COURS DE MAGNÉTISME EN 7 LEÇONS

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IVeLEÇON.

C'est un principe qui ne dépend plus de l'homme, ni de la volonté de l'homme, ni de la raison, ni en un mot de rien qui soit de l'homme.

• l'aconit et la cigûe y sont toujours à côté des fleurs immortelles. »

« La nature est voilée à leur ignorance, ils ne savent ni ne veulent voir en eux ce que la nature leur annonce y exister. »

IVeLEÇON.

Messieurs,

Dans la dernière leçon, je vous ai rapporté quelques-uns des nombreux témoignages donnés par les médecins les plus recommandables, qui constatent, et l'action magnétique, et certains phénomènes physiques que produit cette action : l'insensibilité de la peau, etc., etc.

Je vous ai ensuite tracé brièvement l'historique d'un état particulier, dans lequel peut entrer momentanément un individu : je veux dire le somnambulisme; je vous ai fait connaître, une partie des nombreuses facultés qu'on lui attribue ; et alors, vous m'avez encore entendu vous citer des faits recueillis par une infinité de personnes revêtues d'un caractère qui les met à l'abri de tout soupçon.

J'ai abrégé cependant autant que je l'ai pu, les citations, parce que le somnambulisme est aujourd'hui si commun, si facile à produire, que celui qui veut le constater, peut sans beaucoup de peine l'observer fréquemment.

Laissant de côté pour le moment tout examen critique, je vais vous entretenir de quelques effets rares que produit la magnétisation; effets peu observés, et qui cependant méritent de l'être attentivement.

Ils justifieront, de plus en plus, notre croyance en la réalité d'un agent; et les craintes que nous vous avons manifestées, relativement aux dangers qui résultent d'une application irréfléchie du magnétisme, vous paraîtront plus que jamais fondées.

Vous vous prémunirez contre les assertions de quelques magnétiseurs modernes, qui ne voient dans le magnétisme que des dangers qui n'y existent pas,et méconnaissent les véritables, qui sont inhérents à sa pratique.

Mon dessein est de vous faire connaître leur doctrine, et les applications qu'ils en font au traitement des maladies; vous verrez que, dans un grand nombre de cas, ils agissent en aveugles, sans pouvoir se rendre compte de leur action, s'en rapportant entièrement à la bonté de l'agent qu'ils emploient, persuadés qu'ils sont, que le magnétisme ne peut produire de fâcheux effets.

Cette croyance de leur part est sans fondement et demande une prompte réfutation.

Je vous feraijuges du mérite de leurs observations, en vous exposant les faits produits par ces mêmes magnétiseurs.

Si le magnétisme existe, Messieurs, il doit avoir des lois, une manière d'agir particulière ; et, comme tous les agents de la nature, faire du bien ou du mal ; c'est ce que son emploi doit faire reconnaître : les magnétiseurs n'ont constaté que le bien, ce qui est tout-à-fait contraire à l'avancement de la science.

Beaucoup de ceux qui se sont le plus livrés à la pratique du magnétisme,ne possédaient, pour la plupart, nulles connaissances en médecine : étrangers à cette science,ils n'ont tenu compte, dans leurs examens, d'aucun des accidents de là nature ; ils se sont bornés à nous dire : nous avons guéri telle maladie, nous avons guéri telle personne, sans nous apprendre autre chose du fait, que le fait lui-même; ce témoignage était suffisant pour les gens du monde, mais il ne l'est pas pour le médecin ce dernier doit rechercher en vertu de quelles lois le malade a été guéri, quelle marche a suivie la nature pour ramener l'équilibre, etc.

Les observations bien faites sont rares, quoique les expériences aient été nombreuses; aussi la science du magnétisme est restée presque stationnaire, et nous a fourni peu de lumière, malgré la prodigieuse quantité de personnes qui se sont occupées de son étude.

Une routine aveugle a même gagné les plus instruits des magnétiseurs ; ils ont fait le bien , il est vrai, mais ils l'ont fait sans rechercher quelle source leur en fournissait les moyens, cette conduite peut être bonne en morale, mais ne suffît pointa la physique, l'on doit procéder d'une manière toute différente.

Les médecins modernes méritent encore un autre reproche : ils se sont occupés de la pratique du magnétisme, mus par un sentiment particulier, celui d'arriver à une conviction; peu leur importait les dispositions physiques dans lesquels ils se trouvaient pour observer; ils ne tenaient, non plus, aucun compte de l'état des personnes qu'ils magnétisaient; ils ne cherchaient qu'à faire naître des phénomènes; et lorsqu'ils avaient obtenu ce qu'ils desiraient, il était trop tard pour se rendre compte des sentiments et des causes qui les avaient déterminés. Il leur faut, maintenant, recommencer cette étude, et suivre une marche contraire à celle qu'ils ont adoptée, s'ils ne veulent encore porter un jugement précipité, que le temps viendrait détruire. Le peu d'observations publiées par eux, portent l'empreinte des dispositions que je viens de vous signaler; ils ont jugé le magnétisme sur des faits isolés ; ils ont tiré de ces faits des inductions qui ne sont nullement justifiées par la pratique éclairée du magnétisme, et ils n'ont pas produit tout le bien que leurs noms et leurs lumières avaient droit de faire espérer.

Il vous appartiendra bientôt d'examiner vous-mêmes la question que je soulève ; ce sera à vous de redresser les erreurs qui ont été commises, mais il est de mon devoir de vous signaler ici ce qu'une pratique de plusieurs années m'a fait connaître de bon et de mauvais dans les doctrines enseignées et dans les effets magnétiques obtenus par les procédés en usage maintenant.

Je reprends l'exposé des phénomènes produits par la magnétisation, remettant à une séance prochaine , l'examen des doctrines.

Les faits magnétiques que je vous ai précédemment fait connaître, sont ceux que l'on observe le plus communément; mais il en est d'autres, qui naissent dans quelques circonstances rares, et qui sont, par cette raison, très-peu connus, même des magnétiseurs exercés; je vais vous en faire l'exposé.

Voici ce qu'on observe dans quelques cas : Lorsque l'on magnétise pour la première fois, on est mu, en général, par un sentiment de curiosité, de doute et de crainte. Si la personne que l'on magnétise dans cette disposition est sensible à votre action, elle ne tarde pas à éprouver des effets qui vous surprennent. Si l'on n'a aucune méthode pour les diriger, et que l'intensité des phénomènes augmente, on veut aussitôt les faire cesser ; mais loin d'y parvenir comme on le désire, ils prennent un développement souvent effrayant; le patient, tout à l'heure dantun état naturel, entre dans un état de convulsions extraordinaires : il se roule par terre, crie et se débat; et dans ce moment, plus on le touche ou laisse toucher, plus on augmente ses angoisses. . Des convulsions produites de cette manière ont duré quelquefois six et huit heures sans interruption, et les personnes ainsi affectées restaient malades pendant plusieurs jours, éprouvant un sentiment de brisement accompagné d'une horreur profonde pour le magnétisme, et le magnétiseur; ce mot seul prononcé devant eux, les agitait violemment. L'état de calme finit par revenir ; mais j'ai vu dans quelques circonstances,' rares à la vérité, les malaises résister au repos, aux antispasmodiques, et persister pendant plusieurs semaines.

Ne croyez pas, Messieurs, que les femmes nerveuses éprouvent seules ces effets; des hommes bien constitués, qui ne connaissaient que de nom ces sortes de maladies, ont été ainsi désorganisés en quelques minutes, et ont éprouvé tous les effets dont je viens de vous rendre compte.

Voici deux exemples de ces faits , que j'ai pris au hasard, car il y en a un assez grand nombre, et ils se ressemblent tous dans le fond. .

M. de S.-C. ancien militaire, avait entendu parler vaguement du magnétisme. Il voulut essayer de magnétiser sa fille, quoiqu'elle ne se plaignît d'aucun mal, et seulement pour voir s'il ne pourrait pas lui faire éprouver quelques effets. Pour cela, sans se douter de tout le mal qu'il allait faire, il mit une main sur. l'estomac de sa fille. Après quelques minutes de magnétisme , elle éprouva quelques mouvements convulsifs, qui, loin d'effrayer le père, ne firent que l'encourager à poursuivre son expérience. Bientôt Mlle de C. eut des convulsions très-violentes, et son père ignorant la manière dont il aurait pu les calmer, ne fit plus que les augmenter par sa présence, et même par l'effroi qu'elle lui causait. Il fut forcé d'abandonner sa fille en cet état, et elle passa la nuit suivante dans des convulsionscontinuelles. Cet état dura huit jours. ( T.D. M. )

Voici un autre fait dont le récit a été envoyé à M. de Puységur par M. Segrettier, propriétaire à Nantes.

« Une jeune personne distinguée par sa naissance , et qui paraissait jouir dela meilleure santé, se trouvant au château de M. le marquis de B., son parent, se mêlait, comme le reste de la compagnie, de plaisanter sur le magnétisme. M. de B... son oncle renchérissant sur les autres, gesticulait à tort et à travers. Il dirige sur sa nièce sa prétendue influence, et les voilà à se magnétiser réciproquement. D'abord la jeune fille rit beaucoup ; mais on ne tarda pas à voir que ce rire n'était pas naturel, et bientôt on passa de la surprise de ce phénomène à une terreur inexprimable, en s'apercevant qu'elle perdait par degré la raison et l'usage de ses sens. Elle vint en effet au point de ne plus voir, de ne plus entendre, de ne plus parler; et les yeux fixés, le cou tendu, semblable exactement à un aimant plus faible qui est entraîné par un aimant plus fort, elle suivait son magnétiseur partout, et n'obéissait qu'à ses diverses impressions. On voulut les séparer, mais cela ne produisit que des convulsions affreuses : son magnétiseur éprouvait, de son côté, des sensations extraordinaires qui, jointes au saisissement que lui avait occasionné l'état de sa nièce, le rendait méconnaissable par sa pâleur et son abattement.

Au bout de quelques heures, l'état de la magnétisée se dissipant, elle se plaignit de beaucoup souffrir de l'estomac.

La journée et la nuit qui suivit furent passées tantôt en convulsions, tantôt en sommeil magnétique , et cet état ne cessa entièrement qu'au bout de plusieurs jours. »

Le magnétisme produit dans d'autres circonstances un effet non moins bizarre que celui dont vous venez d'entendre le récit. L'individu soumis à une expérience sent, petit à petit, ses membres s'engourdir; il perd le sentiment de leur position : si vous persistez dans votre action sur lui, les muscles du thorax peuvent être affectés d'une paralysie momentanée, une difficulté s'ensuit dans les mouvements des muscles inspirateurs, et une espèce de râle se fait entendre; le patient se plaint, demande du secours, et si vous ne savez faire cesser cet état, le malade peut courir des dangers. J'ai vu deux fois naître des effets semblables. On se rendit maître des accidents, mais je sais que dans l'un des principaux hôpitaux de Paris, un fait semblable s'est présenté à l'observation de ceux qui expérimentaient alors. N'étant point prévenus de l'existence de ce singulier effet, ils furent fort effrayés, lorsqu'ils voulurent débarrasser la malade de l'oppression qu'elle éprouvait, de ne pouvoir y parvenir de suite; ils ne purent obtenir la cessation dela paralysie qu'au bout de 23 à 30 minutes. La malade avait parcouru, pendant ce temps, tous les degrés de l'asphyxie : la respiration était devenue d'abord entrecoupée, puis insensible, la peau était violacée, les veines extraordinairement gonflées, et il y avait eu perte de la mémoire pendant plusieurs minutes. Il n'en résulta rien de fâcheux, mais tous ceux qui furent témoins de cette expérience pensèrent que si les obstacles opposés à la circulation eussent tardé encore quelque temps à disparaître , la malade serait infailliblement morte dans cet état.

Ceci doit vous faire tenir en garde contre une action que vous étiez sans doute portés à croire toute bénigne, et lorsque vous entendrez quelques enthousiastes vous assurer que le magnétisme n'a été donné à l'homme que pour faire le bien, vous vous rappellerez le fait que je viens de vous citer, et vous ferez peu de cas de leurs assertions, parce qu'elles ne sont nullement propres à servir de règles.

Dans le sommeil magnétique ordinaire, il se présente quelquefois un état particulier peu observé, et que les magnétiseurs craignent beaucoup de rencontrer; parce que peu d'entre eux possèdent les moyens de le conduire à bien.

Je vais vous le décrire :

Une personne endormie du sommeil magnétique (et en général ce sont les individus dont le sommeil est le plus profond), tombe dans un état extraordinaire, dont voici les principaux symptômes. Le somnambule qui vous entendait parfaitement, cesse tout-à-coup de vous entendre, il ne vous sent plus, vous qui auparavant, étiez dans un rapport intime avec lui, et qui pouviez imprimer quelques modifications à ses organes, vous avez perdu votre empire, il n'obéit plus à vos injonctions; il est muet pour vous comme pour tout le monde; ses mâchoires sont fortement serrées, et il serait plus facile de les briser que de les ouvrir; H n'exécute aucun mouvement, il obéit aux lois de la pesanteur, et son corps est entraîné vers la terre.

Un phénomène non moins digne de remarque, c'est que les pulsations diminuent de nombre et de force ; la température du corps baisse sensiblement , et vousavez sous les yeux le spectacle d'une mort apparente. Si vous êtes familiarisé avec ce phénomène, et que vous n'ayez pas quitté le patient, il revient par degrésde cet état de concentration ; son pouls reprend son rythme habituel, et tout se passe comme auparavant; si vous l'interrogez sur-le-champ , il vous dira les choses qui t'ont affecté pendant son état léthargique ; mais, par une anomalie bizarre, il peut à peine, quoique toujours en somnambulisme, se les rappeler pendant cinq minutes de temps; il les oublie ensuite complètement et ne sait plus rien vous dire des sensations qu'il a éprouvées, quoiqu'elles eussent pour lui un charme inexprimable.

Aucun symptôme ne peut faire connaître l'instant où arrivera ce phénomène, je l'ai observé un grand nombre de fois, et c'est souvent lorsque je pensais à faire cesser le sommeil magnétique ordinaire, que le somnambule tombait tout-à-coup et sans ma volonté dans cet état singulier, pour n'en sortir quelquefois qu'au bout de plusieurs heures.

Cet état, Messieurs, le plus extraordinaire du magnétisme, et le plus dangereux peut-être, est aussi celui qui peut fournir le plus de lumières, quand l'on sait interroger à propos ces sortes d'extatiques. Si vous savez entrer dans les idées qui les dominent, tous obtenez les révélations les plus instructives ; mais vous n'avez qu'un moment pour cela, il faut saisir l'instant où, sortant de leur extase , ils rentrent dans le somnambulisme ordinaire; car ils perdent bientôt le souvenir de ce qu'ils ont éprouvé.

Celte crise semble être la limite d'un état de chose tout nouveau, que nous ne pouvons connaître qu'avec une extrême difficulté. C'est là ce que l'on pourrait appeler la magie de la vie, car tous les phénomènes qui naissent échappent à l'explication, et il y en a un grand nombre qui effrayent notre raison. « Le mystère est immense et l'esprit s'y confond. »

Je regarde cette crise comme très-dangereuse et pouvant amener des accidents fâcheux, si le magnétiseur abandonnait à lui-meme celui qu'il a plongé dans ce sommeil profond.

Je viens de vous dire, Messieurs, que j'avais été témoin de plusieurs de ces crises, je pourrais donc vous donner des détails très-circonstanciés ; mais je dois, pour faire plus d'effets sur votre esprit, puiser ailleurs que dans ma pratique un exemple de ces faits.

M. Chardel, membre de la Chambre des députés et conseiller de la Cour royale de Paris, s'est beaucoup occupé de magnétisme ; et dans un ouvrage qu'il a récemment publié, on trouve le fait suivant :

« Un jour, en magnétisant une somnambule, » dit M. Chardel, plein de sécurité, je la laissais » promener dans l'appartement avec une amie; » elles causaient ensemble et je ne m'occupais » plus du mode extraordinaire d'existence que je » venais de produire, quand les deux amies, je ne » sais à quel propos, me prièrent de réciter une » scène des tragédies de Racine ; je me livrai im» prudemment aux sentiments que cet auteur ex» prime si bien, et je ne m'aperçus de l'émotion » de ma somnambule qu'en la voyant tomber sans » mouvement à nos pieds» Jamais privation de » sentiments ne fut plus effrayante : le corps » inanimé avait toute la souplesse de la mort, » chaque membre que l'on soulevait retombait de » son poids, la respiration s'était arrêtée, le pouls et les battements du cœur ne se faisaient plus sentir, les lèvres et les gencives se décolorèrent, et la peau que la circulation n'animait plus, prit une teinte livide et jaunâtre. Tout semblait m'annoncer que je n'avais plus qu'un cadavre sous les mains ; heureusement je ne me troublai point, la pureté de mes intentions donnait à mon dévouement une énergie calme, mais positive, et je me possédais trop pour ne pas sentir que je pouvais exercer une grande puissance sur ma somnambule. Je commençai à magnétiser sur les plexus, j'inspirai ensuite un souffle dans les narines, dans la bouche et sur les oreilles; et peu-à-peu ma somnambule recouvra l'usage de la parole : cette parole était d'abord faible, mais bientôt elle se fit entendre assez distinctement pour répondre à mes questions. J'appris que rien n'avait altéré la santé de ma somnambule, etc. »

Tous ceux qui éprouvent ces effets bizarres sont loin de s'en plaindre ; ils désireraient au contraire leur prolongation.

« Pourquoi me rappeler à la vie, disait une » somnambule dans l'exaltation magnétique. Si » vous vous éloigniez, ce corps qui me gêne, se » refroidirait, et mon âme n'y serait plus à votre retour; et je serai parfaitement heureuse. » (*) Toutes, vous tiennent à-peu-près le même langage; mais vous devez lien vous garder de vous arrêter à leurs discours ; il faut au contraire vous empresser de les faire sortir de cet état, dans le doute où vous êtes si sa prolongation n'amènerait pas des désordres irréparables. Il est encore un autre motif qui doit vous engagera en agir ainsi, c'est que vos forces s'épuisent, vous perdez votre énergie, et il peut arriver un moment où vous ne pourriez plus agir , quoique ayant la volonté de le faire, car cette volonté ne pourrait plus mettre en jeu le mobile nécessaire. Rappelez-vous toujours que vous n'êtes qu'une machine sécrétant l'agent magnétique, et qu'il faut à la nature un certain temps pour le reproduire, lorsque par une cause quelconque vous l'avez épuisé.

(*) Cette crise donne souvent au somnambule le moyen de trouver ce qu'il lui faut pour opérer sa guérison ou celles des personnes avec qui il a été mis en rapport, lorsque dans son somnambulisme ordinaire il ne l'avait pas aperçu.

Que de réflexions se présentent a notre esprit, lorsque nous sommes témoins de semblables scènes ; c'est bien alors que la vie nous paraît un mystère inexplicable. Le philosophe qui a dit : « Rien n'est après la mort, la mort même n'est rien, » pourrait bien s'être trompé. C'est une question que le somnambulisme résoudra un jour.

Tenez de l'huile en réserve, si vous ne voulez que votre lampe s'éteigne. (*) Je ne fais qu'esquisser le tableau des phénomènes qui naissent dans cet état extrême du somnambulisme; mais ce que je vous en dis, doit vous faire comprendre qu'il peut être dangereux de s'en rapporter à ceux qui vous disent qu'il suffît d'une bonne intention pour prévenir tout danger. Vous le voyez,, il faut plus. —Il fout des connaissances, et une grande force morale que certaine constitution physique ou des liens de parenté ôtent presque toujours dans les circonstances critiques que je viens de vous signaler. C'est pourquoi la présence d'une personne instruite du magnétisme est nécessaire dans un traitement où le somnambulisme s'offre accompagné de crises semblables ; crises où vous placez l'âme vis* à-vis d'elle-même; où l'âme se sent elle-même.

(*) C'est en raison dé cette vérité, que souvent vous ne menez point abien des effets qui naissent pendant l'application du magnétisme ; vous voyez tous les symptômes du sommeil arriver et se suivre ; il ne faut plus qu'un pas pour obtenir le somnambulisme ; et cependant, malgré vos efforts, cette crise ne se produit point, et le patient retourne a son premier état ; la cause cessant ou diminuant d'intensité, l'effet cesse ou s'amoindrit : ce n'est pas une des plus faibles preuves de l'existence de l'agent magnétique.

Je le dis avec conviction, c'est aux personnes qui auront des connaissances approfondies de cet état physiologique, qu'il appartiendra de diriger les traitements magnétiques, car on peut bien magnétiser vingt fois, cent fois, sans faire naître des effets inquiétants; mais du moment où vous acquérez la certitude que ce cas peut arriver, vous ne devez vouslivrer à la pratique du magnétisme qu'en connaissant parfaitement les effets qu'il peut produire, et en possédant les moyens defaire tourner ces effets au profit du malade ; autrement vous pourriez vous préparer des regrets , car vos actes magnétiques ont la vie en puissance : en prenant du feu dans votre sein, craignez que vos habits ne brûlent.

Lorsque je vous parlerai de l'action thérapeutique du magnétisme, vous reconnaîtrez que son application demande quelques ménagements et un grand discernement dans le chois des maladies que vous voulez traiter.

Vous verrez quelquefois agir cet agent comme le ferait un violent excitant, déterminer, en cette qualité, des effets funestes, quand les organes de l'individu que vous magnétisez sont incapables de soutenir l'impulsion qu'il leur communique. Je vous ai dit, dans la dernière séance, qu'une malade magnétisée par moi à l'Hôtel-Dieu de Paris, présentait 60 à 65 pulsations par minutes, avant l'opération ; eh bien, l'action magnétique, en moins de cinq minutes, faisait monter le pouls d'une manière extraordinaire; on comptait alors 115 et 120 pulsations dans le même espace de temps.

Ainsi, voilà une augmentation de près du double , dans les battements du cœur. Magnétisez un malade affecté d'une tumeur anévrismale, ou d'une phthisie avancée, et vous reconnaîtrez que cet agent physique possède plusieurs des inconvénients des autres agents de la nature.

Autre observation :

Si l'action magnétique une fois mise en mouvement , peut s'exercer sans votre participation, quelle prudence ne doit-on point avoir pour l'employer?

Il est reconnu par moi, et un grand nombre de faits me prouvent que je ne suis pas dans l'erreur , il est reconnu, dis-je, que la personne que l'on magnétise peut, dans certains cas, ne rien ressentir de votre action pendant la séance, et en éprouver tous les effets plusieurs heures après, au moment où vous n'êtes plus à même de les diriger.

Il est reconnu que des individus placés près des personnes que vous magnétisez, peuvent éprouver tous les effets d'un magnétisme direct, et ces effets être d'autant plus bizarres, que cette action ne s'adressait point à ces individus. —J'ai quelquefois produit le somnambulisme de cette manière, et je vais vous en citer un exemple.

II n'y a pas longtemps que je fus appelé pour donner mes soins à un jeune enfant, fils de M. le comte de B..., on ne me dissimula point que l'enfant était très-mal, et que mes soins étaient réclamés comme une dernière ressource, de laquelle cependant on espérait encore.—Comme le malade était d'une faiblesse extrême, unejeune femme, qui lui portait un tendre intérêt, le tenait sur ses genoux. Je le magnétisais dans cette position, entouré de quelques personnes qui eussent voulu aux dépens de ce qu'elles possédaient rappeler cet infortuné à la vie. Une faible lampe éclairait ce tableau, et un profond silence régnait autour de nous. —Mon action dirigée sur le malade, et à un pied de distance environ, ne tarda pas à produire un effet salutaire. Les douleurs que l'enfant éprouvait, et qu'il manifestait par des cris et, des mouvements convulsifs, se calmèrent promptement, et il jouit de quelque tranquillité.

Il en fut tout autrement à l'égard de la personne qui le tenait sur ses genoux: ses yeux s'étant fermés, elle tomba dans un état complet de somnambulisme, bientôt de grosses larmes inondèrent ses joues ; nous voulûmes prendre l'enfant qu'elle n'avait point quitté ; mais elle le retint, et ne s'en dessaisit qu'à mon invitation fortement exprimée, et après nous avoir donné des preuves d'une grande lucidité.

Le lendemain elle s'endormit de la même manière , etc.

Mais, Messieurs, souvent les sensations éprouvées de cette manière, ne vont point jusqu'à produire le sommeil, il eu résulte quelquefois des spasmes, des convulsions; et un état insolite rompt l'équilibre qui paraissait exister avant l'opération.

Le 28 septembre dernier, je magnétisais une dame qui éprouvait peu d'effets sensibles du magnétisme ; une personne qui accompagnait cette dame, sentit pendant l'opération tous ses membres s'engourdir, et eut des picotements aux paupières.

Le lendemain, magnétisant la même personne sans songer à produire d'autres effets que sur elle-même, la dame qui l'accompagnait éprouva encore plus d'effets que la veille, et elle fut courbaturée toute la journée.

Le 50, le sommeil magnétique se déclara chez elle, et cependant comme je viens de le dire , je ne songeais nullement à produire cet effet : elle se réveilla bientôt, mais succombant de nouveau au sommeil, se rendormit et s'éveilla de même; et ce singulier état se prolongea malgré moi pendant plusieurs heures.

Le même fait m'est arrivé il y a peu de temps, chez une malade, femme d'un conseiller d'état. -La femme de chambre de cette dame, qui assistait aux séances, afin de me suppléer en cas de besoin, fut prise de mouvements nerveux qui devinrent effrayants.—Je me levai pour les faire cesser, mais cette personne s'enfuit en criant qu'elle ne voulait pas que je l'approchasse, et que je lui faisais du mal ; elle revint bientôt, cependant, un peu plus calme et attribuant a son imagination les effets qu'elle avait éprouvés : bien rassurée elle s'assit à sa place accoutumée, et je continuais comme avant cette scène, de magnétiser sa maîtresse. — Mais au bout de cinq minutes, et sans que je cherchasse à agir ailleurs que sur ma malade, elle fut prise de nouveau des mômes accidents, et courut s'enfermer dans sa chambre en poussant des sanglots et se plaignant d'une gène dans la respiration, qui la fatiguait beaucoup. — Cet état dura plusieurs jours, et servit bien plus à la conviction des personnes qui m'entouraient, que les effets thérapeutiques que j'aurais pu produire.

Vous le voyez, Messieurs, les phénomènes produits par le magnétisme, présentent une très-grande variété, et nous sommes loin , je crois, de les connaître tous (*); cependant, vous pouvez suivre partout son action physique.—Il n'est plus possible d'expliquer ses divers effets par d'autres causes que par celles de l'émission d'un agent particulier, agent soumis à notre volonté, et qui semble être constamment à notre disposition, dans tous les cas, surtout, où les organes qui le contiennent et le forment sont dans leur intégrité; mais agissant au dehors, en vertu de lois qui lui sont alors particulières, et qui ne nous sont pas encore bien révélées.—Pour achever de vous convaincre de cette double vérité et vous empêcher de chercher d'autres explications contraires à celles que je viens de vous donner, voici d'autres observations, peut-être plus décisives ;

(*} Beaucoup de magnétiseurs ont cessé de magnétiser, lorsqu'ils eurent reconnu l'existence de phénomènes si bizarres. Ne croyant point ala possibilité de les diriger, ils se sont soustraits à la crainte de les produire.

Dites-moi pourquoi prés d'une personne qui dort du sommeil naturel, ne loi voyez-vous rien éprouver de contraire à ce qui se passe ordinairement dans cet état?—C'est parce que vous êtes restés dans un état passif, et que votre magnétisme est latent, permettez-moi cette expression.

Mais si au contraire, vous dirigez sur le dormeur la force que vous avez appris à reconnaître en vous, bien que placés à quelques pas de distance dans l'état ou vous étiez avant, comment se fait-il qu'au bout de quelques instants succède à ce calme, un état d'agitation sensible, et que le patient exécute quelques mouvements; et si vous ajoutez à cet indice du changement qui s'opère en lui, d'autres symptômes tels que la difficulté de respirer, et le réveil instantané, comme si on l'eût touché avec une bouteille de Leyde légèrement chargée, si vous pouvez reproduire ces effets dans beaucoup de circonstances semblables; en employant les mêmes précautions, il faut bien nécessairement avouer que le système nerveux de l'individu que vous avez magnétisé a subi l'impression de quelque chose d'étranger; et cela me paraît si évident, que je n'ose insister davantage.

Je passe encore à d'autres expériences. Vous vous rappelez que j'ai endormi, à l'Hôtel-Dieu, une malade à travers des cloisons fort épaisses ; le fait ne peut être douteux, je l'ai répété plusieurs fois, et les précautions étaient prises par les témoins, de manière qu'ils ne pussent être dupes d'une mystification.

Mais, comme un fait isolé ne peut être concluant, je vais vous en citer d'autres.

Lorsque vous avez obtenu le somnambulisme par les procédés mis en usage maintenant, il vous est facile de produire cette crise en variant votre manière d'agir. Votre somnambule qui ne s'était endormi qu'au bout d'un temps souvent fort long, finit, après quelques séances, par s'endormir très-promptement; quelquefois même ce temps n'excède pas trente secondes. Lorsque vous êtes parvenu à lui imprimer cette mobilité, vous pouvez l'endormir sans faire aucun geste qui puisse trahir votre intention. Votre volonté fortement exprimée produit ce résultat. Ce n'est certainement pas la volonté seule, car il n'est pas prouvé que. son empire puisse s'exercer au dehors (*), mais elle a mis en mouvement le véritable principe agissant, un agent qui s'irradiant dans un espace qui n'est pas encore connu, va pénétrer le genre nerveux du sujet que vous voulez endormir, et causer le somnambulisme qui n'est lui-meme qu'un des nombreux effets que son mode d'action peut produire.

(*) La volonté seule et sans fluide n'opérerait rien. (Réponse d'une somnambule).

Cela paraît si vrai, que vous n'agissez point sur le patient, lorsque faisant des passes et des mouvements , vous n'avez point l'intention ou une intention contraire à celle qu'il vous faut pour endormir, le magnétisé vous avertit lui-même du peu d'effets qu'il éprouve ; mais si vous changez tout-à-coup votre disposition morale, et que vous vouliez l'endormir, vous le voyez fléchir et céder promptement à un pouvoir qu'il sent être irrésistible.

Quand vous êtes distrait en magnétisant, les effets sont beaucoup plus lents à se manifester, et vous n'en obtenez aucun, si votre attention est absorbée par une occupation de votre esprit sur des choses qui ne sont point relatives au magnétisme. (*)

(*) La volonté est une grande pièce, de très-grande importance , et doit l'homme étudier surtout à la bien régler.

( Charon. ) « Vous voulez des lèvres ,mais votre cœur est loin de vouloir. »

Ces faits, Messieurs, ne sont point des faits observés par quelques individus isolés ; interrogez tous ceux qui se sont occupés du magnétisme avec quelque attention , ils vous répondront qu'ils les ont vérifiés.

Veuillez bien vous rappeler ce que je vous ai dit d'une séance expérimentale qui eut lieu à l'Académie de Médecine, sur un somnambule qui les yeux tamponnés et la face couverte d'un triple bandeau, sentait néanmoins mon approche ou mon éloignement; rappelez - vous qu'il m'était facile de déterminer dans ses extrémités des mouvements convulsifs qui cessaient et reprenaient à ma volonté, et cependant j'étais à sept ou huit pas de lui, aucune parole n'était proférée, et le signal pour agir m'était donné par des tiers, qui avaient pris les plus grandes précautions pour vérifier ce fait étonnant.

Souvenez-vous encore que j'ai magnétisé l'un des commissaires chargés de l'examen du magnétisme , et qu'il en a éprouvé lui-même les effets les plus évidents et les moins contestables, dans des organes qui n'étaient point soumis à sa volonté ; que ces effets physiques arrivaient toujours de la même manière, et dans le môme espace de temps. Je ne finirais pas, s'il me fallait, Messieurs , tous entretenir de tous les faits prouvant d'une manièrepositivel'existence du magnétisme animal. Mais comme mon intention est bien moins de tous convaincre par eux, que de tous engager à expérimenter vous-memes, je borne ici cet exposé. Je tous enseignerai bientôt des procédés qui, vous facilitant les moyens de produire vous-même des faits, bâteront votre croyance, persuadé que je suis, que personne n'a en privilège la faculté magnétique, qu'elle est le résultat de notre organisation, le produit de la vie et d'un mouvement que nous pouvons imprimer à nos organes, dans des circonstances particulières; il vous sera donc facile de vous convaincre de la vérité de tout ce que nous vous avons dit; et un jour, j'en ai l'espoir, vous nous direz que nous n'avions rien avancé qui ne fût fondé, si vous avez surtout la prudence de ne vous prononcer qu'après avoir magnétisé, non pas une seule personne, mais plusieurs, et si vous vous placez dans les circonstances favorables que nous vous aurons appris à distinguer. (*)

(*) « Combien est grande l'inconstance des mortels et leur témérité, en matière d'expériences nouvelles! Car, si l'effet ne réussit selon leur désir, ils abandonnent aussitôt l'entreprise commencée, et tournent hâtivement a leurs premières coutumes, se reconcilient arec elles.

Je vais continuer de poursuivre le développement de l'action magnétique, vousla montrer agissante dans notre organisation et y faisant naître des effets analogues à ceux que produit notre principe vital.

Vous reconnaîtrez encore dans cette circonstance l'action indépendante de l'individu qui la reçoit et de celui qui la donne, soumise elle-même à de nouvelles lois ; il ne vous sera plus possible de vous méprendre sur ces résultats, et d'attribuer les phénomènes qui se manifesteront, à d'autres causes que celles que notre volonté met en jeu.

Voyons le magnétisme, appliqué comme moyen thérapeutique, et dirigé en cette qualité sur des organes malades; examinons son action, et les modifications qu'éprouvent les parties qui y sont soumises.

Vous allez reconnaître que la vie se trouve augmentée ou diminuée, que tous ces effets semblent provenir de la saturation des organes malades , par un principe essentiellement actif et pénétrant ; vous vous expliquerez alors les bons ou mauvais effets qui résultent de l'emploi de ce moyen de guérir; et l'étude de cet agent vous deviendra plus facile, à mesure que son existence matérielle vous sera démontrée.

Lorsque je commençai mon instruction magnétique, je croyais ce qu'avaient écrit des hommes graves; j'adoptais comme article de foi leurs axiomes; je ne pouvais penser qu'ils eussent affirmé des choses dont ils n'avaient pas la certitude. Je n'ai pas tardé à être désabusé, et j'espère vous convaincre de leurs erreurs.

Les premiers faits bien tranchés qui vinrent m'éclairer, méritent de vous être racontés : ils serviront à votre instruction , sijamais vous magnétisez, et vous donneront dans tous les cas des idées plus justes sur le magnétisme, et de nouvelles preuves de l'effet physique de cet agent.

Dans beaucoup d'ouvrages sur cette science vous lisez : que rien n'est comparable en vertu,à l'action magnétique, son influence est une véritable panacée; magnétiseurs, vous pouvez tout,même des miracles, si vous savez bien employer votre puissance.

La tête exaltée, après avoir réellement obtenu quelques succès;je me croyais capable de guérir les maladies les plus invétérées. Je magnétisais donc des malades affectés de maladies pulmonaires très-avancées, et déclarées tout-à-fait incurables par d'habiles médecins.

Je pensais que cette maladie affreuse devait céder aux bienfaits de l'action magnétique; car j'avais lu que l'on avait réussi à en guérir de semblables. Voici ce que j'obtins dans cette disposition.

Les malades magnétisés avec une grande énergie ne tardèrent pas à ressentir vivement mon action ; ils éprouvèrent d'abord un grand calme, suivi d'un sentiment de bien - être : mais à cet heureux effet succédaient bientôt des accès de toux, qui, se déclarant avec une violence inaccoutumée, étaient suivis de sueurs et d'un état d'angoisses, qui forçaient les malades à me prier de cesser. Je les engageais au contraire, tant était grande ma confiance, à persister ; pensant que ces mauvais effets étaient le résultat d'un effort de la nature pour se débarrasser du mal ; mais les symptômes fâcheux continuaient de se développer, les pommettes se coloraient, les yeux devenaient brillants, et une expectoration forcée amenait des stries de sang vermeil : j'étais alors contraint de suspendre le magnétisme (*).

(*) Un semblable effet serait capable, lorsque ces maladies sont moins avancées, de produire des crises favorables qui assureraient le retour de la santé; mais on attend jusqu'au dernier moment, pour essayer l'emploi du magnétisme.

J'ai répété quelquefois cette expérience, et j'ai toujours vu le même effet avoir lieu.

Pans ces cas, le magnétisme agissait bien évidemment comme un agent physique puisqu'il portait le trouble dans beaucoup de fonctions, et augmentait considérablement la circulation du sang. Ce phénomène explique très-bien les effets fâcheux qui avaient lieu, car dans ces maladies, tout ce qui agit comme excitant est pernicieux; ce ne pouvait être l'imagination des malades qui avait produit le trouble, car ce trouble avait lieu dans des organes soustraits à la dépendance de leur volonté; je promettais à ces malheureux leurs guérisons : vous savez que dans ces maladies on se berce jusqu'à la fin de douces illusions. Plusieurs croyaient que réellement je pouvais les sauver; ils auraient donc éprouvé, si leur imagination y eût eu quelque part, un changement favorable , et le contraire avait lieu.

Je passe sur ces faits pour vous en citer d'autres aussi concluants.

Vous trouverez encore dans les recueils de pièces sur le magnétisme, que l'on peut, lorsqu'on le veut, réveiller un malade que l'on a rendu somnambule. — Eh bien ! Messieurs, ils vous arrivera, dans quelques cas, ce qui m'est arrivé : des malades endormis par moi en quelques minutes ne purent être réveillés qu'au bout de plusieurs heures; je mettais cependant en usage les procédés recommandés en pareils, cas. Mais, vains efforts, plus je voulais obtenir le réveil, et plus l'intensité du sommeil se faisait remarquer, et souvent, à force de passer mes doigts sur les paupières, pour déterminer leur ouverture, je produisais des échimoses qui n'étaient nullement senties, et le réveil ne s'opérait qu'au bout d'un temps très-long ; en sortant de ce sommeil, les somnambules passaient dans un autre état, et le moindre bruit alors opérait seul leur réveil.

Je pourrais vous citer un grand nombre de faits semblables qu'il est impossible d'expliquer sans recourir à l'hypothèse d'un agent dont nous subissons les lois.

J'espère que vous serez désormais disposés à accepter cette vérité, et que vous rejetterez comme non fondées toutes les explications qui paraissent opposées à l'admission, comme réel, d'un agent physique.

Je termine ici l'exposé des faits particuliers qui sortent de l'ordre habituel des phénomènes produits par le magnétisme, et je les résume tous afin que vous ne puissiez les perdre de vue, puisque les faits sont seuls écoutés maintenant, et qu'on les regarde, avec raison, comme faisant loi.

Je vous ai dit qu'un homme placé de certaine manière, et connaissant le magnétisme, pouvait agir sur son semblable et déterminer dans son organisation des phénomènes presque toujours appréciables, surtout pour des personnes auxquelles l'étude des lois de la vie n'était pas étrangère. Je vous ai fait l'énumération des principaux effets attribués aux propriétés de l'agent magnétique , en vous prévenant qu'ils ne naissent point dans l'ordre que j'indiquais. Je vous ai dit que cela paraissait dépendre de quelques causes cachées, et en outre de l'idiosyncrasie de chaque individu, et j'ai ajouté que le plus petit symptôme de votre action était quelquefois suivi d'un dérangement marqué dans le jeu de la machine humaine.

Je vous ai cité beaucoup de ces phénomènes en m'entourant toujours de témoignages qu'il vous eût été impossible de récuser.

Vous avez pu vous apercevoir que, lors môme que ces témoignages n'existeraient pas, je pourrais vous parler avec autant d'assurance de l'existence du magnétisme, puisque les phénomènes qui naissent de son application sont très-faciles à obtenir, et que l'onne récuse personne pour les faire naître et pour en devenir juge. Vous aurez été frappés des phénomènes étranges qui arrivent quelquefois à la suite de la magnétisation; je veux parler du somnambulisme et de ses nombreuses merveilles.

Enfin je vous ai entretenu de quelques effets particuliers, bien capables de faire craindre que, dans certains cas, le magnétisme ne produisît entre des mains inhabiles des accidents qui pourraient devenir irréparables.

Vous vous serez dit, sans doute, qu'il fallait, pour tirer un grand parti médical du magnétisme, l'avoir étudié d'une manière spéciale et être versé dans les connaissances physiologiques, et vous aurez trouvé mes conclusions conformes à votre manière de voir.

Mais, Messieurs, lequel d'entre vous pourrait rester froid au récit de tant de choses extraordinaires, et, en apprenant que la nature l'a doué de la puissance la plus utile, puisqu'elle tend à notre conservation, se refuserait à acquérir les moyens de lui donner le développement dont elle est susceptible, et d'apprendre l'art de soulager son prochain, quand il ne lui faut, pour y parvenir, qu'un peu de travail et de bonne volonté ?

C'est une découverte bien précieuse que celle qui, après tant de théories incertaines, fournit enfin quelques principes incontestables au plus dangereux de tous les arts, celui de conserver et de guérir ; une découverte qui, dansune science jusqu'à présent conjecturale, offre des routes lumineuses, où nous n'apercevions que sentiers obscurs ou d'inévitables écueils ; une science qui en mérite à peine le nom, dit M. de Laromiguière : « Qu'est-ce qu'une science qui n'a ni principes » arrêtés, ni matériaux fixes, ni méthodes constantes? Qu'est-ce qu'une science qui change » de nature et de forme au gré de tous ceux qui » la professent ? Qu'est-ce qu'une science qui n'est » plus aujourd'hui ce qu'elle était hier; qui, tourà-tour,vante comme autant d'oracles, Hippocrate, Galien, Boerhave, Fréderic Hoffmann, » Brow, etc., etc. Et pour tout dire enfin, qu'est-.» ce qu'une science dont on a demandé, non pas » si elle était, mais si elle était possible? »

La médecine, telle que nous la pratiquons aujourd'hui, est nécessairement dangereuse, parce qu'il est impossible, quoiqu'on en dise, de la faire résulter de régies certaines. Pour qu'elle résultât de règles certaines, il faudrait qu'elle nous fournît un moyen constant de trouver dans le corps organisé le lieu où réside l'obstacle qui s'oppose au mouvement réparateur de la nature : il faudrait de plus qu'elle nous fit connaître exactement comment agissent les forces, c'est-à-dire les remèdes que nous pouvons employer pour vaincre cet obstacle, et la quantité de leur action dans chaque circonstance donnée; or, qui osera nous dire que cet obstacle n'est pas souvent caché de telle sorte qu'il échappe à la sagacité la plus exercée ! Qui est-ce qui a saisi, je le demande, les rapports qui peuvent se trouver en une organisation malade, et le remède employé pour la délivrer de la douleur ? Qui est-ce qui a mesuré l'action des remèdes à travers la prodigieuse variété des tempéraments et des âges? Et si presque jamais vous ne pouvez rassembler que des doutes, et sur le mal qu'il vous faut combattre, et sur l'effet des ressources que vous mettez en œuvre pour le détruire, oh ! combien de fois ne peut-il pas arriver que vous vous trompiez et sur le mal et sur le remède, que vous agissiez contre la nature qui veut guérir, et non pas contre le mal dont vous vous êtes empressé de suspendre les progrès; et qu'est-ce alors que l'art de la médecine pour l'homme qui a le plus de génie, qu'est-il autre chose que l'art d'assembler assez souvent, si vous le voulez, d'heureuses conjectures? Mais, dans les mains de l'homme

qui n'a point de génie, dans les mains de cette foule d'hommes médiocres qui le pratiquent chaque jour avec tant d'effronterie dans la société, qu'èst-il ? Quand vous mesurez ses ravages, n'êtes-vous pas tenté cent fois de le regarder comme le droit funeste dedicter des proscriptions et d'exercer des vengeances ?

« MM. les savants et surtout les médecins sont opposés au magnétisme animal, ils le traitent avec mépris, cela n'est pas très-moral, mais cela est très-naturel. Le champ des sciences ressemble au sol de la Sicile qui ne doit sa fertilité qu'aux agitations du volcan qui brûle dans son sein : il faut qu'à de certaines époques, ce champ se bouleverse sous les pas de ceux qui le cultivent, il faut que le génie, comme l'Etna, travaille puissamment et parmi des secousses profondes, les germes que ce champ recèle, et que, pour le parer d'une fécondité nouvelle, il sème pendant quelques instants sur sa surface désolée le désordre et la tempête. Mais les pâtres de la Sicile voient-ils sans murmurer leurs paisibles demeures ravagées, leurs riches moissons envahies par les torrents enflammés; et quand un homme de génie vient ébranler dans le champ des sciences une masse d'idées, je le répète,pourquoi veut-on que les hommes qui vivent en repos sur cette masse, demeurent spectateurs indifférents du bouleversement qu'il produit?

» Pourquoi veut-on qu'ils contemplent d'un œil sec leurs masures philosophiques chancelantes? Pourquoi verraient-ils avec indifférence la terre qui les a nourris, après diverses agitations, se couvrir tout-à-coup deplantes inconnues, qui ne peuvent devenir leurpâture? Sans doute on ne résiste pas plus au génie qu'à la nature : tous les deux sont puissants comme la nécessité; mais si ces hommes croient avoir un moyen d'arrêter le génie, quel que soit ce moyen, excusés par l'instinct de leur conservation, pourquoi craindraient-ils d'en faire usage? est-on jamais coupable en défendant ses foyers? »

Vous, Messieurs, qui n'avez point d'intérêts de corps, vous vous livrerez à l'élude du magnétisme ; car ce n'est pas seulement comme phénomènes curieux que le magnétisme s'offre à nous et réclame notre attention; c'est comme moyen de guérison, comme principe d'existence. En effet, sous son empire, tout paraît se revivifier, les sens reprennent leurs fonctions et la nature semble se renouveler. Nous vous avons déjà fait remarquer que ses divers effets modifiaient d'une manière remarquable notre organisation et changeaient parfois les symptômes qui caractérisent la légion de nos organes : de mémorables exemples nous apprennent ce qu'on en a obtenu de bien, des guérisons inespérées ont eu lieu, c'est en vain que l'on chercherait à les contester, quand les antagonistes du magnétisme en conviennent eux-mêmes. Nous pouvons donc espérer que l'action de ce nouvel agent, mieux connu, rendra son application plus facileet plus sûre, et que l'on évitera les dangers que je vous ai signalés.

Sans considérer le magnétisme comme une panacée, nous devons cependant vous signaler tous ses avantages.

On trouve dans le rapport de l'Académie de médecine les réflexions suivantes. Le rapporteur après avoir cité des expériences extrêmement curieuses faites sur deux malades, ajoute :

« Nous voyons, dans cette observation, un » jeune homme, sujet depuis dix ans, à des attaques d'épilepsie pour lesquelles il a été successivement traité à l'hôpital des enfants, à SaintLouis,et exempté du service militaire. Le magnétisme agit sur lui quoiqu'il ignore complétementce qu'on lui fait. Il devient somnambule. » Les symptômes de sa maladie s'améliorent ; les accès diminuent de fréquence ; les maux de » tête, son oppression, disparaissent sous l'influence du magnétisme, il se prescrit un trai-» tement approprié à la nature de son mal, et » dont il se promet sa guérison. Magnétisé à son » insu et de loin, il tombe en somnambulisme et » en est retiré avec la même promptitude que » lorsqu'il était magnétisé de près. Enfin il indique avec une rare précision un et deux mois » d'avance le jour et l'heure où il doit avoir un » accès d'épilepsie, etc. »

M. Husson vient de rapporter dans tous ses détails l'histoire d'un somnambule, et dit : « Les conclusions à tirer de cette longue et curieuse observation sont faciles. Elles découlent naturellement de la simple exposition des faits que nous vous avons rapportés, et nous les établissons de la manière suivante : 1° un malade qu'une médecine rationnelle faite par un des praticiens les plus distingués de la capitale n'a pu guérir de la paralysie, trouve sa guérison dans l'emploi du magnétisme etdans l'exactitude avec laquelle on suit le traitement qu'il s'est prescrit. —2° Dans cet état ses facultés sont naturellement augmentées.—3° Il nous donne la preuve la plus irrécusable qu'il lit ayant les yeux fermés.—4° II prévoit l'époque de sa guérison, et cette guérison arrive. »

II a fallu beaucoup de courage au rapporteur pour venir avouer en pleine académie des faits d'une telle nature, et pourtant ces faite sont la vérité môme.

Vous le savez, Messieurs, la chirurgie a déjà profité plusieurs fois d'un des singuliers états du somnambulisme : l'insensibilité. Quelques opérations ont été faites sur des somnambules. M. Cloquet, chirurgien distingué, a pu faire une opération qui a duré 12minutes, et qui lui a permis d'enlever un sein cancéreux sans que l'opérée ait ressenti la moindre douleur pendant l'opération.

M. Cloquet a rendu compte de ce phénomène étonnant, à l'Académie de médecine. Gomme vous le pensez, de semblables assertions ont trouvé beaucoup d'incrédules ; mais cela n'altère en rien l'existence du fait matériel.

Vous savez encore que M. Recamier a appliqué lui-même des moxas sur plusieurs individus dormant du sommeil magnétique, et bien que ces moxas aient produit des escarres de dix-huit lignes de longueur sur autant de largeur, les malades ne se réveillèrent point, et ne manifestèrent par aucun signe la douleur qui devait en résulter» Vous savez que ces douleurs sont extrêmement vives. M. Recamier est convenu de ce fait au sein de l'Académie, eu déniant toutefois l'utilité du magnétisme. Mais il n'est pas, heureusement pour le magnétisme, le seul juge de cette question.

Je dois vous rappeler encore ici le fait non moins important que ceux que je viens de vous faire connaître : l'épileptique, endormi par le docteur Frappart, et qui a été plongé durant son sommeil, et d'après ses ordres, dans une cuve pleine d'eau à la glace, où il est resté un certain temps. Ce fait s'est passé dans un des premiers hôpitaux de Paris, au Val-de-Grace, en présence du médecin en chef M. Broussais, et de plusieurs autres médecins, le même somnambule subit une opération qui devait être encore plus douloureuse, car on lui appliqua, toujours d'après ses ordres, un large cautère actuel au mollet; ce qui a contribué à sa guérison.

Messieurs, cet état si incompréhensible qui permet l'emploi de moyens si actifs, moyens que les plus courageux des hommes envisagent toujours avec une sorte d'effroi; cet état, dis-je, nous offre encore d'autres ressources.

Ce somnambule dont la peau et les muscles, à une très-grande profondeur, sont devenus insensibles, a cependant des perceptions cérébrales Beaucoup plus actives que dans l'état de veille, et si ces nerfs ne lui apportent plus rien du dehors, par une compensation libérale , la nature a voulu que son intelligence s'en accrût.

C'est surtout dans cet état, où on connaît la sagesse infinie du créateur de toutes choses, l'être le moins favorisé des dons de l'esprit possède souvent, à un degré bien supérieur, les moyens de pourvoir à sa conservation, et à celle des personnes mises en rapport avec lui.—Nous voyons se manifester dans cette espèce d'extase des phénomènes moraux incompréhensibles, qui n'auraient point lieu dans l'état ordinaire.

Cet individu qui ne vit plus physiquement possède une existence intellectuelle bien surprenante, il a des sensations qu'il ne nous est pas permis d'éprouver, il semble avoir le plein exercice d'un sixième sens qui lui permet d'apprécier le désordre qui existe dans ses organes et de trouver le moyen d'y rétablir l'harmonie. Bien qu'il se trompe quelquefois, les exemples où il juge sainement sont bien plus nombreux, et semblent justifier l'empressement que certains magnétiseurs mettent à rechercher cette crise. Ces divers phénomènes,. vrais dans tous les points feront, Messieurs, que vous accorderez quelque indulgence aux personnes qui, considérant la découverte du magnétisme animal comme devant être la seule médecine ont répété ce que disait un ancien philosophe, Sénèque, ad idsufficit, natura quodposcit.

La nature suffit à ce qu'elle demande.

Avant de terminer cette leçon, permettez-moi de vous faire connaître quelques faits de guérison pour vous convaincre de la puissance du magnétisme employé comme moyen de traitement, vous allez reconnaître que les maladies les plus rebelles à la médecine ordinaire peuvent être guéries par le magnétisme. La raison qui vous dit que vos soins peuvent être infructueux vous trompe souvent. — C'est pourquoi vousdevez dans tous les cas possibles essayer l'emploi du magnétisme, persuadés que bien dirigés, il ne fera pas de mal, s'il ne fait pas le bien que vous en attendez.

Voici un exemple frappant du faux jugement des hommes, et de l'inépuisable bonté de la nature , secondée par le magnétisme.

Caroline Baudoin, âgée de vingt ans, d'un tempérament lymphatique, passa sa première enfance à Genève; là, sa mauvaise constitution se développa davantage, soit par l'action du climat, soit par l'usage des mauvais aliments. Tout le système glanduleux s'entreprit; la gorge, les seins, les aisselles, présentèrent des engorgements d'une nature tout-à-fait scrofuleuse, plusieurs de ces engorgements s'ouvrirent et donnèrent issue à une suppuration abondante et sans cesse renaissante. On combattit cette maladie avec les moyens les mieux indiqués. On réussit à fermer plusieurs de ces émonctoires; mais d'autres engorgements se formèrent et s'ouvrirent; un surtout, au bras gauche, intéressa les os et les chairs, de manière à nécessiter l'amputation du bras ; elle fut résolue et pratiquée du consentement de la malade, qui, fatiguée de souffrir de cette énorme plaie, regardait comme un bienfait d'en être débarrassée.

Ce fut à l'hôpital Saint-Louis que cette opération fut pratiquée. Elle eut tout le succès possible : la cicatrisation eut lieu, un peu lentement cependant , et la malade put sortir de l'hôpital, où elle avait passé plusieurs mois parfaitement traitée. Mais sa constitution infectée de scrofules, ne lui laissa aucun repos. Une plaie s'ouvrit au sein , et résistait aux traitements les mieux indiqués. C'est dans cet état que je connus cette jeune fille qui, sans aucune fortune, était destinée à souffrir et mourir jeune dans un hôpital. Emu au récit de ses souffrances, je me décidai à la magnétiser, plutôt par instinct que par conviction du bien que je pouvais lai faire ; car je ne croyais point qu'il fût possible de guérir une maladie semblable.

Au bout de trois minutes de magnétisation , elle s'endormit. Elle commença par me dire que si elle m'eût connu sept mois plus tôt, elle eût conservé son bras ; il y en avait trois qu'il était amputé : elle s'indiqua des moyens de cicatrisation pour les plaies du bras et du sein, et ces moyens employés réussirent complètement. II restait à faire la chose la plus importante, changer sa constitution ou la modifier de telle manière que les accidents passés ne reparussent plus, et que ceux à venir fussent neutralisés. Le magnétisme avait développé assez de lucidité pour permettre à cette personne de donner des conseils à d'autres malades, mais pas encore assez pour trouver des moyens de guérison pour elle-même. Un jour qu'elle s'occupait d'un malade et paraissait très-préoccupée de son rétablissement, elle interrompit cette consultation et me déclara que le24 août, à neuf heures du soir, elle tomberait dans un état de sommeil profond qui durerait pendant trente heures ; que ce sommeil serait très-tranquille , si deux jours avant elle n'était point contrariée ; que dans le cas opposé, elle serait très-agitée, et que par une envie inexplicable, elle chercherait à mordre ses chairs, qu'on eût à prendre les précautions nécessaires pour empêcher un si funeste penchant, et que la surveillance fut de tous les instants. Elle déclara que pendant cette crise de trente heures, elle ne prendrait absolument rien, qu'elle n'aurait aucune évacuation , et que toute l'humeur scrofuleuse se rendrait aux intestins pour être ensuite évacuée par un devoiement, qui durerait pendant douze heures ; elle assura que l'on entendrait, pendant son sommeil, un bruissement à l'épigastre, bruissement occasionné par le transport de l'humeur scrofuleuse. Elle prédit ensuite sa guérison parfaite et la cessation de son sommeil lucide. Elle fit cette déclaration le 14 juillet 1833. Je la lui fis répéter le 21 du même mois, devant quinze personnes qui dressèrent et signèrent un procès-verbal , après avoir toutefois constaté l'état scrofuleux de cette fille, qui était on ne peut plus manifeste.

Dans l'intervalle qui nous était laissé, plusieurs personnes prirent connaissance de la déclaration et de l'état de la malade, et se promirent de vérifier un fait si étonnant de prévision.

Le 24 août, à 8 heures du soir, plusieurs personnes devaient se rendre directement chez la malade, au Petit-Carreau.

J'avais recommandé aux personnes qui devaient surveiller la malade , avant le développement entier de sa crise, de la faire coucher une demi-heure avant, afin d'éviter avec le plus grand soin qu'elle fût tourmentée. Tout fut enfin exécuté ponctuellement. A 9 heures précises, nous nous rendons en grand nombre près de la malade. En arrivant, nous apprenons que son état de crise s'est développé seulement quelques minutes plutôt qu'elle ne l'avait prédit, mais qu'il était complet. Nous entrons dans la chambre, et nous trouvons cette pauvre fille, la face gonflée, la langue sortie de la bouche et serrée et presque coupée par les dents ; une extrême raideur des membres et des mâchoires , qu'il eût été plus facile de briser que d'ouvrir. Après avoir magnétisé les masseters, de manière à faire cesser l'état de raideur des mâchoires , je fis rentrer la langue qui était déjà devenue noire , et qui fort heureusement n'avait été entamée que dans une petite partie. Personne ne s'était aperçu encore qu'un doigt avait été non-seulement mordu, mais qu'il y avait perte de substance ; le morceau manquant avait été par elle avalé au commencement de son sommeil. La main fut pansée : il s'échappait de la plaie, non pas du sang, mais une grande quantitéde lymphe rosée, ce que tout le monde put constater. La gravité de cette crise ne me permit pas de m'éloigner ; je restai pendant les trente heures près dela malade. Je n'eus qu'à me louer de ma détermination ; car, pendant plusieurs heures, elle fit des efforts inouïs pour porter sa main à sa bouche et la remordre; elle ne put qu'atteindre le drap, et en enlever un morceau.

Toutse passa comme elle l'avait prédit et je me félicitai de mon nouveau succès.

Encore d'autres exemples:

Une femme de quarante ans épuisée par d'anciennes souffrances, ne pouvant plus faire un pas sans béquilles, décidée à faire essai du magnétisme, arrive à Paris en litière : elle met deux jours à faire quatorze lieues : plusieurs syncopes ont eu lieu pendant le trajet : magnétisée à son arrivée, elle tombe en somnambulisme, mais le sommeil ne présente point de lucidité. Les effets magnétiques que le magnétiseur développe sont d'une telle nature (*), qu'il ne craint pas d'annoncer que dans quelques jours, la malade marchera sans béquilles. Il invite la malade à venir à un jour fixe assister à une soirée dansante qu'il donne dans sa maison: le doute dela malade et des assistants n'effraie point le magnétiseur ; il prévient au contraire beaucoup de monde pour reconnaître et constater son annonce, et le triomphe du magnétisme. La malade est magnétisée tous les jours, le matin; et tous les jours, on peut constater un nouveau progrès; au onzième jour, elle commence à faire quelques pas, soutenue sous les bras seulement, et abandonne ses béquilles. Le dix-septième, elle vient à la soirée du magnétiseur, elle monte l'escalier seule, se promène et reste jusqu'à une heure du matin, rentre chez elle, sans avoir éprouvé d'autre fatigue que celle qu'aurait ressentie une personne bien portante.

(*) Pour celui qui aurait vu galvaniser un cadavre, les effets eussent été les memes. La malade, d'une maigreur et d'une pâleur extrême, immobile avant la magnétisation, était tout-à-coup remuée arec violence, et retombait dans son immobilité, à l'instant où cessait la magnétisation.

Après de tels faits, quel médecin pourrait dédaigner un auxiliaire si puissant, lorsqu'il ne lui fout qu'un travail consciencieux, pour apprendre ce qu'il en peut tirer d'avantages ?

Mademoiselle Lacour, fille d'un commissionnaire au Mont-de-Piété, demeurant à Paris, cour des Fermes, jeune personne de dix-huit ans, malade depuis cinq ans et demi, après avoir au commencement de sa maladie, éprouvé quelques améliorations par l'emploi de divers traitements, cesse tout-à-coup , après une chute, de pouvoir marcher : une luxation du fémur, parfaitement caractérisée, survient. Des médecins habiles sont appelés, les moyens indiqués par eux sont employés sans succès. Ces médecins annoncent que la maladie a un caractère scrofuleux, ce qui la rend tout-à-fait incurable. Cette déclaration est faite aux parents de. la malade. M. Dupuytren confirme cette déclaration, et conseille l'amputation de la jambe : on essaye encore cependant l'emploi des moxas, conseillé par M. Broussais : la malade ne va pas mieux. On parle du magnétisme , comme moyen douteux , mais le seul qui restait à essayer. On me demande si je veux en faire l'emploi : je m'y refuse d'abord, pensant que la maladie était trop grave, et devait être incurable; pressé de nouveau, je cède aux sollicitations : je me rends chez la malade, qui ignorait absolument ce que c'était que le magnétisme. Après cinq minutes de magnétisation, elle s'endort : je l'interroge; elle déclare devant plusieurs personnes qu'elle marchera le 25 juillet à midi, sans béquilles, et sans boiter, et qu'elle n'aura jamais de rechute : elle demande seulement à être magnétisée pendant quinze jours de suite ; puis de deux jours l'un, jusqu'au jour indiqué. Nous en étions à cinq semaines ; je me conforme entièrement à son indication : j'engage plusieurs médecins à suivre son traitement. Douze de mes élèves l'examinent attentivement, et s'y rendent plusieurs fois par semaine. Le temps prédit arrive; toute la famille, qu'une maladie si affreuse affligeait cruellement, ne peut croire à un rétablissement si prochain; ce serait un miracle, et personne ne croit plus aux miracles ; mais, moi, j'étais bien certain que la malade marcherait. Les effets produits par le magnétisme étaient manifestes pendant chaque séance; une sueur très-abondante et gluante, venait avertir que les articulations se nettoyaient de l'humeur qui les obstruait; la peau avait changé de teinte ; les forces reparaissaient aussi ; les digestions étaient redevenues bonnes; il n'y avait plus que la jambe malade, qui d'abord plus grande que l'autre, et ensuite plus courte, qui présentât encore un raccourcissement assez sensible. Le 24, la malade affirme de nouveau que le lendemain elle marchera à midi, sans béquilles et sans boiter. Il y avait alors six mois qu'on ne l'avait levée, et cinq ans et demi qu'elle était malade; le 25, à onze heures et demie, je vais chez elle.: tout l'appartement était envahi par une foule de personnes venues pour être témoins d'une guérison presque sans exemple ; l'incrédulité est peinte sur toutes les figures : on me taxe d'enthousiaste , dejeune homme; chacun croit qu'une mystification m'attend. J'avoue que tous ces discours avaient porté dans mon âme un trouble inexprimable ; une sueur froide coulait de mon front; j'étais pâle et tremblant; et cependant, quelque chose me disait que dans un instant j'allais recueillir le prix de mes peines, et que ma foi aux prévisions somnambuliques, éprouvée par un grand nombre deprédictions toutes réalisées, allait être encore justifiée. A midi précis, je m'approche de la malade; elle était dans son lit, habillée ; je la magnétise devant tout le monde. Lorsqu'elle fut endormie, je lui rappelle sa promesse, je la somme de la tenir : je lui commande avec force de se lever et de marcher : elle sort du lit, lentement, et pose ses pieds à terre, pour qu'on lui mette des souliers. La foule immobile fixe ses jeux sur la jeune fille et sur moi ; et reste muette, impressionnée par un spectacle si nouveau ! A un signe de ma volonté, on s'écarte pour ouvrir «a passage; je commande de nouveau à la malade dé marcher; elle tâte d'abord le sol avec son pied malade ; elle semble mal assurée, fait un pas, se recueille, et enfin avance jusqu'à l'extrémité de l'appartement, sans être soutenue, ni appuyée sur personne. Elle revient à son lit, chacun la suit : je la réveille brusquement et lui dis de marcher; ce qu'elle ne sait pas encore avoir fait; elle tâtonne de nouveau le sol, et marche avec la mêmehésitation; mais bientôt, prenant de l'assurance, elle fait plusieurs fois le tour de l'appartement.

Je m'arrête, Messieurs, car il est hors de mes forces et de mon sujet, de vous peindre toutes les impressions que ce spectacle si sublime venait de produire sur la foule assemblée.

Les anciens philosophes, par leur intelligence, avaient pénétré dans les plus secrets ressorts spirituels de la nature. Ils avaient pensé que non seulement le principe spirituel de vie est dans la nature de chaque être, pour son existence et pour sa réparation, et suivant l'axiome des sages :

Nature contient nature, nature sêjouît en nature; nature surmonte nature; nulle nature n'est amandee, sinon en sa propre nature.

« Apprenez, disaient-ils encore,que c'est de la nature seule que vous recevez la guérison et la santé, pourvu que vous sachiez l'aider. Comme vous ne craignez pas que votre lampe s'éteigne tandis que vous avez de l'huile pour y mettre ; ne craignez pas non plus que les maladies vous assaillent, tandis que la nature aura en réserve un si grand trésor. Cessez donc de vous fatiguer nuit et jour dans la recherche de mille remèdes inutiles, et ne perdez pas votre temps dans de vaines sciences, ni dans des opérations fondées sur de beaux raisonnements, en vous laissant entraîner par l'exemple. »

Je viens,Messieurs, de vous donner la preuve que l'on peut, sans aucuns remèdes, guérir beaucoup de maladies regardées aujourd'hui comme incurables, et justifier quelques-uns des axiomes des médecins de l'antiquité.

Désormais, vous considérerez le magnétiseur comme une machine électrique, mettant en mouvement, par ses propres forces, un fluide doué des propriétés les plus admirables. Les nerfs conducteurs de ce feu principe, le recevant, le porferont dans toutes les parties de l'individu soumis à la magnétisation, il s'y répandra comme une rosée salutaire, pour humecter les parties mobiles et délicates qui doivent se toucher, sans jamais se réunir; entraînant avec lui la matière nutritive qui doit les soutenir, les développer et les réparer, il établira entre tous les organes une sorte de sympathie conservatrice qui les fera concourir au soulagement les unes des autres ; il se mêlera dans l'estomac avec les aliments, deviendra le premier agent de la digestion et enfin le premier remède auquel auront recours les malades qu'un sot aveuglement ne fera pas préférer une médecine inventée par les hommes vains et orgueilleux, à un moyen simple et universel que la nature a établi comme une loi nécessaire à son équilibre.

Dans la prochaine séance, je vous entretiendrai dû magnétisme dans l'antiquité, et de son état actuel en France.

FIN DE LA QUATRIÈME LEÇON.

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