COURS DE MAGNÉTISME EN 7 LEÇONS

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VIIeLEÇON.

Les couleurs ne sont réellement rien pour un aveugle, les sons n'existent pas pour un sourd ; le temps, le mouvement, l'étendue, ne nous offrent que des rapports de proportion.

Les choses que nous appelons réelles pendant la veille, n'existent donc réellement que dans nos sensations.

« Doutez-vous que l'âme puisse porter un regard sur les » objets cachés aux yeux du corps, lorsque, souvent, quand nos » paupières sont fermées par un sommeil bienfaisant, pleine de » vie, l'âme aperçoit les choses distantes et les lieux éloignés, » dirigeant sa vue à travers les campagnes, sur les mers et jusqu'aux étoiles, par la seule force de sa volonté? »

VIIeLEÇON.

Messieurs,

Dans la dernière séance, je vous ai annoncé qu'aujourd'hui je vous entretiendrais de quelques phénomènes particuliers, plus rares qu'aucun des autres faits magnétiques que je vous ai fait connaître, mais cependant constatés aussi de manière à ne laisser aucun doute sur leur existence.

Ces phénomènes, que l'on observe dans quelques maladies nerveuses peu fréquentes, se présentent quelquefois dans le somnambulisme magnétique le plus développé, et semblent résulter d'une disposition particulière des sujets magnétisés.

Quoique vous fassiez, ils ne durent qu'un certain temps, lors meme que le somnambulisme se prolonge. (*)

(*) Je dirai un jour ce qu'il en coûte à ceux qui s'obstinent à vouloir le maintenir.

Vous avez déjà vu que, contrairement aux règles tracées par les physiologistes, il peut exister, dans certains cas, une perturbation de l'ordre naturel de notre manière d'être; et par suite de cet état insolite, s'opérer le déplacement d'un ou de plusieurs de nos sens.

Je vous ai fait entendre que l'action de la vue pouvait momentanément avoir lieu sans le secours des yeux, et je vous ai promis de vous citer des exemples de ces faits.

Je vais, en suivant la marche que je me suis tracée, prendre mes preuves dans des ouvrages estimés. Ces phénomènes seront attestés par des hommes respectables et tout-à-fait désintéressés dans la question du magnétisme.

Je pourrais trouver un grand nombre d'exemples de faits répandus partout, mais comme ces allégations n'ajouteraient rien à celles que je vais vous communiquer, je n'en parlerai point.

« Quiconque entreprendrait, Messieurs, de » réunir tous les témoignages donnés en faveur » de la certitude du phénomène qui nous occupe, en formerait une masse si imposante, quel'incrédulité la plus décidée ne pourrait s'empêcher » d'en être subjuguée, et il en serait alors de la » vue sans le secours des yeux, comme de la » chute des aérolithes. Il résulte d'un relevé » exact, inséré dans l'Annuaire du bureau des » longitudes, qu'au commencement de ce siècle, » il existait cent quatre-vingts exemples de chutes » de pierres suffisamment constatés ; et cependant, à cette époque, c'était avec le sourire de » la dérision, qu'on recevait, même à l'Institut, » ceux qui venaient lire des mémoires dans lesquels ils établissaient la réalité de ce phénomène » qu'on ne pouvait se décider à croire, parce qu'il » paraissait, comme celui-ci, absolument inexplicable. »

Nous espérons que les savants se rendront de même à l'évidence du magnétisme.

Permettez-nous, Messieurs, avant de vous faire connaître l'authenticité du fait de la vue sans le secours des yeux, de vous entretenir, un instant, d'un autre phénomène aussi digne de remarque et non moins inexplicable : je veux parler de la faculté qu'ont les somnambules d'apercevoir les changements qui doivent survenir dans leur état morbide,  de  calculer avec une  inconcevable précision le moment de ce changement, changement souvent éloigné de plusieurs jours, de plusieurs mois, etc.

Cette faculté aperçue de tous les temps se présente presque toujours dans l'état particulier que nous savons faire naître, le somnambulisme, mais elle accompagne aussi certaines maladies. Je dois vous répéter, ici, que je n'adopte particulièrement aucune des explications qu'on a données de ce phénomène : que ce soit l'âme, l'archer ou le fluide nerveux qui le produise, cela est indifférent au résultat de la chose, mais il paraît de la dernière évidence qu'il est dû dans tous les cas au même principe : L'accumulation du fluide magnétique vers le cerveau, les plexus, ou dans quelques points des trajets nerveux, que cet état ait lieu naturellement , comme cela arrive quelquefois dans l'état extatique par exemple, ou bien qu'il soit provoqué par le magnétisme.

« Bans son Traité de la sagesse, Charon dit : l'âme est de soi toute savante sans être apprise, et ne fault point à produire ce qu'elle fait, et bien exercée ses fonctions comme il faut si elle n'est empêchée, et moyennant que ces instruments soient bien disposés. »

« Les hommes mélancoliques, maniaques, frénétiques etatteintsdecertainesmaladiesqu'Hippocrate appelle divines, sans l'avoir appris parlent latin , font des vers, discourent prudemment et hautement, devinent les choses secrètes et à venir. »

« Lesquelles choses les sots ignorants attribueront au diable ou esprit familier, bien qu'ils fussent auparavant idiots et rustiques, et que » depuis soient retournés tels après la guérison. »

« Il ne faut donc pas s'étonner, dit Plutarque, » que l'âme, pouvant saisir ce qui n'est plus, » puisse prévoir ce qui n'est pas encore. L'avenir » la touche même davantage, et est plus intéressant pour elle, elle tend vers le futur, et l'embrasse déjà au lieu qu'elle est séparée du passé » et n'y tient que par le souvenir. Les âmes ont donc cette faculté innée, mais à la vérité faible » et obscure, elle n'agit qu'avec difficulté. Cependant,ajoute Plutarque, il en est en qui elle « se développe tout-à-coup, soit dans les songes, » soit quand le corps se trouve dans une position favorable à l'enthousiasme , et que la partie raisonnable et contemplative, dégagée de l'impression des objets présents qui troublaient son action, applique l'imagination à prévoir l'avenir. »

Plutarque ajoute : « Les hommes pendant » qu'ils veillent n'ont qu'un monde lequel est » commun à tous, mais en dormant chacun a le » sien à part. »

Pendant le sommeil, ditTertullien,il nous est révélé non-seulement ce qui tient à l'honneur, aux richesses, mais encore ce qui tient aux maladies , aux remèdes et à la guérison.

Jamblique, au chap. des Songes, dit : «Quand nous sommes parfaitement endormis » nous ne pouvons pas si bien et distinctement » remarquer ce qui se présente en nos communs » songes, que quand c'est la divinité qui nous les » envoie en particulier ne dormant à son bon » escient, car nous apercevons bien plus clairement lors, la vraie et réelle vérité des choses, » que nous n'avons accoutumé de faire en veillant ; » au moyen de quoi en ses visions-là, consiste la » principale espèce de divination. Et de fait l'âme » a doublevie, l'une conjointe avec le corps, et » l'autre séparable de toute corporéité. Quand » nous veillons, nous usons la plupart du temps de la vie qui est commune avec le corps, hormis quelquefois que nous venons à être totalement » séparés d'icelui, mais en dormant, notre esprit » peut être du tout délivré des liens corporels qui » le détiennent comme en charte privée. »

Celui qui connaîtrait parfaitement les conjectures qu'il est possible de tirer des songes, en » recueillerait un grand avantage dans le commerce de la vie. L'âme veille par elle-même. » Lorsqu'elle est occupée du corps, et qu'elle est » en quelque sorte répandue sur tous les points » qui le composent, elle ne songe point à ellemême : elle donne toute son attention aux différents besoins du corps, aux sens, à l'ouïe, à la » vue, au tact, au marcher. Elle dirige l'action, a elle règle la pensée ; mais elle n'entre point dans » la connaissance d'elle-même. Au contraire, » lorsque le corps est en repos, l'âme se met en » mouvement; et abandonnant insensiblement les » diverses parties du corps, elle se retire et se » concentre dans son domicile. Là, elle s'acquitte « de toutes les fonctions du corps, car le corps, » lorsqu'il est pris par le sommeil, ne sent rien ; » c'est elle qui veille alors, et qui connaît. Elle » voit ce qui esta voir; elle entend ce qui est à » entendre; elle va, elle touche, elle s'attriste, elle raisonne plus promptement et plus facilement. Pendant le sommeil elle remplit toutes » les fonctions, tant celles qui lui sont propres, » que celles du corps. Si donc quelqu'un pouvait » saisir, avec un jugement sain, cet état de l'âme » dans le sommeil, celui-là pourrait se flatter » d'avoir fait un grand pas dans la science de la » sagesse. » ( Ier Chap. du Livre des Songes par Hippocrate. )

« Lorsque l'âme sensitive est profondément assoupie avec le corps, l'âme intellectuelle se lève » pleine d'éclat et de sérénité... Les esprits relevés » qui méditent de grands desseins, ont quelque-» fois des pressentiments nocturnes différents des > songes ordinaires ; car l'âme travaille perpétuellement et sans que nous nous en apercevions ; ■ elle a des raisonnements tacites, une idée qui » paraît oublier, parce que les distractions du jour l'offusquent, s'enfonce dans l'esprit et revient » pendant la nuit, élaborer en secret. La chaîne » des raisonnements intermédiaires nous ayant » échappé, ou se faisant à notre insu, nous présente tout-à-coup quelque vérité frappante; et » comme nous n'en voyons pas la source, elle » nous paraît envoyée par inspiration ; c'est ainsi qu'une fontaine qui se perd sous terre, reparaît » plus loin, grossie dans son cours par des veines » inconnues.

» L'âme peut acquérir quelquefois un développement surnaturel, et recevoir de Dieu un surcroit de lumière et de force.

» L'homme n'invente rien, que selon la mesure » du don qu'il a reçu.... Qu'est-ce qui le remplit » du germe de ses inventions et de ses connaissances, si ce n'est une lumière divine. » ( Virey, antagoniste du Magnétisme. )

« Ces communications de l'âme avec un ordre » de choses invisibles, sont rejetées de nos savants » modernes, parce qu'elles ne sont pas du ressort » de leurs systèmes et de leurs Almanachs ; mais » que de choses existent, qui ne sont pas dans » les convenances de notre raison et qui n'en ont » pas été même aperçues. »

( Etudes de la Nature, par Bernardin de Saint-Pierre. )

Jourdain Guibelet rapporte une histoire fort singulière d'une demoiselle affectée de suffocations hystériques. Dans ses accès, qui duraient ordinairement plus de 24 heures, sans aucune apparence de mouvement ni de sentiment, « quoique la langue ou les autres parties qui servent à » la formation de la voix ne fussent point empechées, elle discourait avec tant de jugement et » de délicatesse d'esprit, qu'il semblait que sa maladie lui donnât de l'entendement, et lui fût plus » libérale que la santé. On n'a jamais vu raisonner » avec tant d'art et discourir avec tant de facilité. » On pourrait dire, ajoute notre auteur, que le » corps étant comme mort pendant la violence du » mal, l'âme se retirait chez elle et jouissait de » tous ses privilèges : les conceptions de Pâme » doivent être d'autant plus nettes et plus relevées, » qu'elle est plus débarrassée des liens du corps » et de la matière. »

Ecoutez encore ce que dit un autre philosophe, Cabanis :

« J'ai vu, dit ce médecin célèbre , des malades » dont le goût avait acquis une finesse particulière, qui désiraient et savaient choisir lesaliments et même les remèdes qui paraissaient leur » être véritablement utiles, avec une sagacité qu'on » n'observe pour l'ordinaire que dans les animaux... (*) On en voit qui sont en état d'apercevoir dans le temps de leurs paroxismes, ou » certaines crises qui se préparent, et dont la terminaison prouve bientôt après la justesse de » leurs sensations, ou d'autres modifications attestées par celles du pouls, ou des signes plus «certains encore.

(*) « M. Bourdois, membre de l'Académie de médecine, » appelé auprès d'un homme de moyen âge, accablé, depuis » plus de trente-six heures, par un choléra-morbus tres-intense, pressée en telle façon qu'elle puisse venir jusqu'à la divination et langage non appris, les » exemples en sont fréquents, non pas à toutes » sortes de personnes, mais à quelques-uns doués » d'une vive imagination, qui es fortes maladies » et fièvres chaudes disent des choses à quoy ils » n'avoient jamais pensé, prédisent même les » choses futures, principalement quand ils sont » proches de la mort, et lorsque l'âme approchant » de sa liberté reçoit des rudes secousses par l'effort des maladies et chaudes vapeurs qui montent au cerveau. Et c'est, lorsqu'il se fait une » collision des objets fantasiez avec les organes, comme il sort du feu d'un caillou et fusil frappezl'un contre l'autre, qui n'estoit manifestement en l'un n'y en l'autre. Ou comme il sort » une odeur etforce d'aucunes herbes estant prèssées et frottées rudement entre les doigts, qui » n'eust pas paru sans ce froissement. »

« L'esprit, dit encore Cabanis, peut continuer » ses recherches dans les songes, et il peut être » porté, par une certaine suite de raisonnements, » à des idées qu'il n'avait pas. »

« C'est pour montrer qu'il ne faut pas mesurer » la puissance de nos âmes à l'aulne ordinaire par laquelle elle ne fait ordinairement rien d'admirable. Si elle n'est pressée, on n'y aperçoit rien » que ce qu'elle a puisé des sens qui est chose » commune à toutes. Or, que l'âme puisse être crut entendre le malade proférer dans son délire le mot pêche. » Cet habile praticien, profitant de cette sorte de mouvement » instinctif, fit apporter un de ces fruits. Le malheureux agonisant » le mange avec avidité, il en demande un second, qui est également accordé. Les vomissements, jusqu'alors opiniâtres et » déterminés par la moindre gorgée de tisane, ne reparaissent plus; leur absence enhardit le médecin. Enfin le malade mangea, » ou plutôt dévora dans une nuit, une trentaine de pêches, non » seulement sans accidents, mais même avec un tel avantage, que « le lendemain sa guérison était parfaite. »( Dictionnaire de Médecine en 18 volumes ; vol. 5, p. 190. )

« Cette faculté de prévision se trouve, quelque » incompréhensible qu'elle vous paraisse, appuyée » sur des faits si nombreux et si positifs, qu'aucun » des hommes qui ont observé le somnambulisme, l'extase ou quelques-unes des affections » qui s'en rapprochent, n'ont pu échapper à cette » vérité.

» On est étonné de la foule de noms que l'on » peut citer à l'appui de l'existence de ce pbénomène.

» Parmi ces noms se trouvent ceux d'Aretée, » d'Aristote, de Platon, de Porphyre, et de tous » les philosophes de l'école d'Alexandrie, d'un » grand nombre de médecins qui, beaucoup plus » tard, ont écrit et professé sur ce sujet, et tout » récemmentM. le professeur Moreau de la Sarthe » dans un article intitulé, Médecine mentale, a » reconnu l'existence de cette étonnante faculté ; » il en est de même de M. Deseze, et tant de témoignages pourraient-ils se réunir en faveur » d'une faculté contre laquelle la raison se révolte» » si des phénomènes réels n'avaient pas triomphé » de tout le scepticisme des observateurs ? »

Dans le Traité du somnambulisme du docteur Bertrand, on y lit que ce médecin fut témoin de plus de soixante accès convulsifs de la nature la plus grave, qu'il était absolument impossible de simuler , et qui tous avaient été prédits, tant pour leur commencement que pour leur terminaison (à la minute ). Le même médecin assure qu'une somnambule lui a annoncé quinze jours d'avance un délire de quarante-trois heures, qui eut lieu comme elle l'avait prédit; et il s'était assuré que cette somnambule ne conservait aucun souvenir au réveil.

Sauvage, dans sa Nosologie, cite une observation de Descartes, qui rapporte que deux jeunes filles hystériques se prédisaient mutuellement d'avance les différentes crises de leur maladie. Il en rapporte au même endroit une de Cavaliers, qui dit avoir vu à Fréjus « Quatre hydrophobiques » qui avaient prédit le jour, et même l'heure de » leur mort, et qui moururent au jour et presqu'à l'heure prédite; moi-meme, ajoute-t-il, » j'ai vu un sexagénaire prédire le jour de sa mort » un mois auparavant, et il mourut d'une fièvre » épiai au jour indiqué. » (*)

(*) Sauvage, Nosologie, tome 2, page 738.

Les médecins chargés de l'examen du magnétisme, ont constaté des phénomènes semblables. Des épileptiques en somnambulisme ont prédit plusieurs jours, plusieurs mois d'avance, leurs accès; et à l'heure indiquée, malgré toutes les précautions prises pour leur cacher le moment de l'invasion de cette crise, ils en étaient atteints.

Mais, Messieurs, tant de témoignages sont, j'ose le dire, superflus; car ce phénomène s'observe dans tous les cas de somnambulisme, et vous savez que. cet état se voit communément, il ne faut que faire quelques essais magnétiques pour s'en assurer.

Ce fut aussi le premier phénomène que les docteurs Rostan et Georget constatèrent à l'hôpital de la Salpêtrière ; voici ce que dit l'un d'eux :

« J'ai vu, positivement vu, un assez grand » nombre de fois, des somnambules annoncer » plusieurs heures, plusieurs jours, vingt jours » d'avance, l'heure, la minute meme de l'invasion » d'accès épileptiques et hystériques de l'irruption des règles, indiquer quelle serait la durée, » l'intensité de ces accès ; choses qui se sont exactement vérifiées. »

Moi-même j'ai observé un grand nombre de fois tous ces faits, et si je ne vous en offre pas le tableau, c'est que mon témoignage n'ajouterait aucun poids à toutes les preuves que je viens de vous donner.

Je ne m'arrêterai donc pas plus longtemps à vous entretenir de ce phénomène si singulier; car vous pourrez vous-mêmes bientôt, si vous le désirez, vérifier mes assertions, puisque, comme je viens de vous le dire, la prévision est un des phénomènes fréquents qu'offre le somnambulisme.

J'arrive, Messieurs, à vous parler du déplacement du sens de la vue.

Je devrais ici rappeler à votre mémoire, une partie des phénomènes magnétiques dont je vous ai parlé dans ce Cours ; vous montrer comme ils s'enchaînent, et vous amener par degré à ceux que je crois devoir vous foire connaître.

Si tout vous a semblé merveilleux, étonnant, dans ce que je vous ai raconté, combien ce qui va suivre dépasse encore, s'il est possible, mes précédents récits.

Jusqu'à présent vous avez pu en quelque sorte lier vos idées, et même, à un certain point, vous expliquer les effets produits par le magnétisme ; mais ici, tout semble échapper à notre jugement, nos lumièresparaissent ne plus suffire, et cependant ce sont encore des phénomènes physiques que nos sens peuvent apprécier; mais peu accoutumés à leur apparition, nous nous effrayons de leur existence ; et frappés de la vérité, nous voudrions que cette vérité n'existât pas, car elle vient déranger la marche de nos idées, et nous reporter vers un ordre de choses dont l'investigation semble se soustraire à nos moyens d'analyse.

Nous devons cependant en entreprendre l'étude, et considérer que toute découverte importante dans les sciences, produit sur nous le meme effet, jusqu'à ce que familiarisés avec les phénomènes nouveaux, ils n'offrent plus rien qui nous paraisse contraire aux lois de la nature.

Ne vous étonnez pas, Messieurs, si dans cette circonstance j'accumule les citations : je le dois, car l'importance du phénomène ne me permet pas de vousdire seul, je l'ai vu ; il faut un grand nombre de témoignages' pour justifier notre croyance,et vousdonner quelque confiance en la réalité d'un fait, qui paraît inexplicable dans l'état actuel de nos connaissances.

L'esprit,dans l'extase, dit Aristote, s'élance, va au-devant des causes et des effets, en saisit l'ensemble avec la plus grande vitesse, et le confie à l'imagination pour en tirer le résultat futur. Les mélancoliques, à cause de la véhémence de leur tempérament, sont plus propres à ces opérations conjecturales.

Quintus,dans le traité de la divination de Cicéron, soutient « que tout est lié par un enchaînement éternel ; que lé passé reproduit leprésent, et que le présent est gros de l'avenir; que de même que la vertu de tout ce qui doit être produit, est contenue dans les semences, de » même les choses futures sont renfermées dans

» leurs causes; que ceux qui ont des visions en » songe, voient distinctement cet enchaînement » éternel de toutes choses, que la vaticination et » les conjectures ne sont que le développement de » cette chaîne. »

Tout ce qui se peut connaître de la nature est manifesté en nous.

L'homme, dit l'éloquent Buffon, réunit en » lui foutes les puissances de la nature, il communiquepar ses sens avec les objets les plus éloignés, son individu est un centre où tout se rapporte, un point où l'univers entier se réfléchit, » un monde en raccourci. »

Cette grande vérité est aperçue dans tout son jour par la découverte du somnambulisme. Dans cet état singulier où la vie semble abandonner quelques parties de l'individu, pour en animer doublement d'autres points, notre corps parait être le jouet d'un être incompréhensible qui se plaît à manifester sa puissance par les aberrations les plus choquantes des fonctions de nos organes et par l'exercicedessens, là où la nature semblait avoir tout mit pour ne point les y admettre et nous montrer qu'il est une autre lumière que celle en rapport avec nos yeux de chair.

Qu'ils sont blâmables ,les gens qui, pénétrés de la vérité de l'existence du magnétisme, emploient leurs moyens à en restreindre la pratique (*), et combien ils sont aveugles ceux qui se refusent à tout examen; car si quelque chose aujourd'hui peut nous fournir de nouvelles lumières, s'il est une voie pour nous affranchir du joug des anciennes routines, c'est sans contredit l'étude des lois de la vie.

(*) Oh ! Messieurs les médecins, quelle occasion vous avec perdue! Les hommes les plus ambitieux en cherchent toute leur vie de pareille et ne la trouvent point; ou s'ils la trouvent, ils meurent contents en l'embrassant : et vous, Messieurs, elle vous cherche elle-même, et vous la repoussez ! Ces hommes si avides de l'estime de leurs semblables, se croient heureux quand ils peuvent montrer une fois, aux yeux de quelques-uns, un peu de supériorité, soit par le cœur, soit par l'esprit; et vous, Messieurs, vous pouviez (ce qui ne se rencontre presque jamais) prouver à la fois et à tous, et votre cœur et votre esprit. Vous pouviez, en vous montrant les amis généreux de la seule humanité, vous voir déférer le titre de réformateurs d'an art dont on vous a crus les esclaves; il ne fallait peut-être qu'un peu de patience et être équitables pour faire éclater les plus grandes lumières, et mériter le plus grand honneur. Non,Messieurs, non, cette occasion est passée pour ne revenir jamais.....

Homme, connais-toi toi-même, avaient dit d'anciens philosophes ; on a répété bien souvent cette inscription, mise sur la porte d'un temple, mais peu de personnes se sont livrées à cette étude qui était, il est vrai, hérissée de difficultés ; aujourd'hui cependant, il n'en est plus de même, nous pénétrons dans l'intérieur de notre organisation, noustenons l'un des. fils qui en font mouvoir les ressorte, nous pouvons assister à quelques-unes des scènes de la vie qui semblaient pour toujours devoir êtresoustraitesà nos regards. Honneur, cent fois honneur à Mesmer ! il a soulevé le voile qui nous cachait plusieurs opérations de la nature. A Athènes, à Lacédémone on eût élevé des autels à un tel homme : on l'a couvert de mépris et de ridicule; sa fortune, sa vie ont été exposées aux plus grands dangers ; il a subi le sort de Galilée, poursuivi par le fanatisme de son siècle pour avoir soutenu le mouvement de la terre ; on l'a traité de visionnaire, comme le célèbre Harvey, qui enseignait la circulation du sang; on l'a persécuté comme Christophe Colomb qui découvrit le nouveau monde ; enfin, on l'a joué sur le théâtre comme Socrate, pour le faire haïr du peuple. (*)

(*) « Ainsi tout grand bienfait, en naissant fut an crime, Tout grand génie un fou, souvent une victime ; Et depuis Dieu, qui vint, subissant notre sort, Instruire par sa vie et sauver par sa mort ; Jusqu'aux sages mortels dont les vives lumières

Je m'écarte de mon sujet, Messieurs; mais lequel d'entre vous resterait froid et méthodique en présence d'une vérité qui lui serait démontrée, si cette vérité intéressait l'humanité tout entière ; car ce n'est pas seulement comme phénomènes physiques et physiologiques, que les effets magnétiques nous sont utiles à connaître. Mais c'est que de l'étude de leurs lois découle la connaissance des causes d'une foule de maladies nerveuses dont le traitement, incertain parles procédés de la médecine ordinaire, devient facile et assuré par le magnétisme; et de nombreux faits nous prouvent cette vérité. C'est qu'avec cette étude nous sortons du cercle tracé depuis longtemps autour des connaissances de l'homme ; cercle que l'on ne croyait pouvoir franchir, et nous trouvons' enfin l'explication naturelle de beaucoup de phénomènes que notre ignorance nous faisait classer au rang des fables.

Nous allons rencontrer partout des observations faites avec toutes les précautions convenables et pardes gens pourvus des connaissances nécessaires, des observations qui vont justifier complètement les assertions que nous avons avancées sur le phénomène de la vue sans le secours des yeux.

Au jour de la raison ouvrirent nos paupières, Toujours le inonde, sourd aux sublimes voix, Eut pour ses bienfaiteurs des bûchers et des croix. »

Bans non récit j'aurai soin de laisser parler les expérimentateurs eux-mêmes et de ne vous citer mes observations particulières qu'à la suite de leurs témoignages.

Voici un premier fait tiré de la Gazette de Santé, et qui est rapporté dans le Journal de Paris du 24 brumaire, an XIV.

« Les journaux, dit le rédacteur, retentissent en » ce moment des prodiges d'une femme somnambule de Lyon, qui, les yeux fermés, lit une lettre » cachetée, devine la pensée, et rend compte des » sensations qu'on éprouve, etc.; ce qu'il y a de » plus singulier, c'est que cette femme est bien née » et que, soit à raison de son éducation, soit à raison » de sa fortune, elle est au-dessus du soupçon de  simuler ces étranges scènes : au reste, les personnages les plus graves, les médecins les plus » instruits,des savants estimés de Lyon paraissent » très-convaincus de ces prodiges. »

M. Deleuze, bibliothécaire et professeur d'histoire naturelle au Jardin des plantes, rapporte dans un mémoire sur la Clairvoyance des somnambules, l'historique que voici : « La jeune malade, dit M. Deleuze, m'avait la fort couramment sept ou huit lignes, quoique ses yeux fussent masqués de manière à ne pouvoir s'en servir, ensuite elle avait été obligée de s'arrêter, étant, disait-elle, trop fatiguée : quelques jours après, voulant convaincre des incrédules qu'il ne pouvait mener chez la somnambule, l'auteur lui présente une boîte de carton fermée dans laquelle étaient écrite ces mots : amitié, santé, bonheur. Elle tint longtemps la boite dans sa main, éprouva beaucoup de fatigue, et dit que le premier mot était amitié, mais qu'elle ne pouvait lire les autres ; pressée de faire de nouveaux efforts, elle y consent et dit eu rendant la boîte, je n'y vois pas assez claire, je crois cependant que ces deux mots sont bonté, douceur : elle se trompait sur ces deux derniers mots ; mais, comme on le voit, ces mots avaient la plus grande ressemblance avec ceux qui se trouvaient écrits, et une pareille coïncidence ne peut pas être attribuée au hasard. »

Voici des attestations récentes, qui sont plus concluantes :

M. Rostan, professeur à la Faculté de médecine, connu depuis longtemps par plusieurs écrits qui ont fixé l'opinion publique sur son compte, pouvait craindre de perdre beaucoup de l'estime qu'on lui portait en avouant les phénomènes de lucidité somnambulique ; il n'a pas hésité cependant, et l'article magnétismedansleDictionnaire des Sciences médicales, contientplusieurs faits extrêmement curieux et qui se rapportent à ceux dont je vous entretiens.

Ce médecin cite l'observation d'une somnambule qui lui a indiqué exactement et à plusieurs reprises, l'heure que marquait une montre placée derrière sa tête.

Voici cette expérience :

Après avoir parlé des facultés somnambuliques en général, M. Rostan s'exprime ainsi :

« Mais si la vue est abolie dans son sens naturel, » il est tout-à-fait démontré pour moi qu'elle existe » dans plusieurs parties du corps.Voici une expérience que j'ai fréquemment répétée : cette expérience a été faite en présence de M. Ferrus. Je » pris ma montre, que je plaçaià 3 ou 4pouces derrière l'occiput. Je demandai à la somnambule » si elle voyait quelque chose ; certainement, je » vois quelque chose qui brille; ça mefait mal. Sa » physionomie exprimait la douleur ; la nôtre devait exprimer l'étonnement ; nous nous regardames, et M. Ferrus, rompant le silence, me » dit que puisqu'elle voyait quelque chose briller, » elle dirait sans doute ce que c'était. » Qu'est-ce que vous voyez briller ? Ah ! je ne sais pas, je ne puis vous le dire. Regardez bien : » Attendez.. ça me fatigue... Attendez, c'est une » montre. Nouveau sujet de surprise. Mais si elle » voit que c'est une montre, dit encore M. Ferrus, » elle verra sans doute l'heure qu'il est : Pourriez-vous dire quelle heure il est? Oh ! non, c'est » trop difficile. Faites attention, cherchez bien? » Attendez».. je vais tâcher... je dirai peut-être » bien l'heure, mais je ne pourrai jamais voir les » minutes. Et après avoir cherché avec la plus » grande attention, il est huit heures moins dix minutes; ce qui était exact. M. Ferrus voulut répéter l'expérience lui-même, et il la répéta avec » le même succès. Il me fit tourner plusieurs fois » les aiguilles de sa montre, nous la lui présentâmes sans l'avoir regardée, elle ne se trompa » point. (Extrait du Dictionnaire de Médecine, imprimé à Paris en 1827, article Magnétisme. ) AI. Georget, autre collègue de M. Rostan, affirme avoir observé une somnambule qui lui a présenté des phénomènes fort étonnants de prévision et de clairvoyance, tellement, ajoute-t-il, que dans aucun ouvrage de magnétisme, pas même dans celui de Pététin, je n'ai rien rencontré de plus extraordinaire, ni même dans tous les phénomènes que j'ai été à même d'observer.

« Mettra-t-on en doute la bonne foi de ce médecin? Mais qu'avait-il à gagner en publiant ses » observations? rien que du mépris si le magnétisme ne triomphait pas; il n'a écouté aucune considération personnelle, et il a dit la vérité. »

Le docteur Rostan se rend garant de la véracité de son confrère, il dit : « Tout ce qu'a publié M. Georget, je l'ai vu, plusieurs des expériences ont été faites chez moi, nous n'avions d'autre but l'un et l'autre que celui de nous instruire. Nous apportions tous deux un esprit de doute. Si nous pensions qu'il eût été dupe, voudrions-nous partager un pareil reproche ? et s'il était un fourbe, pourrions-nous assumer une semblable complicité?

M. Chardel, député, auteur que je vous ai déjà cité, rapporte, dans un ouvrage qu'il a publié, il y a quatre ans, sur le magnétisme , plusieurs exemples de vue sans le secours des yeux.

Voici l'un de ces faits :

« La somnambule revenue à elle, elle venait » d'avoir une syncope, me demanda de l'eau, j'allai sur la cheminée prendre une carafe ; elle » se trouva vide, je l'emportai pour la remplir, » dans la salle à manger, où j'avais remarqué une » fontaine filtrante ; je tournai le robinet, l'eau ne vint pas, cependant la fontaine était pleine; » j'imaginai qu'il fallait déboucher le robinet, et » je me servis d'un rotin que je fendis : l'eau n'arriva pas davantage. Je supposai alors que le » conduit aérien du réservoir était obstrué, et » comme il était fort étroit, il fallait de nouveau » fendre le rotin pour l'introduire : mais je n'eus » pas plus de succès. Je pris enfin le parti de revenir avec une carafe pleine d'eau non filtrée. Ma somnambule était encore dans l'attitude où je » l'avais laissée. Elle m'avait constamment vu, elle » avait suivi tous mes mouvements, etme les raconta sans omettre une circonstance ; cependant » il se trouvait entre elle et moi, le salon et deux murs, et ma conduite contenait une foule de » détails qu'on ne pouvait imaginer. » (*)

(*) « Non, la vue de l'âme ne dépend point d'une étroite prunelle, c'est une flamme vive, un feu qui s'élance, fend la nue et pénètre dans le vaste abîme de l'inconnu. » Illis viva acies, nec pupula parva, sed ignis Trajector nebulae, vasti et penetrator operti est.

Monsieur Chardel ajoute : « Je pourrais citer » plusieurs autres exemples de vue semblables et » même à des distances bien plus considérables ; » mais les circonstances n'en seraient pas plus concluantes. »

AUREL. PRUDENCE.

Voici, Messieurs, des attestations données par des personnes non moins dignes de foi..

« M. Francœur, mathématicien distingué, a » lu en 1826, à la Société Philomatique, un mémoire contenant les faits les plus curieux ; s'étant trouvé aux eaux d'Àix en rapport avec des » médecins respectables, et notamment le docteur Despine, médecin en chef de l'établissement, qui lui avait raconté avoir été témoin» » pendant des mois entiers, du phénomène si » singulier du déplacement des sens, qu'il croyait » dans l'intérêt de la vérité devoir en rendre » compte à la Société. »

Dans la première observation de ce mémoire, on y lit que la malade qui en fait le sujet, avait la faculté de voir, d'entendre et d'odorer par les doigts.

La seconde observation est beaucoup plus curieuse ; elle fut faite sur la fille de M.*** qui jouit de l'estime de toute la ville de Grenoble, où il vit retiré , et que la maladie de sa fille désolait extrêmement. Il faisait tous ses efforts pour cacher cette maladie et refusait toute visite de curieux.    .

Parmi les différents états que présenta cette malade, et que le docteur Despine décrit avec beaucoup de détail, il insiste particulièrement sur celui de somnambulisme. Je transcris textuellement le passage le plus positif sur la translation du siège dela vue.

<< Non-seulement notre malade entendait par »la paume de là main, mais nous l'avons vue » lire sans le secours des yeux, avec la seule extrémité des doigts, qu'elle agitait avec rapidite au-dessus de la page qu'elle voulait lire,, » et sans la toucher, comme pour multiplier » les surfraces sentantes, lire, dis-je, une page » entière d'un roman de Madame de Montolieu.

» Nous l'avyons vue d'autres fois, choisir sur un «paquet de plus de trente lettres, l'une d'entre » elles qu'on lui avait indiquée; lire sur le cadran et à travers le verre l'heure qu'indiquait » une montre ; écrire plusieurs lettrés, corriger, » en les relisant, des fautes qui lui étaient échappées, recopier une des lettres, mot pour mot. ». Pendant toutes les opérations, un écran de » carton épais interceptait de la manière la plus » étroite tout rayon visuel qui aurait pu se rendre » aux yeux.

» Les mêmes phénomènes avaient lieu à la » plante des pieds et sur l'épigastre ; et la malade semblait éprouver un sentiment de douleur par » le simple toucher.»

Messieurs, vous trouverez encore des faits très-circonstanciés de vue sans le secours des yeux, dans un mémoire curieux du docteur Delpit, sur deux affections nerveuses. (*) « L'une des malades lisait, dit l'auteur, et lisait três-distinctement, lorsque ses yeux étaient entièrement » fermés à la lumière, en promenant ses doigts » sur les lettres. Je lui ai fait lire ainsi, soit au » grand jour, soit dans l'obscurité la plus profonde, les caractères imprimés, en ouvrant le » premier livre qui me tombait sous la main ; et » quelquefois des caractères écrits, en lui remettant des billets que j'avais préparés exprès » avant de me rendre chez elle. Etait-ce le sens » du toucher qui suppléait alors à celui de la » vue? Je l'ignore ; mais j'affirme qu'elle lisait » très-couramment en promenant ses doigts sur » les lettres. »

(*) Bibliothèque médicale, t. 56, page 308.

Voilà certes un témoignage positif, et un témoignage rendu par un homme auquel de pareils faits sont venus se présenter sans qu'il les cherchât , sans qu'il se doutât même de la possibilité de leur existence, et qui, frappé de leur inconcevable singularité, n'a pris la plume que pour les consigner.

Monsieur Delpit, dans des réflexions fort courtes placées à la suite de ces observations, invoque l'autorité de plusieurs auteurs connus, et particulièrement celle de Dumas. « II y a cinq ans, » dit cet auteur célèbre, qu'une jeune personne » du département de l'Ardeche, venue à Montpellier pour consulter les médecins sur une affection hystérique accompagnée de catalepsie, » donna l'exemple d'un phénomène étrange. Elle » éprouvait, pendant toute la durée de ses attaques, une telle concentration de la sensibilité » vers la région précordiale, que les organes des » sens y étaient comme entièrement fixés ; elle » rapportait à l'estomac toutes les sensations de » la vue, de l'ouïe, de l'odorat, qui ne se produisaient plus alors dans les organes accoutumés. » Ce phénomène rare, observé chez une personne bien digne d'intéresser, fut un objet » d'attention pour les médecins, et de curiosité » pour le public.

» Je ne me dissimule point, poursuit M. Delpit, que les faits de ce genre, en opposition » avec toutes les lois connues de la nature, ne doivent point obtenir sans difficulté ni sans » restriction, l'assentiment des esprits sages qui » craignent d'être abusés; mais si l'on multiplie » les observations à cet égard, si l'on constate » avec scrupule les moindres circonstances de » chaque observation, il faudra bien reconnaître » la possibilité d'un phénomène qui ne semble » peut-être aussi merveilleux, que faute par nous » d'avoir beaucoup de faits auxquels nous puissions le comparer, »

Ces faits sont récents, et ils sont d'une telle nature, qu'il n'était pas possible de se tromper. Voilà des témoignages rendus par des auteurs vivants et au-dessus de tout soupçon d'imposture.

On serait fort embarrassé de trouver les motifs de semblables assertions si les faits n'eussent pas été évidents. D'ailleurs, ils se renouvellent à chaque instant. Voici une observation publiée dans la Gazette de Santé de septembre 1829.

Ecoutez ce que dit le journaliste :

« Magnétisme animai. —Il y a en ce moment, dans les salles de M. Fouquier, une malade chez laquelle le magnétisme a développé des phénomènes curieux et quelquefois incroyables. Sans nous ranger parmi les amis du merveilleux, il est de notre devoir de tenir compte des faits quand ils sont authentiques. Or, ceux que nous allons rapporter, ayant été observés par un grand nombre de personnes à la fois, nous croyons pouvoir les offrir à nos lecteurs comme dignes de toute leur confiance.

» La nommée Pétronille Leclerc, âgée de 26 ans, ouvrière en linge, était entrée à la Charité, pour se faire traiter d'une affection cérébrale spasmodique; épileptiforme, d'une constitution très-nerveuse, pâle, épuisée par d'anciennes souffrances, excessivement irritable, elle avait éprouvé, à la suite d'accès de colère, un renversement en haut des globes oculaires, qui avait résisté à toutes les médications; il vient à M. Sbire, qui la pansait, l'idée d'essayer l'emploi du magnétisme, il en fit la première application le 29 août dernier, la répéta plusieurs fois depuis : voici les circonstances les plus remarquables qui ont été notées, et dont quelques-unes se sont passées sous nos yeux.

» Dans la première séance, la somnambule donne plusieurs preuves de lucidité. La personne qui l'avait magnétisée lui présenta quelques objets , tels qu'un flacon rempli, du sucre, du pain, qu'elle caractérisa parfaitement sans les voir, elle avait un bandeau sur les yeux : d'ailleurs, pour répondre aux questions qui lui étaient adressées, elle se tournait du côté opposé, et s'enfonçait le visage profondément dans son oreiller. Sans être interrogée, elle dit à la môme personne qui lui tenait la main : vous avez une douleur de tête. Le fait était réel ; mais pour éprouver son embarras, l'élève lui répondit qu'elle se trompait ; voilà qui est singulier, reprit-elle, j'ai touché alors quelqu'un qui avait une douleur de tête, car je l'ai bien senti. Elle distingua encore différents individus présents à l'expérience, par quelques particularités de leurs vêtements. Une des circonstances les plus remarquables est celle-ci : le magnétiseur s'était retiré en lui promettant de revenir vers cinq heures et demie pour la réveiller. Il devança l'heure de son retour, là somnambule lui fit observer qu'il n'était pas cinq heures et demie ; ce dernier lui répondit qu'une lettre qu'il venait de recevoir l'avait forcé de revenir auprès d'elle. Ah!oui, reprit-elle sur-le-champ, c'est cette lettre que vous avez dans votre portefeuille, entre une carte bleue et une carte jaune; le fait se trouva de la plus grande exactitude.

» On lui plaça une montre derrière l'occiput, et on lui demanda l'heure, quatre heures six minutes , il était quatre heures sept minutes. »

Le numéro 17 du même journal contient une note où on raconte que la môme malade a eu, comme elle l'avait prédit, une inflammation assez intense de la bouche et de l'arrière-bouche avec salivation ; elle a été accompagnée de constipation, ainsi que la somnambule l'avait annoncé.

Ces assertions feront beaucoup d'effet sur vous, Messieurs, lorsque vous saurez que les rédacteurs de ce journal furent longtemps opposés au magnétisme ; les magnétiseurs n'étaient rien moins, à leurs yeux, que des empoisonneurs.

Voici un autre extrait de la Gazette Médicale de Paris, 2 octobre 1832.

« On observe en ce moment, à l'hôpital Della-Vitta de Bologne, un phénomène de magnétisme animal fort extraordinaire. Il se trouve dans cet hôpital un malade qui, de trois jours en trois jours, est attaqué, à onze heures précises du matin, d'une convulsion tellement forte, qu'il perd entièrement la faculté de percevoir des sensations : la vue, l'ouïe, l'odorat, disparaissent complètement ; les organes des sens ne font plus aucune fonction ; les deux mains se ferment si étroitement qu'il est impossible de les ouvrir ; en employant la force, on briserait infailliblement les doigts. Cependant le docteur Cini, fils du peintre, qui lui donne des soins, a découvert, après de longues etattentives observations, que l'épigastre, à la distance de deux doigts au-dessus de l'ombilic, recevait, pendant la crise convulsive, toutes les perceptions des sens au point de les remplacer. Si Ton parle au malade en touchant l'épigastre du bout du doigt, il répond, et si on le lui commande, il ouvre les mains de lui-même; si l'on place un corps sur l'épigastre, le malade en décrit la forme, l'odeur, la qualité, la couleur. Pendant le contact du doigt, la convulsion va en diminuant et semble disparaître ; mais si l'on place le doigt sur le cœur, la convulsion se reproduit et dure aussi longtemps que le doigt conserve cette position. Si l'on joue de la flûte en touchant l'épigastre, le malade entend la musique, et lorsque, sans interrompre le jeu de l'instrument, le doigt quitte un instant l'épigastre pour se porter vers le cœur et revient immédiatement à l'épigastre, le malade demande pourquoi on cesse de jouer par intervalle.

» Les expériences ont été faites, dans les premiers jours de septembre, en présence des professeurs et des étudiants ; elles ont excité une surprise extrême. »

J'ai, moi-même, vu et fait constater ce phénomène, et c'est surtout parmi les gens les plus éclairés que je prenais mes juges.

Il y a une année au plus, traitant une malade somnambule, j'ai pu observer, pour la vingtième fois peut-être, le phénomène de la vision sans le secours des yeux. Une foule de personnes ont été témoins de cette singularité, car la malade se prétait avec plaisir à ces sortes d'expériences. Cet état de sommeil incompréhensible cessa au bout de quelque temps avec la maladie qui l'avait fait naître, et la relation entière du traitement et des phénomènes observés n'ont jamais été contredits.

Cette malade, traitée par d'habiles médecins de la capitale, notamment par M. Fouquier, ne fut guérie que par le magnétisme. Le sommeil avait lieu au bout de quelques minutes de magnétisation.

Voici comment, dans son somnambulisme, elle s'y prenait pour exercer son sens interne.

On appliquait sur son estomac ce qu'on voulait lui faire lire, en ayant soin de couvrir le papier avec la main. Bientôt son estomac se gonflait d'une manière sensible, et elle indiquait d'abord une lettre, puis une autre, et ainsi de suite jusqu'à la fin ; mais, par une bizarrerie inconcevable, c'était toujours par la terminaison des mots que sa lecture avait commencé, et on était obligé de les recomposer, mais toutes les lettres et leur valeur étaient parfaitement exactes.

Elle assurait sentir, pendant cette opération, la présence d'une boule dans son estomac, qui la fatiguait beaucoup. Interrogée comment elle voyait, elle ne savait nous répondre ; ce n'était pour elle ni voir ni sentir, mais quelque chose entre ces deux états.

Elle portait elle-même, au centre épigastrique, les objets qu'on lui donnait à percevoir.

Un jour, on lui remit une tabatière bien fermée : après l'avoir considérée avec attention, elle nous dit que cette tabatière contenait dans son intérieur un petit papier très-petit. Tout le monde ignorait cette particularité, car la boîte n'avait pas encore été ouverte depuis sa sortie de chez le marchand, et la personne qui venait de l'acheter ne s'était nullement préparée à une expérience; mais la somnambule, continuant son opération, dit qu'elle voyait quelque chose d'écrit sur ce petit papier, elle traça avec ses doigts les chiffres 2 et 5 ; on ouvrit la boîte et on trouva effectivement le papier , grandd'une ligne et demie, et dessus, les deux petits chiffres qu'elle avait assuré devoir s'y trouver (*).

{*) « Croyez-vous que l'âme ne voie que par les yeux, et qu'elle soit circonscrite par la portée de nos regards? Celui qui » croirait de la sorte serait dans une grande erreur.

Notre étonnement fut on ne peut plus grand, car celte expérience, dont le hasard seul était cause, était tout-à-fait concluante ; pas un seul doute ne pouvait exister sur son résultat.

Ce n'est pas seulement en France qu'on observe ce phénomène, mais partout où l'on s'occupe du magnétisme animal.

Dans un écrit très-curieux, imprimé en Allemagne il y a quelques années, on trouve, sur la même faculté, des faits qui ne paraissent pas moins concluants , et ces faits sont également attestés par de bons observateurs (*).

(*) Beaucoup d'ouvrages ont paru depuis quelques années, mais aucuns n'ont été traduits en français ; plusieurs le méritent cependant, et pourraient nous éviter des recherches.

L'auteur de l'ouvrage dont nous parlons, et témoin oculaire des faits qui y sont contenus, a joint à la relation qu'il a faite, celle de trois médecins distingués qu'il avait fait appeler auprès dela somnambule, et ces trois relations s'accordent merveilleusement avec la sienne.

Voici quelques-uns des principaux faits de vue sans le secours des yeux.

AUREL. PRUDENCE..

La somnambule voit un papier écrit par M. le baron de Strombeck, elle indique que cet écrit contient deux alinéa, et combien chaque alinéa a de lignes.

J'allai chercher le papier, ajoute l'auteur, je comptai les lignes, et je frissonnai comme je l'aurais fait à la vue d'un spectre.

La meme extatique voit à un étage supérieur, dans la chambre de M. de Strombeck, et sur son bureau, une épreuve de son imprimeur, que lui-môme ne savait pas être apportée.

Elle indique la place de plusieurs objets situés derrière elle, et dont on avait à dessein dérangé secrètement la position.

La malade indique, à la minute, l'heure que marque la montre du docteur Schmidt, qui ne se trouvait d'accord avec aucune de celles qui étaient dans l'appartement.

Elle indique que le docteur Marcard a de l'argent sur lui, dans une bourse longue, verte et rayée, telle qu'on n'en portait plus depuis longtemps; ce médecin ne portait cette bourse sur lui que depuis quelques jours, et il assurait ne l'avoir jamais tirée de sa poche hors de chez lui.

Si nous ouvrons l'ouvrage de Pétetin, nous trouvons des phénomènes absolument semblables et ce n'est plus sur une seule personne seulement qu'on les constate, mais sur sept femmes toutes tombant en catalepsie.

Une de ces cataleptiques distingue successivement plusieurs cartes que l'on avait glissées sous sa couverture et placées sur son estomac; elle dit l'heure que marque une montre renfermée dans la main d'une personne, et reconnaît une médaille antique dans la main d'une autre personne.

Un autre jour la môme malade reconnaît une lettre placée sous la veste de Pétetin, puis une bourse qui y avait été glissée par un incrédule, et indique le nombre de pièces d'or et d'argent qui se trouvaient de chaque côté de cette bourse : à la suite de cette dernière expérience, elle annonce qu'elle va dire successivement ce que chaque personne a de plus remarquable, ce qu'elle fait en effet. Elle aperçoit au travers d'un paravent, que M. Pétetin, en sortant, prend le manteau de son mari pour le sien, et le fait avertir de son erreur.

Une autre malade donnait des preuves de vision sans le secours des yeux, non moins extraordinaires. Soumise aux expériences de plusieurs personnes , elle sut reconnaître un petit morceau de platine renfermé dans du papier, une boule de cuivre cachée dans un mouchoir, un cachet à trois faces tenu dans la main, et distinguer ce qui était gravé dessus ; sur l'une des faces était une devise en italien, écrite en si petits caractères qu'il fallut àPétetin une grande attention pour la lire. La malade désigna aussi deux livres placés dans la poche d'un spectateur ; enfin, elle lut une ordonnance renfermée dans un papier cacheté, et dit quel en était le contenu, une once de quinquina et un gros de valériane.

Le docteur Bertrand, qui rend compte de l'ouvrage de Pétetin, fait les réflexions suivantes :

« Si Pétetin n'a pas menti, dit-il, il faut franchement reconnaître que les malades dont il a consigné l'histoire, avaient la faculté d'acquérir, sans le secours des yeux, la connaissance de la forme et de la couleur des corps ; et si les faits qu'il atteste nesont pas vrais, non-seulement il faut qu'il ait menti, lui en particulier, mais on est obligé de faire la môme supposition relativement aux parents de ses malades, à leurs amis, et aux médecins , d'abord incrédules, et qui ont fini par se déclarer convaincus : or, je ne crains pas de le dire, le concours d'un aussi grand nombre de témoins choisis parmi des personnes graves, éclai rées, et qui n'avaient aucun intérêt à vouloir tromper; ce concours, dis-je, pour attester des faits qui ne seraient que d'insipides mensonges, offrirait le plus singulier phénomène moral ; car l'ouvrage de Pétetin renferme l'histoire de sept somnambules, qui toutes ont présenté les mômes phénomènes; et par conséquent, il aurait fallu que ce merveilleux concours, pour une imposture inutile et pleine d'effronterie, se fût sept fois renouvelé, et cela est impossible à supposer. »

Il y a peu de temps, Messieurs, je ne craignis pas de m'exposer à convaincre un corps savant, de la réalité du phénomène de la lucidité. Je convoquai un grand nombre de médecins pris dans le sein de l'Académie de médecine, je demandai que les expériences fussent faites au grand jour, et de manière à ne laisser aucun doute sur leurs résultats.

Je vais vous citer quelques-unes des expériences qui furent faites dans cette circonstance.

Un jeune homme magnétisé par moi fut aussitôt endormi. On chercha à le faire lire, il déchiffra quelques mots, mais avec difficulté. Il contempla avec plaisir un portrait que lui présenta le professeur Adelon.

On plaça devant lui plusieurs jetons, dont un avait été choisi par un des expérimentateurs et magnétisé par moi ; il le reconnut chaque fois que l'on fit cette expérience.

De deux verres d'eau dont un était magnétisé, il prit celui-ci sans hésiter, quoiqu'on les eût changés de place de manière que je ne susse pas moi-même lequel j'avais touché.

Dans cette même séance, le somnambule joua à l'écarté, successivement avec M. Adelon, et avec M. Ampère, membre de l'Académie des sciences. Il lui arriva par moment de reconnaître les cartes sans qu'elles fussent retournées ; enfin, il vit plusieurs fois l'heure à la montre de M. Ampère ; le cadran retourné de' manière que le somnambule ne pût rien voir que le boîtier, et les aiguilles ayant été dérangées sans que personne ait jugé et reconnu leur direction.

En se retirant, ces Messieurs me manifestèrent la satisfaction que leur avait causée des expériences qui leur semblaient concluantes sur la plupart des points. Ils parurent désirer être de nouveau témoins des mômes expériences, et je n'eus rien de plus pressé que de me rendre à leur invitation. Dans cette nouvelle séance, à laquelle assistèrent de nouveaux témoins, le somnambule fut endormi en moins de quatre minutes, des bougies allumées furent tenues à deux pouces de ses yeux pendant tout le temps des expériences, et l'on ne put jamais apercevoir le moindre mouvement des paupières dont les cils étaient entrecroisés ; on lui ouvrit les yeux de force et il ne se réveilla point. On remarqua que la prunelle était portée en bas et inclinée vers le grand angle de l'orbite.

Les yeux étant hermétiquement fermés, M. Ribes lui présenta un catalogue qu'il tira de sa poche ; le somnambule, après quelques efforts qui paraissaient le fatiguer, lut très-distinctement ces mots : Lavater,il est bien difficile de connaître les hommes. Ces derniers mots étaient imprimés en caractères très-fins.

M. Bourdois tire de sa poche une tabatière sur laquelle était un camée, encadré en or ; le somnambule ne put d'abord le voir distinctement : le cadre d'or l'éblouissait, disait-il ; quand on eut couvert le cadre avec les doigts, il dit voir l'emblème de la fidélité ; pressé de dire quel était cet emblème, il ajoute : je vois un chien, il est comme dressé devant un amour; c'était là , en effet, ce qui s'y trouvait représenté.

On lui montre une lettre fermée, il ne peut rien découvrir du contenu, il suit seulement la direction des lignes avec les doigts ; mais il lit fort

Lien l'adresse quoiqu'elle contienne un nom fort difficile, à M. de Rokenstroh.

Toutes ces expériences ayant fatigué le somnambule, on le laissa reposer un instant. Puis on lui proposa de jouer aux cartes, ce qu'il fit avec la plus grande dextérité. On essaya plusieurs fois de le tromper en jouant une carte autre que celle que l'on annonçait ; mais toujours il reconnut la fraude, ilen était de même pour les points que marquait son adversaire ; il releva plusieurs fois des erreurs que ce dernier faisait exprès pour exciter la sagacité du somnambule. Pendant tout ce temps on n'avait cessé d'examiner les yeux et de tenir auprès d'eux une lumière, et toujours on les vit exactement fermés.

Le procès-verbal constatant les faits dont je viens de vous donner connaissance a été dressé et signé par les personnes présentes sans aucune réclamation, tant l'évidence des faits paraissait grande.

Je ne veux pas, Messieurs, prolonger des récits de faits qui sont tous identiques; je vous ai cité assez de témoignages pour vous faire croire à leur possibilité ; car s'ils étaient rejetés , il faudrait mettre également en doute les phénomènes de la nature,les plus positifs, les plus avérés ; et notre esprit de doute a des bornes lorsque nous avons à juger des phénomènes physiques. Nous ne pourrons donc récuser les effets magnétiques, puisqu'ils ne sortent pas du domaine des choses positives.

Sans nous faire le défenseur du somnambulisme factice, nous en admettons l'existence et reconnaissons pour vraies toutes les merveilles que nous avons racontées dans plusieurs leçons de ce Cours. La découverte s'en est faite, elle ne se perdra pas : le temps la mûrira ; et semblable au ruisseau qui ne devient limpide qu'après avoir roulé dans les sables et y avoir déposé son limon, ainsi le mesmérisme, roulant à travers les contradictions de l'intérêt, ou à travers les critiques de la fausse science, le mesmérisme déposera tout ce que la jalousie lui a suscité d'ennemis, tout ce qu'elle lui a prêté de ridicules, tout ce qu'elle lui a supposé de dangers; et, épuré par le temps, il renaîtra dans tout l'éclat dont est susceptible une si belle découverte ; les passions qui l'ont poursuivi s'éteindront, etforcée à se taire, la postérité accueillera avec empressement tous les secours dont on se refuse à reconnaîtreaujourd'hui tous les avantages.

Messieurs, on a cherché la cause du somnambulisme naturel dans la dépravation d'une des quatre humeurs fondamentales. Dans l'état du cerveau, on a cru reconnaître la cause immédiate du somnambulisme dans la tension ou la rigidité des fibres de cet organe.

Sennert voulait en trouver la source dans l'action d'une vapeur narcotique qui assoupissait les sens.

Musitan s'appropria cette idée en l'étendant, et crut trouver l'explication naturelle du somnambulisme dans l'existence d'une vapeur semblable à celle qui agite les gens ivres. Mais on s'aperçoit combien toutes ces explications sont peu satisfaisantes.

Dans le 16e siècle on donnait le nom de malbaptisés aux somnambules, parce qu'on croyait que cette affection avait sa source dans l'oubli de quelque parole sacramentale, ou d'une autre cérémonie, lorsque le prêtre les baptisait.

Horstius ne fait pas difficulté d'admettre dans le somnambulisme plusieurs phénomènes hyper-physiques ou divins, parmi lesquels il compte un esprit plus pénétrant, une intelligence plus élevée dans les somnambules que dans les gens éveillés.

Mais tout cela ne dit pas quelle est la cause du somnambulisme.

Cet état paraît être une modification du sommeil. Il n'y a pas de somnambulisme sans sommeil.

L'on pourrait même ajouter qu'il n'y a pas de sommeil sans somnambulisme, et que tout homme est né somnambule.

Cette proposition, qui paraît un paradoxe, n'est pas moins incontestable, pourvu qu'on ne se presse pas de donner trop d'extension au terme de somnambule. Le sommeil parfait est un temps de repos pendant lequel les sensations sont réduites à un état de concentration qui ne laisse paraître an-dehors aucun autre signe de vie que la respiration et le mouvement du pouls.

Le sommeil imparfait est celui où cette concentration n'est pas complète, de manière qu'il laisse encore quelques accès au jeu extérieur des organes. Il est rare qu'on jouisse de la première espèce de sommeil.

Dans le sommeil le plus profond et le plus heureux,la personne endormie conserve une portion de veille.

Le commun des hommes pousse plus loin le somnambulisme, puisqu'il y a une infinité de personnes qui parlent en dormant , font des gesticulations , tiennent des discours d'une longue étendue, adressent la parole à ceux dont elles se croient environnées. (*)

Ces singularités sont si ordinaires, qu'il n'y a presque pas de famille où l'on n'en rencontre quelques exemples.

Hippocrate l'a reconnu, et s'exprime à ce sujet en termes formels.

Aristote en fait aussi mention d'une manière non moins précise : Sunt enim qui dormientes et ambulent, videntes comodo quo vigilant.

Galien, qui avait refusé de croire à l'existence du somnambulisme, en fut convaincu par sa propre expérience, lorsqu'il lui arriva de dormir en marchant pendant la nuit.

(*) Dans un de mes rêves, dit Voltaire, je soupais avec » M. Touron, qui faisait les paroles et la musique des vers qu'il » nous chantait. Je lui fis ces quatre vers dans mon songe :

» Mon cher Touron, que tu m'enchantes, » Far la douceur de tes accents ! » Que (es vers sont doux et coulants! » Tu les fais comme tu les chante.

» Dans un autre rêve, je récitais le premier chant de la Henriade tout autrement qu'il n'est ; je rêvais qu'on nous disait des » vers a souper : quelqu'un prétendait qu'il avait trop d'esprit; » je lui répondis que les vers étaient une fête qu'on donnait à » l'âme, et qu'il fallait des ornements dans les fêtes. »

Diogène Laërce rapporte dans la vie de Pirrhon, que le philosophe Théon se promenait en dormant, et qu'un esclave dePériclès se levait au milieu de son sommeil, et parcourait les toits tout endormi.

Lorsque le somnambulisme acquiert quelques nuances de plus, il produit des choses extraordinaires.

C'est alors que l'on voit le dormeur écrire, travailler , ouvrir les portes, etc.

Ce qui nous ramène à cette proposition, que tout dormeur est en somnambulisme commencé, que quiconque se livre au sommeil, est dans un état prochaindu somnambulisme, qui doit se développer d'une manière plus ou moins frappante, en raison de la constitution physique du dormeur, de la nature de la maladie, etc.

De là, il est aisé de concevoir qu'un malade déjà porté,ou par tempérament, ou par la nature de sa maladie, à un somnambulisme un peu prononcé, est susceptible de recevoir, avecle sommeil magnétique, une plus grande détermination vers le somnambulisme; que le somnambulisme soit salutaire ou non, toujours est-il vrai qu'il est une des dépendances du sommeil, qu'il s'introduit  ' avec lui, et qu'il doit par conséquent se développer plus ou moins, et c'est ce que nous voulions établir.

Je vous ai fait connaître toutes les nuances du sommeil magnétique et naturel.

Ce sont ces merveilles qu'il me reste à rendre concevables, mais il est des problèmes qu'on ne peut résoudre qu'à la faveur de suppositions; les conséquences que l'on en tiré, si elles sont justes, découvrent l'inconnu; et la solution est admise, si les suppositions dont elles dérivent peuvent être rigoureusement démontrées.

Voici les explications que des magnétiseras modernes ont hasardées pour rendre raison des effets du magnétisme animal. Ils sont loin de donner pour fondées, dans tous leurs points, ces explications; ils pensent même que plusieurs sont erronées ; mais les erreurs se rectifieront à mesure que l'on avancera dans la science , et que de nouveaux faits viendront l'éclairer.

Théorie des magnétiseurs actuels.

« Nous pensons, ont-ils dit, que tous ces phènomènes appartiennent au système nerveux, dont toutes les fonctions ne nous étaient point encore connues; que c'est à une modification, à une extension de ce système et de ses propriétés, qu'on doit attribuer les effets dont nous parlons»

» Dans l'état actuel de la science, tout porte » à considérer le cerveau comme un organe sécrétant, une substance particulière dont la » propriété principale est detransmettre ou de » recevoir le vouloir et le sentir. Cette substance, » quelle qu'elle soit, paraît circuler dans les » nerfs, dont quelques-uns sont consacrés an » mouvement ( à la volonté ); ceux-là partent de » l'encéphale ou de ses dépendances, et vont se rendre aux extrémités, les autres au sentiment ; » ceux-ci vont se rendre à l'encéphale : les premiers sont actifs et les seconds passifs.

On peut aujourd'hui regarder ces propositions comme démontrées.

» Lorsque nous voulons mouvoir un membre, » notre cerveau envoie au muscle destiné à exécuter ce mouvement une certaine quantité » d'agent nerveux qui détermine la contraction a musculaire ; cette transmission se fait au moyen » d'un nerf que l'anatomie démontre; et si nous » le coupons, ou si nous en faisons la ligature, » il nous devient impossible d'exécuter le mouvement, il y a paralysie. Le même phénomène » a lieu pour les nerfs du sentiment ; si on les détruit, la sensibilité est anéantie dans la » partie d'où ils procèdent. Ces faits, connus de » temps immémorial, sont incontestables et généralement adoptés. Us avaient fait penser que la » fonction de l'innervention était une véritable » circulation. H y avait des vaisseaux nerveux » afférents, c'étaient ceux de la volonté ; il y en » avait d'efférents, c'étaient ceux de la sensibilité.

» Les travaux récents de M. Bogros, semblent » prouver matériellement ce que le raisonnement » avait fait admettre.

» Mais de quelle nature est cet agent'? Les nouveaux travaux de Messieurs Prevost et Dumas » portent à croire que cet agent a la plus grande » analogie avec le fluide électrique. Ces physiologistes ont démontré que la contraction musculaire était le résultat d'une véritable commotion électrique.

» Le savant professeur Béclard assurait, » qu'ayant mis à nu, et coupé un nerf d'un assez » gros volume sur un animal vivant, il avait » fait souvent dévier le pôle de l'aiguille aimantée, en mettant en rapport ce nerf et cette » aiguille.

» Tout le monde sait que le galvanisme, substitué à l'influence nerveuse, fait contracter les muscles qu'on soumet à son action. L'on sait » comment Galvani et Volta virent et prouvèrent » l'existence d'un fluide particulier, que plus » tard on a reconnu pour être le même que l'électricité.

» L'on sait aussi que certains animaux ont la » singulière propriété de sécréter, au moyen » d'un appareil que la nature a disposé pour » cela, une grande quantité de fluide électrique , » avec lequel ils donnent de fortes commotions ; » commotions quelquefois si violentes, qu'elles » peuvent tuer, aune certaine distance, d'autres » poissons, ou même des hommes.

» Lagimnote électrique, le silurus electricus,. » le tetraodon, le torpedo unimaculata, marmorata, et beaucoup d'autres, possèdent cette » faculté.

» On est parvenu à apprécier la quantité et la » qualité de leur fluide électrique, au moyen » d'électroscopes et d'électromètres très-sensibles ; » on s'est assuré que ce fluide était sécrété par » le cerveau de ces animaux, puisqu'en enlevant celui-ci, ou les nerfs qui se rendent à » l'appareil, on anéantissait les effets électriques, » ce qui n'avait pas lieu en enlevant les organes » de la circulation.

» Ainsi, il est bien démontré que, dans quelques animaux, le cerveau sécrète du fluide » électrique; que la contraction musculaire peut avoir lieu par un excitant électrique, etc.; » considérations qui nous font fortement présumer que l'agent nerveux est du fluide électrique, ou un fluide ayant avec celui-ci une grande analogie.

» Nous passons sous silence les preuves que » l'on pourrait tirer de l'acupuncture et du perkinisme. »

Vous le voyez, Messieurs, toutes ces probabilités sont puissantes, et peuvent faire admettre la circulation d'un agent nerveux. (*)

(*) J'ai toujours été, je l'avoue, très-porté à penser que l'électricité modifiée par l'adtion vitale, est l'agent invisible qui parcourt sans cesse le système nerveux.....

Cabanis.

Les êtres organisés, et spécialement le corps de l'homme, composés par l'assemblage d'un grand nombre de substances hétérogènes en contact, nous présentent de véritables appareils électriques compliqués, dans lesquels le principe dont les nerfs sont les conducteurs, semble agir d'une manière analogue à celle de l'électricité.

Physiologie de Richerand, t. 2,p.263.

« Mais cet agent ne s'arrête pas aux muscles ou » à la peau, il s'élance encore au dehors avec une certaine force, et forme ainsi une véritable » atmosphère nerveuse, une sphère d'activité » absolument semblable à celle des corps électrisés. »

Cette opinion est celle des plus habiles physiologistes de nos jours, Reil, Autenrieth, et M. de Humboldt.

Dès lors ,tous les phénomènes du magnétisme nous semblent susceptibles d'une explication plausible.

L'atmosphère nerveuse, active, du magnétiseur, augmentée sans doute par l'impulsion que lui donne sa volonté, « se mêle, se met en rapport avec l'atmosphère nerveuse, passive de la » personne magnétisée , » et vient augmenter cette dernière, à tel point, que dans certains cas, il semble y avoir une véritable saturation du système nerveux, susceptible, lorsqu'il y a excès, de se mettre, par des décharges, en équilibre avec les corps ambiants ; et l'on ne pourrait expliquer, par une autre hypothèse, les secousses qu'éprouvent parfois les magnétisés.

Le système nerveux du magnétisé, ainsi influencé, et éprouvant des modifications en raison de sa sensibilité particulière, expliquerait toutes les perturbations que l'on observe, et rendrait parfaitement raison de la communication des désirs, de la volonté, des pensées même de celui qui magnétise.

« Ces désirs, cette volonté, étant des actions du » cerveau, celui-ci les transmet au moyen des » nerfs jusqu'à la périphérie du corps et au-delà. » Et pourquoi ce principe ne conserverait-il pas chez le magnétisé quelques-unes de ses propriétés? C'est ce que nous croyons en particulier.

« Dans cet aperçu, nous n'avons peut-être pas » dévoilé le vrai mécanisme de la production des » effets magnétiques. Cependant notre hypothèse, » qui ne s'éloigne pas beaucoup des faits physiologiques et physiques généralement adoptés, » expliquerait d'une manière assez satisfaisante la » majeure partie des innombrables effets que produit ce que l'on appelle le magnétisme animal, ». et peut-être sera-t-on conduit un jour, par cette » voie, à la révélation complète des mystères les » plus admirables de la vie animale. »

Cette explication est due en partie au docteur Rostan, médecin fort estimable ; mais, Messieurs, on peut dire dès à présent qu'elle n'est pas entièrement fondée : le magnétisme a une autre manière de procéder, un autre mode d'action; et d'ailleurs, le magnétisme n'est pas le somnambulisme. (*) Mais cependant, d'après tout ce qui précède on peut reconnaître que le magnétisme n'est pas un remède contre nature, qu'il est au contraire la nature elle-même, la nature augmentée et dirigée, la nature en plus.

(*) Dès qu'on admet dans les volontés créées une puissance d'agir sur les corps et de les remuer, il est impossible de lui donner des bornes, etcette puissance est indéfinie. En effet : « Dans le mesmérisme, l'instinct animal monte au plus haut » degré admissible dans ce monde. Le clairvoyant est donc un » pur animal, sans aucun mélange matériel ; ses opérations sont » celles d'un esprit. 11 est semblable a Dieu ; son regard pénètre » tous les secrets de la nature. Si son attention se fixe sur des » objets de ce monde, sur sa maladie, sa bien-aimée, ses amis, » ses parents, ses ennemis ; en esprit, il les voit agir, il pénètre » les causes et les suites de leurs actions; il devient médecin, » prophète, devin, etc. »

Ocken, Instructions sur la Philosophie de la nature.

Les facultés des somnambules sont des mystères qui ne pourront jamais être expliqués par des moyens humains. Indiquer des remèdes convenables pour opérer les effets qu'on désire, n'avoir dans son état de veille la connaissance d'aucun de ces remèdes, ni même des mots qui servent & les désigner; découvrir, al'instant qu'on y porte sa vue, ce qui se passe dans des pays éloignés, en détailler toutes les particularités, composer ou exécuter, dans ce sommeil des sens, des œuvres que l'on serait incapable de faire dans l'état organique de veille ordinaire ; ces exploits merveilleux de l'âme humaine, cette universalité de connaissances, cette grande puissance de vouloir, à quelle cause les attribuer, sinon acelui qui possède en lui-môme l'universalité de la puissance souveraine, et qui peut en départir un rayon à qui il lui plaît? »

Messieurs, je ne me suis pas appesanti dans ce Cours sur une multitude de phénomènes que présentent le magnétisme et le somnambulisme. Je n'ai voulu que vous donner le goût de l'étude de cette découverte, en vous signalant les phénomènes merveilleux qui s'offrent à l'observation de celui qui cherche à les connaître et à les faire naître, et vous foire juge des raisons de ceux qui se refusent à tout examen. Si j'ai gardé le silence sur. beaucoup de phénomènes magnétiques, connus peut-être par quelques-uns d'entre vous, ce n'est pas que j'ignore leur existence ; mais comme ces phénomènes semblent sortir du cercle que nous nous sommes tracé, nous avons jugé prudent de ne pas vous en entretenir, attendant pour cela que la croyance au magnétisme soit plus généralement répandue, et que plus d'hommes , dans le silence du cabinet, aient médité sur ses résultats.

Mais ma réserve ne doit pas vous empêcher d'examiner ; loin de là, elle doit vous faire entrevoir une mine féconde, qui, bien exploitée, enrichira la science, car tout n'est pas découvert en magnétisme, nous ne possédons pas même toutes les découvertes faites en des temps antérieurs.

Je vous ai signalé les écueils qui vous attendaient dans cette étude. Tous pourrez maintenant les éviter et faire de plus rapides progrès sans compromettre la santé des individus confiés à vos soins, et sans être alarmés, vous-mêmes, sur les suites de vos explorations.

Si vous ne magnétisez que pour guérir, rappelez-vous encore que le magnétisme peut devenir entre vos mains un instrument rival de la nature, portant dans l'économie animale un trouble qui favorise le retour des crises que la médecine ordinaire ne saurait produire ; Hippocrate lui-même en avait désespéré : ce grand homme a bien trouvé et décrit la marche des crises dans les maladies aiguës ; mais il s'est arrêté là. Dans ces maladies, dit-il, la nature seule guérit. Elle a de la force, elle fait elle-même la plus grande partie de l'ouvrage : il n'y a qu'à l'aider; mais dans les maladies chroniques, il ne vit que les bornes de son art. En effet, les retours périodiques y sont trop variés et trop incertains pour être saisis, trop longs et trop compliqués pour être étudiés, trop faibles pour être aperçus. Tandis que la nature ne fait que des efforts insuffisants pour retourner à la vie, elle ajoute chaque jour un autre pas à ceux qu'elle a déjà faits vers la mort. Toujours traînants, toujours languissants, nous nous voyons mourir sans savoir comment nous mourons. Aussi, dans ces cas malheureux et trop fréquents, Hippocrate défendait-il expressément les remèdes et ne prescrivait-il que régime, exercice, bains, frictions et patience. Depuis sa mort rien n'a été ajouté à la médecine. Par sa découverte, Mesmer aura porté le système des crises dans le champ des maladies chroniques, ce dont Hippocrate avait désespéré. Nous voyons en effet que l'agent magnétique, renforçant la nature, accélère et redouble ses efforts, et la force à reprendre une marche progressive vers un retour à la santé. Tous les effets magnétiques nous prouvent cette vérité et quelle plus grande preuve peut en exister pour nous que de Voir successivement disparaître les affections sympathiques déterminées par la maladie principale; de voir se localiser cette dernière, devenue bientôt après le foyer d'une action particulière qui tend sans cesse à sa destruction.

Ainsi, on peut le dire avec certitude, le magnétisme employé comme moyen de traitement est, en dernier résultat, l'action constante de la force qui conserve, sur la cause qui détruit. Faisons donc, Messieurs, que le magnétisme, qui est aujourd'hui le dernier moyen de guérison réservé à l'homme souffrant, en devienne le premier. Nous suivrons l'indication de la nature et nous aurons bien mérité de nos semblables.

FIN.

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