INTRODUCTION
Cet ouvrage est un traité d'éducation psychique.
C'est un livre de chevet qui a sa place marquée dans le
palais du riche à qui la fortune ne donne pas le bonheur, comme dans la
chaumière ou la mansarde de l'honnête ouvrier qui aspire à
une condition meilleure.
Quelques-uns à qui l'effort paraît impossible,
à qui la volonté fait plus ou moins défaut, vont le feuilleter
fiévreusement dans l'espoir d'y découvrir un secret, une formule cabalistique
ayant la puissance de faire jaillir à l'instant, comme le fait la
baguette magique d'une fée d'opéra-comique, la considération et l'amour qui
leur manquent, la fortune et le bonheur qui les fuient.
Que ceux-là ferment le livre et n'y cherchent
pas de secret, car il n'y en a pas pour eux, du moins dans leur condition
psychique actuelle. Mais qu'ils tâchent de
comprendre que la cause de leur malheur est en eux et non pas hors d'eux ;
qu'elle tient à leur caractère, à la mauvaise orientation
de leurs pensées, à leur incapacité, à leur indécision, à
leur manque de volonté. Qu'ils cherchent aussi à se persuader que, sauf
de très rares exceptions, nous occupons à peu près tous la
situation sociale que nous méritons ; que nous pouvons nous perfectionner,
devenir meilleurs ; et qu'avec de la persévérance, il est toujours possible,
d'apprendre, de se rendre utile, d'augmenter son énergie, et d'acquérir les
qualités qui font défaut pour mériter une situation meilleure.
S'ils parviennent à comprendre ces vérités
incontestables, et surtout s'ils sont capables de faire des efforts pour
chercher à sortir du bourbier dans lequel ils s'enfoncent, qu'ils
rouvrent le livre, le relisent, l'étudient et en apprennent le contenu avec la
plus grande attention ; ils y trouveront, comme tous ceux qui veulent augmenter
leurs aptitudes et en acquérir de nouvelles par une éducation bien comprise,
les moyens de développer en eux les Puissances, les Forces qui donnent
l'intuition, le courage, l'énergie, la confiance, la volonté ; — Qui font
naître la sympathie, l'intérêt, la considération ; — Qui assurent
l'amour, le pouvoir, la domination ; — Qui donnent et entretiennent la santé
physique et morale ; — Qui font tourner la roue de la fortune comme on le
désire ; — Qui permettent de prévoir les événements futurs et même de les
diriger dans une large mesure ; — Qui donnent la possibilité d'accomplir des
travaux qui tiennent du prodige ; — Etc., etc.
Ils y trouveront, enfin, le secret de la Bonté, de la
Vertu, de la Sagesse, le Secret de tous les Secrets, la Clef de la magie
antique.
Mais, soyons modestes ; n'exigeons
pas la possession de tous les pouvoirs, de tous les dons de la nature, car il
nous faudrait trop de temps pour les acquérir et l'existence actuelle serait
certainement beaucoup trop courte.
Que ceux qui n'occupent, encore, que les degrés
inférieurs de l'échelle sociale se contentent de vouloir améliorer leur
situation, de gagner la sympathie, la confiance, la considération de ceux qui les
entourent ; d'acquérir, non pas la fortune qui donne rarement te bonheur, mais
une honnête aisance ; ils peuvent avoir la certitude la plus absolue
qu'en suivant la voie qui leur est tracée plus loin, ils obtiendront des
résultats appréciables en quelques semaines, en quelques mois tout au plus, et
qu'alors ils seront assez encouragés pour marcher hardiment vers le but qu'ils
veulent atteindre.
Ils se transformeront peu à peu ; et,
transformant le milieu dans lequel ils se trouvent, ils ne tarderont pas
à recevoir la récompense qu'ils méritent. Ils verront, avec
satisfaction, que les bonnes choses qu'ils avaient longtemps désirées en vain
viennent d'elles-mêmes à eux quoiqu'ils ne fassent rien de spécial
pour les obtenir.
Ce sera le commencement de la réussite, l'arrivée de la
chance, ce sera peut-être le début de la fortune. Dans tous les cas,
c'est le bonheur qui s'annonce. D'insignifiant, de nul, d'antipathique
même et de répulsif que l'on était, on commence à devenir
quelqu'un, à être intéressant, sympathique et attractif.
En avançant résolument dans cette voie que l'on s'est
tracée, malgré les embûches que l'on ne manque pas de rencontrer, on a,
bientôt, conscience que cet état de sympathie attractive constitue un véritable
pouvoir adducteur, qu'il s'affermit, se développe, grandit, qu'il peut grandir
encore et même grandir toujours ; que l'on peut faire de mieux en mieux,
obtenir de plus en plus ; et qu'à un moment donné, dans un temps plus ou
moins éloigné, il n'y aura plus de but que l'on ne puisse atteindre, plus de
limites que l'on ne puisse franchir.
Quels sont les moyens à
employer pour développer cette sympathie attractive qui doit nous diriger vers
le but que nous voulons atteindre ? — Ces moyens sont assez nombreux. Ils
tiennent, d'abord, à certaines dispositions physiques et, morales
naturelles ou acquises, puis à son caractère que l'on peut
modifier, à l'orientation que l'on peut donner au courant de ses pensées
habituelles, et, surtout, à la persistance et à l'énergie de la
volonté que l'on peut toujours développer.
Quelques systèmes de philosophie enseignent que
notre caractère est immuable, que nous naissons avec une destinée que
nous devons subir sans grand espoir de la modifier. Il n'en est pas ainsi. Nous
pouvons non seulement modifier notre caractère, mais le changer à
peu près complètement ; nous sommes les maîtres presque absolus
de notre destinée.
L'homme possède, donc, son
libre-arbitre,
quoique certains philosophes affirment que sa Destinée est fixée d'avance.
La fatalité gouverne évidemment les règnes
minéral, végétal, animal, ainsi que l'homme inférieur, chez qui la volonté
n'est pas encore développée. Poussé par l'implacable destin, l'individu de
cette catégorie est fatalement entraîné dans la direction tracée par ses activités
antérieures ; il est le jouet de tous les événements. Mais,
dès que l'homme sait vouloir, il peut vaincre le Destin et acquérir son
libre-arbitre. Il exerce, alors, une action directe sur les événements
ordinaires de la vie : et ceux-ci, au lieu de l'accabler comme par le passé,
répondent à ses désirs. C'est ce qui a fait dire à Edgar Poe : « Dieu enchaînant étroitement la nature par le Destin,
donna la Liberté à la volonté humaine. »
En effet, pour me servir d'un
terme couramment employé dans le langage philosophique, on observe souvent la
pluralité des types chez le même individu. L'âge, les maladies, les
circonstances même, font disparaître des tendances naturelles et en font
naître de nouvelles. Par l'exemple, par le raisonnement, — on peut, certainement,
parvenir à faire comprendre à l'égoïste qu'en renonçant
à un petit avantage, il peut en réaliser un plus grand. D'une façon
analogue, on peut également faire admettre au méchant que pour causer une
souffrance à autrui, il s'en impose une plus grande, et que pour ne pas
souffrir lui-même, il doit renoncer, ne serait-ce qu'à titre
d'essai et pendant un temps plus ou moins limité, à faire souffrir les
autres.
S'il en est ainsi, le caractère n'est pas
immuable. Avec l'attention, la réflexion, la volonté qui oriente le courant des
pensées, et avec le temps qui modifie tout, on peut parvenir à le
changer à peu près complètement et à faire mentir
ce proverbe : « Chassez le naturel, il revient au galop. »
Le changement obtenu, ne serait-ce que pendant un
instant, se poursuit et s'affirme ; et on sait suffisamment qu'une tâche
difficile s'accomplit, d'abord, péniblement, qu'elle devient, peu à peu,
plus facile, que l'on finit par s'y habituer, et qu'on l'accomplit, ensuite,
avec facilité.
Dans tous les cas, que l'on se persuade bien que dans
le domaine psychique les changements et les transformations se font comme les
compositions et décompositions chimiques, c'est-à-dire que, selon la
formule de Lavoisier, « rien ne se fait de rien,
que rien ne se perd et que tout se transforme. »
Le plus petit effort, l'acte le
plus insignifiant laisse comme on le verra plus loin, une trace durable sous
une forme réelle ; et à une échéance plus ou moins éloignée, parfois au
bout de quelques jours seulement, nous recevons, comme par un choc en retour,
l'effet malfaisant de nos mauvaises pensées, de nos mauvaises actions, comme
nous recevons, aussi sûrement, la juste récompense de nos bonnes pensées
et de nos bonnes actions.
La Providence est en nous et non
pas hors de nous. La nature ne nous domine pas, mais elle obéit, au contraire,
à notre impulsion, à notre mouvement intérieur ; elle n'est que
le champ mis à notre disposition pour cultiver notre évolution, et nous
ne pouvons y récolter que ce que nous y avons semé ; en un mot, nous faisons
nous-mêmes notre propre destinée.
Il n'y a pas d'effet sans cause. Le hasard n'existe pas
et le plus grand nombre des événements ordinaires de la vie peuvent être
prévus, car ceux qui se réalisent en ce moment sont la conséquence de ceux qui
se sont accomplis dans le passé, comme ceux qui surviendront dans l'avenir
tiennent intimement à ceux qui se déroulent actuellement.
Lorsqu'ils sont longtemps répétés, les plus petits
effets peuvent engendrer de grandes causes ; et nous savons tous que la goutte
d'eau qui tombe, toujours, à la même place finit par creuser son
trou dans le roc le plus dur.
En principe, pour se faire une
heureuse destinée, il faut, d'abord, que chacun cherche la voie qui lui
convient le mieux, car nous avons tous des aptitudes spéciales ; qu'il
acquière toutes les connaissances voulues pour être, toujours,
à la hauteur de sa tâche, et qu'il oriente le courant de ses pensées
vers le but qu'il veut atteindre. Mais il ne suffit pas de dire du bout des
lèvres : je veux ; il faut que la volonté parte naturellement des replis
les plus profonds de la conscience et qu'elle prenne naissance dans un vif
désir du succès ; qu'elle soit calme, constante, uniforme ; que, sans
orgueil, mais avec une noble fierté, l'on ait, alors, la plus grande confiance
en sa valeur personnelle, en l'efficacité des moyens que l'on emploie, et dans
la certitude absolue de la réussite.
Tous les individus ne sont pas
aptes à vouloir avec énergie et persévérance. Le calme et le sang-froid au
moment du danger sont l'indice d'une volonté puissante. En général, les gens
nerveux et impressionnables, ceux qui s'irritent à la moindre
provocation, ont une volonté faible, surtout lorsqu'ils sont entêtés et
qu'ils ne reviennent pas sur la détermination qu'ils ont prise dans leur emportement.
Mais la volonté des uns et des autres est toujours susceptible d'éducation et
de développement ; et, cela, avec d'autant plus de facilité qu'ils sont moins
entêtés.
Ainsi, pour être heureux,
fort, bien portant, réussir en tout et assurer sa Destinée, il faut exercer
autour de soi une puissante influence personnelle, être sympathique et
attractif.
Cette influence est possédée à un degré plus ou moins élevé,
naturellement et même, souvent, sans en avoir conscience, par les meneurs
des foules, par les réformateurs religieux et autres, par les grands orateurs
et par tous ceux qui, du bas de l'échelle sociale, parviennent aux meilleures
situations. Si ceux-là connaissaient la nature et la cause de
l'influence qu'ils exercent instinctivement sur ceux qui les entourent, ils
pourraient très facilement la fortifier, la développer encore et la
diriger pour obtenir des résultats plus importants.
Cette même influence existe aussi chez un
très grand nombre d'individus qui ne savent, pas du tout s'en servir, car
leurs qualités plus ou moins grandes sont contre-balancées par certains
travers, souvent insignifiants, qui peuvent même passer pour des qualités
aux yeux du plus grand nombre ; enfin, elle est à l'état latent chez
tous les autres. Les premiers comme les derniers s'ils jouissent de la
plénitude de leurs facultés intellectuelles et morales, peuvent apprendre
à s'en servir, la développer et même la faire grandir toujours.
Cette influence, ce magnétisme personnel, naturel ou
acquis, ne tient pas, toujours, aux apparences extérieures: Une belle stature,
un port majestueux, une figure agréable, des manières distinguées
peuvent y contribuer et y contribuent dans une certaine mesure. Mais, qu'on le
sache bien, il n'y a pas de corps trop contrefait, pas de figure trop laide,
pas d'apparence trop chétive qui ne puisse lui donner asile.
Si de belles pensées sont exposées dans un beau
langage, leur tendance à s'imposer n'en est que plus grande ; mais, la
pureté et la noblesse des pensées jouent, ici, le rôle principal, et celui qui
parle avec peu d'éloquence parvient, toujours, à se faire écouter en
raison directe de l'élévation de ses pensées et de la conviction avec laquelle
il les exprime.
Nous rencontrons des individus fort laids, contrefaits,
qui nous sont très sympathiques et qui exercent évidemment sur nous une
influence susceptible de nous disposer en leur faveur, tandis que nous restons
froids, impassibles devant certains individus beaux et bien faits au point de
vue plastique, mais qui n'ont pas d'expression, qui n'impressionnent pas notre
être intérieur. Ces derniers sont comme de belles statues qui, manquant
de chaleur et de magnétisme, ne sont que des images
de la vie.
Napoléon était petit, sans grande instruction, dépourvu
du prestige que donnent la naissance et la fortune, mais il possédait
naturellement, à un degré que nul ne saurait dépasser ni même
atteindre par la pratique et par l'entraînement, le magnétisme personnel, cette
influence, cette force, sœur aînée du génie, qui permet de surmonter tous
les obstacles, qui assure le pouvoir, donne le moyen de bouleverser le monde,
de disposer des empires et d'accomplir des œuvres gigantesques.
« Qu'on se
rappelle simplement, dit un distingué personnaliste que je citerai plusieurs
fois, sa marche triomphale à travers la France, après l'évasion
de l'Ile d'Elbe, et l'irrésistible souveraineté qu'il exerça, alors, sur la
foule. Paysans nobles et bourgeois se précipitaient sur son passage, attirés
comme par une force mystérieuse ; et sous l'empire du charme, un million de
poitrines humaines poussaient le cri formidable, immortalisé par l'histoire : «
Vive l'Empereur ! »
Lorsqu'on le possède consciemment et qu'il est
développé, le magnétisme personnel constitue le plus précieux et le plus
durable de tous les biens. Il vaut mieux que la science, car il est la Science
des Sciences ; il est cent fois préférable à la fortune la mieux
établie, car celle-ci peut sombrer du jour au lendemain dans des spéculations
maladroites.
Avec lui, le plus modeste peut, toujours, avoir la
certitude de devenir meilleur, de préparer avantageusement son avenir et
l'avenir des siens, de vivre, toujours, dans une honnête aisance entouré
de la considération de tous, de jouir d'une bonne santé physique et morale
qu'il transmettra à sa descendance ; en somme, de posséder le bonheur
sous ses formes les plus variées. Celui qui a des ambitions, quelque grandes
qu'elles puissent être, qui convoite l'amour, qui veut la fortune ou tout
autre avantage peut avoir la même certitude de l'obtenir, surtout si cela
ne nuit en rien à la propriété d'autrui.
Avec le Magnétisme personnel tout
est complet, tout est certain, tout est durable ; sans lui, au contraire, rien
n'est stable, rien n'est parfait. Il est en tout et partout la cause directe du
succès, l'exposant et l'expression de la puissance.
Il est à la portée de tous. Cet ouvrage permet
à chacun de le développer davantage s'il le possède déjà,
de l'acquérir et le développer, ensuite s'il n'est chez lui qu'à l'état
latent. Mais les résultats ne seront pas identiques
pour tous, car il faut compter avec les dispositions naturelles de chacun.
Il est un certain nombre de
privilégiés qui comprendront tous les détails de l'enseignement, même
avant d'avoir complètement lu l'ouvrage. Ils se mettront à la
pratique et en retireront immédiatement les plus grands avantages. D'autres, et
ce sera le plus grand nombre, le reliront et comprendront certaines
affirmations qu'ils m'avaient pas saisies tout d'abord ; puis, en s'exerçant
ils obtiendront des résultats très satisfaisants, en l'espace de un
à deux mois. Enfin, un très petit nombre, ceux qui vivent dans
l'indolence et qui redoutent l'effort, le trouveront, d'abord, au-dessus de
leurs forces et de leurs moyens d'action. Ils le reliront trois ou quatre fois
pour bien s'en pénétrer, et à un moment donné, une lueur d'espérance
leur apparaîtra. Ils comprendront, alors, qu'en voulant, ils s'ont capables de
quelques efforts. Ils essaieront timidement ; avec l'espérance, le courage
viendra peu à peu, et ils parviendront à obtenir, au bout d'un
temps plus ou moins long, trois mois, six mois peut-être, des résultats
satisfaisants, et la partie sera gagnée.
Après un premier
succès, la tâche deviendra de plus en plus facile, et il ne restera
plus, aux uns comme aux autres, qu'à persévérer pour augmenter
considérablement les premiers résultats.
Pour terminer celte introduction déjà longue
mais certainement nécessaire, j'ajoute que l'ouvrage est divisé en deux parties
:
1° Une etude théorique qui expose les lois psychiques
ainsi que les manifestations de la pensée et de la volonté ;
3° Une étude pratique, démonstrative, expérimentale,
qui enseigne les moyens de se rendre maître de ses pensées, de développer et de
fortifier sa volonté, d'employer tous ses moyens d'action pour arriver au but
de ses désirs.
Prentice MULFORD
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