XII. — SUGGESTION ET AUTOSUGGESTION
Théorie. — Pratique. —
L'Autosuggestion pendant le sommeil. — Auto magnétisation. — L'Attitude, les
gestes et les mouvements. — Absorption de l'énergie. — Cherchez et vous
trouverez. — La Suggestion. — Suggestion mentale. — Pour éviter les suggestions
des autres.
Pour les gens du monde, la
Suggestion est, le principal et même l'unique moyen d'action employé par
l'hypnotiseur pour faire manger à ses sujets des pommes de terre crues
pour des fruits délicieux, leur faire commettre des crimes imaginaires et obtenir
d'eux tout ce qu'il désire pour l'ébahissement des badauds. Pour le plus grand
nombre des médecins et des hypnotiseurs, elle peut guérir, parfois
instantanément, presque toutes les maladies. Tout cela est vrai ; et si on
savait la pratiquer convenablement, on obtiendrait bien plus encore.
Si la suggestion joue le rôle
prépondérant dans les phénomènes de l'hypnotisme, elle est presque sans
importance dans ceux du Magnétisme physique ; et l'on peut même affirmer,
sans crainte d'être démenti par tout observateur impartial, que neuf fois
sur dix au moins, la suggestion des hypnotiseurs n'y exerce pas la plus petite
action.
Je n'entends, en aucune façon,
parler ici de l'hypnotisme, que je considère comme l'ombre du
magnétisme, le revers de la médaille, le mauvais côté sur lequel sont
naturellement groupés les inconvénients que les magnétiseurs ont su éviter, car
ces inconvénients peuvent devenir dangereux entre des mains impures ou,
seulement, inexpérimentées. Je me contenterai de dire que, contrairement à
ce que soutiennent presque tous les hypnotiseurs, on observe deux ordres de
phénomènes bien distincts : d'une part, le magnétistisme, dont le
principal agent est un fluide, ou un mouvement vibratoire se communiquant, par
ondulations, du magnétiseur au magnétisé ; d'autre part, l'hypnotisme, qui
n'admet d'autre moyen d'action que la suggestion mettant en jeu l'imagination
de l'hypnotisé.
Au figuré, la suggestion peut
être considérée comme l'ivraie de l'Evangile, contenant plus ou moins de
bon grain. L'ivraie seule, c'est le mal que peut faire l'hypnotiseur en
suggérant des mauvaises idées et en faisant des expériences, amusantes
peut-être pour le public, mais toujours fatigantes et, souvent, nuisibles
pour le sujet, car elles sont susceptibles de laisser chez lui des impressions
pénibles plus ou moins durables. Même tout en voulant être utile,
en suggérant constamment de bonnes idées, l'hypnotiseur peut nuire, car toute
suggestion a tendance à transformer le sujet en automate, qui perd, ainsi,
peu à peu, le pouvoir de se diriger convenablement lui-même. Il se
trouve, alors, dans un état analogue à celui de la pendule qui doit
toujours être remontée au bout d'un certain temps.
Le bon grain pouvant être
extrait de l'ivraie représente les avantages que la suggestion, bien comprise
et parfaitement appliquée dans un but louable et désintérésé, peut donner
à celui qui veut bien la recevoir.
Ne voulant rien perdre, je vais
tâcher de séparer le bon grain du mauvais, d'abandonner celui-ci et de donner
à l'autre toute l'importance qu'il mérite.
La suggestion est l'art de faire
réagir le moral sur le physique, d'imposer une idée et d'en assurer
l'exécution.
Les Pensées et les associations de
pensées que l'on appelle des Idées sont des forces extraordinairement
puissantes, car d'elles-mêmes, elles créent de toutes pièces ce
que l'on veut avec persévérance, et même ce que l'on ne voudrait pas.
C'est une arme à deux tranchants ; car toute idée acceptée par le
cerveau se transforme en acte à une échéance d'autant plus rapprochée
qu'elle revient plus souvent dans le champ de la conscience.
A l'époque de Charcot et de
l'Ecole hypnotique de Nancy, la suggestion se pratiquait exclusivement pendant
l'hypnose ; maintenant, les hypnotiseurs suggèrent presque aussi bien
à l'état de veille qu'à l'état de sommeil ; il ne leur faut pour
cela que le consentement du sujet. Ces praticiens ont parfaitement raison, car
il est évident que nous sommes tous plus où moins aptes à
recevoir les idées des autres et à imiter leurs exemples.
Toutes les idées qui nous sont
imposées verbalement dans un but quelconque, constituent la Suggestion. Mais,
les idées viennent encore très souvent par d'autres moyens, pour
s'imposer plus ou moins à notre attention. C'est ce qui a lieu souvent
dans la conversation ou lorsqu'on écoute un conférencier éloquent et
sympathique. Dans un cas comme dans l'autre, elle se produit toujours de celui
qui parle à celui qui écoute et d'autant mieux que celui-ci écoute plus
passivement, surtout lorsqu'il est moins évolué que le premier.
La suggestion peut encore se faire
mentalement, c'est-à-dire sans le secours de la parole et, méme, sans
aucun geste extérieur, rien qu'en formulant intérieurement sa pensée, son
désir, sa volonté, pour la transmettre à travers le milieu ambiant.
C'est la Suggestion mentale, ou vulgairement transmission de pensée. Certains
praticiens entraînés à cela font, avec des sujets également entraînés,
des expériences fort intéressantes.
La transmission de pensée se fait,
aussi, d'elle-même, sans qu'on le veuille, et, cela, beaucoup plus
souvent qu'on ne le pense. Ainsi, vous pensez à une personne et au bout
de quelques instants, on frappe à, votre porte ; vous ouvrez, et vous
êtes tout surpris de voir la personne à laquelle vous venez de
penser. Que s'est-il passé ? — La réponse est simple ; la pensée active de
votre visiteur était dirigée vers vous ; et à quelques centaines de
mètres de votre domicile, elle s'est communiquée à vous. Cette
transmission se fait même à des distances très éloignées.
En voici un exemple : — Un parent ou un ami éloigné pense à vous et vous
écrit ; à cet instant, précis, vous pensez à lui en vous disant :
« J'aurai, bientôt, de ses nouvelles. » En effet, le prochain courrier vous
apporte, presque toujours, une lettre de lui.
Voici un fait qui n'est pas aussi
commun, mais qui n'en est pas moins évident pour tous. Une mère a,
souvent, conscience de l'accident qui vient, à l'instant même,
d'arriver à son enfant éloigné de plusieurs milliers de
kilomètres. Le prochain courrier, qui n'arrivera parfois que dans trois
ou même quatre semaines, lui confirmera le bien fondé de cette action
télé psychique.
L'apparition simultanée d'une idée
nouvelle, soit d'ordre politique, littéraire, scientifique ou industriel, dans
plusieurs localités éloignées l'une de l'autre, n'est pas due au hasard, mais
à la pensée constante d'un individu travaillant sans relâche à
l'élaboration de son idée ou de son invention, idée qui rayonne autour de lui
et se communique à d'autres individus qui la travaillent et qui parviennent
à la réaliser. On donne une explication très rationnelle de ce
phénomène en disant : celle idée est dans l'air, ce qui veut dire
qu'étant née quelque part, elle s'est répandue partout. C'est, ainsi, que
s'expliquent les progrès extraordinairement rapides de l'aviation, dont
la possibilité était discutée partout depuis longtemps. Avant même qu'en
Amérique les frères Wright eussent terminé en secret leurs premiers
essais, des constructeurs d'aéroplanes surgirent partout, en France et ailleurs,
car les inventeurs, qui seuls étaient susceptibles de recevoir cette idée « qui
était dans l'air », se mirent à la tâche et donnèrent bientôt,
isolément, des modèles nouveaux.
La transmission de la pensée
suggestive se fait constamment d'un milieu dans un autre. La lecture d'un roman
ou d'un simple article de journal, la pluie ou le beau temps, le
thermomètre qui monte ou qui descend, le vent qui souffle, la mode, et
ce que l'on appelle les usages et les convenances modifient, à chaque
instant nos dispositions à faire ceci ou cela ; et, à notre insu,
c'est presque toujours sur les résolutions des autres que nous agissons. Nous
sommes les esclaves de nos passions et de nos besoins ; et ceux-ci sont,
toujours, inconstants, car ils sont sans cesse modifiés par une idée qui,
presque toujours, nous vient du dehors. Certaines circonstances nous font
désirer une chose à un moment donné, quand, quelques instants
après, d'autres circonstances imprévues substituent ce désir à un
autre.
On sait que la vue d'un objet qui
nous plaît éveille en nous l'idée de le posséder. Notre appétit s'ouvre
réellement en voyant nos semblables devant une table bien garnie. La vue d'une
jolie femme tente un homme jeune et fort, comme réciproquement, la vue d'un
beau garçon éveille la tentation chez la femme ; et la tentation est un acte
qui commence. Elle justifie parfaitement ce proverbe : l'occasion fait le
larron.
En somme, tout ce qui frappe nos
sens, agit sur nous à la façon d'une suggestion, souvent très
légère, c'est vrai, mais, si nous lui donnons de l'importance, elle peut
devenir énergique et nous faire beaucoup de bien ou beaucoup de mal; en un mot,
la suggestion est en tout et partout.
Tous les psychologues sont
d'accord pour affirmer que les idées et les impressions qui nous viennent du
dehors constituent la Suggestion ; et que, lorsque ces idées et impressions
viennent de nous, comme les résolutions que nous croyons prendre librement, il
y a autosuggestion. Ce mot est un mot hybride, qui vient du grec autos,
soi-même, et du latin suggerere, placer dessous, faire impression,
c'est-à-dire impression qu'on se fait à soi-même, ou, plus
exactement, impression qui naît dans notre esprit.
Mais, les limites qui séparent la
suggestion de l'autosuggestion sont tellement vagues, que l'on peut dire qu'elles
n'existent pas. Dans tous les cas, il importe peu que ce soit l'une ou l'autre
qui nous impressionne, car toute suggestion pour se réaliser, doit être
acceptée par le suggestionné ; et si, après l'avoir acceptée, celui-ci
la développe et la cultive, elle devient une véritable autosuggestion, qui est
beaucoup plus puissante que la simple suggestion.
Telle que la comprennent,
maintenant, les psychistes les plus avancés, l'Autosuggestion est La forme de
la Pensée la plus puissante que l'homme ait à sa disposition.
La Prière et la Foi, qui
nous sont des formes supérieures de la Pensée, produisent ce qu'on appelle
improprement le miracle, tandis que l'imagination, forme inférieure de la
même pensée, indépendamment des mille et un méfaits qu'elle nous cause,
nous rend malades beaucoup plus souvent qu'on ne le pense et peut même
nous tuer à l'instant précis que l'on aura fixé d'avance. J'en donne des
preuves évidentes dans le chapitre traitant de la Thérapeutique psychique.
C'est une arme à deux tranchants, qui produit en nous le bien et le mal
; et, comme le plus grand nombre d'entre nous sont encore fort loin
d'être affranchis de ce dernier, il en résulte que le mal s'obtient
beaucoup plus facilement que le bien. C'est pour cela que le miracle est fort
rare et que la mélancolie, les idées fixes et l'obsession sont
extraordinairement fréquentes.
théorie. — Le corps physique n'est que
l'instrument de l'astral et du mental. C'est la pioche entre les mains de deux
terrassiers qui se remplacent tour à tour pour faire un travail qui
n'exige pas constamment les mêmes aptitudes.
Comme j'ai tâché de le faire
comprendre dans la première partie de cet ouvrage, les suggestions sont
des actes exécutés par l'astral, la conscience inférieure ou subconscience,
l'être impulsif ou subjectif, qui dirige complètement les
fonctions physiques pendant le sommeil, et plus ou moins complètement
dans tout autre état voisin dans lequel le mental, la conscience ordinaire,
l'être objectif n'exerce pas une surveillance active.
Dans le sommeil hypnotique, le
mental, qui se repose complètement, qui est même absent, ne
gouverne pas l'organisme et la suggestion pénètre directement sous
l'influence de la volonté de l'hypnotiseur, non pas dans la conscience
ordinaire, mais dans l'inférieure, et s'exécute presque fatalement, à
l'insu même du mental qui l'a toujours ignoré. Dans tout autre état
voisin, où le mental, sans être absent, ne gouverne pas
complètement, comme dans la rêverie, par exemple, elle pénètre,
en quelque sorte, par surprise et a tendance plus ou moins grande à
être exécutée, car le mental, qui la connaît à peine, n'y oppose
qu'une faible résistance. A l'état de conscience pleine et entière, la
suggestion peut encore pénétrer dans la conscience inférieure, si celle-ci est
volontairement ouverte, comme lorsque le sujet demande à être
suggéré dans un but quelconque, ou lorsqu'il veut s'autosuggérer. Dans ce
dernier cas, la suggestion pratiquée à l'état de veille, pénètre
dans la conscience ordinaire ou conscience de veille et se transforme en
autosuggestion.
Considérées sous un autre aspect,
les fonctions du mental et de l'astral forment à peu près ce que
les philosophes appellent l'entendement, c'est-à-dire l'intelligence et
la sensation confondues ensemble. Séparées l'une de l'autre comme je le fais
ici, elles constituent la fonction active,qui appartient au mental et la
fonction passive qui est celle de l'astral.
Ces deux fonctions existent
toujours ensemble chez tous les individus, mais à des degrés très
différents. L'homme fort, résolu, volontaire, de prompte exécution est,
surtout, gouverné à l'état de veille par la fonction active qui domine
l'autre ; l'irrésolu, qui obéit instinctivement, d'une façon automatique, est,
au contraire, gouverné, le plus souvent, par la fonction passive.
Le premier est l'homme capable de
suggérer, d'imposer sa volonté et qui ne reçoit que peu de suggestions ; le
second est, toujours, plus disposé à recevoir les suggestions
qu'à les donner, à obéir qu'à commander. Mais, l'un et
l'autre reçoivent ou repoussent constamment, selon leur degré d'activité, des
incitations suggestives plus ou moins nombreuses qui leur viennent du dehors.
Quelle que soit, d'ailleurs, la
théorie de la suggestion — du moment qu'elle désigne maintenant tous les actes
de la subconscience, — il est évident qu'elle s'exerce à des degrés
très divers chez le plus grand nombre d'entre nous, à l'étal de
veille, surtout lorsque nous y pensons le moins. S'il en est ainsi, nous devons
la connaître, autant pour profiter des avantages qu'elle peut nous donner que
pour éviter les dangers auxquels elle nous expose.
Dans l’Education rationnelle de la
volonté, P.-E. Lévy attache une si grande importance à l'autosuggestion
qu'il la considère comme l'unique base de son système
d'éducation. Mais il nous la représente comme un fait grossier, matériel, qu'il
ne raisonne pas au point de vue spiritualisle. Il impose brutalement une idée.
Il y a quelque chose d'aride, d'incomplet qui vous laisse froid ; on sent qu'il
ne s'adresse au présent que pour améliorer un avenir trop limité. Malgré cela,
sa méthode est claire et certainement susceptible de donner de bons résultats.
Les auteurs américains que j'ai cités en première ligne, plus
particulièrement Mulford, Atkinson et Turnbull sont beaucoup plus
pratiques, et leur méthode doit être préférée comme étant susceptible de
donner de meilleurs résultats, surtout en ce qui concerne le développement de
l'individualité. Avec ces derniers, on a conscience que l'on avance d'un pas
assuré, d'étape en étape, vers les profondeurs infinies de l'avenir, et que
rien de ce que l'on fait en ce moment ne sera jamais perdu. Néanmoins, en
indiquant sommairement les conditions qui me paraissent les plus avantageuses
pour obtenir le plus facilement, de l'autosuggestion, ce qu'elle est
susceptible donner, je vais m'inspirer des uns et des autres.
Je viens de dire que la suggestion
pratiquée dans le sommeil hypnotique pénètre dans la subconscience et
que la suggestion donnée à l'état de veille s'incorpore dans la
conscience ordinaire, plus élevée. L'Autosuggestion simple appartient,
également, à la conscience ordinaire, mais, lorsqu'elle est pratiquée
souvent, avec un grand désir et une volonté douce mais inébranlable, elle
s'élève jusqu'à la surconscience et devient, alors, une faculté
supérieure de l'Ame, qui est capable de produire tous les résultats cherchés.
Elevée à ce degré,
l'Autosuggestion peut, très facilement, vaincre la crainte et la
timidité, faire naître l'Assurance et la Confiance en soi, augmenter
l'Endurance, développer la Mémoire, donner le Courage et l'Energie. Elle
constitue le plus puissant moyen à employer pour la construction du
Caractère et l'Evolution de l'Etre psychique ; pour abandonner ses
mauvaises habitudes et en prendre de bonnes, pour vaincre les passions telles
que l'habitude de fumer, l'ivrognerie, la morphinomanie et autres manies du
même genre ; pour la guérison de la mélancolie, des idées fixes, de
l'obsession, de l'envoûtement, et de toutes les maladies les plus
incurables. L'envoûtement, l'obsession, les idées fixes et la mélancolie
disparaîtront facilement si le malade peut admettre que c'est sa pensée,
concentrée sans cesse sur ses malaises, qui a déterminé, peu à peu, la
terrible maladie devant laquelle la médecine officielle reste toujours impuissante.
Et ces divers résultats sont obtenus d'autant plus facilement que l'on
possède plus complètement la Maîtrise de soi.
Pour les malaises
passagers et les simples douleurs, quelques autosuggestions suffisent, mais,
lorsqu'il s'agit de maladies incurables et des divers cas que je viens
d'énumérer, il est indispensable qu'elles soient presque constantes le jour et
la nuit, ou, tout au moins, qu'elles soient répétées très souvent et
qu'elles occupent la plus large place dans la conscience. Dans tous les cas, on
peut d'avance avoir la certitude la plus absolue que l'on obtiendra toujours
des résultats proportionnels à la somme de Pensée, de Désir, de
Confiance et de Bonne volonté que l'on aura dépensée pour cela.
pratique
directe. —
Pour pratiquer l'Autosuggestion avec certitude d'un succès rapide, il
faut procéder avec beaucoup de méthode. Il est, d'abord, nécessaire de détendre
ses nerfs et de relâcher ses muscles ; puis, de concentrer sa pensée sur les
avantages que donnent les qualités que l'on veut acquérir et bien se figurer
que l'on possède, déjà, ces qualités.
II ne faut pas
transformer la tâche que l'on entreprend en un combat, qui rend, toujours,
l'insuccès pénible ; ne pas contracter les muscles, ni serrer les dents,
ni prendre un air menaçant ; mais se raisonner avec calme, le plus souvent
mentalement ou à demi-voix, et ne mettre la volonté en jeu que pour
maintenir l'attention. Etant placé bien à son aise, soit assis, soit
couché, une sorte de relâchement est nécessaire pour que la fonction passive puisse
prendre le gouvernement de l'organisme. En se reportant à la théorie qui
précède, on comprend que la volonté pourrait être, ici, plus
nuisible qu'utile, car elle est une fonction du mental, et celui-ci n'a rien
à faire avec les suggestions qui sont reçues et exécutées par l'astral.
Il faut, ensuite,
remplacer dans son esprit les mots par les choses qu'ils représentent ;
autrement dit, matérialiser sa pensée, en lui donnant un corps avec des formes
aussi bien définies que possible ; mettre ce corps en mouvement, le voir sous
tous les aspects qu'il peut, présenter ; et, pour me servir d'une expression
empruntée au langage philosophique, rendre concret ce corps créé par la pensée.
II faut faire comme, l'artiste qui entre dans la peau du personnage qu'il représente,
car, ici, l'illusion joue un rôle créateur très important.
Je le répète
: il est indispensable de se représenter comme si l'on était, déjà, ce
que l'on veut devenir ; se figurer que l'on possède réellement les
habitudes que l'on veut prendre, les avantages que l'on veut obtenir. Donner
une forme à chacun d'eux en « pensant concret ».
Ainsi, pour faire cesser la
crainte et obtenir l'Assurance et la Confiance en soi, il ne faut pas dire : je
ne veux plus avoir de crainte ; je veux avoir en moi toute confiance et réussir
ce que je vais entreprendre ; car la volonté, seule, n'est susceptible de
parvenir à cela que chez les individus d'une très grande énergie,
c'est-à-dire lorsque la fonction active est devenue assez puissante pour
dominer complètement la fonction passive. Il vaut mieux, pour tous ceux
qui n'ont pas une volonté assez énergique, que celle-ci s'efface, pour laisser,
pendant le temps qu'on se livre à l'autosuggestion, la direction de
l'organisme à la fonction passive. Pour cela, employer l'affirmation
pure et se dire, en se donnant cette conviction : je suis sans CRAINTE ; MA
TIMIDITE A DISPARU ; J'AI TOUTE confiance
EN MOI, CAR J'AI TOUT CE QU'IL FAUT POUR RÉUSSIR.
Même si nous n'y ajoutions
pas, tout d'abord, la moindre foi, dit Lévy, ces formules répétées
machinalement finiront par amener peu à peu à leur suite l'idée
qu'elles représentent. Puis nous nous attacherons à préciser cette idée,
à lui donner des contours mieux accusés, une forme plus concrète,
plus vivante. Nous nous représenterons, nous nous verrons tels que nous
voudrons être, vigoureux, robustes, pleins de santé. Plus l'idée gagnera
en précision et em relief, plus elle deviendra image, plus sa réalisation sera
sûre. Ce que l'on concevra bien se réalisera aisément.
Souvent, on pourra
faire une observation curieuse. Il s'agissait, par exemple, de
phénomènes douloureux à dissiper. L'autosuggestion vient
d'être faite, la douleur persiste aussi vive ; il semble que le résultat
soit nul. Quelque temps après, le hasard y ramène la pensée ; on
s'aperçoit avec surprise que la douleur a disparu. On serait tenté de conclure
à une simple coïncidence, si l'on ne se rappelait fort bien
maintenant l'intensité de la douleur primitive, si, raison plus convaincante
encore, le fait ne se reproduisait très fréquemment. Que s'est-il, donc,
passé ? L'idée déposée dans l'esprit, une fois que l'attention consciente s'en
est détournée, n'y a pas moins continué son chemin à notre insu ; peu
à peu, elle a entamé le symptôme que l'on voulait combattre et,
finalement, en a complètement triomphé. En réalité, la douleur avait été
si bien dissipée que le souvenir même s'en était effacé : preuve
nouvelle, s'il en était besoin, que l'idée d'une douleur et cette douleur
elle-même se confondent. Supposons, maintenant, que la pensée n'eut pas
été ramenée fortuitement sur la suggestion qu'on s'était faite. On serait
demeuré dans sa conviction première, que l'autosuggestion avait échoué.
Il y a là, on le comprend, un écueil, et ces faits doivent être
bien connus et soigneusement, contrôlés à l'occasion par qui veut bien
se pénétrer de la réalité et de l'efficacité de l'autosuggestion (Education,
rationnelle de la volonté, p. 68).
Commentant et voulant, ensuite,
appliquer les idées de Pavot sur la méditation, le même auteur ajoute :
Le recueillement,
c'est bien là l'état de l'esprit qui s'isole de toutes choses, de toutes
sensations, de toutes pensées, pour se replier tout entier sur un coin de
lui-même, qui, dams le calme, sans tension, sans efforts, sans faligue,
vivifie et féconde quelques idées préalablement choisies, par l'attention
purement, contemplative qu'il leur accorde.
...On saura colorer, échauffer
l'idée en se représentant le plaisir qu'on éprouve à se dominer
soi-même, l'usage que l’on pourra faire de la santé recouvrée, etc...
Nous nous peindrons énergiquement les joies calmes du travail, l'avantage qu'il
y a de régler harmonieusement sa vie, la satisfaction que ressentiront de nos
succès les personnes qui s'intéressent à nous, etc. Tous ces
sentiments attirés progressivement de la pénombre à la pleine
lumière de l'attention que nous projetons sur eux, atténueront peu
à peu l'éclat des sentiments opposés, puis finiront par amener leur
complet effacement (id. p. 70).
L'autosuggestion
n'est, pas aussi facile à pratiquer qu'on se le figure tout d'abord.
Pleins d'une noble ardeur, il en est beaucoup qui vont se mettre hardiment
à la tâche, la pratiquer convenablement pendant quelques jours et n'en
retirer que fort peu d'avantages. Mais, au bout de huit à dix jours,
sans savoir pourquoi ni comment, on se surprend à ne plus rien faire,
car on n'y pense pas.
Or, continue Lévy,
c'est là le point essentiel : il faut que le sujet s'habitue à
penser a l'autosuggestion. Cette tâche lui sera facilitée par l'observation rigoureuse
de la règle suivante : dès le premier jour, pratiquer très
régulièrement deux autosuggestions, l'une le matin, au réveil ;
l'autre, le soir, au moment de s'endormir. Ces deux suggestions serviront,
en quelque sorte, de point de repère ; elles ne seront négligées sous
aucun prétexte, qu'on en sente ou non la nécessité, quelque hâte que l'on ait
de se lever ou de se livrer au sommeil. Et ce sera, déjà, un excellent
exercice de volonté que cette violence régulièrement faite à notre
paresse naturelle, que cet arrêt imposé par nous à toutes autres
pensées, à toutes autres préoccupations. On procédera, tout d'abord,
à une sorte d’examen de conscience physique et moral, critique de la
journée passée, préparation de la journée à venir, récapitulation des modifications
que l'on désire apporter à sa manière d'être présente, des
qualités que l'on veut implanter en soi, maintenir ou développer. Puis
viendra l'autosuggestion proprement dite..., en s'appliquant très
soigneusement à se conformer aux règles indiquées. Elle sera,
autant que possible, continuée jusqu'à ce que les paroles prononcées le
soient en toute sincérité, autrement dit, aient complètement éveillé les
idées correspondantes...
L'habitude de se
suggestionner s'affermit peu à peu. Les échecs même deviennent
un enseignement, pour le sujet ; car ils lui procurent la nécessité de bien
imprégner son esprit des procédés divers, qui lui permettent de varier ou de
renforcer l'action de l'autosuggestion. Il devient, ainsi, plus expert dans
l'art de se suggestionner. Il se laisse moins aisément subjuguer par ses
sensations, par ses passions : il s'apprend même, parfois,
à s'en faire des auxiliaires... (p. 136).
Les procédés recommandés par
Atkinson peuvent avantageusement compléter ceux de l'auteur précédent :
Etendez-vous, dit-il, sur une
chaise-longue ou sur un fauteuil de façon à avoir le plus d'aise et de
confort possible ; et, dans cette position, détendez-vous, allongez-vous,
amollissez-vous comme si vous vouliez vous affranchir, vous dégager de votre
enveloppe charnelle. Cela fait, respirez avec autant de lenteur et de
profondeur que possible et ne cessez ces exercices de respiration que lorsque
vous aurez acquis cet état d'esprit qui est le parfait repos et l'absolue
sérénité.
Concentrez votre attention sur
vous-même et maintenez-vous dans cet état de recueillement aussi
longtemps que possible.
Fixez, alors, votre pensée sur ces
deux mots : sans crainte et cherchez à vous en représenter la forme
graphique. Puis passez de l'image à la signification et représentez-vous
ce que peuvent être les caractéristiques d'une personne qui est dans cet
état.
Imaginez-vous en possession de la
qualité que vous voulez acquérir et, agissant sous l'empire de cette qualité,
considérez-vous, dans cet état, en relation avec les autres hommes et cherchez
à analyser ces relations ; en un mot, soyez dans l'état d'esprit d'un
homme qui après avoir fait un rêve, le vit, et se donne, pour
agrandir sa vie et ennoblir sa nature, de hautes impressions, de fortes sensations
et de grands sentiments. Il arrivera, presque toujours, que votre état général
se transformera et, que votre personnalité se dégagera du milieu gris et terne
qui l'enveloppe. Vous serez, alors, tel que vous aurez rêvé d'être
et votre moi aura pris la forme précise et la structure morale que vous aurez
ambitionnées pour lui.
Répétez ces exercices aussi
souvent que possible. Chacun d'eux est comme la goutte d'eau qui tombe sur la
pierre. Leur action, lente mais sûre, finit toujours par avoir raison des
vieilles habitudes et des tendances rebelles. Pratiquez ces exercices de
préférence le soir, au moment où vous arrivez dans notre chambre, ou la
nuit à vos heures d'insomnie, ou de demi-réveil, lorsque votre esprit,
replié pour ainsi dire sur lui-même et à demi assoupi, est prêt
à recevoir toutes les empreintes et toutes les suggestions. Ne craignez
point que ces exercices vous fatiguent ; ils vous faciliteront, au contraire,
le repos. En calmant vos nerfs, en apaisant votre esprit, ils vous conduiront
doucement au sommeil...
...II faut bien se garder de
croire que ces deux mots, sans crainte, soient les seuls dont on puisse faire
usage. En réalité le mot qui convient est celui qui exprime la qualité que l'on
veut acquérir. Etes-vous, par exemple, indolent, apathique et voulez-vous
changer votre nature ? Vous avez recours au mot energie, et, pendant toute la
durée de vos expériences, vos pensées devront se fixer sur ce mot et en
imaginer, pour s'y mieux tenir comme une forme graphique. Nous dirons autant
des mots bonté, courage, désintéressement, qui pourront, selon les défauts de
votre caractère, intervenir dans l'expérience. Dans tous ces exercices,
ne vous laissez point dominer par les défauts qui vous accablent, et ne pensez
qu'aux qualités que vous voulez acquérir. Quand une chambre est pleine de
ténèbres, vous n'en saisissez pas l'obscurité comme un bloc et vous ne
la jetez pas dehors. Vous appelez, simplement, la lumière qui pousse
l'ombre devant elle, l'expulse de partout et répand la clarté. Il en est de même
pour l'esprit...
Est-il besoin de dire que ce
résultat ne sera pas instantané et qu'il exigera, au contraire, de lents
efforts et des expériences variées. Vous ne devrez pas, toutefois, vous
effrayer et c'est de toute votre énergie, de toute votre intelligence, de toute
votre volonté que vous travaillerez à votre émancipation (La
Force-pensée).
Pour acquérir
l'Assurance et la Confiance en soi, Turnbull recommande un procédé qui donne les
meilleurs résultats. Vous avez, par exemple, une affaire délicate à
traiter demain avec un personnage que vous connaissez pour être
intraitable, ou que vous supposez être tel sans le connaître, vous pouvez
faciliter cette entrevue et la rendre plus avantageuse pour vous qu'elle ne
semble l'être. Pour cela, placé dans un endroit quelconque où l'on
ne risque pas d'être dérangé, dans sa chambre, par exemple, on s'exerce
sur un personnage imaginaire que l'on crée tel qu'on le connaît, ou tel qu'on
le suppose être ; on le place debout, ou, mieux encore, assis dans
l'attitude qu'il doit naturellement prendre à cette entrevue, et l'on
procède de la façon suivante :
D'abord, dit-il, respirez
lentement et longuement pendant cinq minutes ; aspirez l'air de toute la force
de vos poumons, puis exhalez l'haleine d'une manière lente et uniforme.
Dressez-vous, alors, vivement sur vos pieds et parlez à cette personne
imaginaire que vous supposez se trouver vis-à-vis de, vous. Vous pouvez
à l'occasion, vous servir de votre propre image, dans un miroir, ou vous
fier uniquement à votre imagination, quant à la personne
supposée. Parlez d'une manière naturelle sur n'importe quel sujet, tout
extraordinaire qu'il soit, mais préparez à l'avance chaque phrase de
votre conversation. Adressez-vous, alors, à la personne imaginaire d'une
voix forte, pleine et assurée. Accentuez bien chaque syllabe et
arrêtez-vous y un peu. Il faut que vos paroles résonnent et sortent
directement, de votre poitrine. Parcourez la chambre à grands pas,
menacez du doigt, gesticulez d'une manière tragique comme l'indique la
fig. 27) ; enfin, dites et faites tout ce que vous auriez désiré dire et faire
si la personne à qui vous parlez était réellement là...
FIG. 27. — Pour acquérir de
l’assurance.
(Quinze à vingt minutes de
cet exercice lorsque vous vous sentez abattu ou que vous voulez augmenter votre
confiance en vous-même, produisent un effet surprenant. Il est, souvent
utile de se servir, ainsi, du pouvoir de l'autosuggestion au moyen de la parole
parlée en toute sa force, pour obtenir un résultat matériel et défini. Demandez
ce dont vous avez besoin ; demandez-le comme quelque chose qui vous appartient
et qui vous est dû (Cours de magnétisme personnel).
Ce procédé, que l'on peut varier
plus ou moins selon les circonstances, est susceptible de rendre de grands
services dans beaucoup de cas. A la veille d'un examen, par exemple, en se
figurant être devant l'examinateur posant les questions du programme que
l'on connaît le moins, on cherche à répondre à celles-ci dans
tous leurs détails avec la hardiesse et l'assurance que l'on aurait si on les
connaissait parfaitement. Il en est de même pour le conférencier ou
l'orateur qui doit parler sur un sujet déterminé. En se représentant devant soi
l'auditoire tout entier, plus ou moins disposé à vous entendre, on parle
à haute et intelligible voix, en faisant tous les gestes que l'on doit
faire pour donner plus de force à son discours. Tout en se figurant
être devant ses auditeurs, on peut se placer devant, une glace et
observer ses gestes pour corriger ceux qui sembleraient défectueux. Ce procédé,
qui peut paraître banal pour ceux qui ne savent pas quelles conditions doivent
remplir ceux qui parlent en public, est constamment employé par certains grands
orateurs politiques qu'il est inutile de nommer ici.
Pour devenir
meilleur,
il faut résister à ses passions et ne pas se laisser gouverner par ses
instincts. Si, par exemple, on se met facilement en colère, on trouble
plus ou moins les fonctions physiques et morales, et au bout d'un temps plus ou
moins long tout semble rentrer à peu près dans l'ordre ; mais il
reste une disposition plus grande à l'irritabilité, et l'on se mettra
plus facilement en colère à la moindre contrariété. Si, au
contraire, on résiste à ce mouvement de colère, l'organisme n'est
pas troublé ; dans tous les cas, il l'est considérablement moins, et si l'on ne
cède jamais on finit peu à peu par perdre l'irritabilité et la
colère n'a plus de prise. C'est l'application d'une loi morale que l'on
peut formuler ainsi :
« Chaque fois que l'on cède
à une passion, la résistance devient plus difficile lorsqu'une occasion
analogue se produit ; chaque effort qui tend, au contraire, à la
réprimer rend la victoire suivante plus facile. » Lévy, qui a fort bien compris
cette vérité, s'exprime, ainsi, à son sujet :
Si chacune de nos pensées, de nos
sensations, chacun de nos sentiments, de nos mouvements, de nos actes, n'était
qu'un fait passager, simple réponse de l'organisme à une sollicitation,
extérieure, disparaissant avec la cause même qui l'a provoqué, la vie ne
serait qu'un perpétuel recommencement ; ou, pour mieux dire, à peine
serait-elle possible, l'homme restant aussi ignorant de toutes choses, aussi
inhabile à se conduire qu'il l'est au jour de sa naissance. En réalité,
il n'est pas un seul phénomène produit ou subi par nous qui meure tout
entier. Tout fait physique ou psychique, si léger qu'il soit, nous marque de
son empreinte, dépose en nous un résidu. Ce résidu, c'est une tendance à
vivre, désormais, sous une excitation moindre. C'est, en somme, déjà
constitué par ce premier fait, un commencement d'habitude. — Le même fait
vient-il à se répéter ? La tendance à la reviviscence s'accentue.
Mais en même temps, et par une conséquence toute naturelle, nécessitant,
pour se produire, un effort, une somme d'attention moindre, le phénomène
perd de son relief, il s'obscurcit progressivement dans la conscience. Enfin,
au degré le plus élevé, l'habitude s'affermit, s'enracine si profondément dans
l'individu que, désormais, elle fait, à son insu, corps avec
lui-même. Non seulement l'acte tend à se produire spontanément,
mais tandis que jusque-là il fallait un effort pour le faire, maintenant
il faudrait un effort pour en empêcher la production. L'habitude est
devenue un besoin qui veut absolument se satisfaire, une sorte d'instinct, inconscient
et impérieux, à la façon des instincts déposés en nous, par l'hérédité.
C'est grâce à l'habitude
que les phénomènes de conscience, une fois produits, demeurent
emmagasinés en nous, ignorés de nous-mêmes, mais prêts à
revivre sous l'influence d'une circonstance favorable, d'un plus puissant
effort d'attention, pour fournir à l'intelligence les matériaux qu'elle
disposera, combinera, élaborera à sa guise (Education rationnelle de la
volonté, p. 119).
Voulant donner des exemples, le
même autour ajoute :
Le sujet qui résiste aux
premières nausées produites par le tabac, crée en lui l'habitude de
fumer. Dès lors, aux sensations pénibles d'abord éprouvées, il
substitue, peu à peu, une jouissance, effet, non du tabac, mais de la
satisfaction donnée à l'habitude créée. Plus tard, l'habitude devient
besoin de fumer, sorte de tic d'où tout plaisir est banni ; tout au
moins ce plaisir, inconscient dans la possession, ne devient-il conscient, et
cruellement conscient, que s'il y a privation. De même le plaisir du
buveur s'émousse de plus en plus ; mais le besoin de boire s'accentue sans
cesse : le goût pour la boisson est devenu dipsomanie. Le morphinomane
passe par les mêmes phases ; il s'est, d'abord piqué par nécessité, puis
par plaisir. Bientôt, le plaisir n'existe même plus, mais le besoin de
morphine n'en devient que plus vif et plus exigeant.
De même, enfui, il est une
foule de manifestations morbides qui s'expliquent tout naturellement à
la lumière de cette théorie... soit des palpitations, soit, une syncope,
une crampe d'estomac, une crise de diarrhée, Un tic, un tremblement, un spasme,
etc... Ces phénomènes sont survenus sous l'influence d'une secousse
morale ou physique violente. Ultérieurement, il suffira, pour les faire
réapparaître, d'émotions progressivement moindres. Enfin la production en
deviendra tellement aisée qu'ils sembleront naître d'eux-mêmes, la cause
provocatrice devenant si faible qu'elle n'est même plus perçue.
Il est évident pour tous que
l'habitude crée chez nous une sorte d'automatisme qui nous pousse à
accomplir, presque inconsciemment, des actes que notre raison réprouve, tels
que l'ivrognerie, l'abus du tabac, la morphinomanie et toutes les manies qui
sont susceptibles de s'enraciner en nous. C'est l'avis d'Annie Besant, qui
s'exprime ainsi à ce sujet :
L'habitude, dit-elle, crée un accroissement du pouvoir émotionnel
qu'elle représente par la somme de matière qu'elle attire. Il y a
quelque chose d'analogue au travail que fait un muscle sous l'action, répétée
de l'exercice ; il prend des éléments nouveaux et provoque l'élimination des
parties inutiles (L'Homme et ses corps, p. 18).
L'homme est plus
souvent gouverné par ses passions, ses instincts et ses habitudes que par sa
raison, c'est-à-dire par l'être subjectif qui est en lui. On peut, même, affirmer
que le plus grand nombre des gens qui sont doués d'une certaine énergie, qui
croient agir dans leur propre intérêt, volontairement, y sont plus ou
moins soumis. Celle remarque n'a pas échappé à Papus, qui l'expose avec
beaucoup d'à-propos.
Supposons
qu'après des atermoiements successifs, dit-il, après des crises
de paresse et de pessimisme, vous soyez, enfin, attelé à votre travail
de réalisation intellectuelle. Vous vous figurez que l'effort, de volonté que
vous avez dépensé pour en arriver là est le seul nécessaire et que,
maintenant, tout va marcher sans encombre. Mais à peine êtes-vous
sur le point d'écrire ou de dessiner qu'un immense besoin de sortir et de
marcher s'empare de votre être. Il vous semble que, dehors, l'idée
actuellement quelque peu obscure va se préciser. Ce besoin, bientôt, prend une
telle importance que, si vous n'êtes pas habitué, vous vous levez, vous
laissez là votre travail et vous sortez. Vous avez succombé au
piège tendu par l'être impulsif, que le repos physique accablait,
et bien entendu votre idée n'est pas plus claire qu'auparavant, loin de
là. Dans ce cas, c'est le centre instinctif, dont la marche est le moyen
d'action caractéristique, qui a trompé votre vigilance.
Supposons,
cependant, que vous connaissiez, déjà, ce piège et qu'au lieu de
céder, votre volonté se tende, au contraire, vers l'effort à accomplir.
Alors, l'être impulsif se manifeste d'une autre façon.
Le besoin d'action
disparaît comme par enchantement et une soif assez vive se fait sentir progressivement,
à mesure que le travail cérébral s'accentue. Encore un piège du
centre instinctif ; car chaque gorgée de liquide absorbée entraîne une partie
de la force nerveuse en ce moment dans le cerveau et reculera d'un peu la
réalisation projetée.
Mais vous dominez
encore cette sensation et la plume écrit, enfin, sur le papier. C'est, alors,
que les autres centres impulsifs entrent en action. Les besoins physiques se
taisent mais les émotions sentimentales viennent les remplacer. Les images des
luttes passées, des affections d'autrefois, des ambitions de demain se
dessinent peu à peu, et une force en apparence invincible vous pousse
à laisser tomber la plume, à vous renverser en arrière et
à laisser aller votre esprit à la douceur mélancolique ou
à l'ardeur impétueuse des rêveries qui s'ébauchent. Combien de
jeunes réalisateurs peu aguerris se laissent prendre à la tentation, et
combien de fois l’œuvre reste-t-elle encore en suspens ! Et nous ne
parlons pas de l'action combinée du besoin d'activité et des sentiments qui
s'ajoute, souvent, à ces deux impulsions isolées. Ce sont là des
réactions que chaque auteur croit personnelles et qui ne sont dominées que par
une habitude instinctive de régularité très grande dans le travail ou
par l'âge (Traité élémentaire de Magie pratique p. 171).
La cause de cette action impulsive
qui fait valoir les dispositions de notre paresse native étant connue, on peut,
généralement, en éviter les effets par la volonté seule. Mais, si la volonté
était insuffisante, on en viendrait facilement à bout en employant les
procédés d'autosuggestion que je viens de décrire. Après s'être
recueilli dans l'isolement et avoir médité pendant cinq à six minutes
sur les avantages qu'il y a pour nous de travailler sérieusement, on fixerait
sa pensée sur ce seul mot : travail ; et, en se donnant une tâche, on prendrait
l'engagement formel de l'accomplir. On ferait tout son possible pour se donner
des habitudes d'ordre et de travail qui, petit à petit, feraient oublier
les habitudes de flânerie et d'irrégularité. On s'aiderait beaucoup à
cela en se persuadant que si nos croyances, notre manière d'être,
nos habitudes se cramponnent à nous, c'est parce que nous nous
cramponnons à elles. Pensons, donc, toujours a prendre de bonnes
habitudes, et celles-ci ne tarderont pas à se « cramponner » a nous pour
ne plus nous quitter.
Les plus grands
ennuis de l'homme sont certainement l'ennui, la paresse, la tristesse, le
découragement. Ces sentiments paralysent l'initiative de l'individu,
abaissent et même dégradent sa personnalité, ruinent son énergie et lui
font toujours craindre des maux qui n'auront peut-être pas le temps de
lui arriver. L'abîme appelle l'abîme, dit un vieux proverbe qui nous vient des
latins. Rien n'est plus vrai, et l'on pourrait même ajouter que,
lorsqu'on est pénétré de ces sentiments, on tombe presque toujours de Charybde
en Scylla, c'est-à-dire d'un mal dans un mal plus grand. La raison de ce
phénomène est expliquée dans la théorie exposée dans la première
partie du volume ; on peut la résumer en quelques mots. — Les pensées d'ennui,
de tristesse, de découragement que nous émettons rayonnent autour de nous,
attirent des pensées analogues qui viennent entretenir les nôtres et augmenter
encore leur énergie. Ainsi, en se tourmentant, en se chagrinant, en redoutant,
une perte, en pensant, sans cesse que ceci ou cela ne doit pas réussir comme on
le voudrait, on crée des forces destructives, qui agissent tout autour de nous,
diminuent notre énergie, nous fatiguent et nous rebutent, des affaires, nous
font désespérer de tout, nous affaiblissent. et nous disposent à la
maladie, nous rendent désagréables et antipathiques aux autres, éloignent les
quelques amis sérieux qui peuvent, nous rester et achèvent, de nous
précipiter dans le malheur. Une bonne action, une bonne pensée se font sentir
autour de nous comme une série d'ondulations agréables qui attirent à
nous les bonnes choses de la vie sans que nous fassions quoi que ce soit pour
cela, assurent notre santé, nous rendent plus sympathiques aux autres et
contribuent très largement à notre bonheur.
L'homme triste et
découragé est, presque toujours paresseux ; le travail le fatigue, la vie le
dégoûte, la réalité le blesse. S'il manque de tout et qu'on lui vienne en aide, cela
lui paraît mauvais ou insuffisant ; et poursuivant, sans cesse, des
chimères, il ne désire que ce qu'il ne peut pas obtenir.
On ne parvient a se créer une
situation indépendante que par le travail ; et, pour cela, il faut être
courageux, plein d'espoir, satisfait du sort que l'on a momentanément, tout en
ayant la certitude que l'on parviendra, bientôt, à l'améliorer.
En cherchant
à s'élever dans les régions sereines de la Pensée, on doit faire tout
son possible pour comprendre que l'univers est en voie d'Evolution, que nous
faisons partie de cet univers ; que nous parviendrons tous à la
Perfection et au Bonheur parfait qui en sont les conséquences ; et qu'en
employant les divers moyens que j'indique, on peut y parvenir beaucoup plus
rapidement que les autres.
On évoquera, donc, des idées
d'Activité, de Gaîté, d'Espérance. On se figurera accomplir quelque acte de
Courage, être parvenu à la situation que l'on désire et posséder
tout le Bonheur dont on voudrait jouir. Ces idées feront naître des états d'âme
correspondants qui, en s'affermissant, prendront, peu à peu, la place de
leurs antagonistes.
Je l'ai déjà dit, cela est
d'une importance capitale ; la volonté de se débarrasser d'une passion est un
moyen héroïque qui ne réussit que bien rarement lorsqu'on l'oppose
directement à la passion même, car celle-ci devient, presque
toujours, plus active ; et si on la comprime, ainsi, trop violemment, des
réactions dangereuses sont à craindre. Il ne faut pas attaquer de front,
mais tourner la difficulté, canaliser la force de cette passion en lui opposant
un antagoniste ; et celui qui me paraît le plus puissant, est de mettre
à la place d'une passion, la vertu opposée.
Ainsi, la prodigalité peut
être facilement transformée en idées d'Ordre et d'Economie, surtout si
l'on raisonne sur les avantages que cette transformation peut donner. L'amour
sexuel exagéré, qui est, toujours, égoïste, peut être transformé en
Amour de l'humanité.
C'est l'avis des théosophes et des
psychologues qui ont compris l'importance des principes servant de base au
magnétisme personnel.
Dans son ouvrage traitant, des
Lois de la Destinée, page 58, le docteur Pascal s'exprime, ainsi, à ce
sujet :
De même que dans le monde
physique, les fluides électriques positifs et négatifs se neutralisent, de
même que l'on peut détruire une force subtile quelconque, lumière,
chaleur, électricité, en superposant les monts et les vaux de ses ondes. Ainsi,
dans le monde moral, en opposant à un vice la vertu qui lui est opposée,
on détruit le vice. L'amour et la haine
sont, les monts et les vaux de la force abstraite inconsciente, qui est
leur racine commune. Or, la source de toutes les erreurs, de tous les vices,
c'est l'égoïsme... et le foyer de toutes les forces du bien brûle
dans le cœur, par l'Amour qui purifie toutes choses, unit tout, fait tout
vivre.
Un désir isolé ne meurt, pas, dit
Frantz Hartmann, mais il devient une passion, et les passions comprimées
deviennent de plus en plus violentes. L'énergie accumulée ne peut être
annihilée, elle doit être transférée en d'autres modes de mouvement, elle
ne peut, pas rester inactive. Il est parfaitement inutile d'essayer de résister
à une passion qu'on ne peut contrôler. Si son énergie accumulée m'est
pas canalisée et, dirigée sur un autre courant, elle croîtra et deviendra plus
forte que la raison. Pour la contrôler, il faut la diriger vers un but plus
élevé. De même, l'amour pour quelque chose de vil peut être
transformé en un Amour pour quelque chose de plus élevé, et le vice peut
devenir vertu par le changement de son but. La
passion est aveugle, elle va où on la mène, et elle a besoin de
la raison pour la guider...
Les anciens ont dit
que la « Nature a horreur du vide ». Nous ne pouvons détruire ou annihiler
une passion. Si une passion est chassée, elle est remplacée par une
autre. Nous ne devons pas, en conséquence, nous efforcer de détruire ce qui
est inférieur mais il faut l'obliger à céder la place à ce qui
est supérieur ; la vertu au lieu du vice et le savoir au lieu de la
superstition
(La Magie blanche et noire, p. 169).
L'AUTOSUGGESTION PENDANT LE
SOMMEIL. — Puisque j'ai parlé d'un effet que l'on peut facilement obtenir
pendant le sommeil, il est bon de dire, ici, ce que l'autosuggestion est
susceptible de donner dans cet état.
Si on a bien compris que l'astral,
l'être subjectif, l'inconscient gouverne complètement l'organisme
pendant le sommeil, on comprendra facilement que si on s'impose une tâche
à accomplir dans cet état, si on fixe sérieusement une idée dans
l'inconscient, cette idée devra forcément s'élaborer. En effet, l'idée se développe,
s'élabore avec une logique bien supérieure à celle que l'on aurait pu
avoir à l'état de veille, car l'attention n'est pas dérangée par
d'autres idées et l'exécution a lieu avec une remarquable précision. Des
exemples pris dans les circonstances ordinaires de la vie peuvent, d'ailleurs,
convaincre suffisamment ceux qui ne s'arrêtent pas aux théories.
— Un proverbe nous dit que « la nuit porte conseil ». Ce proverbe est
parfaitement justifié, car on a maintes fois reconnu que, si l'on est
embarrassé, le soir, pour prendre une décision importante, on la prendra bien
plus sûrement après le repos de la nuit, car les divers éléments
de la question apparaîtront plus nets, plus clairs, plus précis. Beaucoup
d'écoliers savent qu'il leur suffit, très souvent, le soir, avant de
s'endormir, de lire une ou deux fois leurs leçons pour les savoir le lendemain.
— Les mêmes écoliers ou étudiants et même beaucoup d'entre nous
savent également qu'en se couchant avant d'avoir pu résoudre un problème
quelconque auquel on avait travaillé en vain pendant plusieurs heures, la
solution se trouve, souvent, résolue le lendemain dans l'esprit, et qu'il ne
reste plus qu'à la transcrire.
Un certain nombre d'individus
n'ont qu'a se dire en se couchant qu'ils se réveilleront à telle heure
dans la nuit, pour qu'ils se réveillent à l'heure indiquée, quoiqu'ils
n'en aient pas l'habitude.
Très souvent, en se
couchant avec une douleur, une névralgie, par exemple, on pense fortement
à dormir ; on s'endort, bientôt, et se réveillant quelques heures
après, on est tout étonné de constater que la douleur a disparu, car la
concentration de la pensée sur l'idée de dormir a donné lieu à une
dérivation dont la conséquence a été soit de faire oublier la douleur, soit de
la transformer en un phénomène d'un autre ordre.
Ces faits étant admis, on peut,
avec la plus grande facilité, s'imposer au lit, sans perte de temps, telle idée
que l'on veut, en se conformant aux règles de l'autosuggestion
ordinaire. Ainsi, par exemple, si l'on veut se débarrasser d'une mauvaise
habitude, on fixe sa pensée sur la qualité que l'on veut développer à la
place. On ferme les yeux et l'on médite pendant cinq à six minutes sur
les avantages qui doivent en être la conséquence, avantages que l'on se
figure, déjà, posséder ; et, comme pour faire la conquête des
autres, on se dit mentalement : je ferai ceci, j'achèverai cela, en
s'efforçant de préciser les conditions dans lesquelles on devra le faire. On se
répète cela plusieurs fois dans les mêmes conditions ; puis,
abandonnant l'autosuggestion on cherche à s'isoler pour ne penser
à rien, ce qui conduit rapidement, au sommeil. Pendant la plus grande
partie de la nuit, l'inconscient, qui est devenu pour quelques heures
l'être actif, ne s'occupera que de l'élaboration de l'idée ainsi que des
moyens les plus simples et les plus pratiques pour en assurer l'exécution. Le
lendemain, on se rend toujours compte que, si le résultat n'est pas complet, il
est, tout au moins, obtenu en partie ; on a une facilité bien plus grande pour
faire ce que l'on a voulu, et un sentiment intérieur ne manque jamais de vous
indiquer qu'avec de la persévérance, le résultat final ne saurait être
éloigné.
Il arrive, parfois, que
l'autosuggestion n'est acceptée qu'avec une certaine difficulté, et que l'on a
conscience de l'instant où elle est acceptée. Je connais un jeune homme,
excellent dormeur, comme le plus grand nombre des jeunes gens, qui, au besoin,
se réveille à l'heure qu'il veut. Pour cela, avant, de s'endormir, il
s'autosuggestionne de la façon suivante. En fermant les yeux, il se dit : «
Demain, je me réveillerai lorsque telle heure sonnera. » L'ordre que
l'être conscient donne à l'inconscient n'est pas accepté de suite
par celui-ci, et une image extérieure se manifeste sous la forme d'un « non »
bien déterminé. Il se répète à nouveau : « Je me réveillerai
lorsque telle heure sonnera », et le même « non » se montre encore. Il
continue l'autosuggestion jusqu'à six et même huit fois, et un «
oui » apparaît. Abandonnant alors toute idée de réveil, il s'endort
paisiblement, et ne manque jamais de se réveiller à l'instant où
la pendule sonne.
Il y a, encore, beaucoup de moyens
indirects susceptibles de renforcer l'autosuggestion, et, même, de la
provoquer ; je vais en indiquer quelques-uns.
automagnétisation. — Pour faire disparaître une
douleur intense ou favoriser la guérison d'une maladie chronique rebelle, tout
en pratiquant convenablement l'autosuggestion selon les règles qui
précèdent, il faut faire des applications avec l'une ou l'autre main et
même avec les deux en même temps, sur le siège du mal, si
cela est possible. De cette façon, étant au lit, on traite facilement la
surdité et les bourdonnement, le mal de gorge, les affections des poumons, du
cœur, de l'estomac, de l'intestin, des reins et de toute partie que les
mains peuvent atteindre. Contre les maux de tête et l'insomnie, se
coucher sur le côté droit de préférence, de telle façon que, sans éprouver de
gêne, on puisse appliquer la main gauche au front, les doigts en l'air.
Contre la mélancolie, les idées noires, et tous les cas où il y a de la
tristesse, on se couche sur le côté gauche et l'on applique la main gauche sur
la région temporale gauche. En même temps, il est bon de faire revivre
dans sa mémoire, aussi souvent que possible, une scène de gaîté telle
qu'on l'a vécue jadis. A plusieurs reprises dans la journée, on appliquera un
doigt de la main gauche sur le centre de la gaîté des phrénologues, sur le côté
gauche du crâne (et non sur le côté droit, ce qui augmenterait encore la
tristesse), au points c, fig. 28. Ceux qui voudraient connaître la raison de ce
phénomène de mécanique cérébrale, eu trouveront la description
complète dans l'étude des Centres nerveux contenue dans mes Théories et
procédés du Magnétisme.
Fig. 28. — Centres nerveux
Centres moteurs et sensitifs
1. Centre du bras. — 2. Centre de
la jambe. — 3. Centre de la rate. — 4. Centre cérébro-spinal. — 5. Centre de
l'ouïe. — 6. Centre moteur de la tête, de la langue, et du cou.
Langage articulé. — 7. Cœur. — 8. Seins. — 9. Poumons. — 10. Foie. — 11.
Impression, croyance — 12. Nez. — 13. Estomac. — 14. Centre génital. — 15.
Coordination des mouvements, tact. — 16. Larynx. — 17. Centre des dents. — 18.
Centre, sensitif de l'oreille. — 19. Reins, organes génito-urinaires. — 20. Vue
et mouvement des yeux. — 21. Intestin. — 22. Respiration.
Facultés morales et
intellectuelles
A. Douceur à gauche,
colère à droite. — B. Formes de la mémoire. — B' à gauche,
souvenirs gais ; envie de rire et de se moquer, prendre tout en riant :
satisfaction. — B, à droite, souvenirs tristes ; rend sombre et
rêveur ; mélancolie, mécontentement. — C. Gaîté à gauche.
Tristesse à droite. — D. Attention. — E. Volonté.
En vertu d'un principe que
certains psychologues contemporains appellent la polarisation psychique, on
peut, presque toujours, remplacer une idée triste, par une idée gaie en
appliquant simplement un doigt de la main gauche au milieu du front, au centre
de la volonté : E (fig. 28). Cette application fait toujours cesser, en quelques
instants, l'émotion pénible laissée par un cauchemar, émotion dont on ne
pourrait souvent pas se débarrasser sans se lever, pour se réveiller
complètement. Il suffit, à moitié endormi, de changer de côté,
c'est-à-dire de se tourner sur le côté droit si l'on est sur le gauche,
et réciproquement, et d'appliquer le doigt, de préférence l'index, au point
indiqué, en s'efforçant de s'isoler pour ne penser à rien. L'émotion
pénible s'atténue rapidement et, au bout d'un temps qui ne dépasse guère
une à deux minutes chez les moins sensitifs, on se surprend à
penser à des choses gaies qui font naître des impressions agréables, et
l'on s'endort, à nouveau, pour ne plus se réveiller qu'avec de bonnes
dispositions.
L'ATTITUDE,
LES gestes ET LES mouvements correspondent, toujours, à une émotion
déterminée, et, réciproquement, une attitude, des gestes et des mouvements
spéciaux tendent à faire naître, l'émotion correspondante.
On sait que les mélancoliques et
tous ceux qui sont tristes, fatigués, mécontents d'eux-mêmes, marchent la
tête baissée, tandis que ceux qui sont gais et satisfaits marchent le
front haut. Donc, que tous ceux qui sont affectés par la tristesse et le
découragement cherchent à marcher le front haut en s'efforçant de se
redresser, ils ne tarderont pas à constater une tendance à la
gaîté et au courage. Lorsqu'ils sont assis, qu'ils se redressent sur leur
siège et qu'ils élèvent légèrement les yeux vers le ciel,
non pas dans l'attitude suppliante de celui qui prie pour obtenir une faveur du
ciel, mais en ne pensant à rien, si ce n'est à exécuter ces
mouvements le plus correctement possible, car c'est un phénomène
automatique. Au bout de quelques instants, la satisfaction se fait sentir et la
gaîté apparaît.
Le rire est le signe le plus
apparent d'une gaîté exubérante. Que celui qui est hanté par la tristesse
s'efforce de rire, sans en avoir envie. Il n'y parviendra pas de suite, mais,
après quelques efforts, il imitera le rire, puis il rira assez
facilement ; et ce rire, quoique factice, aura tendance à orienter la
manière d'être vers la gaîté.
L'Attitude, les Gestes et les
Mouvements modifient assez rapidement la manière d'être et de
penser de tous les individus, sans même en excepter les animaux
supérieurs. Dans un jeu quelconque, où l'on fait semblant de se fâcher
on ne tarde pas à se fâcher sérieusement. Ainsi, en jouant à la
bataille avec un chien, vous lui frappez légèrement le museau avec la
main, il vous répond en faisant semblant de vous mordre, sans en avoir
l'intention ; mais cela ne dure pas longtemps, car l'émotion réelle se
produisant, il vous montre sérieusement les dents, et vous mordrait, bientôt,
si vous ne cessiez pas.
absorption de l'energie. — Un autre moyen d'autosuggestion
recommandé par Turnbull, est ce qu'il appelle l'absorption de l'Energie.
Nous avons un violent désir que
notre raison réprouve et dont nous voulons nous défaire, par exemple celui
d'abandonner notre travail pour aller nous amuser. A cet effet, on concentre
fortement sa pensée sur ce désir que l'on cherche à considérer comme
l'expression d'une force brutale qui s'empare de nous. Cette idée de force
étant bien représentée, en observant les trois temps de la respiration
profonde, on se l'approprie, on s'en empare, on l’absorbe, pour la placer sous
le contrôle de la raison.
L'opération se décompose en trois
temps, qui doivent durer chacun de huit à dix secondes.
— Premier temps.
Aspirer lentement l'air : et, considérant ce désir comme une force brutale qui
maîtrise la raison, on se dit avec conviction, mentalement ou à
demi-voix : J'absorbe consciemment celle force et me l'approprie.
— Deuxième
temps. Retenir son haleine et se dire, avec la même conviction : Je
fixe celte force qui m'appartient désormais.
— Troisième
temps. En expirant lentement, on se dit : Je me suis rendu maître de cette
force, et je l'utiliserai selon mes besoins.
Ce procédé me paraît très
puissant pour combattre les passions et les défauts fortement enracinés qui
auraient résisté aux autres formes de l'autosuggestion, tels que ceux de se
ronger les ongles, se masturber, fumer, s'enivrer, se morphiner, etc., etc...
On doit répéter cette opération
plusieurs fois après quelques instants de repos, en ayant toujours soin
de bien fixer dans sa pensée la triple idée d'absorption, de fixation et
d'utilisation de la force du désir.
Lorsqu'on aura fait cet exercice
pendant huit à dix jours, on pourra supprimer les paroles prononcées
à chaque temps de la
respiration, en fixant seulement son attention sur l'utilisation de la force fixée.
Le sillon étant bien tracé, l'impression de la fixation se fera
d'elle-même.
L'absorption de
l'énergie peut être employée dans de nombreuses circonstances pour puiser
des forces ou des qualités dans le milieu ambiant.
La nature est comme
une table très abondamment servie qui est, toujours, à notre
disposition. Elle est garnie de tout ; il y en a pour tous les goûts,
pour tous les besoins, et on peut dire qu'il n'y a qu'à allonger la main
pour prendre ce que l'on veut.
Les conditions
à réunir pour y parvenir se déduisent de l'ensemble des moyens indiqués
dans cet ouvrage. L'influence personnelle doit, déjà, être en voie
de développement pour donner des résultats importants. Le plus grand nombre de
ceux qui commenceraient cette étude par l'Autosuggestion n'obtiendraient que
des résultats incomplets, car ils seraient insuffisamment préparés. Il est
indispensable que la Maîtrise soit en grande partie acquise. Alors, en
l'espace de quelques mois, rien qu'en consacrant dix à douze minutes,
matin et soir, à des exercices bien compris et intelligemment exécutés,
on y parviendra facilement. Après avoir concentré sa pensée sur la
qualité ou sur l'avantage que l'on veut obtenir, il faut se persuader que tous
les éléments de cette qualité ou de cet avantage sont là, à notre
disposition, que nous les méritons, qu'ils nous sont dus, qu'ils ne tarderont
pas à nous arriver d'eux-mêmes, et que nous avons le droit de les
prendre immédiatement.
Ces idées étant bien présentes
à l'esprit, comme pour utiliser la force d'un désir, on les absorbe, on
les fixe en soi et on prend l'engagement d'en profiter, en exécutant
méthodiquement les trois temps de la respiration profonde.
Au début, on doit employer des
formules, on peut même écrire celles-ci sur un carré de papier que l'on
place devant ses yeux pour le regarder avec calme et persistance ; mais lorsque
la Volonté est suffisamment disciplinée, on peut se dispenser des formules, car
elles ne servent qu'à fixer son attention sur le sujet.
On peut demander, d'abord,
l'accroissement de qualités que l'on ne possède pas à un degré
assez élevé, telles que : Exactitude, Patience, Douceur, Bonté, Jugement ; plus
tard, on demandera la Force morale et, même, la Force physique si elles
ne sont pas suffisantes, la Guérison d'une maladie, la Réussite de telle ou
telle affaire que l'on entreprend ; enfin, obtenant à peu près ce
que l'on veut, on pourra demander des choses plus importantes, plus élevées,
plus précises. Il n'y a, certainement, pas de limites au développement de ce
pouvoir qui peut s'étendre à l'Infini, surtout lorsque les bases de
l'Influence personnelle sont bien établies et que celle-ci est méthodiquement
cultivée.
cherchez
et vous trouverez, demandez et vous recevrez, dit l'Evangile (Math., c. 7, v.
7) ; c'est-à-dire, demandez avec Intelligence, Energie et Persévérance,
et cela vous fera découvrir les moyens de trouver ce que vous cherchez.
Dieu laissa-t-il jamais ses
enfants au besoin ? Aux petits des oiseaux, il donne la pâture, Et sa bonté
s'étend sur toute la nature. Tous les jours je l'invoque et, d'un soin
paternel, Il me nourrit des dons offerts sur son autel.
II ne faut pas prendre à la
lettre cette affirmation que Racine met dans la bouche de Joas (Athalie), car
Dieu ne donne qu'à ceux qui méritent et qui savent prendre. Il y a
beaucoup de gens, moins heureux que Joas, des gens qui ne sont ni bons ni
méchants, car ils sont incapables de faire du bien ou du mal, et qui attendent
toujours que la roue de la fortune tourne en leur faveur sans que celle-ci
vienne, car ils ne font rien pour cela. Aide-toi,
dit le proverbe, le ciel l'aidera. Il faut chercher pour trouver, demander pour
recevoir ; mais il faut, surtout, savoir diriger ses recherches et employer
pour la demande le langage de la Nature.
La demande est la
base de la prière. Dans leurs évocations, les spirites prient leurs bons
esprits et en obtiennent des fluides qui sont utilisés pour la production de
phénomènes aussi étranges que réels. Les dévots tirent de la
prière des consolations, des espérances et certains avantages ; ils
obtiendraient bien autre chose encore s'ils connaissaient le principe qu'ils
mettent en action, et, surtout, s'ils ne demandaient pas des faveurs injustes,
des grâces qu'ils ne méritent pas et des avantages qui seraient nuisibles
à leur prochain. Il ne faut pas que le marchand de parapluies demande
des averses constantes lorsque la terre est suffisamment mouillée, ni que le
charbonnier prie pour avoir du froid lorsqu'il fait encore chaud. Demandez ce
qui est juste, ce qui vous est utile sans être nuisible à vos
semblables, et vous recevrez en raison directe de la sincérité de votre demande
et de la somme de Volonté que vous aurez dépensée pour l'obtenir. La faculté de puiser dans le milieu ambiant des forces
quelles qu'elles soient constitue, à elle seule, le principal facteur du
magnétisme personnel. On doit, donc, l'étudier avec attention et faire tout son
possible pour la développer.
la suggestion. — Arrivons, maintenant, à
la suggestion proprement dite, c'est-à-dire
à l'art d'influencer les autres, de leur communiquer ses idées et
d'obtenir d'eux tout ou partie de ce que l'on désire.
Ici encore, je vais diviser la
question, car je n'entends en aucune façon traiter la suggestion comme les
hypnotiseurs en général et surtout comme ceux qui, au mépris de la dignité
humaine, font, avec des personnes sensitives transformées en mannequins, des
expériences toujours inutiles au point de vue scientifique, et, souvent, fort
dangereuses pour la liberté morale des sujets. Je veux rester presque
exclusivement, avec l'incitation, l'influence que l'on peut exercer dans le
voisinage de quelqu'un, verbalement quand on parle et mentalement lorsqu'on
écoute. Encore, je n'engage personne à vouloir s'imposer ; j'engage,
moins encore, à pratiquer l'incitation suggestive pour obtenir une chose
déterminée, car lorsqu'on est suffisamment développé, les bonnes choses
viennent d'elles mêmes suffisamment, nombreuses, sans que l'on fasse quoi
que ce soit pour les obtenir. Malgré cela, ceux qui voudraient cultiver,
spécialement, l'art d'influencer les autres par incitation suggestive, verbale
ou mentale, pourraient tenir compte des observations suivantes :
— Lorsque la personnalité
magnétique est développée à un haut degré, l'incitation suggestive est
spontanée, inconsciente même. La manière d'être du penseur
se transmet à ceux qui l'environnent, même sans qu'il le veuille,
car ses pensées, actives et fortes, vont droit aux personnes à qui elles
sont destinées. Là, elles ont tendance à s'imposer, et ceux qui
les reçoivent les acceptent toujours comme si elles avaient pris naissance en
eux-mêmes, comme si elles étaient l'expression de leur propre désir, de
leur véritable intention. Mais si le penseur suffisamment développé fait, pour
agir, acte de Volonté, il impose toutes ses idées et dicte ses ordres qui sont,
souvent, exécutés avec une précision et une promptitude qui tiennent du
prodige.
Je le répète,
il faut comprendre, avant tout, que pour diriger les autres, il faut savoir se
diriger soi-même et que, pour leur imposer sa Volonté, il est
indispensable d'être Maître de la sienne. On doit, ensuite, être
essentiellement honnête et ne jamais penser à obtenir quoi que ce
soit qui puisse nuire à l'intérêt ou à la considération des
autres. Ces deux premiers points étant bien définis, il faut être animé
du vif désir d'obtenir la chose que l'on veut, être bien persuadé qu'on a
droit à cette chose, qu'on a le pouvoir de l'obtenir et qu'on
l'obtiendra d'autant plus vite qu'on le voudra avec plus de Calme, d'Energie et
de Persistance. Pour exercer une puissante incitation
suggestive, il est bon de puiser des forces dans le milieu ambiant,
comme je viens de l'expliquer, en parlant de l'Absorption de l'énergie, et de se mettre, par la volonté, dans un état d'activité pour
donner, c'est-à-dire dans un état d'expansion pour faire rayonner ses
pensées, ses désirs vers les personnes que l'on veut influencer.
Celui qui veut
dominer les autres doit leur inspirer confiance, les intéresser, les égayer par
de joyeux propos, car le rire ouvre l'individu et le dispose à recevoir
les influences extérieures. Son expression, son maintien, ses gestes, ses
manières, le ton de sa voix sont autant d'éléments d'action qui se
combinent et s'ajoutent les uns aux autres s'ils sont tous concordants.
Le Regard magnétique
et la Conversation jouent, ici, le rôle prépondérant, mais celle-ci doit être
appropriée, adaptée, avec beaucoup de tact, au caractère, aux
goûts, aux aptitudes et, même, à l'intérêt de celui
à qui on l'adresse. Judicieusement employée, elle constitue, à
elle seule, un très puissant moyen d'insinuation qui permet, même
à celui qui ne possède que fort peu l'Influence personnelle, de
vaincre les défiances, les antipathies et les résistances auxquelles il est
toujours plus ou moins exposé. Il en est de même pour le malade que l'on
veut suggérer.
Le malade, dit Atkinson, rassuré
et conquis, s'ouvrira à lui sans arrière-pensée, et son abandon
fera plus pour sa guérison que les innombrables médecines dont l'accablent
généralement les hommes de l'art.
Mais cette
conversation doit être conduite avec soin, avec discernement avec
intelligence.
Il faut que l'opérateur s'y efface, s'y oublie progressivement et, que le
malade s'y abandonne et l'occupe de plus en plus. L'opérateur n'a plus,
dès lors, qu'à écouter et qu'à encourager, de son attention
et de son intérêt, les confidences qu'on lui fait.
On apprend à
écouter comme on apprend à parler, par des efforts successifs par une
étude méthodique. Le silence, comme la parole, a sa science. II faut, de toute
nécessité, que l'opérateur la possède ;
ce n'est qu'à ce prix qu'il fera vraiment la conquête de
son malade.
suggestion
mentale. —
Après avoir étudié pratiquement les règles qui précèdent,
on peut s'exercer à la pratique de la suggestion mentale. Pour cela, on
formule, d'abord, dans sa pensée, des idées simples et en harmonie avec la
manière d'être des gens que l'on fréquente. On donne à ces
idées une forme aussi précise que possible, et, en s'aidant de l'action du
regard, on s'efforce de les transmettre. Ainsi, par exemple, on cherche
à suggérer à un ami l'idée d'une visite à un ami commun,
l'idée d'une étude quelconque qui lui plaise et l'on y parvient d'autant plus
facilement que l'on rend plus concrète l'idée à suggérer. On
cherchera ensuite à transmettre à ce même ami une idée
qu'on sait ne pas lui plaire et l'on sera tout surpris de constater que l'on
réussira, sinon toujours, du moins fort souvent.
Les expériences de cette nature
peuvent être variées presque à l'infini. On doit les répéter
souvent, car elles concourent puissamment au développement de l'influence que
l'on est susceptible d'exercer sur les autres. En voici deux que l'on ne
manquera pas d'essayer lorsque l'occasion se présentera :
— Dans une conversation, la
personne qui vous parle oublie un mot qu'elle cherche en vain à prononcer.
Ce mot vous est presque toujours suggéré par l'idée que s'en fait la personne
qui parle. Pensez fortement à ce mot et regardez l'interlocuteur
à la racine du nez. Très souvent, en moins de temps qu'il en faut
pour le dire, celui-ci prononce le mot et vous avez conscience que c'est vous
qui en avez rappelé le souvenir.
— Dans une réunion quelconque,
vous voulez, par exemple, que tel assistant demande à vous être
présenté. Passez plusieurs fois sous son regard, sans paraître indiscret.
Lorsqu'il vous regarde, dirigez avec calme votre regard entre ses yeux et
dites-vous mentalement : « Vous voulez m'être présenté, je vous attends
». Lorsqu'on est bien familiarisé avec la pratique de la suggestion mentale,
les deux expériences ne manquent presque jamais.
Certaines personnes
sont particulièrement
douées pour obtenir ce qu'elles désirent.
Je connais une dame douce et
bonne, qui, malgré cela, vit en assez mauvaise harmonie avec son mari. Elle n'a
qu'à penser à une robe, à un manteau, à un bijou
qu'elle désire pour que le mari s'empresse de lui offrir l'objet désiré, tandis
que lorsqu'elle demande verbalement quoi que ce soit, elle se heurte, à
peu près toujours, à un refus catégorique.
Un artiste peintre plein d'avenir,
qui a suivi mon cours de Magnétisme personnel et qui a fort bien mis à
profit tous les détails de l'enseignement, pense, à un moment donné,
à un artiste qu'il a connu il y a une vingtaine d'années et cherche
à se remémorer ses œuvres principales. Deux ou trois jours
après, il reçoit par la poste, d'une personne qu'il connaissait à
peine, une reproduction d'une œuvre de l'artiste auquel il avait pensé.
Quelques jours après, le
même artiste ouvre une encyclopédie pour avoir des renseignements sur les
monuments de Trieste. La cathédrale est signalée comme un monument remarquable.
Trois jours après, il reçoit d'un ami une carte postale illustrée
reproduisant cette cathédrale.
L'artiste en question observe,
à juste titre, que ce que l'on appelle improprement le hasard ne saurait
être invoqué, car si ses amis avaient réellement voulu lui envoyer un
souvenir, un objet utile ou véritablement intéressant, ils auraient, mieux
choisi la nature de leur envoi. Vraisemblablement, malgré la distance, il y a
eu transmission de la pensée de l'artiste à ses, amis, qui ont, ensuite,
voulu lui être agréable. Pour s'en assurer, il accusa réception de ces
documents et pria les expéditeurs de vouloir lui dire dans quel but ils avaient
fait cet envoi. La réponse de chacun d'eux fut à peu près celle-ci
: « J'ai pensé à toi et l'idée m'est venue que je te ferais plaisir en
t'envoyant ce document. »
Lorsque l'on est parvenu à
pratiquer habilement la suggestion mentale, il n'est guère nécessaire
d'avoir recours à la suggestion verbale. Pourtant, lorsque celle-ci est
utilisée avec tous les ménagements qu'elle comporte, elle est plus active que
la première. Dans la conversation, on peut la pratiquer de deux façons
différentes : 1° à l'insu du sujet ; 2° avec le consentement du sujet.
Je préfère, de beaucoup, la
première, car elle est plus active, et réussit généralement mieux que la
seconde, le sujet, ne se doutant pas que l'on exerce sur lui une action
suggestive, n'opposant aucune résistance à celle-ci.
Lorsque le sujet veut se guérir
d'une maladie organique de quelque gravité, il faut avoir recours non pas
à la suggestion hypnotique, mais au Magnétisme, qui guérit toujours
mieux et plus vite que les moyens ordinaires de la médecine classique les mieux
appropriés. Pour une maladie morale, telle que l'obsession ; pour se débarrasser
plus vite de certaines passions, comme l'ivrognerie, la morphinomanie, on peut
avoir recours à la suggestion verbale, soit à l'insu du sujet,
soit avec son consentement ; mais il est indispensable, surtout dans ce dernier
cas, que le praticien que l'on choisit soit digne en tous points de votre
confiance, car le remède pourrait être pire que le mal. Le
praticien qui convient le mieux est, encore, le magnétiseur, surtout s'il
possède l'influence personnelle à un certain degré, car tout en
magnétisant pour rétablir l'équilibre physique, qui est toujours plus ou moins
troublé, il emploie, en même, temps, non pas la suggestion brutale des
hypnotiseurs, mais une insinuation suggestive qu'il fait sous la forme d'une
sorte d'affirmation conditionnelle ( Les différents modes de suggestion verbale
sont exposés longuement par Henri Durville, dans son Cours de Magnétisme personnel. ).
Pour ne pas risquer de voir
diminuer la confiance que l'on a en lui, ce qui amoindrirait son autorité
morale, le praticien ne doit pas se tromper comme l'hypnotiseur qui, dans
certains cas, fait tous les jours pendant, cinq à six semaines, la
même suggestion avec le même insuccès. Il ne doit pas dire :
Vous ne souffrirez plus ! Vous dormirez très bien ! Vous ne serez plus
obsédé par les idées qui vous tourmentent ! Vous ne penserez plus à la
morphine ! car cette forme de la suggestion ne réussit, même
imparfaitement, que chez les rares malades sensitifs que l'on peut endormir ;
et encore, ce résultat n'est, parfois, obtenu qu'aux dépens de certaines autres
fonctions physiques ou morales qui se pervertissent à leur tour. Au
contraire, on doit raisonner avec le malade, lui faire comprendre que la
maladie dont il souffre a des causes, souvent profondes et tenaces, qui ne
peuvent, généralement, pas cesser de suite, qu'il faut chercher à
rétablir l'équilibre des fonctions physiques, et qu'alors un mieux,
probablement très sensible, ne tardera pas à se faire sentir. La
suggestion pourra être faite à peu près en ces termes :
Vous allez certainement éprouver du mieux et le sommeil ne tardera pas à
se rétablir ! Les idées qui vous tourmentent vont diminuer peu à peu et
disparaîtront, bientôt, complètement ! Vous aurez moins besoin de
morphine et d'ici cinq à six semaines vous n'en aurez plus du tout
besoin !
Au début d'un traitement quel
qu'il soit, on observe, presque toujours, une amélioration qui tient
certainement un peu à l'espoir que le malade met dans l'efficacité de ce
traitement. L'affirmation suggestive se réalise à peu près complètement,
la confiance du malade grandit encore et les nouvelles suggestions exerceront
dans l'avenir une influence d'autant plus grande que le praticien aura mieux
prévu leur réalisation. Le magnétiseur, qui sait établir le diagnostic des
maladies par l'examen des centres nerveux et qui connaît le mécanisme des
modifications qui surviennent sous l'action du traitement (voir mes Théories et
procédés du Magnétisme), sait réellement, non seulement ce qui se passe
présentement dans l'organisme du malade, mais ce qui doit s'y passer dans un
certain délai. De cette façon, tant par l'action directe du Magnétisme que par
l'action indirecte de la suggestion, il favorise, toujours, le travail de la
nature sans jamais le contrarier.
Si, par la parole, par le geste,
par des manières, l'homme fort peut imposer au faible ses idées et ses
manières de voir ; si, d'autre part, toutes les impressions qui viennent
du dehors sont des suggestions, il est évident que nous sommes tous plus ou
moins exposés à subir les suggestions intéressées et les mauvaises
pensées de ceux qui nous environnent. Dans ce cas, il est de toute nécessité
que celui qui cherche à développer son Influence magnétique puisse
échapper aux mauvaises influences. C'est sur ce point que je termine ce chapitre.
Fig. 29. — Rayonnement d’expansion
pour
ÉVITER LES SUGGESTIONS DES AUTRES. — II est évident que nous faisons partie du milieu
dans lequel nous sommes et que si nous agissons sur les autres, les autres
peuvent agir sur nous, nous influencer, nous asservir même.
Cela est si vrai, dit Atkinsom,
que nos opinions varient avec les circonstances et que, selon que nous vivons
avec les uns ou avec les autres, nos idées diffèrent et, parfois
même, s'excluent...
Les exemples de ce
phénomène sont fréquents, surtout en politique. On voit une idée
jaillir, se répandre, tout entraîner, puis s'apaiser, rentrer dans son lit et
mourir... Telle foule, par exemple, calme et modérée, s'agite et
s'exaspère soudain pour revenir, bientôt, à la modération et
à l'équité. Il a suffi, pour déterminer ces alternatives, de quelques
hommes d'action, de quelques esprits résolus. Ceux-là ont déchaîné la
foule par des discours de violence; ceux-ci l'ont ramenée et retenue par des
appels à la tolérance. Mais les uns et les autres, ont usé des
mêmes moyens, c'est-à-dire de leur don d'influence, de leur force
de pénétration, de toutes les ressources de volonté et d'action qui sont comme
l'essence du Magnétisme, le secret des sciences occultes.
Il importe, donc, si l'on veut obéir à sa propre raison, de se
garder contre toutes les influences d'alentour et de dresser comme une
barrière autour de soi. Mille dangers nous menacent. A chaque
instant, nous sommes sollicités par des forces supérieures, par des volontés
qui sont impatientes de nous asservir à leurs desseins, à leurs
ambitions, à leurs intérêts. Il faut, de toute nécessité, que nous
puissions nous protéger nous-mêmes et nous défendre contre elles. Notre
dignité la commande et notre intérêt l'exige. Nous serions exposés
à de terribles éventualités si nous nous abandonnions sans défense
à toutes les influences, à toutes les suggestions, à
toutes les forces extérieures qui pèsent sur nous et nous sollicitent
(La Force-pensée).
Si le précédent auteur décrit fort
bien, tout en les exagérant un peu, les dangers auxquels le plus grand nombre
d'entre nous sont exposés, même lorsque notre Influence magnétique est
développée à un certain degré, il n'indique pas, d’une façon suffisante,
les moyens à employer pour les éviter. Je vais tâcher de le faire en
quelques mots, en prenant pour exemple la haine qu'un individu peut avoir
contre nous et l'impureté de certains milieux dans lesquels on est obligé de
pénétrer.
Le principal moyen
de résister aux mauvaises influences, c'est, d'abord, de ne pas les craindre,
car elles agissent comme la peste qui frappe ceux qui en ont peur. Ensuite,
c'est d'être raisonnable, juste, bon, et de ne jamais avoir aucun tort
à se reprocher envers qui que ce soit. Malgré cela, il y a certaines
influences, celles de la haine prolongée pendant longtemps, qui pourraient
parvenir à nous atteindre. Soyons sur nos gardes et, si nous nous méfions de quelqu'un de malveillant, ayons
bien soin de ne lui envoyer que des pensées de bienveillance et de bonté et
faisons appel, en même temps, à toute notre volonté, à
toutes nos énergies intérieures pour nous mettre dans un état d'expansion qui
fasse rayonner notre force autour de nous, comme l'indique la figure 29.
Dans cet état, nous sommes en activité pour donner et nous ne recevons rien du
dehors. Notre impénétrabilité aux influences
extérieures sera, encore, augmentée si nous avons présent à l'esprit
l'aura de pensées et d'influences qui nous environne et si, en précisant bien
le rôle protecteur de cette aura, nous faisons acte de volonté pour la rendre
encore plus impénétrable, en la repliant sur nous-mêmes. On peut
revoir à cet effet les fig. 17, 18 et 19. En mettant bien dans son
esprit qu'on ne sera jamais dominé par une pensée étrangère si on ne
veut pas l'être, l'autosuggestion rendra, encore ici, quelques services.
D'ailleurs, dès que l'on arrive à un degré d'Evolution
dépassant une certaine moyenne, on se trouve, naturellement, protégé contre les
mauvaises pensées et les mauvaises intentions des autres.
Cette protection est facile
à comprendre à l'aide des rapprochements suivants :
La matière mentale et la
matière astrale ne sont pas identiquement les mêmes chez tous les
individus. Lourdes, grossières, impures, chez la brute, elles sont
fines, légères et pures chez celui qui atteint un très haut degré
de développement. Elles vibrent constamment et leurs mouvements vibratoires se
communiquent, par ondulations, au milieu ambiant ; ces mouvements peuvent
être transmis au loin. Mais les vibrations de la matière
grossière sont considérablement moins rapides que celles de la
matière légère et pure.
Les pensées, qui sont « des choses
» et qui revêtent des formes particulières, sont formées d'une
matière analogue à la matière mentale et astrale de celui
qui les émet : leurs vibrations sont les mêmes.
Nul mouvement, autrement dit nulle
action, ne peut se communiquer à cette matière en dehors de
certaines conditions d'analogie et de vitesse. C'est pour cela que les
vibrations lentes du méchant ne peuvent pas modifier les vibrations beaucoup
plus rapides de l'homme évolué. Entre ces extrêmes, le mouvement,
c'est-à-dire l'action, peut se communiquer, mais la communication est
d'autant plus lente et plus difficile que la différence est plus grande entre
la rapidité des mouvements de celui qui agit et de celui qui reçoit.
En principe, une
pensée de haine ne peut, pas atteindre une âme pure ; elle est repoussée, et,
comme rien ne se perd, elle revient frapper celui qui l'a projetée. Comme celui-ci vibre d'une façon
identique aux pensées qu'il émet, il reçoit ce mouvement, avec la plus grande
facilité et son activité est augmentée d'autant pour en émettre d'autres de
même nature. Ainsi, finalement, le créateur d'une pensée mauvaise
souffre, toujours, de ce qu'il a voulu faire souffrir à d'autres et, si
cette pensée est énergique et se renouvelle constamment, il peut en souffrir
beaucoup et même en mourir. C'est, ainsi, que l’envoûteur
s'envoûte lui-même, surtout, lorsque l'action qu'il dirige n'est
pas reçue par celui à qui elle était destinée. Au temps de la
sorcellerie, on disait, avec des apparences de raison, que, tôt ou tard, le
sorcier finissait par être étranglé par le diable.
Celui qui est peu
évolué reste, donc, exposé, dans une certaine mesure, aux attaque de ceux qui
veulent lui nuire, mais lorsqu'il s'est purifié, les jaloux, les envieux, les
ennemis qu'il peut encore avoir ne peuvent rien ou à peu près
contre lui. Comme j'ai cherché à le faire comprendre, on doit rechercher
la société des gens heureux, courageux, gais, forts, pleins d'espoir et éviter
le plus possible les craintifs, les mélancoliques, les coléreux, les méchants
et les malheureux en général ; comme
l'avait déjà observé G. Agrippa :
« Leur âme est pleine de mauvais
rayons et elle communique sa contagion à ceux qui l'approchait. »
Nous sommes, pourtant, obligés de
pénétrer dans leur milieu, de nous mettre en contact avec eux. Allons-y
gaiement, et en nous mettant dans l'état d'expansion dont je viens de parler,
pour leur « donner de nous-mêmes sans rien
prendre d'eux », soyons sans aucune crainte d'être influencés.
Encourageons-les, donnons-leur de bons conseils, faisons, à ceux qui en
ont besoin, une aumône en rapport avec nos moyens, mais ne nous apitoyons pas
sur leur sort et quittons les avec la satisfaction du devoir accompli, pour ne
plus y penser que lorsqu'une nouvelle occasion de leur être utile se
présentera.
Il me reste à
dire quelques mots qui ne s'adressent qu'aux sensitifs se prêtant aux
expériences, et qui peuvent craindre des suggestions post-hypnotiques qu'ils
pourraient exécuter au moment convenu. C'est pour leur apprendre à
déjouer toute suggestion que je leur indique le procédé suivant :
Il suffit au sujet
de savoir que, pour empêcher une suggestion de se réaliser, il n'a
qu'à appliquer sa main gauche et, même, un seul doigt de cette
main au front pendant quelques instants.
Cette action constitue le procédé
tout entier, dont on comprendra le mécanisme par quelques mots de théorie. :
— Chez le plus grand nombre des
sujets, le sommeil hypnotique présente quatre états bien distincts : état
suggestif, état cataleptique, état somnambulique et état léthargique, quoique
l'école hypnotique de la Salpetrière ne classe que les trois derniers.
Toutes les suggestions
post-hypnotiques, c'est-à-dire celles que l'hypnotiseur donne pendant le
sommeil pour être exécutées lorsque le sujet sera réveillé, ne
s'exécutent que dans le premier état, état dans lequel le sujet rentre de
lui-même au moment où l'idée lui vient, d'accomplir l'acte
suggéré. Donc, si le sujet fait cesser cet état, la suggestion ne s'accomplit
pas.
Le sujet, peut, toujours, agir
physiquement sur lui-même par auto magnétisation. L'action de sa main
droite appliquée au front l'endort, celle de sa main gauche au même point
le réveille. Dans le cas qui nous occupe, le sujet, qui est obsédé par l'idée
d'exécuter l'acte suggéré, entre automatiquement dans l'état suggestif. A ce
moment, s'il applique sa main droite au front, il passe dans l'état
cataleptique, puis dans l'état somnambulique, et s'il y applique la main
gauche, il se réveille. Dans les deux cas, l'état suggestif ayant cessé, la
suggestion ne peut plus avoir de prise.
Comme elle est décrite dans le
présent chapitre, l'autosuggestion suffit pour faire disparaître les névralgies
et les maux de peu d'importance ; mais lorsqu'il s'agit de guérir une maladie
chronique considérée comme incurable, il faut bien comprendre tous les
arguments du chapitre suivant et employer, souvent pendant de longs mois, les
moyens que j'indique. De l'ensemble de ces deux chapitres, le mélancolique,
l'ivrogne et tous les esclaves d'une mauvaise habitude pourront facilement
instituer le traitement qui leur convient.
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