CHAPITRE XII: SPIRITISME.
Depuis 1878,
lorsque l'occasion s’est présentée, et que nos occupations nous l’ont permis,
nous avons étudié les manifestations dites spirites. Nous avons assisté a de
nombreuses séances et nous avons fait beaucoup d'expériences personnelles, ce
qui nous autorise, en connaissance de cause, a faire connaître notre opinion
sur ce sujet troublant.
Avant
cette époque, nous avions, comme tant d'autres, des préventions sur ces fameux
phénomenes spirites, vantés par quelques-uns, décriés par le plus grand nombre ;
aussi, refusions-nous toujours d'assister a des séances ou l'on invoquait les
âmes des morts.
En
octobre 1878, nous trouvant en villégiature chez Mme la Marquise de F.... a
Orange, Vaucluse, nous fumes témoin, pour la premiere fois, des soi-disant manifestations des habitants
d'outre-tombe.
Mlle de
F... était médium et, un soir, apres le dîner on fit danser la table. Le début
de la séance nous laissa absolument froid, alors que d'autres assistants
étaient émerveillés, parce que nous pensions que les personnes qui formaient la
chaîne, leurs mains appuyées sur le meuble, la poussaient ou le tiraient
consciemment ou inconsciemment dans diverses directions. Mais 20 ou 25 minutes
apres le début de la séance, la table se souleva presque du sol et frappa de si
étrange façon qu'elle attira notre attention. Nous constatâmes, dans le cours
de cette séance, que, a défaut d'esprit,
il y avait la réellement une force quelconque que nous eumes, des lors, le
désir de connaître.
Un de
nos amis, fervent spirite, possédait une bibliotheque assez complete. En peu de
temps, nous dévorâmes tout ce qu'il
possédait sur la matiere, et nous recherchâmes ces séances au lieu de les fuir.
Pendant
l'hiver de 1878-1879, nous assistâmes régulierement aux réunions de deux
groupes spirites. Eh bien, malgré tout ce que nous avions vu durant ce laps de
temps, malgré tout ce que nous avions lu en faveur du spiritisme, nous n'étions
point convaincu de la présence des esprits dans ces manifestations.
Les
spirites allégueront que nous avions une forte dose de scepticisme, un parti
pris invétéré : nous n'avons jamais eu
d'idée préconçue pour quoi que ce soit.
Pendant
quatre ans, nous ne pumes étudier que des phénomenes insignifiants, les uns
provenant d'une pression des mains, plus ou moins volontaire, exercée sur la
table par les opérateurs ; les autres attribuables a l'électricité animale : nous connaissions le cas d'Henriette Cottin
et d'autres semblables. Alexandre Aksakof n'avait point encore écrit Animisme et spiritisme.
Nous
avions également expérimenté ce que les spirites appellent l'écriture
automatique, qui se produit soit par le moyen d'une planchette a roulettes,
soit par une corbeille, soit le crayon seul tenu par le médium, sans obtenir
des résultats plus, satisfaisants.
En 1883,
a Marseille, nous eumes la bonne fortune de rencontrer, en Mme M.... un
véritable médium : nous obtînmes, a notre domicile, pendant plus de trois mois,
de remarquables phénomenes, que nous ferons connaître dans ce chapitre, et qui
orienterent nos idées dans une autre direction. Depuis, nous nous sommes
vivement intéressé a cette question.
Aujourd'hui,
notre conviction sur les phénomenes spirites est faite, et si nous sommes
encore éloigné des théories émises par les diverses écoles spiritualistes, nous
admettons les faits comme réels, indiscutables.
Laissons
de côté les faux médiums, les imitateurs, les truqueurs. (Louis Jacolliot, sous
le pseudonyme du Dr Fhilyps, a écrit la
Fin du monde des esprits, livre dans lequel tous les trucs sont dévoilés.
Ces trucs sont faciles a démasquer, mais nous déplorons que cet auteur attribue
tous les faits spirites a la supercherie.) Ne nous occupons que des faits réels
de l'animisme et du spiritisme ; mais que l'on sache bien aussi que souvent les
vrais médiums trichent également ; forcent en quelque sorte le phénomene,
lorsqu'il ne se produit pas. Que l'on ne perde pas de vue non plus que neuf
fois sur dix c'est le phénomene animique qui se présente : il faut apprendre a
le différencier, malheureusement nombreux sont les spirites fanatiques qui
s'imaginent obtenir toujours des manifestations célestes, et malin serait celui
qui voudrait les éclairer ! Nous avons essayé quelquefois, mais nous prechions
dans le désert.
Ainsi
que nous l'avons dit au début de ce travail, sauf quelques-uns de vraiment
instruits, de compétents, qui ne prennent point leurs reves ou leurs désirs
pour des réalités, qui savent, dans leurs expériences, employer la méthode
scientifique, les spirites, en général, par leurs affirmations puériles,
portent un préjudice considérable a la vérité qu'ils veulent propager, soutenir
et défendre.
Nous
savons, nous le répétons encore, que les spirites sont de bonne foi, mais leur
bonne foi ne suffit pas a justifier leurs grossieres erreurs. La plupart,
n'ayant que des liens tres éloignés avec les sciences, ne tiennent aucun compte
des observations de ceux qui, plus habitués aux manipulations de physique,
attribuent ces faits a une cause autre que celle invoquée par les partisans de
Kardec.
Lorsqu'on
peut naturellement expliquer un phénomene peu ou pas connu, lors meme qu'il
sort du domaine de nos connaissances, il n'est point nécessaire de l'attribuer
au surnaturel.
Un homme
de science ne sera point satisfait et sera loin d'approuver des communications
idiotes d'Alexandre le Grand, de César,
du Christ, de la Sainte Vierge, de saint Vincent de Paul, de Napoléon 1er, de
Victor-Hugo, etc..., que soutiennent exactes une foule de pseudo-médiums.
L'abus
des grands noms est détestable, car il fait naître le scepticisme.
Nous
avons souvent démontré a ces médiums qu'ils se trompaient, en posant, aux
soi-disant esprits présents, des questions qu'ils devaient connaître ; mais que
les médiums ignoraient. Ainsi, par exemple, Napoléon 1er ne se souvenait plus
de Waterloo ; saint Vincent de Paul ne savait plus un mot de latin ; Le Dante
ne comprenait pas l'italien ; Lamartine, Alfred de Musset étaient incapables
d'accoupler deux vers.
Prenant
ces esprits en flagrant délit d'ignorance et faisant toucher la vérité du doigt
a ces médiums, pensez-vous que nous
ébranlions leur conviction ? Non, car l'esprit
guide soutenait que nous étions de mauvaise foi et que nous cherchions a
empecher une grande mission de s'accomplir, mission
dévolue a son médium.
Nous
avons connu plusieurs de ces grands
missionnaires qui ont terminé leur mission dans des maisons
spéciales !...
Cependant,
nous devons reconnaître que les spirites ont eu l'honneur d'attirer l'attention
de quelques savants. Dans plusieurs pays, notamment en Angleterre, des
investigateurs compétents ont pu, apres de nombreuses expériences, différencier
les faits, les classer et, comme les premiers, affirmer la réalité de certains
de ces faits, inexplicables par les agents physiques connus.
Les
travaux de ces investigateurs ont amené un assez grand nombre de savants
modernes a ces recherches et, comme leurs devanciers, ils n'hésitent pas a
pénétrer dans ce champ insuffisamment exploré. Aussi, sommes-nous persuadéS
que, dans un avenir plus ou moins éloigné, la psychologie expérimentale
établira une science nouvelle, aussi exacte que celles existantes, sortira tous
les faits extra-naturels du chaos actuel et créera la science
psycho-physiologique.
Avant de
passer en revue les principaux phénomenes animiques et spiritiques nous allons
indiquer le modus operandi ordinairement
employé pour l'obtention de ces phénomenes.
On se
sert habituellement d'une table quelconque, mais légere autant que possible et
en bois, quelques personnes, quatre ou cinq au plus, se placent autour du
meuble et appliquent leurs mains dessus, en formant la chaîne, c'est-a-dire en
faisant toucher leurs doigts, On peut ne pas se mettre en contact par les
doigts, la table étant suffisante pour établir la chaîne. La position des mains est indifférente et ne gene point
le phénomene, lorsqu'il doit se produire. La lumiere doit etre faible et les
expérimentateurs peuvent causer jusqu'a la production des premieres
manifestations, afin d'obvier un peu a la monotonie de cette position d'attente
qu'il faudra garder plus ou moins longtemps, car ce n'est quelquefois qu'au
bout d'une demi-heure qu'un effet se produit. Cesser la conversation lorsqu'un
bruit quelconque : grattement, craquement ou légers coups, se fait entendre
afin de ne rien perdre du phénomene et
de suivre sa marche.
En
procédant de la façon suivante, nous avons, chaque fois, obtenu quelque
résultat.
Dans une
société un peu nombreuse, nous faisons, sur les assistants, par notre procédé
neuroscopique, une sélection. Ces préliminaires achevés, nous formons une sorte
de batterie électrique humaine.
Les
personnes qui réagissent a notre action sont intercalées entre celles qui
n'éprouvent aucune sensation.
Analogiquement,
nous prenons les sensitifs comme pôle
négatif et les asensitifs comme pôle
positif. La chaîne commencée par un sensitif se termine par un asensitif,
les pôles de nom contraire du début et de la fin étant libres, les autres en
contact. Avec ce dispositif, apres une attente qui varie de cinq a trente
minutes, on obtient toujours des effets.
Lorsque
nous jugeons l'entraînement suffisant, nous relions la personne la plus
impressionnable de la société a cette batterie
humaine, et les effets augmentent rapidement en intensité.
Nous ne
voulons point donner une supériorité a notre méthode, nous conseillons
seulement de l'essayer, persuadé qu'elle donnera satisfaction aux
expérimentateurs.
Ordinairement,
apres un quart d'heure d'imposition des mains sur la table, des petits coups
sourds se produisent, suivis bientôt de coups secs, plus nets, comme de légeres
décharges électriques. Ces coups deviennent plus forts, plus précipités au fur
et a mesure de leur production.
Souvent,
ce sont des craquements, des oscillations presque insensibles de la table qui
augmentent progressivement et arrivent a faire basculer le meuble ; puis, la
table tourne ou elle frappe d'un de ses pieds.
Tous ces
effets ne sont point dus a l'action d'un esprit, mais bien a l'électricité animale dégagée parles
opérateurs.
A ce
moment, on interroge la table, on la fait parIer : deux coups veulent dire non,
un coup oui ; puis un assistant épelle les lettres de l'alphabet et la table
frappe la lettre qu'on doit assembler aux précédentes pour former des mots et
des phrases : on peut établir toutes sortes de conventions, pour converser avec
le meuble.
Le plus
souvent, dans ces séances, on n'obtient qu'une sorte d'imbroglio : parfois,
quelques phrases correctes surgissent. Cet imbroglio est impliqué, par les
fervents du spiritisme, aux mauvais
esprits, et alors en avant la priere,
les conjurations, les passes dégageantes, pour chasser les mauvais esprits et leur mauvais fluide.
La cause
de tout cela est pourtant bien simple, pour ceux qui connaissent la question,
puisqu'elle émane de nous et que ce ne sont que des effets animiques.
Qu'on
n'oublie pas qu'un sensitif, meme éveillé, peut voir a distance et sentir ce
que ne peuvent voir ni sentir les asensitifs.
A ce
sujet, il est aisé de se documenter dans les Annales des sciences psychiques du docteur Dariex ; dans les Hallucinations télépathiques de MM.
Gurney, Myers et Podmore, et dans Animisme
et spiritisme d'Alexandre Aksakof.
On sait
que les vrais médiums sont rares et que meme ceux-la, dans certaines
conditions, ont une tendance a forcer le phénomene, a tricher : on a pris
plusieurs de ceux qui en font métier, au moment ou ils fraudaient.
Les faux
médiums sont tres nombreux, surtout en Amérique, berceau du spiritisme.
Mais
autour de ces médiums vrais ou faux gravitent des milliers d'autres médiums
s'attribuant des facultés diverses et personnelles : les typtologues, les écrivains, les intuitifs, les voyants, les
auditifs, les guérisseurs, etc., etc.
Tout le
monde, parait-il, est plus ou moins médium : on n'a qu'a développer cette faculté latente. Quelle erreur, quelle
aberration cérébrale ! Voila pourtant ce que certains livres spirites
affirment.
Ne
montons pas si vite au septieme ciel, restons un peu sur la terre et nous
verrons plus clairement la vérité, nous la comprendrons mieux.
Au
fruit, on reconnaît l'arbre, dit-on. Examinons sans enthousiasme, froidement,
les communications obtenues quelles qu'elles soient, différencions-les surtout,
et nous constaterons que quatre-vingt-dix fois sur cent elles sont banales et
ne dépassent point le niveau intellectuel des assistants.
Les
memes personnes se réunissant régulierement ne tardent pas a s'entraîner, a s'harmoniser, et les communications provoquées augmentent peu a peu
d'intensité, mais ne dépassent pas, nous le répétons, leur niveau intellectuel
; elles créent ainsi une sorte d'intelligence
mixte éphémere qui obéit a leurs desiderata.
Mais la
encore, point d'entité étrangere, point d'esprit de mort : animisme toujours.
Ces
importants phénomenes animiques ne sont pas connus de tous les spirites, mais
ils sont encore plus ignorés des savants, du moins de ceux qui portent ce
qualificatif, a quelques rares exceptions pres ; il est donc urgent de les
indiquer, d’insister sur leur fréquence, pour mettre en garde les chercheurs
non inféodés a une doctrine quelconque, et inviter les croyants a ne pas
confondre, a ne pas prendre l'erreur pour la vérité.
Lorsqu'on
se trouve en présence d'un phénomene transcendant, le doute ne peut persister
dans l'esprit de celui qui est accoutumé a ces sortes d'expériences, la
différence est si grande qu'on ne peut confondre ces faits avec ceux de
l'animisme : nous pensons prouver ce que nous avançons.
PREMIERE SÉRIE DE FAITS
Animisme.
Les
divers phénomenes télépathiques, que nous avons étudiés dans le chapitre
précédent, rentrent dans le cadre de l'animisme ; d'autres, tres nombreux, que
nous allons examiner, sont dans le meme cas.
Aksakof,
un des premiers, sinon le premier, a su reconnaître ces faits et a pu les
classer méthodiquement, rationnellement.
Voici sa
classification :
« 1° Action extracorporelle de l'homme vivant,
comportant des effets psychiques, (phénomenes de la télépathie, impressions
transmises a distance) ;
« 2° Action extracorporelle de l'homme vivant
comportant des effets physiques (phénomenes télécinétiques - transmission
de mouvement a distance) ;
« 3°
Action extracorporelle de l'homme vivant
sous forme de l'apparition de son image (phénomenes téléphaniques -
apparition du double) ;
« 4° Action extracorporelle de l'homme vivant se
manifestant sous forme de l'apparition de son image avec certains attributs de
corporéité (phénomenes téléplastiques - formation de corps matérialisés).
Nous
extrayons de l'ouvrage si documenté du savant russe Animisme et spiritisme quelques cas de chacune de ces catégories,
afin que le lecteur puisse juger en connaissance de cause, ne trouvant point
dans la littérature spirite française l'impartialité et la compétence
rencontrées chez cet auteur.
1re Catégorie. - Cas de Mlle Barbe
Pribitkoff.
« En
1860, je passais l'été au village de BélayaKolp (pres de Moscou), qui est la
propriété du prince Schahovskoy. Sa belle-mere, la princesse Sophie
Schahovskoy, avait pris l'habitude de traiter par l'homoeopathie les malades
des environs.
« Un
jour, on lui amena une petite fille malade. Indécise quant au remede qu'elle
devait lui administrer, la princesse eut l'idée de demander, au moyen de la
table, un conseil au Dr Hahnemann. Je protestai énergiquement contre l'idée de
traiter un malade suivant les indications d'un etre que l'on ne saurait
identifier. On insista et, malgré mon opposition, on réussit a m'installer
devant la table, avec Mlle Kovaleff, une pupille de la princesse Schahovskoy.
(Je ne croyais pas alors a l'homéopathie et estimais que, dans les cas graves,,
il fallait transporter tout malade chez le médecin de la ville.) En dépit de
cette opposition intérieure, - car je m'abstenais de l'étendre jusqu'a
l'activité de mes mains - le pied de la table épela, au moyen de coups, le nom
de Hahnemann, ce dont je fus fort contrariée, et je fis des voux intimes pour
qu'il refusât de formuler un conseil. Et juste, la phrase dictée fut qu'il ne
pouvait pas donner de conseil. La princesse se fâcha a son tour ; elle attribua
ce refus a mon opposition et m'éloigna de la table. Je ne puis dire qui me
remplaça, si ce fut la princesse elle-meme ou une autre personne. Je m'assis
aupres de la fenetre a quelques pas de la table, et m'efforçai, par une
concentration de toute ma volonté, a faire reproduire par la table une phrase
que je formulai mentalement. La princesse demanda alors « pourquoi Hahnemann ne
pouvait pas donner de conseil ». La réponse fut (en français) - « Parce que je
suis devenu un insensé en fait de médecine, du jour ou j'ai inventé
l'homéopathie. » Je dictai cette phrase en faisant appel a toute ma force de
volonté et concentrant ma pensée successivement sur chacune des lettres qui
devaient venir. Je me rappelle bien que pas une seule erreur ne fut commise au
cours de la transmission de cette phrase. A peine la dictée fut-elle terminée
que je ressentis un violent mal de tete. »
Ce fait
prouve bien que lorsqu'on expérimente avec la table, le plus souvent, quand les
mouvements ne sont pas le résultat d'une pression plus ou moins inconsciente -
on a ordinairement une tendance a aider le phénomene - exercée dans un sens ou
dans un autre par les opérateurs trop soucieux d'obtenir des communications,
l'action mentale de l'un ou de plusieurs des assistants est la seule cause des effets produits.
Cas de l'écrivain russe, Wsevolod Solovioff
«
C'était au commencement de l'année 1882. Je m'occupais, a cette époque,
d'expériences de spiritisme et de magnétisme, et, depuis quelque temps,
j'éprouvais une étrange impulsion qui me poussait a prendre un crayon dans la
main gauche et a écrire ; et, invariablement, l'écriture se faisait tres
rapidement et avec beaucoup de netteté, en sens inverse : de droite a gauche,
de sorte qu'on ne pouvait la lire qu'en la tenant devant une glace ou contre le
jour. Un soir que je m'étais attardé dans une conversation avec des amis, je
ressentis a deux heures du matin ce désir irrésistible d'écrire. Je pris le
crayon et priai une dame de mes amies, Mme P.... de le tenir en meme temps ;
nous nous mimes ainsi a écrire tous les deux a la fois. Le premier mot fut Véra. A notre question : Quelle Véra ? Nous obtînmes par
écrit le nom de famille d'une jeune parente a moi, avec la famille de laquelle
j'avais récemment renoué des relations, apres une interruption assez prolongée.
Nous en fumes étonnés, et, pour etre bien surs de ne pas nous tromper, nous
demandâmes : « Est-ce vraiment Vera M... ? » Nous reçumes cette réponse : «
Oui. Je dors, mais je suis ici : et je suis venue pour vous dire que nous nous
verrons demain au jardin d'été. » Alors j'abandonnai le crayon et nous nous
séparâmes la-dessus.
« Le
lendemain, vers 1 heure, je reçus la visite du poete Maikoff ; a 2 heures et
demie, il prit congé ; je lui offris de l'accompagner et nous sortîmes ensemble
reprenant la conversation interrompue. Je le suivais machinalement. Je
demeurais alors au coin des rues Spasskaia et Znamenskaia. (En passant par la
rue Pantélémonskaia, a la hauteur du pont des Chaînes.)
« Jamais,
pendant l'hiver, je ne m'étais promené dans ce parc. Il faut dire aussi que je
ne pensais plus a ce qui s'était passé la veille, a notre séance spiritique.
Jugez de mon étonnement lorsque, ayant a peine franchi de quelques pas la
grille du jardin d'été, je me trouvai face a face avec Mlle Véra M..., qui se
promenait avec sa demoiselle de compagnie. A ma vue, Mlle Véra M... se troubla
visiblement, aussi bien que moi-meme, d'ailleurs, car notre séance de la veille
me revint subitement a l'esprit. Nous nous serrâmes la main et nous nous
quittâmes sans mot dire.
« Le
soir meme, j'allai voir sa famille, et la mere de Vera, apres les premieres
paroles de bienvenue, commença a se plaindre de l'imagination fantastique de sa
fille ; elle me raconta que celle-ci, en rentrant de sa promenade au jardin d'été,
le jour meme, avait manifesté un état extraordinaire d'excitation, qu'elle
avait beaucoup parlé de sa rencontre avec moi, comme d'un miracle ; qu'elle
avait raconté etre venue chez moi en songe et m'avoir annoncé que nous nous
rencontrerions au jardin d'été, a 3 heures.
«
Quelques jours apres, il se produisit un fait similaire, et, dans les memes
conditions : a la séance, ma main écrivit le nom de Vera, et ensuite il nous
fut annoncé qu'elle passerait chez nous le lendemain a 2 heures. En effet, a
l'heure indiquée, elle se présentait chez nous, avec sa mere, pour nous faire
une visite. Les faits ne se renouvelerent plus. »
Les
livres spirites abondent de faits de cette catégorie.
Cas
du juge Edmonds.
« Un
jour que je me trouvais a West Roxbury, je fus mis en rapport, par
l'intermédiaire de ma fille Laure, avec l'esprit d'une personne que j'avais
bien connue dans le temps, mais que je n'avais pas vue depuis quinze ans.
C'était un homme d'un caractere tout a fait étrange ; il ressemblait si peu a
tous ceux que j'avais connus et était si original qu'il n'y avait pas moyen de
le confondre avec un autre. J'étais loin de penser a lui. Quant au médium, il
lui était completement inconnu. Il se manifesta non seulement avec toutes les
particularités qui le caractérisaient, mais me parla meme de choses que lui et
moi étions seuls a connaître. A la suite de cette séance, je conclus qu'il
était mort, et quel ne fut pas mon étonnement en apprenant qu'il était en vie.
Il l'est encore. Je ne puis entrer ici dans tous les détails de notre
conversation, qui dura plus d'une heure. J'étais bien persuadé que je n'avais
pas été l'objet d'une illusion, que c'était une manifestation spiritique pareille
a beaucoup d'autres que j'avais observées moi-meme et qu'on m'avait racontées.
Mais comment cela pouvait-il se faire ? C'est une question qui m'obséda
longtemps. Par suite, j'ai souvent été témoin de faits analogues qui ne me
permirent plus de douter que nous puissions obtenir des communications de
personnes vivantes tout aussi bien que des messages de personnes décédées.
Voici
une autre communication intéressante :
« Un
médium, en meme temps auteur bien connu, Miss Hardinge Brittan, raconte, dans son
article « sur les Doubles », publié dans le Baner
of Light (numéros des 6 novembre et 11 décembre 1875), que, dans l'année
1861, se trouvant a l'état de transe, elle a parlé au nom d'une personne qui
était vivante, ainsi que cela fut constaté plus tard.
« Dans
ce meme article, elle cite un cas intéressant qui s'est présenté en 1858 : dans
un cercle spirite, a Cleveland, chez M. Cutler, un médium féminin se mit a
parler allemand, bien que cette langue lui fut completement inconnue. «
L'individualité qui se manifestait par elle se donnait pour la mere de miss
Marie Brant, une jeune personne allemande qui se trouvait présente. » - « Miss
Brant affirmait que sa mere, autant qu'elle le savait, était en vie et bien
portante.» Quelque temps apres, un ami de la famille, venant de l'Allemagne,
apporta la nouvelle que la mere de Miss Brant, apres avoir traversé une maladie
sérieuse, a la suite de laquelle elle était tombée dans un long sommeil
léthargique, déclara a son réveil avoir vu sa fille qui se trouvait en Amérique.
Elle dit qu'elle l'avait aperçue dans une chambre spacieuse, en compagnie de
plusieurs personnes et qu'elle lui avait parlé. »
2e catégorie.- Si nous tenons compte de ce que rapportent
plusieurs voyageurs, Louis Jacolliot, entre autres sur l'action physique
exercée a distance par certains fakirs sur des objets matériels, nous sommes
amenés a croire qu'un médium européen (sensitif spécial) peut, comme ses
confreres de l'Inde, produire les memes effets. Conséquemment, si le double de personnes vivantes, pendant le
sommeil naturel ou provoqué, a la faculté de se transporter a distance pour
faire écrire a un médium ce qu'il pense, il n'est pas illogique d'admettre que
ce meme etre puisse, les conditions étant favorables, se manifester par des
coups ou par des déplacements d'objets. Les expériences de William Crookes,
avec feu le médium Daniel-Dunglas Home, appuient parfaitement cette opinion.
Celles, plus récentes, de plusieurs savants français et étrangers avec la
Napolitaine Eusapia Paladino n'infirment point le fait, au contraire.
Louis
Jacolliot nous a fait le récit d'expériences obtenues a Chandernagor, dans son
domicile, par le fakir Cowindassamy. Ce dernier prenait, par exemple, le crayon
de son hôte, le jetait dans la vasque d'eau qui se trouvait sur la terrasse de
son habitation et, volontairement, en
présentant un doigt dans la direction du crayon, il faisait plonger cet objet
au fond de la vasque et lui donnait un mouvement de rotation dans les sens
voulus ; puis, selon la volonté de l'observateur, le crayon nageait a la
surface ou circulait entre deux eaux.
Le meme
animait des objets légers et, toujours sans contact, les faisait voltiger comme
des papillons.
Eusapia,
en état de transe, provoque, également a distance, des mouvements d'objets inertes;
elle ouvre les portes de meubles, etc., etc. (Voir Extériorisation de la motricité, par A. de Rochas.)
Les
expériences suivantes, que nous empruntons a l'ouvrage Recherches sur les phénomenes du spiritisme du savant
physicien anglais, démontrent bien le fait animique.
Apres de
longues explications et la réfutation d'articles parus dans divers journaux et
revues, William Crookes dit :
« Je
vais maintenant procéder a la classification des phénomenes que j'ai observés,
en procédant des plus simples aux plus complexes et en donnant rapidement dans
chaque chapitre un aperçu de quelques-uns des faits que je vais avancer. Mes
lecteurs voudront bien se souvenir qu'a l'exception des cas spécialement
désignés les manifestations ont eu lieu dans ma maison, a la lumiere, et
seulement en présence d'amis a moi et du médium.
« Dans
le volume que j’ai en projet, je me propose de donner avec détails tous les
contrôles que j'ai adoptés, toutes les précautions que j'ai prises en chaque
occasion, et les noms de tous les témoins. Dans ce mémoire-ci je ne ferai que
les effleurer.
Mouvements
de corps pesants avec contact, mais sans effort mécanique.
« C'est
la, une des formes les plus simples des phénomenes que j'ai observés. Elle
varie en degrés depuis l'ébranlement ou le tremblement d'une chambre et de son
contenu, jusqu'a élever réellement dans l'air un corps pesant quand la main est
placée dessus. On peut objecter a cela que, quand on touche une chose qui est
en mouvement, il est possible de la pousser, de la tirer ou de la soulever ;
j'ai prouvé par expérience que, dans des cas nombreux, cela n'a pas pu avoir
lieu : mais comme preuves a donner j'attache tres peu d'importance a cette
classe de phénomenes, et je ne les mentionne que comme préliminaires a d'autres
mouvements du meme genre, mais produits sans contact.
« Ces
mouvements, et je puis meme dire les phénomenes de meme nature, sont
généralement précédés par un refroidissement de l'air tout particulier, qui
arrive quelquefois a etre un vent bien marqué. Sous son influence j'ai vu des
feuilles de papier s'enlever, et le thermometre baisser de plusieurs degrés.
Dans d'autres occasions, dont plus tard je donnerai les détails, je n'ai
remarqué aucun mouvement réel de l'air, mais le froid a été si intense que je
ne puis le comparer qu'a celui qu'on ressent lorsqu'on tient la main a quelques
pouces du mercure gelé. »
Phénomenes
de percussion et autres sons de meme nature.
« Le nom
populaire de raps (coups frappés) donne une idée tres fausse de ce genre de
phénomenes. A différentes reprises, pendant mes expériences, j'ai entendu des
coups délicats qu'on eut dit produits par la pointe d'une épingle ; une cascade
de sons perçants comme ceux d'une machine a induction en plein mouvement ; des
détonations dans l'air, de légers bruits métalliques aigus ; des craquements
comme ceux qu'on entend quand une machine a frottement est en action ; des sons
qui ressemblaient a des grattements, des gazouillements comme ceux d'un oiseau,
etc.
« Ces
bruits, que j'ai constatés avec presque tous les médiums, ont chacun leur
particularité spéciale. Avec M. Home ils sont plus variés ; mais, pour la force
et la régularité, je n'ai rencontré absolument personne qui put approcher de
Mlle Kate Fox. Pendant plusieurs mois, j'ai eu le plaisir d'avoir des occasions
presque innombrables de constater les phénomenes variés qui avaient eu lieu en
présence de cette dame, et ce sont ces bruits que j'ai particulierement
étudiés. Il est généralement nécessaire, avec les autres médiums, pour une
séance réguliere, de s'asseoir avant que rien se fasse entendre, mais avec Mlle
Fox, il semble qu'il lui soit simplement nécessaire de placer les mains sur
n'importe quoi pour que des sons bruyants s'y fassent entendre, comme un triple
choc, et quelquefois avec assez de force pour etre entendus a travers
l'intervalle de plusieurs chambres.
« J'en
ai entendu reproduire ainsi dans un arbre vivant sur un grand carreau de vitre,
dans un fil de fer tendu, sur une membrane tirée, dans un tambourin, sur la
couverture d'un cab, et dans le parquet d'un théâtre. Bien plus le contact
immédiat n'est pas toujours nécessaire, j'ai entendu ces bruits sortir du
parquet, des murs, etc., quand le médium avait les pieds et les mains attachés,
quand il était debout sur une chaise, quand il se trouvait dans une balançoire,
suspendue au plafond, quand il était enfermé dans une cage en fer, et quand il
était en syncope sur un sofa. Je les ai entendus sur les verres d'un harmonica,
je les ai sentis sur mes propres épaules et sous mes propres mains. Je les ai
entendus sur une feuille de papier tenue entre les doigts par un bout de fil
passé dans un coin de cette feuille. Avec la pleine connaissance des nombreuses
théories qu'on a mises en avant surtout en Amérique, pour expliquer ces sons,
je les ai éprouvés de toutes les manieres que j'ai pu imaginer, jusqu'a ce
qu'il ne m'ait plus été possible d'échapper a la conviction qu'ils étaient bien
réels et qu'ils ne se produisaient pas par la fraude ou par des moyens
mécaniques. »
«
Mouvements d'objets pesants placés a une certaine distance du médium.
« Les
exemples ou des corps lourds, tels que des tables, des chaises, des canapés,
etc., ont été mis en mouvement, sans le contact du médium, sont tres nombreux.
J'en indiquerai brievement quelques-uns des plus frappants. Ma propre chaise a
en partie décrit un cercle, mes pieds ne reposant pas sur le parquet, Sous les
yeux de tous les assistants, une chaise est venue lentement, d'un coin éloigné
de la chambre, et toutes les personnes présentes l'ont constaté ; dans une
autre circonstance, un fauteuil vint jusqu'a l'endroit ou nous étions assis,
et, sur ma demande, il s'en retourna lentement, a la distance d'environ trois
pieds. Pendant trois soirées consécutives, une petite table se mit lentement a
travers la chambre, dans des conditions que j'avais tout expres préparées a
l'avance, afin de répondre a toute objection qu'on aurait pu élever contre ce
fait. J'ai obtenu plusieurs fois la répétition d'une expérience que le Comité
de la Société de Dialectique a considérée comme concluante, savoir : le
mouvement d'une lourde table en pleine lumiere, le dos des chaises étant tourné
vers la table, et chaque personne étant agenouillée sur sa chaise, les mains
appuyées sur le dossier, mais ne touchant pas la table. Une fois, ce fait se
produisit pendant que j'allais et venais, cherchant a voir comment chacun était
placé.
«Tables
et chaises enlevées de terre sans l'attouchement de personne.
« Quand
des manifestations de ce genre sont exposées, on fait généralement cette
remarque: « Pourquoi n'y a-t-il que les tables et les chaises qui produisent
ces effets ? Pourquoi cette propriété est-elle particuliere aux meubles ?
»
« Je
pourrais répondre que je ne fais qu'observer et rapporter les faits, et que je
n'ai pas a entrer dans les pourquoi et les parce que, mais, cependant, il est
clair que si, dans une salle a manger ordinaire, un corps pesant inanimé doit
s'élever au-dessus du plancher, ce ne peut etre autre chose qu'une table ou une
chaise. J'ai de nombreuses preuves que cette propriété n'est pas particuliere
aux meubles seuls ; mais comme pour les autres démonstrations expérimentales,
l'intelligence ou la force, quelle qu'elle soit, qui produit ces phénomenes, ne
peut se servir que des objets qu'elle trouve appropriés a son but.
« En
cinq occasions différentes, une lourde table de salle a manger s'éleva de
quelques pouces a un pied et demi au-dessus du parquet, et dans des conditions
spéciales qui rendaient la fraude impossible. Dans une autre circonstance, une
table pesante s'éleva au-dessus du plancher, en pleine lumiere, pendant que je
tenais les pieds et les mains du médium.
« Une
autre fois, la table s'éleva du sol, non seulement sans que personne la touchât
mais encore dans des conditions que j'avais arrangées a l'avance, de maniere a
mettre hors de doute la preuve de ce fait.
«
Mouvement de divers petits objets sans le contact de personne.
« Sous
ce titre je me propose de décrire quelques phénomenes spéciaux dont j'ai été
témoin. Je ne puis guere indiquer ici que quelques-uns des faits les plus
saillants, qui tous, qu'on veuille bien s'en souvenir, ont eu lieu dans des
conditions telles que toute supercherie était rendue impossible. Attribuer ces
résultats a la fraude est absurde, car je rappellerai encore a mes lecteurs que
ce que je rapporte ici ne s'est pas accompli dans la maison d'un médium, mais
dans ma propre maison, ou il a été tant a fait impossible de rien préparer a
l'avance. Un médium circulant dans ma salle a manger ne pouvait pas, quand
j'étais assis dans une autre partie de la chambre avec plusieurs personnes qui
l'observaient attentivement, faire jouer par fraude un accordéon que je tenais
dans ma propre main, les touches en bas, ou faire flotter ce meme accordéon ça et la dans la chambre en jouant pendant
tout le temps. Il ne pouvait pas apporter avec lui un appareil pour agiter les
rideaux des fenetres, ou élever des jalousies vénitiennes jusqu'a huit pieds de
hauteur ; faire un noud a un mouchoir et le mettre dans un coin de la chambre ;
faire résonner des notes a distance sur un piano ; faire voler un porte-cartes
par l'appartement ; soulever une carafe et un verre
a pied au-dessus de la table ; faire dresser sur un de ses bouts un collier de
corail; faire mouvoir un éventail et éventer la compagnie ; ou bien, mettre en mouvement une pendule, enfermée dans une
vitrine solidement scellée au mur. »
Voici
deux lettres intéressantes adressées a l'auteur par les docteurs AB et CD, ses collaborateurs, ainsi désignés
dans un de ses premiers mémoires : on verra qu'elles émanent de deux savants
éminents.
« Mon cher monsieur
Crookes,
« Votre
mémoire me semble un exposé fidele de ce qui a eu lieu chez vous en ma
présence. Ma position a la table ne m'a pas permis de voir la main de M. Home
éloignée de l'accordéon, mais seulement que ce fait a été établi a ce moment
par vous-meme et par la personne assise de l'autre côté de M. Home.
« Ces
expériences me semblent montrer qu'il serait important de faire de nouvelles
recherches, mais je désire qu'il soit bien compris que je n'explique aucune
opinion quant a la cause des phénomenes qui ont eu lieu.
« A vous
bien sincerement.
«WILLIAM HUGGINS »
« 36, Russel-Square, 8 juin
1871.
« Cher
Monsieur,
« Etant
présent, dans un but de recherches, aux expériences d'essai relatées dans votre
article, j'apporte avec empressement mon témoignage en faveur de la parfaite
exactitude de la description que vous en avez faite, et des précautions et du
soin avec lesquels furent accomplies les différentes épreuves.
« Les
résultats me paraissent établir d'une maniere concluante ce fait important :
qu'il y a une force qui procede du systeme nerveux et qui est capable, dans la
sphere de son influence, de donner aux corps solides du mouvement et du poids.
« J'ai
constaté que cette force était émise par pulsations ; intermittentes, et non
pas sous la forme d'une pression fixe et continue, car l'index montait et
baissait incessamment pendant l'expérience. Ce fait me semble d'une grande
importance, parce qu'il tend a confirmer l'opinion qui lui donne pour source
l'organisation nerveuse, et il contribue beaucoup a asseoir l'importante
découverte du docteur Richardson, d'une atmosphere nerveuse d'intensité
variable enveloppant le corps humain.
« Vos
expériences confirment entierement la conclusion a laquelle est arrivé le
Comité de recherches de la « Dialectical Society », apres plus de quarante
séances d'essais et d'épreuves.
«
Permettez-moi d'ajouter que je ne vois rien qui puisse meme tendre a prouver
que cette force est autre chose qu'une force émanant de l'organisation humaine,
ou du moins s'y rattachant directement, et qu'en conséquence, comme toutes les
autres forces de la nature, elle est pleinement du ressort de cette rigoureuse
recherche scientifique, a laquelle vous avez été le premier a la soumettre.
« La
psychologie est une branche de la science qui a été jusqu'ici presque
entierement inexplorée; et cette négligence doit etre probablement attribuée a
ce fait, qui semble étrange, que l'existence de cette force nerveuse soit
demeurée si longtemps sans etre étudiée, examinée et a peine constatée.
« Maintenant
qu'il est acquis, par les preuves données par des appareils, que c'est un fait
de la nature ( et si c'est un fait, il est impossible d'en exagérer
l'importance au point de vue de la physiologie et de la lumiere qu'il doit
jeter sur les lois obscures de la vie, de l'esprit et de la science médicale),
sa discussion, son examen immédiat et sérieux ne peuvent pas ne pas etre faits
par les physiologistes et par tous ceux qui ont a cour la connaissance de «
l'homme», connaissance qui a été nommée avec raison « la plus noble étude de
l'humanité ».
« Pour
éviter l'apparence de toute conclusion prématurée, je recommanderais d'adopter
pour cette force un nom qui lui soit propre, et je me hasarde a suggérer l'idée
qu'on pourrait l'appeler force psychique ; que les personnes chez qui elle se
manifeste avec une grande puissance s'appellent Psychistes, et que la science
qui s'y rapporte se nomme psychisme, comme étant une branche de la psychologie.
«
Permettez-moi aussi de proposer la prochaine formation d'une Société
psychologique dans le but de faire marcher, par le moyen des expériences, des
journaux et de la discussion, l'étude de cette science jusqu'ici négligée.
« Je
suis, etc..
EDW. Wm. Cox,»
« La
théorie de la Force psychique, dit
encore William Crookes, n'est autre chose que la simple constatation du fait,
presque indiscutable maintenant, que, dans certaines conditions encore
imparfaitement fixées, a une certaine distance, encore indéterminée, du corps
de certaines personnes, douées d'une organisation nerveuse spéciale, il se
manifeste une force qui, sans le contact des muscles ou de ce qui s'y rattache,
exerce une action a distance, produit visiblement le mouvement, de corps
solides et y fait résonner des sons. Comme la présence d'une telle organisation
est nécessaire a la production des phénomenes, il est raisonnable d'en conclure
que cette force, par un moyen encore inconnu, procede de cette organisation. De
meme que l'organisme lui-meme est mu et dirigé intérieurement par une Force qui
est l'Ame, ou est gouvernée par l'âme, l'Esprit ou l'Intelligence (donnez-lui
le nom qu'il vous plaira) qui constitue l'etre individuel que nous appelons
l'homme, de meme il est raisonnable de conclure que la force qui produit le
mouvement au dela des limites du corps est la meme que celle qui le produit en
dedans de ces limites. Et, de meme qu'on voit souvent la force extérieure
dirigée par une Intelligence, de meme il est raisonnable de conclure aussi que
l'Intelligence qui dirige la force extérieure est la meme que celle qui la
gouverne intérieurement. C'est a cette force que j'ai donné le nom de Force
psychique, parce que ce nom définit bien la force qui, selon moi, prend sa
source dans l'Ame ou l'Intelligence de l'homme. »
Voici ce
que nous empruntons a l'ouvrage d'Aksakof comme faits de la deuxieme catégorie
:
« M. H.
Wedgwood témoigne comme il suit d'une expérience faite par Mme de Morgan, la
femme de feu le professeur de Morgan, l'auteur du livre Matiere et esprit :
« Un
exemple, dont Mme de Morgan m'a souvent entretenu, fera mieux comprendre le
pouvoir que possede l'esprit extra-corporel de produire, dans certaines conditions,
des effets physiques. Elle avait eu l'occasion de traiter par le magnétisme une
jeune fille, une clairvoyante, et plusieurs fois elle mit a l'épreuve sa
faculté de clairvoyance pour la faire aller en esprit en différents lieux, afin
d'y observer ce qui s'y passait. Un jour, elle eut le désir que le sujet se
rendît dans la maison qu'elle habitait. « Bien, dit la jeune fille, m'y voici,
j'ai frappé avec force contre la porte. » Le lendemain, Mme de Morgan s'informa
de ce qui s'était passé dans sa maison au meme moment : « Plusieurs méchants
enfants, lui répondit-on, étaient venus cogner contre la porte et puis
s'étaient sauvés. »
« Le
professeur Party cite de nombreux cas de ce genre dans le chapitre de son livre
intitulé Action a distance des mourants,
pages 125 et suivantes.
« Dans
son ouvrage, le Spiritualisme moderne,
il mentionne, d'apres le professeur Daumer, « le cas d'un grand-pere mourant
qui enjoint a sa fille présente a son chevet (elle n'habitait pas sous le meme
toit) de chercher son petit-fils, afin qu'il vienne prier pour lui, lui-meme
n'en ayant plus la force, - et qui au meme instant se manifeste comme esprit
chez son fils, en frappant avec violence sur la rampe de l'escalier et
l'appelle par son nom en le priant instamment de venir aupres de lui ; aussitôt
celui-ci s'habille, sort et rencontre sur le palier sa mere qui venait le chercher.
Tous deux se rendent aupres du grand-pere qui reçoit son petit-fils en
souriant, l'engage aussitôt a prier et meurt tout doucement deux heures apres.
»
3e Catégorie. - Les apparitions de doubles de personnes
vivantes ont été observées de tout temps, mais la science les a toujours
considérées comme des hallucinations subjectives. Aujourd'hui, grâce a quelques
savants courageux, qui n'ont pas hésité a sortir des sentiers tracés, ces faits
sont admis par beaucoup et sont rangés dans les cas d'hallucinations objectives.
Qu'il y
ait des phénomenes de ce genre purement subjectifs, c'est incontestable ; ils
peuvent meme etre fréquents, mais, cependant, nous sommes obligés de
reconnaître qu'il y en a aussi de réellement objectifs, possédant, en plus, un
certain degré de matérialité.
Les
faits suivants, puisés dans l'ouvrage d'Aksakof et dans celui de Crookes, mieux
que tous les discours éclaireront la question.
«
Apparition du double de Mlle Emilie Sagée.
« En
1845, existait en Livonie (et il existe encore) a environ 36 milles anglais de
Riga et a 1 lieue et demie de la petite ville de Volmar, un institut pour
jeunes filles nobles, désigné sous le nom de « pensionnat de Neuwelcke ». Le
directeur, a cette époque, était M. Buch.
« Le
nombre des pensionnaires, presque toutes de familles livoniennes nobles,
s'élevait a quarante-deux ; parmi elles se trouvait la seconde fille du baron
de Güldenstubbe, âgée de treize ans.
« Au
nombre des maîtresses il y avait une française, Mlle Emilie Sagée, née a Dijon.
Elle avait le type du nord : c'était une blonde a tres belle carnation avec des
yeux bleus clairs, des cheveux châtains ; elle était élancée et de taille un
peu au-dessus de la moyenne ; elle avait le caractere aimable, doux et gai,
mais elle était un peu timide et d'un tempérament nerveux un peu excitable. Sa
santé était ordinairement bonne, et pendant le temps (un au et demi) qu'elle
passa a Neuwelcke, elle n'eut qu'une ou deux indispositions légeres. Elle était
intelligente et d'une parfaite éducation et les directeurs se montrerent
completement satisfaits de son enseignement et de ses aptitudes pendant tout le
temps de son séjour. Elle était alors âgée de trente deux ans.
« Peu de
semaines apres son entrée dans la maison, de singuliers bruits commencerent a
courir sur son compte parmi les éleves. Quand l'une disait l'avoir vue dans
telle partie de l'établissement, fréquemment une autre assurait l'avoir
rencontrée ailleurs au meme moment, disant : « Mais non, cela ne se peut, car
je viens de la croiser dans l'escalier », ou bien elle assurait l'avoir vue
dans quelque corridor éloigné. On crut d'abord a une méprise ; mais comme le
fait ne cessait de se reproduire, les jeunes filles commencerent par trouver la
chose tres bizarre, et enfin, en parlerent aux autres maîtresses. Les
professeurs mis au courant déclarerent, par ignorance ou par parti pris, que
tout cela n'avait pas le sens commun et qu'il n'y avait pas lieu d'y attacher
une importance quelconque.
« Mais
les choses ne tarderent pas a se compliquer et prirent un caractere qui
excluait toute possibilité de fantaisie ou d'erreur. Un jour qu'Emilie Sagée
donnait une leçon a treize de ces jeunes filles, parmi lesquelles Mlle de
Güldenstubbe, et que, pour mieux faire comprendre sa démonstration, elle
écrivait le passage a expliquer au tableau noir, les éleves virent tout a coup,
a leur grande frayeur, deux demoiselles Sagée, l'une a côté de l'autre. Elles
se ressemblaient exactement et faisaient les memes gestes. Seulement, la
personne véritable avait un morceau de craie a la main et écrivait
effectivement, tandis que son double n'en avait, pas et se contentait d'imiter
les mouvements qu'elle faisait pour écrire.
« De la,
grande sensation dans l'établissement d'autant plus que toutes les jeunes
filles, sans exception, avaient vu la seconde forme et étaient parfaitement
d'accord dans la description qu'elles faisaient du phénomene.
« Peu
apres, une des éleves, Mlle Antoinette de Wrangel, obtint la permission de se
rendre, avec quelques camarades, a une fete locale du voisinage. Elle était
occupée a terminer sa toilette et Mlle Sagée, avec sa bonhomie et sa
serviabilité habituelles, était venue l'aider et agrafait sa robe par derriere.
La jeune fille, s'étant retournée par hasard, aperçut dans la glace deux Emilie
Sagée qui s'occupaient d'elle. Elle fut tellement effrayée de cette brusque
apparition qu'elle s'évanouit.
« Des
mois se passerent, et des phénomenes semblables continuaient a se produire. On
voyait de temps a autre, au dîner, le double de l'institutrice, debout, derriere
sa chaise, imitant ses mouvements, tandis qu'elle mangeait, mais sans couteau
ni fourchette ni nourriture dans ses mains. Eleves et domestiques servant a
table en ont témoigné également.
« Cependant,
il n'arrivait pas toujours que le double imitât les mouvements de la personne
véritable. Parfois, quand celle-ci se levait de sa chaise, on voyait son double
y rester assis. Une fois, étant couchée a cause d'un grand rhume, la jeune
fille dont il a été question, Mlle de Wrangel, se retournant par hasard quelques
instants apres, aperçut tres distinctement le double de la malade se promenant
de long en large dans la chambre. Cette fois, la jeune fille avait eu assez
d'empire sur elle-meme pour garder son calme et ne pas faire la moindre
observation a la malade, mais, peu apres, elle descendit l'escalier toute pâle,
et raconta ce dont elle venait d'etre témoin.
« Mais
le cas le plus remarquable de cette activité, en apparence indépendante, des
deux formes est certainement le suivant :
« Un
jour, toutes les éleves, au nombre de quarante-deux, étaient réunies dans une
meme piece et occupées a des travaux de broderie. C'était une grande salle au
rez-de-chaussée du bâtiment principal, avec quatre grandes fenetres, ou plutôt
quatre portes vitrées qui s'ouvraient directement sur le palier et conduisaient
dans un assez grand jardin attenant a l'établissement. Au milieu de la salle
était placée une grande table devant laquelle s'assemblaient habituellement les
différentes classes pour se livrer a des travaux d'aiguille ou autres
semblables.
« Ce
jour-la les jeunes pensionnaires étaient toutes assises devant la table, et
elles pouvaient tres bien voir ce qui se passait dans le jardin ; tout en
travaillant, elles voyaient Mlle Sagée, occupée a cueillir des fleurs, non loin
de la maison; c'était une de ses distractions de prédilection. A l'extrémité
supérieure de la salle se tenait une autre maîtresse, chargée de la
surveillance et assise dans un fauteuil de maroquin vert. A un moment donné
cette dame s'absenta, et le fauteuil resta vide. Mais ce ne fut que pour peu de
temps, car les jeunes filles y aperçurent tout a coup la forme de Mlle Sagée.
Aussitôt, elles porterent leurs regards dans le jardin et la virent toujours
occupée a cueillir des fleurs ; seulement ses mouvements étaient plus lents et
plus lourds, pareils a ceux d'une personne accablée de sommeil ou épuisée de
fatigue. Elles porterent de nouveau leurs yeux sur le fauteuil ou le double
était assis, silencieux et immobile, mais avec une telle apparence de réalité que
si elles n'avaient vu Mlle Sagée et qu'elles n'eussent su qu'elle avait apparu
dans le fauteuil sans etre entrée dans la salle, elles auraient pu croire que
c'était elle-meme. Mais certaines qu'elles n'avaient pas affaire a une personne
véritable, et quelque peu habituées a ces étranges manifestations, deux des
éleves les plus hardies s'approcherent du fauteuil, et, touchant l'apparition,
crurent y rencontrer une résistance comparable a celle qu'offrirait un léger
tissu de mousseline ou de crepe. L'une osa meme passer au devant du fauteuil et
traverser en réalité une partie de la
forme. Malgré cela, celle-ci dura encore un peu de temps, puis s'évanouit
graduellement. L'on observa aussitôt que Mlle Sagée avait repris la cueillette
de ses fleurs avec sa vivacité habituelle. Les quarante-deux pensionnaires
constaterent le phénomene de la meme maniere.
«
Quelques-unes d'entre elles demanderent ensuite a Mlle Sagée si, a cette
occasion, elle avait éprouvé quelque chose de particulier ; elle répondit
qu'elle se souvenait seulement d'avoir pensé a la vue du fauteuil vide : «
J'aimerais mieux que l'institutrice ne s'en fut pas allée ; surement ces
demoiselles vont perdre leur temps et commettre quelque espieglerie. »
« Ces
curieux phénomenes durerent, avec diverses variantes, environ dix-huit mois,
c'est-a-dire pendant tout le temps que Mlle Sagée conserva son emploi a
Neuwelcke (durant une partie des années 1845-1846) ; il y eut cependant des
intervalles de calme d'une a plusieurs semaines. Ces manifestations avaient
lieu principalement a des moments ou elle était tres préoccupée ou tres
appliquée a sa tâche. On remarqua qu'a mesure que le double devenait plus net
elle s'affaiblissait, et, réciproquement, qu'a mesure que le double
s'évanouissait, l'etre corporel reprenait ses forces. Elle-meme était
inconsciente de ce qui se passait et n'en avait connaissance que d'apres ce
qu'on lui disait, elle en était ordinairement instruite par le regard des
personnes présente s; jamais elle ne vit l'apparition de son double, pas plus
qu'elle ne semblait s'apercevoir de la raideur et de l'inertie qui s'emparaient
d'elle des que son double était vu par d'autres personnes.
«
Pendant les dix-huit mois ou la baronne Julie de Güldenstubbe eut l'occasion
d'etre témoin de ces phénomenes et d'entendre les autres en parler, jamais ne
se présenta le cas de l'apparition du double a une grande distance, par exemple
a plusieurs lieues de la personne corporelle ; quelquefois, cependant, le
double apparaissait pendant ses promenades dans le voisinage, quand
l'éloignement n'était pas trop grand. Le plus souvent, c'était dans l'intérieur
de l'établissement. Tout le personnel de la maison l'avait vu. Le double
paraissait etre visible pour toutes les personnes, sans distinction d'âge ni de
sexe. »
La pauvre
institutrice, atteinte de cette affection
depuis l'âge de seize ans, fut maintes fois forcée de changer de maison, a
cause des émotions violentes éprouvées par ses éleves témoins de ce singulier
phénomene.
Photographie
du double d'un vivant.
M. Pierrart
a rapporté, dans la Revue Spiritualiste,
1864, page 84 « M. Gurcio Paulucci, photographe a Chiavari, pres de Genes,
prenait le portrait d'un groupe de trois personnes ; apres le développement de
la plaque, le portrait d'une quatrieme personne apparut derriere le groupe ;
c'était celui du double d'un aide qui s'était tenu quelques instants avant
l'exposition de la plaque derriere le groupe, pour faire prendre la pose voulue
aux personnes qui le composaient. M. Guido, ingénieur, un ami de M. Paulucci, celui-la
meme qui communiqua le fait a M. Pierrart, a décrit toutes les manipulations
chimiques au moyen desquelles il s'est assuré que l'image se trouvait bien sur
le collodion et non, par quelque inadvertance, sur la plaque de verre. »
Communication
faite par un vivant, M. Baldwin, de Birmingham, accompagnée de l'apparition de
son double, fait relaté par
le journal Human nature, 1867, page
510.
« Il y a
de cela quinze jours, miss Taylor se trouvant a table, chez elle, a prendre le
thé avec sa tante et son cousin, elle raconta a ceux-ci qu'elle voyait tres
distinctement M. Baldwin qui se tenait au coin de la table a laquelle ils
étaient assis. A cette occasion, l’apparition ne se manifesta par aucune
communication intelligente, si ce n'est pas un sourire. Mais, quelques jours
apres, les memes personnes se trouvant réunies dans une séance spirite, miss
Taylor répéta qu'elle voyait M. Baldwin ; la-dessus miss Kross, sa cousine,
demanda une preuve de son identité. Aussitôt il s'approcha de la table, saisit
le bras de miss Taylor, qui était médium écrivain, et écrivit son nom en
entier. Miss Cross exigea encore une autre preuve et dit que, si c'était bien
lui, qu'il écrivît la demande qu'il lui avait récemment adressée, qu'il répétât
les dernieres paroles qu'il avait prononcées le soir précédent. Aussitôt elle
fut écrite intégralement. »
« Les
faits d'expérimentation dans cette voie, dit Aksakof, ne sont pas nombreux,
mais ils existent. Ainsi M. Colman témoigne que la fille du juge Edmonds, miss
Laure, « pouvait parfois, a volonté, dégager au dehors (extérioriser) son
esprit et le faire apparaître sous sa propre forme, et délivrer ainsi des
messages aux personnes qui lui étaient sympathiques. »
Miss
Mapes, la fille du professeur Mapes, assura de son côté a M. Colman que «son
amie miss Edmonds lui était apparue et lui avait délivré des messages,
quoiqu'elles fussent séparées l'une de l'autre par une distance de 20 milles
anglais. » M. Colman cite encore un cas de ce genre. (Voir Spirilualism in America, p.4, et
Spiritualist, 1873, p. 470.)
Expériences de W. Crookes.
« Apparitions lumineuses.
« Ces
manifestations étant un peu faibles exigent, en général, que la chambre ne
soit, pas éclairée. J'ai a peine besoin de rappeler a mes lecteurs que, dans de
pareilles conditions, j'ai pris toutes les précautions convenables pour éviter
qu'on ne m'en imposât par de l'huile phosphorée ou par d'autres moyens. Bien
plus, beaucoup de ces lumieres étaient d'une nature telle que je n'ai pu
arriver a les imiter par des moyens artificiels.
« Sous
les conditions du contrôle le plus rigoureux, j'ai vu un corps solide, lumineux
par lui-meme, a peu pres de la grosseur et de la forme d'un ouf de dinde,
flotter sans bruit a travers la chambre, s'élever par moments plus haut que
n'aurait pu le faire aucun des assistants en se tenant sur la pointe des pieds
et ensuite descendre doucement sur le parquet. Cet objet fut visible pendant
plus de dix minutes, et avant de s'évanouir il frappa trois fois la table avec
un bruit semblable a celui d'un corps dur et solide.
«
Pendant ce temps le médium était étendu sur une chaise longue et paraissait
tout a fait insensible.
« J'ai
vu des points lumineux jaillir de côté et d'autres se reposer sur la tete de différentes
personnes ; j'ai eu réponse a des questions que j'avais faites par des éclats
de lumiere brillante qui se sont produits devant mon visage et le nombre de
fois que j'avais fixé. J'ai vu des étincelles de lumiere s'élancer de la table
au plafond, et ensuite retomber sur la table avec un bruit tres distinct. J'ai
obtenu une communication alphabétique au moyen d'éclairs lumineux, se
produisant dans l'air, devant moi, et au milieu desquels je promenais ma main.
J'ai vu un nuage lumineux flotter au-dessus d'un tableau, » etc.
« Nombre
de fois, moi-meme et d'autres personnes avons vu une main pressant les touches
d'un accordéon, pendant qu'au meme moment nous voyions les deux mains du médium
qui quelquefois étaient tenues par ceux qui étaient aupres de lui.
« Les
mains et les doigts ne m'ont pas toujours paru etre solides et comme vivants.
Quelquefois, il faut le dire, ils offraient plutôt l'apparence d'un nuage
vaporeux condensé en partie sous forme de main. Tous ceux qui étaient présents
ne le voyaient pas également bien. Par exemple, on voit se mouvoir une fleur ou
quelque autre petit objet, un des assistants verra une vapeur lumineuse planer
au-dessus; un autre découvrira une main d'apparence nébuleuse tandis que
d'autres ne verront rien autre chose que la fleur en mouvement. J'ai vu plus
d'une fois, d'abord un objet se mouvoir, puis un nuage lumineux qui semblait se
former autour de lui, et enfin le nuage se condenser, prendre une forme et se
changer en une main parfaitement faite. A ce moment, toutes les personnes
présentes pouvaient voir cette main. Cette main n'est pas toujours une simple
forme, quelquefois elle semble parfaitement animée et tres gracieuse ; les
doigts se meuvent et la chair semble etre aussi humaine que celle de toutes les
personnes présentes. Au poignet ou au bras elle devient vaporeuse, et se perd
dans un nuage lumineux.
« Au
toucher, ces mains paraissent quelquefois froides comme de la glace et mortes ;
d'autres fois, elles m'ont semblé chaudes et vivantes, et ont serré la mienne
avec la ferme étreinte d'un vieil ami.
« J'ai
retenu une de ces mains dans la mienne, bien résolu a ne pas la laisser
échapper. Aucune tentative ni aucun effort ne furent faits pour me faire lâcher
prise, mais peu a peu cette main sembla se résoudre en vapeur, et ce fut ainsi
qu'elle se dégagea de mon étreinte ».
L'écriture directe produite, sans le concours d'une main apparente,
sur du papier, comme les expériences de Crookes avec MIle Fox ; celles de
Zollner et du docteur Paul Gibier, sur des ardoises, avec Sleede ; de meme que
le moulage des mains fluidiques,
rentrent, d'apres les savants que nous citons, dans cette catégorie.
Ce qui
tend encore a prouver cette assertion, c'est l'empreinte du visage d'Eusapia,
obtenue, dans les memes conditions, ces dernieres années.
Souvent
les observateurs ont constaté que l'apparition n'était que le double du médium.
Malgré cela, ces faits n'infirment pas ceux que nous étudierons a la fin de ce
chapitre.
4e Catégorie. - « L'action physique et psychique
de l'homme, dit Aksakof, n'est pas confinée a la périphérie de son
corps. » Les faits qui précedent et ceux qui vont suivre affirment cette
proposition.
En
effet, si nous donnons aux phénomenes animiques la créance qu'ils méritent,
nous sommes contraints a marcher dans la voie tracée par les savants qui ont
étudié ces faits et qui nous les donnent dans toute leur exactitude. Mais si, a
priori, sans réflexion sérieuse et surtout sans examen, nous rejetons ces
faits, si nous nous obstinons a les croire impossibles, nous resterons
ignorants et jamais nous n'aurons la satisfaction bien grande que procure la
connaissance des vérités peu connues ou ignorées, mais qui ne demandent qu'a se
révéler.
Quel
intéret auraient ces expérimentateurs consciencieux a soutenir des faits non
contrôlés, insuffisamment étudiés ou erronés ? Nous ne saisissons point leur
but : il est donc plus logique d'admettre leur bonne foi et de croire ce qu'ils
affirment.
Nous
n'ignorons certes pas que toutes les vérités ont eu le plus grand mal pour
s'implanter, et nous savons aussi combien la vieille routine est encore
puissante. Et lorsqu'une vérité renverse les dogmes scientifiques ou les dogmes
philosophiques et religieux elle est toujours mal accueillie. Comment
voulez-vous que les hommes qui ont créé des lois scientifiques, qu'ils ont
crues immuables, détruisent ce qu'ils ont édifié avec labeur et peine ? Mais,
et cela est déja arrivé, leurs neveux ou leurs arriere-neveux saperont ces lois
imparfaites et les remplaceront par d'autres qui, peut-etre a leur tour, seront
reconnues impuissantes pour expliquer des faits nouveaux.
Nier
l'action extracorporelle de l'homme, son objectivité, apres les effets qui la
justifient, c'est vraiment s'obstiner d'une façon regrettable.
La
nature a bien dévoilé quelques-uns de ses secrets, mais il en reste encore
d'innombrables a connaître, et ce n'est pas la négation systématique qui
réalisera un progres dans un ordre quelconque de nos connaissances.
Plus que
bien d'autres, ces faits, produit de
l'organisme humain, méritent toute notre attention, car ils nous ouvrent
des horizons a peine entrevus d'ou nous pouvons tirer des trésors insoupçonnés.
Il est donc du devoir des savants modernes de pénétrer ces secrets et de les
enseigner comme ils enseignent d'autres connaissances acquises.
Nous
avons déja dit que la forme plus ou moins matérialisée des apparitions, dans la plupart des cas, a une grande
ressemblance avec le médium, le fait a été maintes fois constaté, et nous
devons en conclure que, le plus souvent,
on se trouve en présence d'un dédoublement du sujet, que ce dédoublement soit
partiel ou total.
D'apres
Aksakof, le premier cas bien constaté se serait produit vers 1855, dans des
séances obscures faites par les freres Davenport.
« Au
beau milieu de la séance, dit Aksakof, qui s'est bien documenté, un agent de
police ouvrit sa lanterne sourde et éclaira la chambre. Alors se passa une
scene étrange ; Davenport pere se leva en sursaut et déclara, en proie a une
vive excitation, qu'il avait vu son fils Ira pres de la table en train de jouer
sur l'un des tambourins, juste au moment ou la chambre venait d'etre éclairée,
et qu'il l'avait vu revenir a sa chaise. » M. Davenport était exaspéré ; mais
quel ne fut pas son étonnement lorsque, « le calme une fois rétabli, une
vingtaine des assistants affirmerent sur leur honneur qu'ils avaient
distinctement vu, outre la forme humaine aupres de la table, - le double
fantôme d'Ira Davenport, - en meme temps le garçon lui-meme, en chair et en os
assis sur sa chaise, entre deux autres personnes. Le fantôme s'était dirigé
vers le garçon, mais n'était probablement pas arrivé jusqu'a lui, vu qu'il
avait disparu a environ 6 pieds de l'endroit ou il était assis. » (Voir The Davenport Brothers, a biography par
Randolph, Boston, 1869, pp. 198-99; cité dans le Spiritualist, 1873, pp. 154-470.) Dans ce meme livre, nous
apprenons comment s'y est pris le professeur Mapes pour s'assurer que les
phénomenes physiques étaient produits par les doubles des freres Davenport: «
Lorsque, dit-il, la guitare arriva pres de moi, je palpai soigneusement la
personne que je supposais etre le jeune Ira Davenport. Je cherchai a m'assurer
de sa présence en passant ma main sur sa forme entiere, mais je ne pus le
retenir, parce qu'il glissait entre mes mains, s'évanouissait pour ainsi dire
le plus aisément du monde. »
« C'est
surtout aux vetements du jeune Davenport que M. Mapes était sur de l'avoir
reconnu dans l'obscurité ; mais a la lumiere qui fut immédiatement demandée, on
put constater que le jeune Ira était toujours attaché a sa chaise, ainsi que
l'avait laissé le professeur. A une séance qui eut lieu chez M. Mapes, ce
dernier, aussi bien que sa fille, put encore une fois constater le dédoublement
des bras et des manches du vetement du médium. »
Les
memes observations ayant été faites sur d'autres médiums, les journaux spirites
ont soulevé des controverses contre l'attribution de ces faits a l'animisme ;
mais la chose ayant été bien établie, il n'y avait pas lieu d'aller a
l'encontre de l'évidence.
Dans un
numéro du Light, de 1885, au sujet
des expériences de Mr Crookes avec Mrs Fay, il est dit :
«
Attendu que l'expérience dont j'y fais
mention, celle de M. Crookes avec Mme Fay, a été exécutée dans les conditions
de contrôle les plus rigoureuses que la science puisse exiger, et qu'un cas de
dédoublement s'y est produit, nous devons considérer cette expérience comme une
des preuves les plus sérieuses de la réalité de ce phénomene. M. Cox, qui a
pris part a cette séance, la raconte ainsi dans le Spiritualist (1875, I, p. 151).
« Dans
son excellente description de la séance dont il s'agit, M. Crookes dit q'une
forme humaine entiere a été vue par moi ainsi que par d'autres personnes. C'est
la vérité. Lorsque l'on me remettait mon livre, le rideau s'écartait
suffisamment pour me permettre de voir la personne qui me le tendait. C'était
la forme de Mme Fay, dans son intégralité, sa chevelure, sa figure, sa robe de
soie bleue, ses bras nus jusqu'au coude, et portant des bracelets ornés de
perles fines. A ce moment, le courant galvanique n'enregistra pas la moindre
interruption, ce qui se serait produit inévitablement si Mme Fay avait dégagé
ses mains des fils conducteurs. Le fantôme apparut au côté du rideau opposé a
celui ou se trouvait Mme Fay, a une distance d'au moins 8 pieds de sa chaise,
de sorte qu'il lui eut été impossible, de toutes manieres, d'atteindre le livre
sur le rayon sans etre obligée de se dégager des fils conducteurs. Et,
cependant, je le répete, le courant n'a pas subi la moindre interruption.
« Il y a
un autre témoin qui a vu la robe bleue et les bracelets. Personne de nous n'a
fait part aux autres de ce qu'il avait vu, avant que la séance ne fut terminée ;
par conséquent, nos impressions sont absolument personnelles et indépendantes
de toute influence.
« Les
expériences de photographie sont aussi la pour établir le fait du dédoublement.
On sait que Katie King ressemblait d'une façon frappante a son médium miss
Florence Cook; les portraits que M. Crookes a obtenus de Katie en témoignent a
l'évidence.
« Les
empreintes produites sur du papier noirci viennent également corroborer le
phénomene en question. Mais la démonstration la plus éclatante du dédoublement
nous est fournie par les expériences de moulage au moyen de la paraffine.
« J'ai
cité l'expérience faite avec M. Eglinton, au cours de laquelle on a obtenu, au
moyen de ce procédé, la forme de son pied, pendant que le pied meme restait
apparent aux yeux des membres de la commission chargée de surveiller
l'expérience.
« M.
Harrison fait connaître un résultat analogue en mentionnant une autre
expérience dans laquelle on a obtenu le moulage des mains du médium. »
« Le
docteur espagnol Otero Assévedo rapporte une expérience bien curieuse, qu'il a
eu l'occasion de faire. En 1889, il se rendit a Naples, dans le but de vérifier
l'authenticité des manifestations qui se produisaient aux séances du médium
Eusapia Paladino. M. Assévédo désirait obtenir une empreinte sur terre glaise,
dans des conditions absolument inattaquables. Pour cela, il remplit une
assiette de terre glaise fraîche. A la fin de la séance réglementaire, comprenant
les manifestations habituelles, Eusapia Paladino proposa, de son plein gré, de
tenter l'expérience imaginée par le savant espagnol. Elle pria M. Assevédo de
placer l'assiette contenant la terre glaise sur une chaise, devant elle, a une
distance d'environ 2 metres, en s'assurant au préalable que la surface de la
masse était tout a fait unie. Il la recouvrit ensuite d'un mouchoir. Cela se
passait en pleine lumiere.
« Tout
le monde avait les yeux fixés sur Eusapia. Celle-ci avança la main vers l'endroit
ou se trouvait l'assiette, fit quelques mouvements convulsifs et s'écria : «
C'est fait ! » Quand le mouchoir fut enlevé, on constata que sur la terre
glaise il y avait l'empreinte, nettement marquée, de trois doigts. (Voir la Revue spirite, 1889, p. 587.) Dans les
lettres qu'il m'écrivit, M. Assevedo m'a assuré que, pour lui, il n'y avait pas
le moindre doute quant a la réalité de ces faits, bien qu'il eut abordé ces
séances avec les idées préconçues d'un « matérialiste enragé», selon son
expression. »
Les
personnes qui ont eu la bonne fortune d'assister au dédoublement de l'organisme
humain s'accordent a dire que ces apparitions produisent des effets physiques :
coups, attouchements, déplacements, soulevement et mouvement d'objets divers,
etc...
L'expérience
remarquable du magnétiseur negre Lewis avec une personne endormie par ses soins
est des plus intéressantes et elle est surtout concluante[13]. Nous en citons ici une partie :
« En
février 1856, nous allâmes a Blackheath : il s'y produisit un incident tres
curieux. Nous étions descendus a un hôtel, et, le soir, dans le salon commun,
Lewis magnétisa plusieurs personnes et fit quelques expériences frappantes
d'électro-biologie, qui intéresserent vivement l'auditoire.
« Il fut
convenu qu'on mettrait une salle a la disposition de Lewis et, le lendemain, la
conférence eut lieu. Apres les expériences habituelles de magnétisme, qui
réussirent a merveille, Lewis procéda a la démonstration de quelques-uns des
phénomenes de clairvoyance et de somnambulisme sur la personne d'une jeune
fille qu'il n'avait jamais vue auparavant et qui, avec d'autres personnes,
avait quitté les rangs du public pour monter sur l'estrade. Apres l'avoir
plongée dans un profond sommeil, il lui enjoignit d'aller chez elle et de
rendre compte de ce qu'elle y verrait. Elle se mit d'abord a raconter qu'elle
voyait la cuisine, qu'il s'y trouvait deux personnes occupées aux besognes
domestiques.
«
Croyez-vous pouvoir toucher celle de ces deux personnes qui se trouve la plus
rapprochée de vous ?» demanda Lewis.
« Il
n'obtint pour toute réponse qu'un murmure inintelligible. La-dessus, il posa
une main sur la tete du sujet et l'autre sur le plexus solaire, et lui dit : «
Je veux que vous lui touchiez l'épaule ; vous devez le faire, et vous le
ferez. » La jeune fille se mit a rire et dit : « Je l'ai touchée ; comme
elles sont effrayées ! » S'adressant au public, Lewis demanda si quelqu'un
connaissait la jeune personne. Ayant reçu une réponse affirmative, il proposa
qu'une députation se rendit au domicile de la jeune fille, afin de s'assurer de
l'exactitude de son récit. Plusieurs personnes s'y rendirent, et lorsqu'elles
furent de retour, elles confirmerent en tous points ce que la jeune personne
endormie avait raconté, la maisonnée était, en effet, sens dessus dessous et
dans une profonde excitation parce qu'une des personnes qui s'était trouvée
dans la cuisine avait déclaré avoir vu un fantôme et que celui-ci lui avait
touché l'épaule. »
Le
docteur Georges Wyld publia, dans le
Light, 1882, P. 26, le fait suivant :
«
J'avais d'excellents rapports d'amitié depuis quinze ans avec miss J... et sa
mere. Ces deux femmes ont reçu une instruction des plus distinguées et sont
dignes de foi. Le récit qu'elles m'ont fait a été confirmé par l'une des
servantes. Quant a l'autre, je n'ai pu la retrouver.
«
C'était quelques années avant notre connaissance. Miss J... était tres assidue
a visiter les pauvres. Or, un jour qu'elle regagnait son domicile, apres une
tournée charitable, elle se sentit fatiguée et mal a l'aise a cause du froid et
éprouva le désir d'aller a son retour se réchauffer aupres du four, dans la
cuisine. Au moment précis qui correspondait a celui ou cette idée lui était
passée par l'esprit, deux servantes qui étaient occupées dans la cuisine virent
tourner le bouton de la porte, celle-ci s'ouvrir et livrer passage a miss J...
Celle-ci s'approcha du feu et se chauffa les mains. L'attention des servantes
était attirée par les gants de chevreau glacé couleur verte que miss J... avait
aux mains. Subitement, devant leurs yeux, elle disparut. Frappées d'étonnement,
elles monterent précipitamment chez la mere de miss J... et lui firent part de
leur aventure, sans oublier le détail des gants verts.
« La
mere en conçut quelque appréhension de mauvais augure, mais elle essaya de
tranquilliser les servantes, leur disant que miss J... ne portait que des gants
noirs, qu'elle n'en avait jamais eu de verts, et que par conséquent leur vision
ne pouvait etre considérée comme le fantôme de sa fille.
« Une
demi-heure apres, miss J... en personne faisait son entrée ; elle alla droit a
la cuisine et se chauffa devant le feu. Elle avait a ses mains des gants verts,
n'en ayant pu trouver de noirs. »
L'insucces
de l'expérience du docteur Ferroul tentée il y a quelques années, avec une
commission de la Faculté des sciences de Montpellier dont faisait partie le professeur
Grasset, est certainement du a un phénomene de cette nature.
Il
s'agissait de faire lire, a distance, un billet renfermé dans une boîte ficelée
et cachetée, placée dans le cabinet de l'expérimentateur.
Le
sujet, influencé par la présence des commissaires, ne fut pas, ce jour-la, en
pleine possession de ses facultés psychiques et ne put, comme dans une
expérience antérieure, qui avait parfaitement réussi, lire e billet.
Ferroul,
certain des facultés de son sujet, insistait pour le faire lire. Apres
plusieurs tentatives infructueuses, le sujet, agacé, énervé, dit : « Tu veux
que je voie, que je lise ? Tiens ! » Et il fit avec ses mains le mouvement
de quelqu'un qui déchire ou arrache quelque chose.
Or, en
reprenant la boîte, les commissaires constaterent que les ficelles avaient été
dérangées, que des cachets étaient brisés et que la boîte avait du etre ouverte
par un compere, ce qui expliquait le demi succes de la somnambule : elle avait lu quelques mots du billet.
Les
membres de cette commission, ignorant ces extraordinaires phénomenes, furent
fort convaincus que Ferroul avait voulu les mystifier, ce qu'ils affirmerent du
reste.
Si le Dr
Ferroul s'était entouré de toutes les précautions nécessaires, s'il avait fait
apposer les scellés aux portes et aux fenetres avant l'expérience, ces messieurs
de Montpellier auraient été probablement perplexes, en trouvant les cachets des
portes et des fenetres intacts, contrairement a ceux de la boîte.
W.
Crookes, parlant des formes et figures de fantômes de cette catégorie, dit
ceci :
« Ces
phénomenes sont les plus rares de tous ceux dont j'ai été témoin. Les
conditions nécessaires pour leur apparition semblent etre si délicates, et il faut
si peu de chose pour contrarier leur manifestation que je n'ai eu que de tres
rares occasions de les voir dans des conditions de contrôle satisfaisantes. Je
mentionnerai deux de ces cas.
« Au
déclin du jour, pendant une séance de M. Home chez moi, je vis s'agiter les
rideaux d'une fenetre, qui était environ a huit pieds de distance de M. Home.
Une forme sombre, obscure, demi-transparente, semblable a une forme humaine,
fut aperçue par tous les assistants, debout pres de la croisée, et cette forme
agitait le rideau avec sa main. Pendant que nous la regardions, elle s'évanouit
et les rideaux cesserent de se mouvoir.
« Le cas
qui suit est encore plus frappant. Comme dans le cas précédent M. Home était le
médium. Une forme de fantôme s'avança d'un coin de la chambre, alla prendre un
accordéon, et ensuite glissa dans l'appartement en jouant de cet instrument.
Cette forme fut visible pendant plusieurs minutes pour toutes les personnes
présentes et en meme temps on voyait aussi M. Home. Le fantôme s'approcha d'une
dame qui était assise a une certaine distance du reste des assistants, cette
dame poussa un petit cri a la suite duquel l'ombre disparut. »
On
pourrait croire que, depuis les travaux des personnages que nous avons cités,
la question si passionnante du spiritualisme moderne n'intéresse plus les
savants.
Le
passage suivant du discours de M. le colonel de Rochas, que, nous empruntons a la Paix universelle, prononcé, pour
présenter notre ami G. Delanne, aux auditeurs qui assistaient a sa conférence
du dimanche 8 avril dernier, a Grenoble, prouvera qu'on doit croire le
contraire.
« Apres
Charcot et Bernheim, qui s'arreterent prudemment aux états superficiels de
l'hypnose, de peur d'etre confondus avec les anciens magnétiseurs, d'autres,
plus hardis, ne craignirent pas d'avoir recours a leurs procédés traditionnels
et retrouverent une série d'états profonds qu'ils classerent d'apres des
propriétés a peu pres constantes chez les sujets sains. De plus, n'ayant reculé
devant aucun sacrifice d'argent pour étudier des sujets exceptionnels comme la
napolitaine Eusapia Paladino, ils arriverent a constater, d'une façon certaine
pour eux, non seulement la production de mouvements sans contact qu'on a appelé l'extériorisation de la motricité,
mais encore l'extériorisation de la forme,
c'est-a-dire la production d'ectoplasmes
semblant sortir du corps du sujet et pouvant etre vus et touchés pendant
quelques secondes ; c'est la le premier degré des matérialisations dont va vous
entretenir M. Delanne.
« Les
résultats publiés par ces hommes, dont le nom seul était une garantie, finirent
par émouvoir les princes de la science officielle. Un nouveau groupe se forma,
au cours de l'été passé a Paris, pour vérifier encore leurs observations et
tâcher de faire un nouveau pas dans la route qu'ils avaient ouverte.
« Ce
groupe, dont faisaient partie MM. D'Arsonval, Curie, Branly, Bergson, Brissaud
et Gilbert Ballet, tint avec Eusapia treize séances, du 8 juin au 15 juillet
1905, et obtint tous les phénomenes que nous avions constatés cinq ans
auparavant, tout pres d'ici, dans ma maison de campagne de l'Aguélas, avec une
commission composée de MM. Sabathier, doyen de la Faculté des Sciences de
Montpellier ; Maxwel, avocat général a Bordeaux ; Dariex, docteur en médecine,
et de deux docteurs es sciences, le comte de Grammont et le baron de
Watteville.
« Je
viens de recevoir le compte-rendu sténographié de ces séances, ou l'on a pris
toutes les précautions et employé tous les procédés d'enregistrement en usage
dans les laboratoires de physique. Vous pouvez juger de l'impression produite
sur ces personnages, plutôt sceptiques au début par ce fait qu'ils viennent
d'obtenir du gouvernement l'autorisation d'une loterie de quatre millions, dont
le produit sera destiné a fonder a Paris un Institut pour l'étude des
phénomenes de psychologie parmi lesquels on classe, sous le nom de métapsychisme, ceux dont je viens de
vous parler.
« Des
qu'ils auront l'estampille officielle, des qu'on paiera des savants pour les
étudier et les enseigner, ils prendront certainement un essor analogue a celui
dont nous avons été témoins pour l'électricité. Nos enfants les accepteront
aussi facilement que nous acceptons aujourd'hui la télégraphie sans fil et le
transport de la force; j'espere qu'ils rendront alors justice a ceux qui, comme
Delanne et Richet, n'ont pas craint de marcher a l'avant-garde pour explorer
des régions dangereuses ou inconnues. »
SPIRITISME
Les
faits qui précedent démontrent que, dans certaines conditions physiques
particulieres, un médium peut inconsciemment s'extérioriser partiellement ou
totalement.
Nous
avons vu que des personnes vivantes éloignées du lieu des expériences ont pu,
par leur double, manifester leur présence par des coups frappés, des
attouchements et des apparitions : Hallucinations
véridiques : jolis mots, bien trouvés!...
Ces
phénomenes laissent supposer que des faits de meme nature peuvent etre produits
par des etres indépendants, en dehors du médium et d'autres personnes vivantes.
L'animisme
nous indique, ce nous semble, que, la désagrégation du corps ne peut porter
atteinte a ce double qui, quoique
étant constitué par une sorte de matiere, n'est certes pas celle qui frappe
ordinairement nos sens.
L'etre intérieur de l'homme qui traverse
la matiere la plus grossiere mieux que les rayons lumineux peut, définitivement
séparé de sa prison de chair, subsister et prouver sa surexistence en puisant
chez les vivants les forces semi-matérielles nécessaires : ce sont alors des
faits spirites qui se produisent.
Constater
un fait, c'est facile ; l'expliquer, c'est une autre affaire, car le sujet dont
nous nous occupons est trop complexe et son étude présente de grandes
difficultés. Afin de ne pas se tromper sur son interprétation, il ne faut pas
s'enthousiasmer et procéder comme pour les recherches de physique ou de chimie.
Ce n'est
pas parce qu'un observateur constatera la formation d'un etre fluidique qu'il doit conclure qu il a sous les yeux l'esprit
d'un mort. Le cas peut assurément se présenter, comme nous le verrons dans la
suite, mais plus on verra de matérialisations, plus on constatera qu'elles sont
du domaine de l'animisme, et c'est pourtant ces phénomenes animiques qui nous
ameneront a saisir les faits spirites, a les comprendre.
Les
phénomenes physiques que nous connaissons prouvent que ces phénomenes
médianimiques sont les avant-coureurs de faits transcendants, de faits
intellectuels qui déroutent ceux qui veulent malgré tout les attribuer a de
simples effets psycho-physiques.
L'animisme
est le trait d'union du spiritisme, et quoique les effets réellement dus a ce
dernier soient rares, ils sont cependant assez nombreux pour le justifier et
pour inciter les savants a faire de sérieuses recherches.
Les
sceptiques, et ils sont nombreux,
soutiendront que les phénomenes que nous passons en revue sont illusoires, que
tout est le résultat de l'action consciente ou inconsciente du cerveau, ou bien
que les personnes crédules s'imaginent voir ce qui n'existe réellement pas, ou
qu'elles sont dupes d'habiles tricheurs.
Il est
possible que des personnes impressionnables voient ce qui n'est pas. Nous
l'avons constaté souvent ; mais lorsque tous les assistants perçoivent la meme
chose et que tous s'accordent sur les plus petits détails, peut-on penser que
ce résultat est le fruit de l'hallucination collective ? A la rigueur, on peut
admettre cela, mais quand des appareils de physique enregistrent les faits,
quand une plaque photographique conserve l'image de ce que les assistants ont
vu, peut-on alors attribuer le phénomene a l'hallucination ?
Si notre
systeme nerveux, plus on moins irritable, nous prédispose a l'auto-suggestion,
aux hallucinations, les appareils enregistreurs qui, eux, n'ont pas de nerfs,
sont-ils dans le meme cas et peuvent-ils se laisser tromper, s'illusionner ?
Nous
pensons qu'il serait plus sage de repousser de notre esprit cette tendance a la
négation, inhérente a l'etre humain cultivé, qui toujours a retardé le progres.
Si des
hommes éminents, apres de longues et patientes investigations, ont affirmé
hardiment ce qu'ils avaient appris dans la question brulante que nous
soutenons, c'est qu'ils étaient scientifiquement surs de ne pas s'etre trompés,
et nous devons, si nous ne voulons pas faire tort a notre intelligence, ne pas
les prendre pour des naifs ou pour des imposteurs.
Nous espérons
que les observations qui vont suivre encourageront les chercheurs de bonne foi
a entreprendre les recherches des pionniers de cette nouvelle science qui, plus
connue, améliorera fatalement le genre humain.
A sa
mort, le célebre auteur Charles Dickens avait laissé son roman Edwin Drood inachevé. Le médium James,
ouvrier mécanicien, sans éducation et sans instruction, termina ce roman, et
les juges les plus compétents ne purent trouver la moindre différence entre la
production du médium et celle de Dickens vivant.
« Je
tiens a donner quelques détails, dit Aksakof, sur cette production unique dans
les annales de la littérature.
« Quand
le bruit se répandit que le roman de Dickens allait etre terminé par un procédé
aussi extraordinaire, aussi inusité, le
Springfield Dail Union envoya l'un de ses collaborateurs a Brattleborough
(Vermont) ou habitait le médium, pour s'enquérir, sur place, de tous les
détails de cette étrange entreprise littéraire. Voici quelques extraits du
compte-rendu en huit colonnes publié par ce journal, le 26 juillet 1873,
reproduit d'abord par le Banner of Light
et ensuite partiellement par le
Spiritualist de 1873, page 322, auquel nous les empruntons : « Il (le
médium) est né a Boston; a l'âge de quatorze ans, il fut placé en apprentissage
chez un mécanicien, métier qu'il pratique encore aujourd'hui ; de sorte que son
instruction scolaire s'est terminée a l'âge de treize ans. Bien qu'il ne fut ni
inintelligent, ni illettré, il ne manifestait aucun gout pour la littérature et
ne s'y était jamais intéressé.
«
Jusqu'alors il n'avait jamais tenté de faire passer dans un journal quelconque
le moindre article. Tel est l'homme qui prit en main la plume de Charles
Dickens pour continuer: The Mystery of
Edwin Drood et qui a presque terminé cette ouvre.
« Je fus
assez heureux pour etre la premiere personne a qui il ait fait part lui-meme de
tous les détails, la premiere qui ait examiné le manuscrit et en ait fait des
extraits.
« Voici
comment les choses se sont passées. Il y avait dix mois, un jeune homme, le
médium, que je désignerai pour etre bref par l’initiale A (car il n'a pas
encore voulu divulguer son nom), avait été invité par ses amis a se mettre a
une table pour prendre part a une expérience spirite. Jusqu'a ce jour, il avait
toujours raillé les « miracles spirites », les considérant comme des
supercheries, sans se douter qu'il possédait lui-meme des dons médianimiques. A
peine la séance est-elle commencée que l'on entend des coups rapides et que la
table, apres des mouvements brusques et désordonnés, se renverse sur les genoux
de M. A... pour lui faire voir qu'il est le médium. Le lendemain soir on
l'invite a prendre part a une deuxieme séance ; les manifestations furent
encore plus accentuées, M A... tomba soudainement en transe, saisit un crayon
et écrivit une communication signée du nom de l'enfant de l'une des personnes
présentes, dont M. A... ne soupçonnait pas l'existence. Mais les détails de ces
expériences ne sont pas d'un intéret particulier a cette place.
« Vers
la fin du mois d'octobre 1872, au cours d'une séance, M. A. écrivit une
communication adressée a lui-meme et signée du nom de Charles Dickens, avec la
priere d'organiser pour lui une séance spéciale, le 15 novembre.
« Entre
octobre et la mi-novembre, de nouvelles communications lui rappelerent a
plusieurs reprises cette demande.
« La
séance du 15 novembre qui, d'apres les indications reçues, fut tenue dans
l'obscurité, en présence de M. A... seulement, eut pour résultat une longue
communication de Dickens, qui exprimait le désir de terminer par
l'intermédiaire du médium son roman inachevé.
« Cette
communication apprenait que Dickens avait longtemps cherché le moyen
d'atteindre ce but, mais que jusqu'a ce jour il n'avait pas trouvé de sujet
apte a accomplir pareille tâche. Il désirait que la premiere dictée se fit la
veille de la Noël, soirée qu'il affectionnait particulierement, et il priait le
médium de consacrer a cette ouvre tout le temps dont il pouvait disposer sans
porter préjudice a ses occupations habituelles... Bientôt il devint évident que
c'était la main du maître qui écrivait, et M. A... accepta avec plus de bonne
volonté cette étrange situation. Ces travaux, exécutés par le médium, en dehors
de ses occupations professionnelles, qui lui prenaient dix heures chaque jour,
produisirent, jusqu'en juillet 1873, douze cents feuillets de manuscrits, ce
qui représente un volume in-octavo de
quatre cents pages. »
« En
faisant la critique de cette nouvelle partie du roman, le correspondant du Springfield Daily Union s'exprimait
ainsi :
« Nous
nous trouvons ici en présence de tout un groupe de personnages dont chacun a
ses traits caractéristiques, et les rôles de tous ces personnages doivent etre
soutenus jusqu'a la fin, ce qui constitue un travail considérable pour qui de
sa vie n'a écrit trois pages sur n'importe quel sujet : aussi sommes-nous
surpris de constater, des le premier chapitre, une ressemblance complete avec
la partie éditée de ce roman. Le récit est repris a l'endroit précis ou la mort
de l'auteur l'avait laissé interrompu, et ce, avec une concordance si parfaite
que le critique le plus exercé, qui n'aurait pas connaissance de l'endroit de
l’interruption, ne pourrait dire a quel moment Dickens a cessé d'écrire le
roman de sa propre main. Chacun des personnages du livre continue a etre aussi
vivant, aussi typique, aussi bien tenu dans la seconde partie que dans la
premiere. Ce n'est pas tout. On nous présente de nouveaux personnages (Dickens
avait coutume d'introduire de nouveaux acteurs jusque dans les dernieres scenes
de ses ouvres), qui ne sont pas du tout des doublures des héros de la premiere
partie ; ce ne sont pas des mannequins, mais des caracteres pris sur le vif, de
véritables créations. Créés par qui?
« Le
correspondant continue : « Voici plusieurs détails d'un incontestable intéret.
En examinant le manuscrit, je trouvai que le mot traveller (voyageur) était écrit partout avec deux l, comme c'est
l'usage en Angleterre, alors que chez nous, en Amérique, on ne met généralement
qu'une seule l.
« Le mot
coal (charbon) est partout écrit coals, avec une s, ainsi qu'on le fait
en Angleterre. Il est intéressant aussi de noter, dans l'emploi des majuscules,
les memes particularités que l'on peut observer dans les manuscrits de Dickens
; par exemple lorsqu'il désigne M. Grewgious, comme étant an angular man (un homme anguleux). Remarquable aussi la
connaissance topographique de Londres, dont l'auteur mystérieux fait preuve
dans plusieurs passages du livre. Il y a aussi beaucoup de tournures de langage
usitées en Angleterre, mais inconnues en Amérique. Je mentionnerai aussi le
changement subit du temps passé en temps présent, surtout dans un récit animé,
transition tres fréquente chez Dickens, surtout dans ses derniers ouvrages. Ces
particularités, et d'autres encore qu'on pourrait citer, sont de mince
importance, mais c'est avec de pareilles bagatelles qu'on eut fait échouer
toute tentative de fraude. »
« Et
voici la conclusion de l'article cité : « J'arrivai a Brattleborough avec la
conviction que cette ouvre posthume ne serait qu'une bulle de savon qu'il
serait aisé de crever. Apres deux jours d'examen attentif, je repartis, et, je
dois l'avouer, j'étais indécis. Je niai d'abord comme chose impossible, - comme
chacun le ferait apres examen, - que ce manuscrit eut été écrit parla main du
jeune médium M. A ... ; il me dit n'avoir jamais lu le premier volume, détail
insignifiant a mon sens, car je suis parfaitement convaincu qu'il n'était pas
capable d'écrire une seule page du second volume. Ceci n'est pas pour offenser
le médium, car il n'y a pas beaucoup de personnes en état de reprendre une
ouvre inachevée de Dickens !
« Je me
vois, par conséquent, placé dans cette alternative : ou un homme de génie
quelconque a employé M. A... comme instrument pour présenter au public une
ouvre extraordinaire, d'une maniere également extraordinaire, ou bien ce livre,
ainsi que le prétend son invisible auteur, est en effet écrit sous la dictée de
Dickens lui-meme. La seconde supposition n'est guere plus merveilleuse que la
premiere. S'il existe a Vermont un homme inconnu jusqu'a présent, capable
d'écrire comme Dickens, il n'a certes aucun motif d'avoir recours a un
semblable subterfuge. Si, d'autre part, c'est Dickens lui-meme « qui parle,
bien qu'étant mort », a quelles surprises ne devons-nous pas nous préparer ?
J'atteste, en tout honneur, que, ayant eu toute latitude d'examiner librement
toutes choses, je n'ai pu trouver la moindre trace de tromperie, et, si j'avais
le droit de publier le nom du médium auteur, cela suffirait pour dissiper tous
soupçons aux yeux des personnes qui le connaissent, si peu que ce soit. »
M. J.-P.
Barkas, de Neuwcastle, membre de la Société de géologie, publia dans le Light, 1885, pages 85 et suivantes, une
série d'articles sous ce titre : « Réponses improvisées a des questions
scientifiques, par un médium-femme d'une éducation ordinaire. »
« En
1875, je fus invité a prendre part a une série de séances qui devaient se tenir
dans l'appartement modeste d'une jeune dame, médium non professionnel,
demeurant Newcastle-on-Tyne. Toutes les questions s'inscrivaient dans un cahier
au moment meme de la pose, et le médium y écrivait immédiatement les réponses.
Tous ces cahiers se trouvent chez moi, et je les tiens a la disposition de
toute personne qui désirerait les voir.
« Voici
le probleme principal qui se présente dans ce cas : une femme d'instruction
ordinaire a donné des réponses a diverses questions scientifiques soigneusement
élaborées au cours de trente-sept soirées, la séance se prolongeant trois
heures chaque fois; ces réponses sont telles que probablement il ne se trouve
pas un homme en Angleterre qui pourrait en faire autant, c'est-a-dire donner
des réponses aussi précises, dans les memes conditions, a toutes les questions
qui ont été posées.
« Un
compte-rendu détaillé de ces séances, une autobiographie du médium, ainsi que
des exemples de ces questions, avec les réponses, se trouvent dans le Psychological Review de 1878 (t. I, p.
215).
« Il ne faut pas perdre de vue que le médium
est une dame d'instruction médiocre, qu'elle était entourée de personnes qui
l'observaient avec attention, que les questions étaient inscrites et lues a
haute voix, séance tenante, que les réponses étaient écrites par la main du
médium dans ce meme cahier, tres rapidement, qu'elles étaient improvisées, sans
la moindre correction ultérieure ; il ne faut pas oublier non plus que ces
questions se rapportaient a divers sujets scientifiques et autres, généralement
peu familiers aux femmes ; que le médium, a son aveu, est completement ignorant
en ces matieres ; qu'elle écrivait automatiquement, sans se rendre compte si
ses réponses étaient justes. Les personnes qui la connaissaient intimement
assurent qu'elle n’avait jamais eu de gout pour les sciences, et qu'elle
n'avait jamais lu de livres scientifiques. »
Le
général-major A - W. Drayson fit paraître, dans Le Light, en 1884, les observations suivantes, sous le titre Solution of Scientific Problems by Spirits.
« Ayant
reçu de M. Georges Stock une lettre me demandant si je pouvais citer, ne fut-ce
qu'un exemple, qu'un esprit ou un soi-disant esprit aurait résolu, séance
tenante, un de ces problemes-scientifiques qui ont embarrassé les savants du
siecle dernier, j'ai l'honneur de vous communiquer le fait suivant, dont j'ai
été témoin oculaire.
« En 1871,
William Herschel découvrit que la planete Uranus et ses satellites du systeme
solaire parcourent leurs orbites d'orient en occident. J. -F. Herschel dit dans
ses Esquisses astronomiques : « Les
orbites de ces satellites présentent des particularités tout a fait inattendues
et exceptionnelles, contraires aux lois générales qui régissent les corps du
systeme solaire. Les plans de leurs orbites sont presque perpendiculaires a
l'écliptique, faisant un angle du 70° 58' et ils les parcourent d'un mouvement rétrograde,
c'est-a-dire que leur révolution autour du centre de leur planete s'effectue de
l'est a l'ouest, au lieu de suivre le sens inverse. »
«
Lorsque Laplace émit cette théorie, que le soleil et toutes les planetes se
sont formés aux dépens d'une matiere nébuleuse, ces satellites étaient une
énigme pour lui.
«
L'amiral Smyth mentionne dans son Cycle
céleste que le mouvement de ces satellites, a la stupéfaction de tous les
astronomes, est rétrograde, contrairement a celui de tous les autres corps
observés jusqu'alors.
« Dans
la Gallery of Nature, il est
également dit que les satellites d'Uranus décrivent leur orbite de l'est a
l'ouest, anomalie étrange, qui forme exception dans le systeme solaire.
« Tous
les ouvrages sur l'astronomie publiés avant 1860 contiennent le meme
raisonnement au sujet des satellites d'Uranus.
« De mon
côté, je ne trouvai aucune explication a, cette particularité ; pour moi,
c'était un mystere, aussi bien que pour les écrivains que j'ai cités.
« En
1858, j'avais comme hôte, dans ma maison, une dame qui était médium, et nous
organisâmes des séances quotidiennes.
« Un
soir, elle me dit qu'elle voyait a côté de moi une personne qui prétendait
avoir été, pendant sa vie terrestre, un astronome.
« Je
demandai a ce personnage s'il était plus savant a présent que lors de son
existence terrestre.- « Beaucoup plus », répondit-il.
« J'eus
l'idée de poser a ce soi-disant esprit une question, afin d'éprouver ses
connaissances: « Pouvez-vous me dire, lui demandai-je, pourquoi les
satellites d'Uranus font leur révolution de l'est a l'ouest, et non de l'ouest
a l'est ? »
« Je
reçus immédiatement la réponse suivante :
« Les
satellites d'Uranus ne parcourent pas leur orbite de l'orient a l'occident ;
ils tournent autour de leur planete de l'occident a l'orient, dans le meme sens
que la lune tourne autour de la terre. L'erreur provient de ce que le pôle sud
d'Uranus était tourné vers la terre au moment de la découverte de cette planete
; de meme que le soleil, vu de l'hémisphere austral, semble faire son parcours
quotidien de droite a gauche, et non de gauche a droite, les satellites
d'Uranus se mouvaient de gauche a droite, ce qui ne veut pas dire qu'ils
parcouraient leur orbite de l'orient a l'occident. »
« En
réponse a une autre question que je posai, mon interlocuteur ajouta :
« Tant
que le pôle sud d'Uranus était tourné, pour un observateur terrestre, les
satellites semblaient se déplacer de gauche a droite, et l'on en conclut, par
erreur, qu'ils allaient de l'orient a l'occident ; cet état de choses a duré
environ quarante-deux ans. Quand le pôle nord d'Uranus est tourné vers la
terre, ses satellites parcourent leur trajet de droite a gauche, et toujours de
l'occident a l'orient. »
« Je
demandai la-dessus comment il a pu se faire que l'erreur n'a pas été reconnue
quarante-deux ans apres la découverte de la planete Uranus par W. Herschel ?
« Il me
fut répondu : « C'est parce que, dans la regle, les hommes ne font que répéter
ce qu'ont dit les autorités qui les ont précédés ; éblouis par les résultats obtenus
par leurs prédécesseurs, ils ne se donnent pas la peine de réfléchir. »
« Guidé
par cet enseignement, je me mis a résoudre le probleme géométriquement, et je
m'aperçus que l'explication en était tres exacte, et la solution, fort simple.
En conséquence, j'écrivis sur cette question un traité qui fut publié dans les
Mémoires de l'Institution royale d'artillerie en 1859.
« En
1862, je donnai cette meme explication de la prétendue énigme dans un petit
ouvrage sur l'astronomie : Common Sights
in the Heavens (Coup d'oil dans les cieux) ; mais l'influence de «
l'opinion autorisée » est si funeste que de nos jours seulement les écrivains
qui s'occupent d'astronomie commencent a reconnaître que le mystere des
satellites d'Uranus doit probablement etre attribué a la position de l'axe de
cette planete.
« Au
printemps de l'année 1839, j'eus encore une fois l'occasion, par l'entremise du
meme médium, de converser avec la personnalité qui se donnait pour le meme
esprit ; je lui demandai s'il pouvait m'éclairer sur un autre fait astronomique
encore inconnu. Je possédais alors un télescope avec un objectif de 4 pouces et
d'une distance focale de 5 pieds. J'appris que la planete Mars avait deux
satellites que personne n'avait encore vus et que je pourrais découvrir, dans
des conditions favorables. Je saisis la premiere occasion qui se présenta pour
faire des observations dans ce but, mais je ne découvris rien. Je fis part de
cette communication a trois ou quatre amis avec lesquels je faisais des
expériences spiritiques, et il fut décidé que nous garderions le silence sur ce
qui s'était passé, car nous ne possédions aucune preuve a l'appui des
allégations de mon interlocuteur, et nous risquions de nous exposer a la risée
générale.
«
Pendant mon séjour dans les Indes, je parlai de ces révélations a M. Sinnett,
je ne puis dire exactement a quelle époque. Dix-huit ans plus tard, en 1877,
ces satellites furent découverts par un astronome, a Washington. »
M.
Hartmann nous dit :
« Seul,
un médium qui sait écrire peut produire de l'écriture automatique ou de
l'écriture a distance» (sans l'aide de la main) (p. 49).
« Il est
évident que les enfants a la mamelle ne savent pas écrire et que, s'ils
écrivent, c'est une preuve concluante que nous nous trouvons en présence d'une
action intelligente qui est au-dessus et en dehors de l'organisme de l'enfant.
Or, il existe dans les annales du spiritisme plusieurs exemples de ce genre. «
Il est regrettable seulement qu'on n'ait pas preté plus d'attention a ces
phénomenes et que des expériences suivies, bien organisées, n'aient pas été
faites dans ce but. Nous n'avons a recueillir que des observations faites
occasionnellement, de simples mentions; mais, toutes breves qu'elles soient,
elles n'en présentent pas moins pour nous un intéret capital.
« Le
premier fait de ce genre est cité dans le livre de Capron, Modern Spiritualism, page 210 ; il s'est produit en 1850, et Capron
le raconte ainsi :
« Dans
notre cercle intime, raconte M. Leroy Sunderland jamais aucune des questions
posées n'est restée sans réponse. Ces réponses s'obtenaient ordinairement par
notre fille Mme Marguerite Cooper, et quelquefois par sa fille, notre petite-fille,
qui n'avait que deux mois. Pendant que je tenais l'enfant dans mes bras, aucune
autre personne ne se trouvant a côté, nous obtenions des réponses au moyen de
coups frappés, que nos correspondants invisibles disaient se produire par ce
médium. »
«
J'emprunterai a l'ouvrage de Mrs. Hardingue : Modern American Spiritualism, l'exemple suivant :
«
S'apercevant que les phénomenes spiritiques devenaient de plus en plus
fréquents a Waterford, pres de New-York, les pasteurs protestants de l'endroit
s'adresserent au général Bullard, le priant d'examiner cette affaire en
compagnie de quelques autres citoyens, afin de mettre fin a ce scandale. La
commission formée a cet effet se rendit chez M. Attwod, dans la maison duquel,
suivant les rumeurs, des choses étonnantes étaient produites par la médiumnité
de son enfant. Les membres de la commission reçurent bon accueil et furent
introduits dans une piece ou ils virent l'enfant qui s'amusait avec des jouets.
L'arrivée des visiteurs ne semblait aucunement lui sourire, mais les bonbons
eurent vite raison de sa mauvaise humeur, et il se laissa installer sur une
chaise élevée, pres de la table. Bientôt ce lourd meuble se mit en mouvement,
les visiteurs furent déplacés avec leurs sieges, des coups violents se firent
entendre, et, par leur moyen, on obtint diverses communications qui semblaient
émaner de parents des personnes présentes. Entre autres, le frere défunt du
général Bullard manifesta le désir de communiquer.
«. Afin
de contrôler le phénomene, le général pensa :
« Si
c'est vraiment mon frere, qu'il approche de moi cet enfant avec la chaise. »
« Quel
ne fut pas son étonnement et celui de tous les assistants, lorsque la chaise
sur laquelle se trouvait l'enfant, en face du général, a l'autre bout de la
table, fut soulevée avec l'enfant, et, faisant un demi-tour, vint se poser
doucement a côté de lui. Le général était seul a comprendre le sens de cette
action, et, a la grande confusion des membres de la commission, il s'écria,
sous l'impulsion d'un sentiment irrésistible : « Je jure que tout cela est
vrai ! »
« Un
des exemples les mieux constatés de la médiumnité des enfants nous est fourni par
le fils de Mme Jencken (miss Kate Fox), chez lequel les premieres
manifestations se produisirent quand il n'avait encore que deux mois. Nous en trouvons l'exposé dans le Spiritualist de 1873, page 425.
« Un
dimanche, le 16 novembre 1873, d'intéressants phénomenes spirites se sont
produits dans la maison de M. Jencken, qui nous communique ce qui suit :
« Revenant
d'une excursion a Blackeath, ou je m'étais rendu avec ma femme, j'apprends de
la nourrice qui avait la garde de l'enfant que d'étranges choses s'étaient
passées pendant notre absence : des chuchotements s'étaient fait entendre
au-dessus du lit de l'enfant, des pas avaient raisonné par toute la chambre. La
nourrice fit venir la femme de chambre, et toutes les deux affirmerent avoir
entendu des voix et le frou-frou des vetements.
« Ces
témoignages sont d'autant plus précieux que ni l'une ni l'autre ne connaissait
la puissance médiumnique de ma femme. Le jour meme de mon arrivée, pendant que
je tenais l'enfant dans mes bras, en l'absence de ma femme, des coups se firent
entendre, preuve évidente des facultés médiumniques de cet enfant. »
« Une
semaine plus tard, M. Jencken faisait au Spiritualist
la communication suivante: « Le développement des facultés médiumniques de
notre enfant continue toujours. La nourrice raconte avoir vu, hier soir,
plusieurs mains faisant des passes au-dessus du bébé. »
« Ce cas
est particulierement intéressant au point de vue de la théorie de M. Hartmann,
qui devra nous expliquer comment un magnétiseur de deux mois, partant inconscient,
peut suggérer a sa nourrice l'hallucination des mains faisant des passes autour
de lui !...
« A cinq
mois et demi, l'enfant commença a écrire. Nous retrouvons les renseignements
suivants a ce sujet dans le journal Medium
and Daybreak (8 mai 1874) :
« A la
premiere page de ce numéro, sous le titre :
«
Merveilleuses facultés médiumniques d'un enfant, » nous lisons ce fac-similé :
« J'aime cet enfant. Que Dieu le bénisse. Je conseille a son pere de rentrer
dans tous les cas lundi a Londres. Suzanne. » En dessous de la signature se
trouve la mention suivante: « Ces paroles sont écrites de la main d'un petit
enfant de M. Jencken, quand il était âgé de cinq mois et quinze jours. Nous
étions présents et nous avons vu comment le crayon a été placé dans la main de
l'enfant par la meme force invisible qui a conduit sa main » Suivent les
signatures : Wason, K. F. Jencken et une croix faite de la main de Mme Mc.
Carty, illettrée, la nourrice qui tenait l'enfant sur ses genoux.
« Je
citerai encore le témoignage suivant de M. Wason, publié dans le meme numéro.
« Les
époux Jencken étaient venus de Londres a Brighton pour la santé de la mere et
de l'enfant.
« Le 6
mars, jour en question, il n'y avait pas plus de trois qu'ils étaient arrivés,
j'étais leur hôte a cette époque, ou, pour mieux dire, nous occupions un
logement commun. La santé de Mme Jencken et de son enfant s'était visiblement
améliorée, mais M. Jencken se sentait, au contraire, indisposé : il était en
proie a des maux de tete accompagnés de névralgies et souffrait de plus en plus
de l'estomac et des organes digestifs.
« Je
mettais sa maladie sur le compte de ses déplacements continuels entre son
appartement de Londres (a Temple) et Brigthon, ce qui lui faisait
quotidiennement un parcours de 105 milles et, pour la durée entiere de sa
villégiature, c'est-a-dire quatre mois, pas moins de 8.000 milles. M. Jencken
ne partageait pas mon avis sur les causes de sa maladie et consulta un médecin
allemand de ses amis, qui lui donna raison contre moi, de sorte que je dus
abandonner l'espoir de le faire convaincre que ses voyages quotidiens en chemin
de fer, en omnibus et en cabs lui étaient funestes.
«
C'était donc le 6 mars, vers une heure de l'apres-midi; la nourrice était
assise, tenant l'enfant sur ses genoux, dans le salon, aupres de la cheminée ;
j'écrivais a une table, tout pres, et Mme Jencken se trouvait dans la piece
voisine; la porte était ouverte. Tout a coup la nourrice s'écria : « L'enfant
tient un crayon dans sa main ! » Elle n'ajouta pas que ce crayon avait été
placé dans la main de l'enfant par une force invisible : je n'y fis donc aucune
attention, sachant par expérience avec quelle force un enfant vous prend
quelquefois parle doigt, et continuai a écrire. Mais la nourrice s'exclama
immédiatement avec plus d'étonnement encore : « L'enfant écrit ! » ce qui
intrigua Mme Jencken, qui alla dans la chambre.
« Je me
levai aussitôt et regardai par-dessus l'épaule de Mme Jencken, et je vis, en
effet, que l'enfant tenait un crayon dans sa main et que celle-ci reposait sur
le bout de papier avec la communication dont nous prîmes parla suite une
photographie.
« Je
dois dire ici que « Suzanne » était le nom de ma femme défunte, qui, de son
vivant, aimait beaucoup les enfants et dont l'esprit (Ainsi que nous le supposions)
s'était maintes fois manifesté au moyen de coups frappés et d'écriture
automatique par l'intermédiaire de Mme Jencken ; avant son mariage, cette
derniere portait le nom, bien connu dans le monde spirite, de Kate Fox, et
c'est dans sa famille que se produisirent, dans les environs de New-York, les
coups frappés de Rochester, qui inaugurerent le mouvement spiritualiste de
notre siecle.
« Quant
au conseil de Suzanne, enjoignant a M. Jencken de rentrer lundi a Londres, les lecteurs l'apprécieront a sa juste
valeur, lorsqu'ils sauront qu'apres avoir suivi ce conseil et cessé ses
déplacements continuels il se sentit rapidement guéri et redevint aussi bien
portant et robuste qu'auparavant.
«
Agréez, etc.
«
JAMES WASON, solicitor.
« Wason's
Buildings, Liverpool. »
Pour les
observateurs superficiels, les cas qui précedent pourraient etre attribués a la
meme cause qui influençait le petit prodige observé par les docteurs Quintard
et Tesson et dont la communication fut faite a la Société de Médecine d'Angers en
1894.
A l'âge
de cinq ans Ludovic X... sait calculer comme Jacques Inaudi ; il touche du
piano ; il parle les langues vivantes que sa mere connaît ; il voit, sans
regarder, ce que celle-ci parcourt seulement des yeux, etc.
Mais,
éloigné de sa mere, l'enfant n'est pas plus avancé que ceux de son âge: il ne
sait plus rien.
Cette
suggestion mentale se produisait a l'insu de Mme X... et, quoique la chose fut
déja extraordinaire, il n'y avait rien de supra-naturel, ce qui n'est pas le
cas des faits que nous donnons ici.
Notre
étude n'étant pas exclusivement consacrée a ces phénomenes, nous ne pouvons
donner les principaux cas prouvant par A+B les rapports effectifs des trépassés
avec les vivants, mais nous engageons les personnes désireuses de se documenter
plus amplement de s'adresser aux ouvrages spéciaux.
Nous
recommandons tout particulierement les livres de l'ingénieur G. Delanne, qui
est, a notre point de vue - nos relations nous permettent de le juger en
connaissance de cause - l'auteur français actuel le plus compétent.
Delanne
traite avec une égale autorité la question scientifique et la question
philosophique, et nous ne saurions trop engager a le lire.
Les
quelques extraits suivants sont puisés dans son ouvrage Recherches sur la Médiumnité.
Au sujet
de l'identité de feu Georges Pelham, Delanne dit:
« La
publication dans les Proceedings du
cas de Georges Pelham a produit une profonde sensation parmi les psychologues,
car c'est la premiere fois que la possibilité de la communication avec les
Esprits était affirmée catégoriquement par le Dr R. Hodgson, qui s'était
jusque-la montré réfractaire a cette interprétation des phénomenes constatés
dans les séances spirites. Ce n'est pas que cette observation soit beaucoup
plus probante que beaucoup d'autres faites par les spirites, mais elle a été
relatée avec une si grande minutie de détails, avec une si entiere
préoccupation d'impartialité, et avec une rigueur si absolue que les
conclusions qui en ressortent ont pris immédiatement une haute importance. »
« Cette
personnalité, qui se manifestait si clairement, était celle d'un avocat et
écrivain, mort depuis peu de temps, le 17 février 1892, a l'âge de 32 ans, et
bien connu du Dr Hodgson.
Dans les
Proceedings il est désigné sous le
pseudonyme de Georges Pelham ou, par abréviation, G. P., Georges Pelham
écrivait dans le Sun et avait publié
deux ouvrages qui avaient reçu le meilleur accueil des autorités compétentes.
Il faisait partie de la Société de
Recherches psychiques, et l'intéret qu'il portait a ces études venait
plutôt de sa largeur d'esprit que d'une tendance a croire aux phénomenes
surnormaux. Souvent il avait discuté avec M. Hodgson la possibilité d'une
survivance apres la mort, et s'il admettait qu'on put concevoir une vie future,
il ne pouvait accepter que l'ou y crut. Il s'engagea meme, dans le cas ou il
mourrait le premier, a faire tout ce qui
lui serait possible pour démontrer a son ami la persistance de
l'individualité dans l'au dela.
« Le
17 mars 1888, Georges Pelham avait assisté une seule fois a une séance de Mrs
Piper, mais celle-ci ne connaissait pas son nom.
« Quatre
ou cinq semaines apres la mort de G. P.... M. Hodgson accompagnait chez Mrs
Piper un des amis intimes de Georges Pelham, nommé Hart (c'est encore un
pseudonyme). Ce monsieur obtint d'abord des renseignements sur plusieurs de ses
parents décédés, puis tout a coup Phinuit (esprit-guide de Mrs Piper) annonça
qu'un autre Georges voulait parler, et le nom de Pelham fut donné en toutes
lettres, ainsi que les noms, prénoms et surnoms de plusieurs de ses amis
intimes, y compris l'évocateur. Toujours par l'intermédiaire de Phinuit, G. P.
dit a M. Hart qu'il avait des boutons
de manchettes qui lui avaient appartenu, que ces boutons avaient été pris par
sa belle-mere sur son propre corps, qu'elle les avait remis a son frere, lequel
en avait fait cadeau a M. Hart. Ensuite il donna les noms de M. et Mme Howard
et leur prénom (James et Marie), ainsi que des détails tres personnels sur leur
compte. Enfin, parlant de leur fille Katerine, il ajouta : « Dites-lui, et elle
me reconnaîtra : Je veux résoudre les
problemes Katerine. »
Par
l'intermédiaire de ce meme médium, de nombreux décédés se sont mis en
communication avec des parents ou des amis et ont toujours, parait-il, prouvé
leur identité.
Nous-memes,
en 1903, nous avons obtenu des faits remarquables ; en voici un typique et
important :
Dans le
courant de cette année, nous fîmes de nombreuses séances dans lesquelles les
phénomenes spirites et animiques étaient tres mélangés. Fréquemment des coups
frappés en dehors du centre d'opération se produisaient et répondaient
intelligemment a nos questions. Beaucoup de communications, qui affectaient les
caracteres de la véracité, nous furent données; mais, vérification faite, rien
n'était exact.
Les
spirites auraient impliqué ces faits a l'intervention de mauvais esprits, alors qu'ils émanaient simplement de nous-meme.
Néanmoins, dans le cours de ces séances qui durerent plus de trois mois nous
obtînmes des cas spiritiques patents. Voici le plus important, il se présenta
dans la séance du 19 aout.
La
table, ce soir-la, s'agita d'une maniere inaccoutumée et la conversation
s'engagea :
- Qui
etes-vous ?
-
Hermance V...
- Si
c'est réellement Mme V... qui se manifeste, qu'elle nous donne une preuve de
son identité.
- C'est
ce que je viens faire.
- Alors,
parlez.
- Mon
mari se remariera dans le courant de septembre prochain. Avant son mariage, il
viendra a Paris, mais le temps lui manquera pour vous faire une visite.
- Ce que
vous dites-la est impossible, je connais V... Je sais toute l'affection qu'il
portait a sa femme, et jamais je ne pourrai croire qu'il se remarie quatre mois
apres le déces de celle-ci.
- C'est
pourtant vrai, et dans quelques jours vous recevrez la confirmation de ce que
je dis.
- C'est
alors l'intéret qui le guide, et non l'affection ?
-
L'intéret n'y est pour rien, mais vous savez bien que Lucien - c'est le prénom
de M. V... - ne peut rester seul.
-
Epousera-t-il une femme de son âge ?
- Non,
mais une jeune fille de 23 ans et, peu de temps apres son mariage il quittera
la Provence pour venir a nouveau habiter Paris.
- Comment,
avec la position qu'occupe V... dans le midi, cela est tout a fait inadmissible
?
- Des
circonstances malheureuses, surtout une grosse perte d'argent, le forceront a
venir a Paris pour se faire une nouvelle situation.
- Nous
verrons si votre prédiction se réalisera, j'en doute fort ; mais en admettant
ce que vous dites, verriez-vous cette union avec déplaisir ?
- Au
contraire, Lucien ne pouvant vivre seul.
A ces
derniers mots, la table resta immobile. Apres quelques minutes d'attente, je
demandai si la communication était terminée : oui, fut la réponse.
-
Reviendrez-vous encore ?
-
Peut-etre...
Mme V...
ne s'est plus présentée, et c'est la seule manifestation qu'elle nous ait donnée.
Dans le
cas présent, personne ne pouvait se douter de ces révélations, rien ne pouvait
faire prendre cette communication au sérieux. Les membres de ma famille et moi
seul connaissions la défunte et nous étions bien éloignés de croire a ce qu'il
venait de nous etre dit; les autres personnes qui assistaient a nos réunions
n'avaient jamais entendu prononcer le nom de V...
Quelques
jours apres, le 27 aout, je reçus une lettre de mon ami V. . ., dans laquelle
il m'annonçait son mariage, pour le mois de septembre, avec Mlle X... et me
donnait quelques renseignements sur sa future, renseignements qui coincidaient
exactement avec ce qui nous avait été dit le 19 aout.
En mars
1904, M. V... vint nous voir et nous apprit qu'il venait s'installer a Paris.
Surpris, je lui fis part de la communication d'Hermance et il en fut si étonné
que, quoique ne doutant point de nos affirmations, il voulut prendre
connaissance du proces-verbal de cette séance. En conséquence, je le conduisis
chez Mme C..., chargée du rôle de secrétaire, ou il put consulter son cahier de
notes. Nous avons toujours eu la précaution de prendre ou de faire prendre des
notes, parce que, d'habitude, en peu de temps, on oublie les principaux détails
d'un fait quelconque. Ainsi V... put constater que tout ce qu'avait dit sa
premiere femme était d'une rigoureuse exactitude : son voyage a Paris avant son
second mariage, son changement de position, etc., etc. Le pauvre V... était médusé, et il affirma, en présence de
Mme C ... et d'autres personnes, la réalité des faits concluants que nous
n'hésitons pas a donner comme preuve de la conservation du moi apres la mort, comme preuve patente de l'identité de Mme
Hermance V...
M. V...
est a Paris, et nous sommes autorisé, le cas échéant, a donner son nom et son
adresse.
En 1890,
nous avons fait paraître dans la Revue
des sciences psychologiques illustrée, n°
8 de la 1re année, un article intitulé : Force psychique, ses manifestations, que nous croyons utile de
placer ici.
Il y a
quelques années, alors que les expériences de Crookes faisaient sensation, je
voulais étudier ces phénomenes, me rendre compte par moi-meme du bien-fondé de
ces faits. Cette idée arretée, je cherchai des sujets (médiums), et, patiemment, je me mis a l'ouvre.
Pendant
plus de deux ans, je n'obtins que des effets insignifiants et ne vis, dans les
réunions que je fréquentai, que des faits si peu concluants que je me fusse
découragé dans mes recherches, si je n'avais eu un aussi grand désir
d'apprendre.
Ma
patience fut enfin récompensée, puisque, apres ces deux années d'insucces,
j'obtins de patents phénomenes psychiques.
Je ne
dirai point comment le hasard me favorisa, et ne raconterai pas les phénomenes
enregistrés pendant pres de cinq mois ;
je me contenterai, pour donner idée des effets obtenus, de rapporter une de nos
plus belles séances, a laquelle assistaient une quinzaine de personnes,
personnes nullement étrangeres a la science : la réunion, ce soir-la,
comprenait des médecins et plusieurs professeurs de l'Université. Les effets ne
se produisant que faiblement et difficilement en pleine lumiere, nous étions
obligés de faire l'obscurité pour obtenir de sérieuses et puissantes
manifestions.
Les
sceptiques vont dresser l'oreille au mot d'obscurité
et se demanderont, s'ils veulent un instant admettre ma bonne foi, si toutes
les personnes présentes a la séance que je vais relater n'ont pas été trompées
comme moi par un facétieux quelconque ou si nous n'avons pas été les jouets
d'une hallucination générale, et pourquoi l'obscurité, si les phénomenes sont
vrais ?
A cette
objection, qui peut paraître tres juste aux personnes qui n'ont jamais étudié
ces phénomenes et qui n'ont aucune idée de la chose, je répondrai que la chimie
nous apprend que certains corps, comme l'azotate d'argent et le phosphore, pour
n'en citer que deux, sont décomposés par l'action de la lumiere ; que la
physique nous prouve, avec le radiometre de Crookes, sans chercher d'autres
preuves, l'action de la lumiere comme force, puisqu'elle fait fonctionner ce
petit instrument que tout le monde connaît. Donc, pourquoi la force que nous
appelons lumiere ne neutraliserait-elle pas la force que nous nommons psychique
? Ce n'est qu'une hypothese qui trouvera créance aupres des personnes qui ont
assisté a des séances de ce genre et vu des phénomenes psychiques.
A
l'objection de tromperie, je répondrai par la description minutieuse des
précautions prises pour éviter toute fumisterie.
Ainsi,
le 3 mars 1883, avant de commencer la séance, j'engageai les personnes
présentes a vérifier toutes choses, a sonder chaque meuble, a tout scruter
enfin. Les expériences se faisant dans mon cabinet, je crois inutile d'affirmer
que j'avais la certitude absolue qu'aucun truc, qu'aucune préparation ne
pouvait exister. Quoique nous ne cherchions pas a faire parler la table, nous nous placions néanmoins autour d'un de ces
meubles, voici dans quelle disposition. Apres avoir placé la table dans un des
angles de la piece, mon cabinet formait un parallélogramme de 6 metres de
longueur sur 4 m. 25 c. de largeur ; cette piece comprenait deux croisées, une
seule porte d'entrée en face de laquelle se trouvaient la cheminée et deux
placards situés un de chaque côté de la cheminée, apres avoir fait ranger, dans
l'angle choisi, l'angle de droite faisant face a la cheminée, les personnes qui
ne devaient pas se mettre a la table, cinq personnes seulement sur quinze
devant l'occuper, avec l'aide d'un des assistants, j'attachai les mains de ces
dernieres sur la table, sans trop les gener, mais de façon a les empecher de
s'écarter de plus de 15 a 20 centimetres les unes des autres. J'enserrai le
pied de la table dans les plis de la corde passée autour de la taille de
chacune des personnes présentes.
Ceci
fait, je priai M. R.... qui m'avait aidé, de garder un des bouts de la corde
pendant que je tiendrais l'autre. Pour plus de sureté, j'avais préalablement
placé le canapé, les deux fauteuils inoccupés, ainsi que mon bureau, autour des
personnes qui occupaient la table, ce meuble étant, ainsi que je l'ai dit,
placé dans un des angles de la piece, et c'est dans cet angle meme, derriere la
table, que j'avais fait asseoir les assistants. Ainsi arrangés, aucun de nous
ne pouvait se déplacer sans entraîner les autres, et le plus léger mouvement
d'un seul était forcément saisi par tous.
Ces dispositions
achevées, m'emparant de mon bout de corde, je me plaçai derriere les autres
personnes, tout a fait au sommet de l'angle ou j'avais, auparavant, mis un
petit guéridon pour supporter la lampe. A onze heures moins cinq minutes,
j'éteignis la lumiere.
A peine
le premier coup de onze heures sonnait a la pendule que des coups violents se
firent entendre sur divers points de la piece ; des coups plus faibles étaient
frappés; au meme instant, sur mon bureau placé a une distance suffisante, ou
aucun des assistants ne pouvait porter ni la main ni le pied, divers objets qui
s'y trouvaient dessus furent projetés du côté de la cheminée, ou nous les
trouvâmes apres la séance. Deux livres fraîchement reliés, qu'on m'avait
apportés dans la journée, furent promenés dans tous les sens et vinrent
effleurer les mains et la tete de quelques uns de nous. Pour mon compte, je fus
touché quatre fois simultanément sur la joue et sur l'épaule droite, mais d'une
façon si délicate qu'aucun de nous n'aurait pu, imiter ces attouchements, meme
en pleine lumiere : les deux volumes furent retrouvés sur la cheminé. En meme
temps que les livres, un timbre qui se trouvait sur mon bureau était enlevé et
promené dans toutes les directions ; tantôt on l'entendait sonner au plafond,
tantôt sous nos chaises.
Plusieurs
personnes ayant demandé mentalement
des nombres de coups, le timbre ne se trompa jamais ; mais meme ayant pensé les
nombres 4 et 10, le timbre répondit exactement : cet instrument se fît entendre
environ cinq minutes et fut retrouvé sur le paquet au pied de la cheminée. Deux
cartes géographiques furent changées de place ; l'une fut suspendue a la
tringle des rideaux d'une des fenetres ; l'autre accrochée a une patere et
retournée sens dessus dessous.
Apres
une pause d'une minute, peut-etre, étant dans l'obscurité, nous ne pouvions
consulter nos montres, des coups se firent entendre sur la porte du placard
situé a gauche de la cheminée. Nous pretâmes l'oreille et nous entendîmes tous
distinctement la porte s'ouvrir - cette porte n'était fermée que par une
targette et un vacarme assez drôle se produisit des plaques métalliques, qui me
servaient pour des expériences d'électricité et qui étaient enfermées la,
s'entrechoquaient en cadence ; ces plaques, toujours entrechoquées, voltigerent
un instant dans la piece, et nous les trouvâmes éparpillées sur le parquet.
Pendant
toute la séance, qui dura dix-huit minutes, les coups ne discontinuerent pas
d'etre frappés un peu dans toutes les directions, mais surtout du côté de la
cheminée, c'est-a-dire en face de nous. Les attouchements, ce soir-la, furent
fréquents ; ces attouchements n'avaient rien de désagréable, et, plusieurs
fois, je sentis comme une main tiede, naturelle; s'appuyer sur la mienne, mais,
chaque fois que je voulais la saisir, elle s'évanouissait. Quelques personnes
dirent avoir vu une main lumineuse aller lentement d'un côté et d'autre, mais
comme quelques-unes seulement la virent, je ne mentionne le fait que pour
mémoire.
Je
dirai, en terminant : je suis absolument
certain de la réalité des phénomenes décrits ; je suis sur, pertinemment sur, de ne pas avoir été
trompé, toutes mes précautions ayant été bien prises. J'ai maintes fois assisté
a des fumisteries, mais pour un observateur tant soit peu attentif, qui a vu de
véritables phénomenes psychiques, l'erreur n'est pas possible, car la
simulation ne ressemble en rien a la vérité.
Maintenant
quelle est cette force, et cette force est-elle intelligente ? Je réponds
affirmativement a cette derniere proposition. Cette intelligence est-elle
étrangere au groupe ? Je répondrais oui, en m'appuyant sur ceci : que jamais le
phénomene n'a voulu se manifester avant 11 heures précises du soir, alors que
nous nous placions dans, les conditions voulues longtemps avant l'heure
indiquée. Nous sommes, quelquefois, restés dans l'obscurité, pour éprouver le
phénomene, plus de deux heures sans obtenir le plus petit effet, les memes
personnes, c’est-a-dire celles qui obtenaient d'habitude les effets réunies ;
le phénomene n'était point a notre disposition, et c'était presque toujours le
contraire de ce que nous attendions ou de ce que nous demandions qui se
produisait. Enfin, apres cinq mois de
séances régulieres, le phénomene nous ayant avertis qu'il ne se manifesterait
plus, nous donnant ses raisons, a l'époque fixée par lui, les effets cesserent,
et, apres maints essais infructueux, nous fumes obligés de nous incliner et de
nous rendre a l'évidence.
Que
conclure apres cela ? Avons-nous eu affaire avec une force émanant de nous
seulement ? La chose me parait peu probante, puisque les memes personnes
réunies n'ont pu, dans la suite, plus rien obtenir. Avons-nous eu réellement
les communications d'un désincarné, comme l'affirmait le phénomene ? Peut-etre
serait-il plus logique, comme le dit Crookes, au sujet de Katie, de croire ce
que disait etre le phénomene que de s'embrouiller dans des hypotheses
indissolubles.
Au sujet
des cas particuliers qui semblent prouver l'action d'intelligences
extra-terrestres, Crookes dit :
« Il a
déja été prouvé que ces phénomenes sont gouvernés par une intelligence. Il est
tres important de connaître la source de cette intelligence. Est-ce celle du
médium ou bien celle d'une des personnes qui sont dans l'appartement, ou bien
cette intelligence est-elle en dehors d'eux ? Sans vouloir a présent me
prononcer positivement sur ce point, je puis dire que, tout en constatant que
dans bien des cas la volonté et l'intelligence du médium ont paru avoir
beaucoup d'action sur les phénomenes, j'ai observé aussi plusieurs cas qui
semblent montrer d'une maniere concluante l'action d'un intelligence extérieure
et étrangere de toutes les personnes présentes. L'espace ne me permet pas de
donner ici tous les arguments qu'on peut mettre en avant pour prouver ces
assertions, mais parmi un grand nombre de faits j'en mentionnerai brievement un
ou deux.
« En ma
présence, plusieurs phénomenes se sont produits en meme temps, et le médium ne
les connaissait pas tous. Il m'est arrivé de voir Mlle Fox écrire
automatiquement une communication pour un des assistants, pendant qu'une autre
communication sur un autre sujet lui était donnée pour une autre personne au
moyen de l'alphabet et par coups frappés,
et pendant tout ce temps le médium causait avec une troisieme personne, sans le
moindre embarras, sur un sujet tout a fait différent des deux autres.
« Un cas
peut-etre plus frappant est le suivant :
Pendant
une séance avec Home, la petite latte dont j'ai déja parlé traversa la table
pour venir a moi en pleine lumiere, et me donna une communication en me frappant
sur la main. J'épelais l'alphabet, et la latte me frappait aux lettres qu'il
fallait. L'autre bout de la latte reposait sur la table, a une certaine
distance des mains de M. Home.
« Les
coups étaient si nets et si précis, et la regle était si évidemment sous
l'influence d'une puissance invisible qui dirigeait ses mouvements que je dis :
« L'intelligence qui dirige les mouvements de la regle peut-elle changer le
caractere de ces mouvements, et me donner au moyen de coups frappés sur ma main
un message télégraphique avec l'alphabet de Morse ? »
« J'ai
toutes les raisons possibles pour croire que l'alphabet de Morse était tout a
fait inconnu des personnes présentes, et meme je ne le connaissais
qu'imparfaitement. J'avais a peine prononcé ces paroles que le caractere des
coups frappés changea, et le message fut continué de la maniere que j'avais
demandée. Les lettres me furent données trop rapidement pour pouvoir faire
autre chose que de saisir un mot par-ci par-la, et par conséquent ce message
fut perdu ; mais j'en avais assez vu pour me convaincre qu'a l'autre bout de la
latte il y avait un bon opérateur de Morse, quel qu'il put etre d'ailleurs.
« Encore
un autre exemple, une dame écrivait automatiquement au moyen de la planchette.
J'essayai de découvrir le moyen de prouver que ce qu'elle écrivait n'était pas
du a l'action inconsciente du cerveau. La planchette, comme elle le fait
toujours, affirmait que quoi qu'elle fut mise en mouvement par la main et le
bras de cette dame, l'intelligence
qui la dirigeait était celle d'un etre invisible, qui jouait du cerveau de la
dame comme d'un instrument de musique, et faisait ainsi mouvoir ses muscles.
« Je dis
alors a cette intelligence : « Voyez-vous ce qu'il y a dans cette chambre ? Oui, écrivit la planchette. Voyez-vous ce
journal et pouvez-vous le lire ? Ajoutai-je, en mettant mon doigt sur le numéro
du Times qui était sur une table
derriere moi, mais sans le regarder. Oui, répondit la planchette. Bien, dis-je,
si vous pouvez le voir, écrivez le mot qui est maintenant couvert par mon doigt
et je vous croirai. » La planchette commença a se mouvoir lentement et avec
beaucoup de difficulté elle écrivit le mot « however » Je me tournai et je vis
que le mot honneur était couvert par le bout de mon doigt.
«
Lorsque je fis cette expérience, j'avais évité a dessein de regarder le
journal, et il était impossible a la dame, l'eut-elle essayé, de voir un seul
des mots imprimés, car elle était assise a une table, le journal était sur une
autre table derriere moi, et mon corps lui en cachait la vue. »
Aussi
intéressante est l'expérience qui fut annoncée en ces termes par un message
alphabétique : « Nous allons vous produire une manifestation qui vous donnera
la preuve de notre pouvoir. » L'obscurité était complete et les deux mains de
Mlle Fox étaient tenues par W Crookes. Une clochette fit entendre son tintement
; elle allait et venait de tous côtés dans la chambre, frappant le plancher, le
mur ou la tete de Crookes, et tomba sur la table au bout de cinq minutes.
C'était la clochette que Crookes avait laissée dans sa bibliotheque, laquelle
se trouvait dans une piece fermée par une seule clef qu'il avait d'ailleurs
dans sa poche. Apres vérification Crookes vit que la sonnette n'était plus la
ou elle aurait du se trouver.
Le cas
suivant eut lieu a la lumiere, en présence de Home et de quelques membres de la
famille de W. Crookes. A la suite d'une conversation sur « certains faits qui
ne semblaient pouvoir s'expliquer qu'en admettant que la matiere pouvait
réellement passer a travers une substance solide » le message alphabétique
suivant fut donné « Il est impossible a la matiere de passer a travers la
matiere, mais nous allons vous montrer ce que nous pouvons faire. » Bientôt
apres, une apparition lumineuse planant sur un bouquet de fleurs placé eu
milieu de la table de la salle a manger, « une tige d'herbe de Chine, de 15
pouces de long, s’éleva lentement du milieu des autres fleurs, descendit sur la
table en face du vase, ne s'y arreta pas, mais elle passa droit a travers » et
tous les assistants la virent bien jusqu'a ce qu'elle l'eut entierement
traversée.
En
outre, deux personnes virent une main qui venait de dessous la table et «
tenait la tige d'herbe dont elle frappa deux ou trois fois Mme Crookes sur
l'épaule avec un bruit que tout le monde entendit » ; puis elle disparut apres
avoir déposé l'herbe sur le plancher. Pendant que cela se passait, les mains de
M. Home étaient placées sur la table en face de lui; de plus la tige était trop
grosse pour qu'elle put passer a travers une fente de la table.
Les
docteurs Dusard et Ch. Broquet, au courant des théories émises par les
sceptiques pour expliquer des faits inexplicables en dehors des données
spirites, ont fait, dans un village du Nord, pres de Valenciennes, de
nombreuses expériences qui démontrent l'intervention d'intelligences
affranchies de la matiere, et ces observateurs se sont toujours mis a l'abri de
toute erreur possible. (Voir Recherches
sur la Médiumnité, de G. Delanne.)
Des
faits tres démonstratifs sont affirmés par des professeurs et des médecins de
tous les pays, et nous ne saisissons point le but qu'ils poursuivraient, en
soutenant des utopies.
Nous
devons mentionner également un fait des plus concluants : le moulage des mains
ou des pieds, obtenu avec de la paraffine chaude, et qui ne sont point les
mains ou les pieds des médiums.
Ces
expériences, réussies avec toute la rigueur scientifique, ne peuvent laisser le
moindre doute aux esprits non prévenus.
En voici
une ou toutes les précautions imaginables avaient été prises.
Afin
d'éviter une fraude quelconque, le docteur Gardner fit confectionner une
caisse, dont la description parut dans le Banner
of Light du 26 mai 1876, description que nous donnons ci-dessous.
« Cette
caisse, de forme rectangulaire, mesure 30 pouces de longueur et de profondeur
sur 24 de largeur. Le fond, les quatre supports des coins et le couvercle a
deux battants sont en bois, ainsi que la partie supérieure des parois comprise
entre le couvercle et le treillis en fil de fer ; ce cadre, en bois, haut de 8
pouces 1/2, est perforé de trous espacés de 1 pouce et ayant 3/4 de pouce de
diametre. Ces orifices se trouvent réduits de 1/4 de pouce par un placage collé
a l'intérieur. Le treillis de fer qui forme le corps de la caisse est composé
d'un morceau unique de fil, dont les deux bouts se joignent sur l'un des
supports et sont masqués par une planchette en bois clouée au support. Le
couvercle est composé de deux parties s'ouvrant au dehors; l'un des battants se
ferme des deux côtés au moyen de verrous ; l'autre se fermait primitivement par
un simple fermoir a levier. Le treillis, tres solide et tres épais, forme des
mailles de 3/8 de pouce. Apres plusieurs séances réussies, mais auxquelles nous
n'avions pas assisté, on remarqua quelques défauts dans la boîte et on fit
exécuter quelques modifications, afin qu'elle répondît a toutes les exigences :
les deux côtés du couvercle furent munis de serrures, assurant la fermeture
absolue de la boîte. Si nous avons si longuement insisté sur les détails de cet
appareil, c'est qu'il doit servir a établir d'une maniere péremptoire la bonne
foi du médium. »
Ce
dispositif servit aux expériences faites a Boston du 1er au 4 mai
1876, par MM. le Colonel Frédérick A. Pope, John Wetherbec, J. S. Draper, Epes
Sargent, le littérateur bien connu, M. Hardy, mesdames Dora Brigham et
Hardy : cette derniere était le médium.
Les
expérimentateurs, apres avoir scrupuleusement vérifié la caisse, l'agencerent
pour l'obtention du phénomene ; puis les verrous furent soigneusement cachetés.
On la recouvrit ensuite d'une toile, et le jour fut diminué dans la piece, mais
il en restait suffisamment pour pouvoir distinguer tous les objets.
Apres
une quarantaine de minutes d'attente, des coups animés et précipités
annoncerent la réussite de l'expérience. Constatation faite, rien n'avait été
changé a ce dispositif, tout était exactement comme avant l'expérience. On
ouvrit alors la caisse, et du vase d'eau froide qu'elle contenait on retira le
moule d'une main plus volumineuse que celles du médium. Ces expériences furent
renouvelées avec le meme succes.
Des
phénomenes de cette catégorie ont été obtenus un peu partout. Des cas nombreux
se sont produits en présence du médium Eglinton, tant en Angleterre qu'en
Russie comme ailleurs.
Dans cet
ordre d'idées, on connaît les expériences récentes de quelques savants
français, faites avec le médium Eusapia.
Ces
faits ne sont pas plus extraordinaires que celui de l'écriture directe, sur des
ardoises, réalisé par le médium Slades.
Le
docteur Paul Gibier a rapporté dans ses ouvrages : Fakirisme occidental et
Choses de l'autre monde, ses nombreuses expériences avec Slades. Le savant
allemand Zollner avait précédé Gibier dans ces recherches avec le meme sujet
et, comme ce dernier, il concluait a la réalité des phénomenes.
Nous-meme,
en 1887, chez le comte Balbiani, sur des ardoises apportées par nous et que le
médium ne toucha pas, nous avons pu obtenir les faits affirmés par Zollner et
Gibier.
Des
effets, peut-etre plus concluants, ont été aussi constatés : nous voulons
parler de la photographie des fantômes.
Vers
1855, on apprit, en Europe, qu'en Amérique on photographiait des spectres et
que ces apparitions étaient réelles, objectives. L'impulsion donnée, plusieurs
photographes essayerent, mais si tous ne réussirent pas, quelques-uns obtinrent
ce que les Américains avaient avancé.
Les
amateurs furent plus nombreux en Angleterre, ou les faits se multiplierent. En
France, il y eut aussi des photographes médiums, et si Buguet fut condamné pour
escroquerie, cela n'infirme en rien la vérité.
Nous
avons vu des photographies spirites de Buguet qui, bien certainement, n'avaient
pas été truquées. Mais le désir de satisfaire ses nombreux clients et surtout
l'appât du gain suggérerent a ce pauvre diable d'aider le phénomene, lorsqu'il
ne pouvait se produire.
C’est
curieux de voir combien de médiums ont la tendance a marcher sur les traces du
photographe parisien… Quoi qu'il en soit, cela n'empeche point le fait
d'exister.
Donc, si
une plaque photographique enregistre quelque chose, c'est que ce quelque chose
n'est pas fictif, et si, vérification faite par plusieurs personnes honorables,
l'image est reconnue pour celle d'une personne décédée, nous ne voyons pas les
raisons qu'on pourrait donner pour essayer de prouver le contraire.
Voici
sur ces faits importants un certificat intéressant :
« Nous,
soussignés, ayant pris part a la séance publique de photographie spirite,
organisée par M. J. Hartman, certifions par la présente que nous avons
minutieusement suivi toutes les manipulations auxquelles ont été soumises nos
propres plaques sensibles, qui étaient marquées ; que nous avons contrôlé les
opérations dans le cabinet noir aussi bien qu'au dehors, et que nous n'avons
pas découvert le moindre indice de supercherie ou d'un truc quelconque employé
par M. Hartman. Nous certifions aussi que, durant la derniere expérience, au
cours de laquelle le résultat fut obtenu, M. Hartman n'a pas touché a la
plaque, et n'est meme pas entré dans le cabinet noir. »
« J.
SLATTER, C.-H. MURHMAN, V. CUTTER, J.-P. WECKMAN, F.-T. MORELAND, T. TEEPLE,
photographes de profession.
« E.
SAUNDERS, WM. WARRINGTON, JOSEPH KINSAY, BENJAMIN E. HOPKINS, E.
HOPKINS, G.-A. CARNAHAN, WM. SULLIVAN,
JAMES P. GEPPERT, D.-V. MORROW, M.D., et ROBERT LESLIE !
«
Cincinnati, Ohio, 25 décembre 1875. » (Réimprimé dans le Spiritualist, n° 179. vol. VIII, n° 4. Londres, 28 janvier 1876,
pp. 37 et 38.)
M.
Taylor, directeur du Journal Britannique
de photographie, apres avoir longtemps combattu la possibilité des
photographies spirites, fit des expériences avec un médium Ecossais et, dans un
article paru dans son journal le 17 mars 1893, intitulé : Photographie spiritique, confirme l'authenticité de ces
photographies transcendantales.
Eu égard
a sa compétence, le témoignage de M. Taylor est capital.
Nous
sommes loin, ici, des hallucinations, et les dernieres expériences que nous
allons citer, si elles ne donnent pas le coup de grâce au scepticisme,
l'ébranleront puissamment.
Dans les
cas qui précedent, l'apparition photographiée n'est vue de personne ou
seulement du médium ; dans ceux qui suivent, elle est tangible, matérielle pour
ainsi dire et vue par tous les assistants.
Crookes
dit, au sujet de la derniere apparition de Katie King et de sa photographie
obtenue a l'aide de la lumiere électrique:
« Ayant
pris une part tres active aux dernieres séances de Mlle Cook, et ayant tres
bien réussi a prendre de nombreuses photographies de Katie King a l'aide de la
lumiere électrique, j'ai pensé que la publication de quelques détails serait
intéressante pour les spiritualistes.
« Durant
la semaine qui a précédé le départ de Katie, elle a donné des séances chez moi,
presque tous les soirs, afin de me permettre de la photographier a la lumiere
artificielle. Cinq appareils complets de photographie furent donc préparés a
cet effet. Ils consistaient en cinq chambres noires, une de la grandeur de la
plaque entiere, une de demi plaque, une de quart, et de deux chambres
stéréoscopiques binoculaires, qui devaient toutes etre dirigées sur Katie en
meme temps, chaque fois qu'elle poserait pour obtenir son portrait. Cinq bains
sensibilisateurs et fixateurs furent employés, et nombre de glaces furent
nettoyées a l'avance, pretes a servir, afin qu'il n'y eut ni hésitation ni
retard pendant les opérations photographiques, que j'exécutai moi-meme assisté
d'un aide.
« Ma
bibliotheque servit de cabinet noir : elle avait une porte a deux battants qui
s'ouvrait sur le laboratoire. Un de ces battants fut enlevé de ses gonds, et un
rideau fut suspendu a sa place pour permettre a Katie d'entrer et de sortir
facilement. Ceux de nos amis qui étaient présents étaient assis dans le
laboratoire en face du rideau, et les chambres noires étaient placées un peu
derriere eux, pretes a photographier Katie quand elle sortirait, et a prendre
également l'intérieur du cabinet, chaque fois que le rideau serait soulevé dans
ce but. Chaque soir, il y avait trois ou quatre expositions de glaces dans les
cinq chambres noires, ce qui donnait au moins quinze épreuves par séance,
quelques-unes se gâterent au développement, d'autres en réglant la lumiere.
Malgré tout, j'ai quarante quatre négatifs, quelques-uns médiocres,
quelques-uns ni bons ni mauvais, et d'autres excellents.
« Katie
donna pour instruction a tous les assistants de rester assis et d'observer
cette condition ; seul je ne fus pas compris dans cette mesure, car depuis
quelque temps elle m'avait donné la permission de faire ce que je voudrais, de
la toucher, d'entrer dans le cabinet et d'en sortir, presque chaque fois qu'il
me plairait. Je l'ai souvent suivie dans le cabinet et l'ai vue quelquefois,
elle et son médium en léthargie, et reposant sur le parquet. Katie et son
costume blanc avaient instantanément disparu.
« Durant
ces dix derniers mois, Mlle Cook a fait chez moi de nombreuses visites, et y
est demeurée quelquefois une semaine entiere. Elle n'apportait avec elle qu'un
petit sac de nuit, ne fermant pas a clef, pendant le jour elle était
constamment en compagnie de Mme Crookes, de moi-meme, ou de quelque autre
membre de ma famille, et ne dormant pas seule, il y a eu manque absolu
d'occasions de rien préparer, meme d'un caractere moins achevé, qui fait apte a
jouer le rôle de Katie King. J'ai préparé et disposé moi-meme ma bibliotheque
ainsi que le cabinet noir et d'habitude, apres que Mlle Cook avait dîné et
causé avec nous, elle se dirigeait droit au cabinet, et, a sa demande, je
fermais a clef la seconde porte, gardant la clef sur moi pendant toute la
séance : alors on baissait le gaz, et on laissait Mlle Cook dans l'obscurité.
« En
entrant dans le cabinet, Mlle Cook s'étendait sur le plancher, sa tete sur un
coussin, et bientôt elle était en léthargie. Pendant les séances
photographiques, Katie enveloppait la tete de son médium avec un châle, pour
empecher que la lumiere ne tombât sur son visage. Fréquemment j'ai soulevé un
côté du rideau lorsque Katie était debout tout aupres, et alors il n'était pas
rare que les sept ou huit personnes qui étaient dans le laboratoire pussent
voir en meme temps Mlle Cook et Katie, sous le plein éclat de la lumiere
électrique. Nous ne pouvions pas, alors, voir le visage du médium a cause du
châle, mais nous apercevions ses mains et ses pieds; nous la voyions se remuer
péniblement sous l'influence de cette lumiere intense, et par moments nous
entendions ses plaintes. J'ai une épreuve de Katie et de son médium
photographiés ensemble ; mais Katie est placée devant la tete de Mlle Cook.
«
Pendant que je prenais une part active a ces séances, la confiance qu'avait en
moi Katie s'accroissait graduellement, au point qu'elle ne voulait plus donner
de séance a moins que je ne me chargeasse des dispositions a prendre, disant
qu'elle voulait toujours m'avoir pres d'elle et pres du cabinet. Des que cette
confiance fut établie, et quand elle eut la satisfaction d'etre sure que je
tiendrais les promesses que je pouvais lui faire les phénomenes augmenterent
beaucoup en puissance, et des preuves me furent données qu'il m'eut été
impossible d'obtenir si je m'étais approché du sujet d'une maniere différente.
« Elle
m'interrogeait souvent au sujet des personnes présentes aux séances, et sur la
maniere dont elles seraient placées, car dans les derniers temps elle était
devenue tres nerveuse a la suite de certaines suggestions malavisées qui
conseillaient d 'employer la force pour aider a des modes de recherches plus
scientifiques.
« Une
des photographies les plus intéressantes est celle ou je suis debout a côté de
Katie ; elle a son pied nu sur un point particulier du plancher. J'habillai
ensuite Mlle Cook comme Katie ; elle et moi nous nous plaçâmes exactement dans
la meme position, et nous fumes photographiés par les memes objectifs placés
absolument comme dans l'autre expérience, et éclairés par la meme lumiere.
Lorsque ces deux dessins sont placés l'un sur l'autre, les deux photographies
de moi coincident parfaitement quant a la taille, etc., mais Katie est plus
grande d'une demi-tete que Mlle Cook, et aupres d'elle elle semble une grosse
femme. Dans beaucoup d'épreuves la largeur de son visage et la grosseur de son
corps different essentiellement de son médium, et les photographies font voir
plusieurs autres points de dissemblance.
« Mais
la photographie est aussi impuissante a dépeindre la beauté parfaite du visage
de Katie que les mots le sont eux-memes a décrire le charme de ses manieres. La
photographie peut, il est vrai, donner un dessin de sa pose ; mais comment
pourrait-elle reproduire la pureté brillante de son teint, ou l'expression sans
cesse changeante de ses traits si mobiles, tantôt voilés de tristesse lorsqu'elle
racontait quelque amer événement de sa vie passée, tantôt souriant avec toute
l'innocence d'une jeune fille, lorsqu'elle avait réuni mes enfants autour
d'elle, et qu'elle les amusait en leur racontant des épisodes de ses aventures
dans l'Inde.
« J'ai
si bien vu Katie récemment, lorsqu'elle était éclairée par la lumiere
électrique, qu'il m'est impossible d'ajouter quelques traits aux différences
que dans un précédent article j'ai établies entre elle et son médium. J'ai la
certitude la plus absolue que Mlle Cook et Katie sont deux individualités
distinctes, du moins en ce qui concerne leurs corps. Plusieurs petites marques
qui se trouvent sur le visage de Mlle Cook font défaut sur celui de Katie. La
chevelure de Mlle Cook est d'un brun si foncé qu'elle parait presque noire ;
une boucle de celle de Katie, qui est la sous mes yeux, et qu'elle m'avait
permis de couper au milieu de ses tresses luxuriantes, apres l'avoir suivie de
mes propres doigts sur le haut de sa tete et m'etre assuré qu'elle y avait bien
poussé, est d'un riche châtain doré.
« Un
soir je comptai les pulsations de Katie : son pouls battait régulierement 75,
tandis que celui de Mlle Cook, peu d'instants apres, atteignait 90, son chiffre
habituel. En appuyant mon oreille sur la poitrine de Katie, je pouvais entendre
un cour battre a l'intérieur, et ses pulsations étaient encore plus régulieres
que celles du cour de Mlle Cook, lorsque, apres la séance, elle me permettait
la meme expérience. Éprouvés de la meme maniere, les poumons de Katie se montrerent
plus sains que ceux de son médium, car au moment ou je fis mon expérience Mlle
Cook suivait un traitement pour un gros rhume.
« Vos
lecteurs trouveront sans doute intéressant qu'a vos récits et a ceux de M. Ross
Church, au sujet de la derniere apparition de Katie, viennent s'ajouter les
miens, du moins ceux que je puis publier. Lorsque le moment de nous dire adieu
fut arrivé pour Katie, je lui demandai la faveur d'etre le dernier a la voir.
En conséquence, quand elle eut appelé a elle chaque personne de la société et
qu'elle leur eut dit quelques mots en particulier, elle donna des instructions
générales pour notre direction future et la protection a donner a Mlle Cook. De
ces instructions, qui furent sténographiées, je cite la suivante : « M. Crookes
a tres bien agi constamment, et c'est avec la plus grande confiance que je
laisse Florence entre ses mains, parfaitement sure que je suis qu'il ne
trompera pas la foi que j'ai en lui. Dans toutes les circonstances imprévues il
pourra faire mieux que moi-meme, car il a plus de force. »
« Ayant
terminé ses instructions, Katie m'engagea a entrer dans le cabinet avec elle,
et me permit d'y demeurer jusqu'a la fin.
« Apres
avoir fermé le rideau, elle causa avec moi pendant quelque temps, puis elle
traversa la chambre pour aller a Mlle Cook qui gisait inanimée sur le plancher.
Se penchant sur elle, Katie la toucha et lui dit : « Eveillez-vous, Florence,
éveillez-vous ! Il faut que je vous quitte maintenant ! »
« Mlle
Cook s'éveilla, et toute en larmes elle supplie Katie de rester quelque temps
encore. « Ma chere, je ne le puis pas ; ma mission est accomplie. Que Dieu
vous bénisse ! » répondit Katie, et elle continua a parler a Mlle Cook. Pendant
quelques minutes elles causerent ensemble, jusqu'a ce qu'enfin les larmes de
Mlle Cook l'empecherent de parler. Suivant les instructions de Katie, je
m'élançai pour soutenir Mlle Cook, qui allait tomber sur le plancher et qui
sanglotait convulsivement. Je regardai autour de moi, mais Katie et sa robe
blanche avaient disparu. Des que Mlle Cook fui, assez calmée, on apporta une
lumiere et je la conduisis hors du cabinet.
« Les
séances presque journalieres dont Mlle Cook m'a favorisé dernierement ont
beaucoup éprouvé ses forces, et je désire faire connaître le plus possible les
obligations que je lui dois pour son empressement a m'assister dans mes
expériences. Quelque épreuve que j'aie proposée, elle a accepté de s'y
soumettre avec l'a plus grande bonne volonté ; sa parole est franche et va
droit au but, et je n'ai jamais rien vu qui put en rien ressembler a la plus
légere apparence du désir de tromper. Vraiment, je ne crois pas qu'elle put
mener une fraude a bonne fin, si elle venait a l'essayer; et si elle le tentait, elle serait tres
promptement découverte, car une telle maniere de faire est tout a fait
étrangere a sa nature. Et quant a imaginer qu'une innocente écoliere de quinze
ans ait été capable de concevoir et de mener pendant trois ans avec un plein
succes une aussi gigantesque imposture que celle-ci, et que pendant ce temps
elle se soit soumise a toutes les conditions qu'on a exigées d'elle, qu'elle
ait supporté les recherches les plus minutieuses, qu'elle ait voulu etre,
inspectée a n'importe quel moment, soit avant, soit apres les séances ; qu'elle
ait obtenu encore plus de succes dans ma propre maison que chez ses parents,
sachant qu'elle y venait expressément pour se soumettre a de rigoureux essais
scientifiques ; quant a imaginer dis-je, que la Katie King des trois dernieres
années est le résultat d'une imposture, cela fait plus de violence a la raison
et au bon sens que de croire qu'elle est ce qu'elle affirme elle-meme. »
A ce
sujet, sir Alfred Russel Wallace, le célebre naturaliste, membre du bureau de
la Société royale de Londres, collaborateur de Darwin, dit dans les Miracles et le moderne spiritualisme :
« Depuis
que ces manifestations ont cessé, en ce qui concerne Miss Cook, elles se sont
produites avec d'autres médiums a Manchester, a Newcastle, a Melbourne et en
particulier en Amérique, dans des conditions, s'il est possible, encore plus
rigoureuses. M. Robert Dale Owen affirme avoir vu la forme esprit sortir d'un cabinet vide, tandis que les médiums étaient visibles et étaient assis parmi les
spectateurs. En diverses occasions, lui et d'autres ont vu cet « esprit »
en apparence vivant, solide, se mouvant et parlant, s'évanouir ensuite,
positivement, sous leurs yeux, et réapparaître au bout d'un certain temps. Le spectre s'évanouissait en commençant par la
tete, et en allant vers le bas. Dans une autre circonstance, sur un autre
parquet nu, en planches polies, le spectre apparut sortant du parquet ; d'abord
la tete, les épaules, ensuite le corps tout entier qui, apres cela, se mit a
marcher parmi les spectateurs. Une autre fois, trois formes distinctes apparurent
sortant d'un cabinet, parlerent aux témoins et furent touchées par eux. Ceux
qui ne savent rien du sujet qui nous occupe ne peuvent naturellement croire
cela ; mais pour tous ceux qui savent que bon nombre de phénomenes spirites
sont des faits, la preuve en question doit etre concluante. »
Les plus
récentes matérialisations sont celles de la villa Carmen (Alger), propriété du
général Noël. Les médiums étaient Mlle Marthe, l'ex-fiancée du fils du général
Noël, et Mme Ninon. G. Delanne, qui avait déja publié dans la Revue scientifique et morale du spiritisme, les proces-verbaux
qui lui avaient été adressés sur les phénomenes de la villa Carmen, fut invité
par M. le général Noël a s'assurer par lui-meme de la réalité des
manifestations et matérialisations de l'Esprit Bien Boa. Pendant pres de deux
mois, il put étudier ces matérialisations et, plus tard, il assista a des
séances en compagnie de M. Ch. Richet, l'illustre physiologiste bien connu.
Dans la Revue qu'il dirige, G. Delanne énumere avec soin « les précautions qui
on été prises pour éviter les causes d'erreur et les moyens employés pour
s'assurer de l'existence positive du fantôme », signalons notamment l'exclusion
du cocher du général Noël, nommé Areski, qui fut pris deux fois en flagrant
délit de tentative de fraude. Nous ne parlerons ici que des séances auxquelles
a assisté le professeur Ch. Richet, et qui ont éveillé quelque peu l'ironie de
la presse profane. La premiere séance eut lieu le 13 aout 1905 a 9 h. 1/2 du
soir. M. Richet était présent, Mme Ninon était le médium. On se sépara sans
résultats. Les 18, 20 et 21 aout, l'apparition se montra vetue de longues
draperies blanches, coiffée d'un turban, la figure pâle avec des moustaches et
de la barbe. L'assistance se composait de M. Richet, M. G. Delanne, le général
et Mme Noël, Mlle B... Mme B... Mme X.., les médiums étaient Mlle A... et Mme
Ninon. Dans les séances qui suivirent, des photographies simultanées de
l'esprit Bien-Boa et des médiums furent obtenues a l'aide du magnésium
chloraté. Certaines expériences prouverent que la matérialisation avait toutes
les apparences de la vie; elle marchait, respirait, parlait. D'autre part, M.
Richet, dans le n° de mars des Annales
psychiques, met en évidence ce que la campagne contre les matérialisations
de la villa Carmen a eu de superficiel et d'inexact ».
Le
colonel A. de Rochas a publié dans un numéro de Je sais tout (15 avril 1906), certaines expériences faites avec un
commerçant de San Francisco (Californie), nommé Miller, et qui est un médium
tres puissant. L'installation réalisait toutes les conditions de sécurité ainsi
que l'atteste la lettre d'un témoin, M. Van der Naillen, fondateur et directeur
de l'Ecole des ingénieurs de San Francisco. Apres les préparatifs et le chant
des hymnes ordinaires dans ces occasions, une forme blanche, de haute taille,
apparut et demanda a voir sa mere, Mme Engel, présente. L'esprit et la mere se
reconnurent, s'embrasserent et causerent ensemble pendant quelques minutes, qui
furent suivies de la dématérialisation. Peu apres, une autre forme, qui déclara
se nommer Lilly Roberts, rentra dans le cabinet, puis se dématérialisa.
Ensuite, « Betzey, le contrôle en chef du médium, » fit son apparition et
s'informa de la santé d'un vieux monsieur, un de ses anciens amis, assis pres
du cabinet et nommé Durban. Betzey, appelé par le médium, retourna dans le
cabinet ; ils tinrent tous deux une courte conversation et avertirent
l'assistance qu'un esprit allait se matérialiser; une jeune fille apparut, en
effet, disant que son nom était « Jérémia Clarke ». M. de Rochas termine sa
communication en espérant « que d'ici a quelques mois, cette preuve de
matérialisation pourra se faire a Paris meme », car le professeur Reichel et M.
Van der Naillen lui ont promis d'amener Miller en France.
Afin de
permettre aux personnes désireuses d'essayer l'obtention des phénomenes
transcendants que nous venons de décrire, nous indiquons le modus operandi habituel, certain de
faire ouvre utile.
Dans un
cercle d'études, si un sensitif rentre dans cet état particulier qu'on nomme trance, on a de grandes chances
d'arriver a de bons résultats : il ne s'agit plus que de développer patiemment
les facultés du médium.
Pour
cela, les memes expérimentateurs doivent se réunir de préférence dans le meme
local, et toujours régulierement.
La piece
choisie pour les expériences doit etre sobrement meublée : des chaises pour les
assistants et une table sont suffisantes.
On
placera, dans l'angle le plus obscur de la salle, d'épais rideaux, pour former
le cabinet ou devra se tenir le médium, allongé sur un canapé, sur une chaise
longue ou assis simplement sur une chaise ordinaire.
Le
sujet, commodément installé dans le cabinet, les rideaux tirés pour le dérober
a la vue des observateurs, ces derniers se placeront en demi-cercle a un metre
ou a un metre cinquante de distance des rideaux et formeront la chaîne en se tenant par les mains
puis on fera l'obscurité la plus complete.
Dans la
suite, si des effets se produisent, pour les observer plus completement, on
pourra se servir de la lumiere rouge ou de la lumiere phosphorée de Crookes
(huile d'olives et phosphore contenus dans un flacon que l'on agite et que l'on
débouche au moment opportun).
Plus ou
moins longtemps, les assistants pourront causer de choses et, d'autres, mais
sitôt qu'un effet quelconque se manifestera, le silence devra etre observé
et une seule personne prendra la
direction des expériences.
Il faut
de l'ordre, de la méthode une certaine discipline pour arriver a des résultats
satisfaisants, pour faciliter le phénomene.
Pour
atteindre un but, il faut de la persévérance ; ici il en faut peut-etre plus
que partout ailleurs.
Donc,
s'arreter aux affirmations de certains sceptiques qui soutiennent qu'en leur
présence aucun fait ne s'est jamais produit, quand ces sceptiques n'ont assisté
qu'a une seule séance, et, partant, que rien n'est vrai, que tout n'est
qu'illusion ou tromperie, ce n'est ni scientifique ni philosophique.
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